Ce matin, malgré les récents événements, je suis d'assez bonne humeur. Hier soir, j'ai passé la soirée chez George et Angie, et nous avons beaucoup ri. Sur le chemin du retour, j'ai croisé Neville, sortant d'un rendez-vous galant avec Hannah Abbot. Je suis vraiment contente pour eux et j'espère de tout cœur que leur couple tiendra.
Je mets un peu d'ordre dans mes papiers avant d'ouvrir la librairie. J'attends les premiers clients avec impatience, d'autant plus que nous avons récemment diversifié notre offre en proposant des romans et magazines sorciers. Nous avons même un très bon partenariat avec Le Chicaneur de monsieur Lovegood.
Rien ne semble pouvoir altérer ma bonne humeur. Enfin… c'est ce que je croyais. En voyant Charlotte entrer dans ma boutique, je perds instantanément mon sourire. Je reste calme et attends qu'elle parle. Elle plonge la main dans son sac et en sort une bourse qu'elle jette sur mon comptoir.
— « Je pense que ce sera suffisant pour racheter cet endroit », annonce-t-elle, avant d'y ajouter une autre bourse. « Et ça, pour que tu quittes le pays. »
J'hausse un sourcil. Pense-t-elle sérieusement pouvoir m'acheter ? Je repousse les bourses.
— « Ce magasin n'est pas à vendre. Et certainement pas pour… », à l'aide d'un sortilège, je révèle le contenu de la première bourse. « 60 000 Gallions. Et tu apprendras par la même occasion que personne ne me fera quitter cette ville. »
Charlotte récupère son argent, visiblement furieuse, et quitte la boutique en pestant. Je décide immédiatement d'envoyer une missive à ma sœur, que je confie à Rex. Je caresse doucement la tête de mon hibou avant de lui murmurer que c'est un message très important. Il bombe fièrement le torse et hulule avant de s'envoler.
Lorsque je reçois la réponse de ma sœur, je n'ai aucun mal à imaginer son ton explosif si elle avait utilisé une beuglante :
« COMMENT ÇA, CETTE CINGLÉE VEUT NOUS ACHETER NOTRE BOUTIQUE ? DE QUEL DROIT OSE-T-ELLE DÉBARQUER COMME ÇA ET POSER DE L'ARGENT SUR LA TABLE ? COMMENT OSE-T-ELLE ESSAYER D'ACHETER TON DÉPART DE L'ANGLETERRE ? JE VAIS LA TUER !
~ Hermione »
Je souris en lisant le message. Au moins, une chose est sûre : Hermione est officiellement entrée en guerre contre cette pétasse !
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— « Le tabou a été accepté ? », répété-je, incrédule.
— « Ouaip ! », confirme Neville en faisant tourner son jus de citrouille dans son verre. « Si quelqu'un prononce ce mot infâme pour désigner un né-moldu, hop, on débarque et on l'interroge. »
Je reste bouche bée. Ce tabou était censé être refusé… Je ne comprends pas vraiment ce qu'il se passe au Ministère ! D'accord, je devrais être contente, cela nous permettra d'arrêter des partisans de Voldemort encore cachés, mais je n'y arrive pas… Est-ce que le Ministère cherche vraiment à instaurer un régime dictatorial ? Je soupire.
— « Et tu ne sais pas la meilleure ! », ajoute Harry. « Drago a débarqué dans le bureau des Aurors avec Blondie, en clamant haut et fort que la sécurité de sa femme était prioritaire, qu'il ferait tout ce qui est en son pauvre pouvoir pour empêcher les Mangemorts de s'en prendre à elle. Il a même dit que ce tabou protégerait non seulement Charlotte, mais aussi la population née-moldue, et bla-bla-bla. », il pousse un soupir, désespéré, avant de reprendre. « Il n'a d'yeux que pour elle, comme si le monde autour n'existait pas. »
— « Allez, stop ! », intervient Hermione en fronçant les sourcils. « On arrête d'en parler ! Je n'ai pas envie que ma petite sœur retombe dans sa dépression amoureuse ! »
Tout le monde acquiesce, et nous passons le reste de la soirée à plaisanter de tout et de rien. Ce soir est aussi une occasion spéciale, car nous accueillons officiellement Rolf dans notre bande de copains. Luna et lui ne sont pas encore ensemble, mais petit à petit, il lui fait comprendre qu'elle est plus qu'une simple amie. Récemment, il lui a offert des boucles d'oreilles à l'effigie de Ronflak Cornu qu'il a fabriquées lui-même. Si ce n'est pas de l'amour, ça !
Le lendemain matin, la routine reprend doucement son cours. Wendy est déjà à la boutique lorsque j'arrive et m'informe que les nouveaux exemplaires de Sorcière Hebdo viennent d'arriver. De nombreux jeunes sorciers, dont les parents refusent de payer un abonnement, passent régulièrement pour acheter quelques numéros chez nous.
Le carton est entreposé dans la réserve et ce matin, c'est moi qui suis de service pour l'installation. Je déballe tout et ouvre la première boîte. En découvrant la couverture, je reste figée. Ma baguette glisse de ma main et tombe au sol. J'aimerais croire que ce que je vois est une mauvaise blague ou juste le fruit de mon imagination, mais…
— « Oh c'est pas vrai… Il va l'épouser ! », s'étrangle Wendy derrière moi.
Un rire nerveux m'échappe. Un de ceux qui viennent quand on ne sait plus quoi faire, rire pour ne pas pleurer. J'avais vraiment cru que j'allais pouvoir tourner la page, passer à autre chose, retrouver une vie normale avec mes amis… Mais il semblerait que Drago Malefoy ne soit pas si facile à oublier.
Wendy, essayant de me changer les idées, s'empresse d'envoyer un hibou à Ginny. Elle arrivera dès la fin de son entraînement de Quidditch pour me rejoindre à la librairie. Malgré tout, une petite lueur d'espoir persiste en moi, que Sorcière Hebdo ait simplement monté cette histoire de toutes pièces pour vendre quelques exemplaires de plus…
Mais cette lueur vacille lorsque, quelques jours plus tard, contre toute attente, Drago Malefoy entre dans la librairie. Mon cœur s'emballe à cent à l'heure. Qu'est-ce qu'il fait là ? Je souffle un coup, évite de trop réfléchir et l'accueille comme n'importe quel client.
— « Salut May, voilà, je tenais à ce que tu saches que Charlotte et moi allons nous marier… »
Sans un mot ni un regard, j'ouvre un tiroir, récupère l'exemplaire de Sorcière Hebdo que j'avais mis de côté et le jette sur le comptoir. Le magazine glisse et finit sa course contre Drago. Le magazine glisse et finit sa course contre Drago. Je sens son regard, insistant, presque accusateur.
— « Je ne pensais pas que tu lisais des magazines »
— « Je vends des magazines », réponds-je, sèchement.
Si je pouvais, je lui cracherais à la figure, mais je préfère prendre un air détaché. Je me force à sourire. Il acquiesce, avant de me le rendre. Je le vois glisser sa main dans sa veste, fouillant quelques instants avant d'en sortir un petit mot, qu'il pose devant moi. Mes yeux se posent sur les mots imprimés : Charlotte Beaufort et Drago Malefoy ont l'immense plaisir et l'honneur de vous convier à leur mariage. Mon cœur se serre à la lecture de cette invitation, et je jette un coup d'œil à Drago, espérant y lire un semblant d'explication.
— « Attends, t'es pas sérieux ? », m'étranglé-je.
— « Charlotte souhaiterait t'inviter »
Je ris, mais c'est un rire amer. Si seulement cette situation n'était pas aussi douloureuse... J'insiste et je demande pourquoi je suis invitée au mariage, et il m'avoue que Narcissa a lourdement insisté.
— « Je vais y réfléchir, autre chose ? »
Je me force à garder un ton neutre, mais ma voix tremble légèrement. Drago me demande alors une chose improbable :
— « C'est possible pour toi de garder William demain ? »
— « Eh bien, je croyais que je ne le reverrais plus jamais ? », rétorqué-je, acerbe.
Il m'explique alors que Charlotte doit se rendre dans sa famille pour les besoins du mariage et qu'ils n'ont pas le temps de chercher quelqu'un d'autre. D'après les instructions, Charlotte partirait aussitôt après m'avoir déposé William. Je finis par accepter avec grand plaisir, mais je tente de rester calme et ne pas trop montrer ma joie à l'idée de revoir William.
Mon petit rayon de soleil dans cet océan de désespoir !
Après le départ de Drago, Wendy me rejoint, son visage rayonnant d'enthousiasme en évoquant le petit monstre. Je suis vraiment très heureuse de le retrouver, mais je lui avoue avoir trouvé Drago étrange. Froid, distant, presque absent. Qu'il soit distant avec moi, je le comprends tout à fait, mais qu'il soit distant même en parlant de son fils, je trouve ça bizarre. Je ne peux m'empêcher de penser que derrière ce masque d'indifférence, quelque chose d'inquiétant se cache.
