La vie au manoir est très différente de ce à quoi je suis habituée. Ici, je ne fais rien. Les Malefoy ont des elfes de maison qui s'occupent de tout. Toutefois, depuis que Lucius a été condamné à vivre comme un moldu, son attitude envers eux a changé. Il se montre désormais plus attentif à leurs besoins, un changement surprenant venant de lui. J'ai eu plusieurs discussions avec lui sur sa vie sans magie, et ses réflexions sont intéressantes.
Concernant les Nés-Moldus, Lucius a fini par les accepter plus facilement qu'on aurait pu l'imaginer. Pour justifier cela, il s'est lancé dans la reconstitution d'arbres généalogiques de familles moldues dont un enfant a développé des dons magiques. Ses recherches ont révélé qu'il y avait toujours au moins un ancêtre Cracmol dans ces lignées. Cela l'a convaincu que la magie chez les Nés-Moldus provient d'une lignée de sorciers oubliée.
Lucius fait de plus en plus d'efforts depuis que je vis ici. Il s'est même rendu chez sa belle-sœur, Andromeda Tonks, avec Narcissa et a exprimé à plusieurs reprises le souhait de rencontrer ma propre famille. Je sais qu'il a secrètement reconstitué notre arbre généalogique. J'aime à penser qu'il en fera la surprise à mes parents. Oui, je sais, l'espionner ainsi n'est pas très correct, mais Lucius Malefoy reste un mystère pour moi…
En ce qui concerne Narcissa, on se souvient toujours qu'elle est la sœur de Bellatrix Lestrange, mais on oublie parfois qu'elle est aussi la sœur d'Andromeda... Et ça pèse lourd sur la balance ! Naricssa a suivi les valeurs de sa famille en reniant sa cadette, Andromeda, pour un certain confort social. Si elle ne détestait pas les Moldus, elle ne les aimait pas non plus. Elle se contentait de les tolérer, tout comme les Nés-Moldus. Mais aujourd'hui, elle est plus en paix avec elle-même et a même renoué contact avec sa sœur, surtout depuis que Drago et William ont rencontré Teddy.
Finalement, et ne pouvant repousser un tel moment indéfiniment, j'ai décidé d'inviter mes parents et Hermione à dîner chez les Malefoy. Contre toute attente, le repas s'est bien passé. Aucun mot n'a été prononcé sur Voldemort, les Mangemorts ou la torture d'Hermione par Bellatrix. Ron n'étant pas présent, cela y a probablement contribué. S'il avait été là… Je n'ose même pas imaginer la tension qui aurait pu s'installer !
De manière surprenante, Lucius s'est très bien entendu avec mes parents. Il a été fasciné par leur métier de dentiste et par leur manière de soigner les dents sans magie ni potions. C'était presque amusant de le voir s'intéresser à un domaine aussi… moldu ! Mais il l'a fait avec une curiosité sincère. Peut-être que ses efforts pour s'adapter à la vie sans magie ne sont pas aussi forcés qu'il n'y paraît parfois.
William a été adorable tout au long de la soirée, racontant des blagues – merci George d'en avoir fait un vrai clown ! – ou pour expliquer tout ce qu'il sait sur les créatures magiques. Il semblait à l'aise et a amusé tout le monde. Drago, lui, est resté plus silencieux, mais semblait se détendre au fil du repas. Ma mère l'a beaucoup apprécié, tandis que mon père est resté prudent, sans vraiment donner son avis.
Comme prévu, à la fin de la soirée, Lucius a présenté à mes parents l'arbre généalogique qu'il avait reconstitué. La surprise fut générale lorsque nous avons découvert que la magie dans notre famille remontait à un ancêtre paternel très lointain. Cet ancêtre avait eu un fils Cracmol, qui s'était marié à une Moldue. Leur enfant, également cracmol, avait continué à se mêler au monde moldu, diluant la magie dans notre lignée jusqu'à ce qu'elle se perde presque complètement... jusqu'à nous.
Cette révélation a ouvert la porte à de nouvelles réflexions. Les jours suivants, ma sœur et moi avons longuement discuté de la famille Malefoy, et surtout de Lucius. Elle ne sait pas trop quoi en penser et me demande de rester prudente. Bien qu'elle sache parfaitement que je suis vigilante et que je garde un œil sur lui, cela la rassure de me le dire, et je comprends tout à fait son inquiétude.
Récemment, j'ai réussi à convaincre Drago d'inscrire William dans une école moldue. Nous avons dû user de sortilèges pour créer un faux certificat de scolarité provenant d'une autre école, et Drago a dû rédiger un justificatif demandant un transfert de dossier, permettant ainsi d'inscrire le petit directement en CE1, malgré le fait que nous soyons déjà en février. William était ravi. Certes, il aura probablement quelques lacunes au début, mais rien d'insurmontable. Je l'ai préparé à la vie scolaire avec des cahiers d'exercices adaptés.
Drago et moi n'avons pas reparlé de la potentielle condition de cracmol de son fils ; il n'en a même pas soufflé mot à ses propres parents. Cependant, je pense que c'est l'une des raisons pour lesquelles il a accepté d'envoyer William à l'école. S'il est un cracmol, il devra tout de même bénéficier d'une éducation, et celle-ci sera moldue.
Ce matin, Drago et William ont rendez-vous avec la directrice. Je les accompagne pour m'assurer que tout se passe au mieux, enfin, si nous arrivons à partir ! Je regarde Drago traîner des pieds dans la chambre, se préparant lentement, très lentement.
— « Drago, tu sais très bien que je ne peux pas y aller seule. Je ne suis pas sa mère ! », soupiré-je.
— « Personne ne le sait, il suffit de trafiquer les papiers... Je ne veux pas y aller, je vais avoir l'air ridicule ! »
Je ne comprends pas pourquoi il me dit ça d'un ton si détaché. D'un côté, il me reproche d'agir trop comme la mère de William, et de l'autre, il voudrait que je le fasse croire...
— « Non, Drago, on ne trafiquera rien là-dessus. Et si on falsifie ces documents pour l'école, il faudra les trafiquer partout. Je ne suis pas sa mère. Et tu ne seras pas ridicule, je serai avec toi tout le temps », réponds-je. Finalement, il s'habille et nous allons prendre le petit-déjeuner.
William est déjà dans la salle à manger. L'excitation se lit sur son visage. Il est impatient d'aller à l'école et de se faire des copains. Drago et moi prenons place autour de la table, et nous mangeons à notre tour.
Après le petit-déjeuner, nous terminons tous nos préparatifs, puis nous nous rendons à l'école. Drago aurait voulu transplaner, mais j'ai refusé catégoriquement. Nous y allons en voiture, et c'est moi qui conduis. Parfois, ça sert d'être née-moldue.
Nous arrivons à bon port. Drago s'est senti mal tout le long du trajet, tandis que William a adoré la balade. Je me gare devant l'école, et nous allons à la rencontre de la directrice. Elle nous salue avec gentillesse et nous entraîne dans son bureau. Nous prenons place, et William s'installe sur mes genoux.
— « Vous venez donc d'emménager, c'est bien cela ? », demande la directrice, tout en consultant les documents que nous lui avons fournis.
Pour ce genre de questions, je laisse Drago gérer. Globalement, l'entrevue se passe bien, même si je sens que la directrice est un peu gênée par notre jeune âge.
— « Je lis ici que sa mère n'est pas présente dans la vie de William », dit-elle en me regardant. « Vous êtes donc ? »
Je m'apprête à répondre, mais Drago me coupe net :
— « Ma fiancée », annonce-t-il. « Il est important qu'elle assiste à cette entrevue en tant que future responsable légale de mon fils », continue-t-il.
J'en reste bouche bée. Le petit vicieux ! Il ne m'a absolument pas parlé de tout ça ! Je croyais qu'il n'y connaissait rien au monde moldu ! La directrice acquiesce et me demande mon nom et prénom pour le noter dans le dossier. Je balbutie :
— « Granger… May », dicté-je.
Pendant qu'elle écrit, je fusille Drago du regard. Il hausse les épaules en souriant. William ne dit rien, préférant rester calme. La directrice se concentre alors sur lui.
— « Et toi, bonhomme, est-ce que tu aimes l'école ? », demande-t-elle.
William hausse les épaules et répond qu'il ne sait pas trop.
— «Et qu'est-ce que tu aimesfaire après l'école? »
— « Lire des histoires de chevaliers ! », répond-il, le plus sincèrement du monde.
Il sourit de toutes ses dents et me regarde.
— « C'est May qui m'a appris à lire ! Et même à écrire et à compter ! »
Je souris et lui fais une bise sur le sommet de la tête. Je devance la question de la directrice et parle en premier :
— « Je travaillais dans une petite librairie, et il aimait m'aider avec les clients, il les encaissait, il les aidait à chercher leurs ouvrages... Et il lisait un peu », raconté-je, mentant à moitié.
La directrice sourit, satisfaite de cette réponse.
La fin de l'entrevue se déroule sans accroc, et William pourra intégrer l'école d'ici la semaine prochaine. Je suis soulagée, et Drago l'est aussi. Le petit monstre, quant à lui, est heureux comme tout. Sur cette victoire, nous rentrons tranquillement au manoir.
