Chapitre 384 : Slapstick comedy
Sebastian sourit. "Comme vous voilà hardie de bon matin..." tandis que je le chevauche.
Un bref coup d'oeil au réveil.
"Qu'espérez-vous m'arracher en si peu de temps, Mademoiselle ?"
"Un orgasme. Ou deux." allant happer sa bouche avec envie.
Il ricane. "Voilà qui est on ne peut plus ambitieux." arrimant les mains à mes hanches. "Je suis curieux d'assister à cet exploit."
Je glisse les fesses jusqu'à ses genoux, bouche partant à l'assaut de ses cuisses, aines sensibles, bas-ventre recouvert par cette sombre toison, sexe encore endormi et que mes lèvres comptent bien éveiller.
"Debout." m'adressant à la belle endormie, riant pour moi.
"Vous ne manquez guère d'humour." s'amuse Sebastian égarant les doigts dans mes cheveux, souffle commençant à se raccourcir à mesure qu'il se dresse.
Sous l'attaque combinée de mes lèvres et ma langue, la hampe se forme et le dresse tout entier.
J'admire le résultat.
"Mmm. Oui. Vous en ferez sans doute quelque chose." finit par admettre mon amant.
Je le chevauche, m'empalant sur lui, brisant le mythe qui fait de Sebastian un être froid et stoïque. Son souffle vacille à mesure qu'il se sent avancer dans la chaleur et l'humidité exquise, artères se dessinant sur son cou.
Le grognement qui suit n'appartient pas au genre humain. Ses pupilles viennent de se fendre et son iris rougeoient violemment.
Bien. Te voilà, Sammaël !
Je me penche pour cueillir son souffle et sa bouche, offrant à sa langue des tourments qui le font palpiter au creux de moi.
Un grognement déchire l'atmosphère et il me retourne, dos contre le matelas, sans quitter la place où il se sent si bien accueilli, mouvant des hanches, le tout ponctué de rauques en cascade.
Le plaisir nous inonde telle une vague.
Et dans les temps, svp !...
J'observe les gestes précis de Jade.
Ses gants immaculés qui manipulent tasses et autres soucoupes...
"En réalité... tu es une fournaise, Jade Leech."
Petit rire en face. "Je suppose qu'il s'agit d'un compliment." jouant sur le même registre.
"Je me demande qui, de Trey ou de moi, notre fournaise honorera ce soir."
"Tu te mets en concurrence avec Trey, Sugar Cake ? Pourtant, vous n'avez guère la même anatomie, si je puis me permettre."
"C'est là toute la question : de quoi notre fournaise aura envie soir ? Pénis ou vagin ?"
Il cligne une fois. Deux fois. Puis finit par rire. "Sugar Cake, quelle distinction !..." terminant le nettoyage du comptoir. "Une chose est sûre : c'est toi qui vas assister à la prestation du jour. Notre boss reçoit un banquier dans la catégorie retors. Je suis en charge de lui remettre les idées en place."
"Kiffe !..." tapant dans les mains.
Jade demeure capable de vous descendre rien qu'au moyen des mots. Hâte d'assister à ça !...
Jade commence à étaler les photographies sur la table basse devant le refus d'obtempérer du banquier. Les festivités vont pouvoir commencer.
"Est-ce bien votre véhicule sur ces clichés, Mr Logan ?"
Le concerné hausse le sourcil. "Dommage qu'on ne voit pas la plaque pour l'attester."
"Rassurez-vous, nous avons fait les choses bien." lui présentant un cliché de ladite plaque. "Vous faites régulièrement les sorties d'écoles, Mr Logan. Et ce n'est pas pour récupérer votre fille chérie."
Jade et Floyd ont une manière si différente de "passer à table" !...
"Si je ne me trompe pas, c'est la fortune de votre femme qui vous a permis d'occuper ce poste, n'est-ce pas, Mr Logan ?... Un divorce vous serait hautement préjudiciable."
"J'ai un contrat de mariage béton." reniflant.
"Nous sommes en étroite relation avec certains magistrats." du pur bluff.
"Octavinelle a la tentacule longue, Logan." se plaît à rappeler le boss.
"Qu'est-ce que... vous voulez ?" commençant à suer, tirant sur son nœud de cravate.
"Pour commencer, signez ce contrat. Il stipule que quel que soit le prêt dont vous engagera Octavinelle, vous devrez y répondre."
"C'est... du chantage !" offusqué.
"Vraiment ? Votre mariage tient donc à si peu de choses, Mr Logan ?"
La négociation a été rude. Jade se pose, soufflant enfin, satisfait de lire la signature sur le contrat. Il quitte son fedora, le posant sur l'assise, tirant légèrement sur son nœud papillon.
"Bien joué, Jade. Le coup des magistrats était fameux !... Il n'y a vu que du feu."
Jade se sert un verre d'eau minérale qu'il déguste lentement, jambe élégamment ramenée sur l'autre. "Il s'agissait là notre dernière carte à jouer."
"Ton art de la pression me fascinera toujours." roulant le précieux contrat avec soin. "Et s'il avait davantage résisté, dis-moi ?..."
"J'aurai imposé une contrainte supplémentaire sur sa fille. Peut-être même y aurais-je ajouté une menace physique."
"Hmm." ravi.
"Enfin. Vous avez ce que vous vouliez, c'est l'essentiel."
"Floyd me l'aurait cassé en deux."
"Il y aurait eu de bonnes chances, en effet."
Le boss regagne son bureau pour mettre le contrat à l'abri dans son vaste coffre fort.
Je prends place aux côtés de Jade. "Redoutable."
"Une fois sa carapace percée, sa chair était aussi molle et tendre que celle d'un tourteau."
Je pouffe. Ces analogies aquatiques !...
"Et vous... aimiez ça, le tourteau ?"
Il glisse le regard vers moi, levant la main pour caresser ma joue d'un revers doux. "On boulotte tout, nous autres murènes. Cependant, depuis notre arrivée sur Terre, nous avons appris à devenir sélectives. Et cela ne concerne pas uniquement la nourriture."
"Tu as envie de moi, Jade Leech ?" cash.
Ses sourcils dessinent un circonflexe tandis que son sourire, pointes parfaitement imbriquées, se précise.
"Après une telle prestation, qui n'aurait pas envie d'une belle récompense ?"
Je ronronne de bonheur entre mes deux murènes. Floyd me nourrit des salés disposés dans diverses coupelles sur la table basse tandis que Jade clôture les comptes.
"T'es bien là, hein, ma Shachi ?..."
"Voyons, Floyd. N'entends-tu pas son ronronnement de contentement ?..." s'amuse Jade, rapprochant sa cuisse de la mienne.
"Ça devrait toujours être comme ça. Toujours !..."
Jade ravale au dernier moment la pensée qui se forme sur sa langue : "Ça le serait... si ta femelle ne se montrait pas aussi volage !..."
Ceci déclencherait à coup sûr les hostilités. Et de cela, Jade n'a aucune envie ce soir. Il est repu.
Il boucle les comptes avant de s'octroyer une juste nuit de sommeil.
"Floyd."
"Boss ?" relevant son fedora alors qu'il est vautré sur le canapé.
"J'aurai besoin de ton service tout à l'heure."
"Pas d'problème, boss."
"Celui-là n'a absolument pas respecté les termes de son contrat. Je te laisse en disposer comme bon te semblera."
"Cool." souriant de toutes ses pointes, idées sadiques lui traversant le plafond.
L'homme est un couard dans son genre. Pas le type d'opposant qui excite la combativité de Floyd. Il tente une entourloupe après l'autre pour justifier ses actes.
Floyd assiste aux premières minutes de l'entretien, posé sur le canapé, mains dans ses poches, une jambe ramenée sur l'autre, vernie brillant à la lueur des néons du Lounge.
"Nous n'arriverons à rien. Floyd."
C'est le signal.
Floyd redresse le haut de son corps, affichant sa stature hors norme. Que le spectacle commence !...
"Bah alors ? On contrarie le patron ? C'est pas malin, ça."
L'homme déglutit.
Floyd écarte les lèvres en un sourire explicite. C'est pointu par là et ça peut faire très, très mal.
Mes pas me mènent jusqu'à ce temple aux idées baignées d'un extrémisme dur.
"Rachel, ta présence en ces murs m'honore." sur une courbe.
"Suguru." souriante.
Je m'installe sous la kotatsu tandis qu'il nous prépare un thé aux notes florales.
"Suguru, as-tu vu la lumière en moi ?..."
Il affiche un petit sourire que je devine malgré le fait qu'il me tourne le dos. "Une lumière comme au bout d'un tunnel. Oui."
"Peu sont capables de la distinguer."
"Nous sommes un peu à part, nous autres les exorcistes. Les énergies nous sont familières."
"Tu as toujours disposé de ce pouvoir ?"
"Oui. Toujours."
"Tu étais le seul dans ta famille à le posséder ?"
"Oui. J'étais, de fait, très incompris de mes parents."
"Te rappelles-tu de #136649 ?"
"Du peu que tu m'en aies dit, oui."
"Lui a vu la lumière. Plus qu'aucun autre. Lui pense que c'est là ma véritable nature et qu'elle a été souillée par mes fréquentations, mon environnement et mes choix."
"Une lucidité toute personnelle. J'aimerai beaucoup le rencontrer pour m'en faire une opinion."
"Tu souhaites l'adresse de sa boutique ?" amusée. "Nous sommes étroitement liés. Il a encore tant à raconter sur son compte..."
"Ta voix arbore un ton tout à fait particulier et tendre lorsque tu l'évoques, Rachel. J'aurai de quoi me montrer jaloux."
"Il lui est arrivé de ne pas me faire de cadeau et me briser en quelques mots seulement. Mais jamais il n'a été question qu'il m'abandonne à mon sort ou me tourne le dos. Jamais."
"Peut-être en demeure-t-il incapable ? L'amour... le plus tordu de tous les fléaux." reprenant la déclaration amère de Satoru.
"Il a eu tant de vies... celle qu'il a portée durant des siècles en tant que #136649. Puis en tant que déserteur. Ce moment où il s'est mêlé aux humains pour autre chose que leur arracher la vie. Aujourd'hui il est connu sous le nom de The Undertaker. J'ignore même son véritable nom."
Il siffle. "Il semble vraiment avoir de l'étoffe."
"Il ne se laisse dicter sa conduite par personne. Pas même moi."
Suguru prend place et sert le thé chaud.
"J'aime tout ce qui le compose. Il s'est choisi le rire comme sas de décompression. Pourtant... lui aussi demeure brisé à l'intérieur. Comme toi, il méprise tant l'ordre des Shinigami qu'il est prêt à n'importe quel sacrifice pour le voir tomber."
"Quel personnage fascinant." approchant ma tasse sur la table.
"A la façon de Satoru, il fait trembler les supérieurs de son ancien ordre."
"Tu apprécies vraiment les êtres qui sortent des sentiers battus, Rachel."
"La masse me fait bâiller d'ennui, Suguru."
"La masse grouillante des singes... je comprends ton ressenti, Rachel."
Je pousse la porte de la boutique, faisant résonner le carillon électronique.
"Bonjour !..." m'accueille Caroline. "Mr Crevan est avec un... client au sous-sol."
"Oh."
"Je prenais justement ma pause." m'invitant dans l'arrière boutique, me proposant une boisson chaude et des cookies en forme d'os.
"Il va bien ?"
"Il... me semblait un peu tracassé ces derniers temps."
"Une raison particulière, selon toi ?"
"Il n'en a évidemment rien dit mais... il semblait plus grave que d'ordinaire, moins enjoué."
"My Lady !... Quel bon vent ?"
"Undy." souriante.
"Patron, venez vous restaurer. Vous êtes à la tâche depuis ce matin."
"Caro line, il me semble que j'ai une boutique à faire tourner." sans agressivité, s'installant tandis qu'elle lui sert un thé. "Que nous racontes-tu, my Lady ?"
"Je t'aime." levant la main pour caresser sa joue marquée.
Il en clôt les paupières, trouble dans tout le corps.
"Quelle délicieuse brise d'été que tes mots..." soufflé.
"Tu m'as toujours comprise, Undy."
Caroline suit notre discussion avec intérêt, petit sourire flottant sur les lèvres.
"Merci d'être venu me trouver à Londres cet été-là."
"Comment aurais-je pu demeurer plus longtemps éloigné de toi ?..." frottant sa joue contre ma main tel un immense chat. "Où en aurais-je trouvé la force ?..."
"Ma précieuse beauté..." ne camouflant en rien ma dévotion à son égard.
"Je vais me sentir de trop..." rit Caroline.
Le carillon retentit.
"J'y vais !..." quittant la pièce, nous laissant à notre tête-à-tête.
"Elle est adorable."
"En effet, c'est là une bien délicieuse enfant." accorde Undy.
"Puis-je me réinstaller un moment ici ?..."
"Bien sûr, my Lady. La porte de ma boutique te sera toujours ouverte." souriant.
"Comme celle de ton cœur ?..."
"Je demeure incapable de la verrouiller."
Nous avons retrouvé nos habitudes ; repas pris en commun dans le vaste appartement, nos joyeuses discussions, lit commun dans un entremêlement intime des corps. Undertaker a retrouvé le sourire depuis mon retour.
"Des nouvelles des supérieurs ?..."
"Je me suis laissé dire qu'ils avaient durci les lois par rapport aux déserteurs. Mon activité dérange en haut lieu."
"Des nouvelles de Spears ?"
"Il n'est pas réapparu depuis. Si cela s'agite en haut lieu, j'imagine que le doute remonte toute la branche."
"Je te demande pardon, Undy. Pour ce que j'ai fait avec... Michaelis."
"Je n'aurai pas toléré qu'il s'en prenne à ton âme."
"Tu le gardais à l'œil ?"
"Pour ainsi dire." sur un petit sourire énigmatique.
Undy vérifie sa sacoche de matériel. Il doit se rendre à domicile pour un décès.
Il charge le véhicule. La nuit tombe. Pas de répit pour les morts !...
"Je vais me glisser sous le plaid avec Caroline devant une bonne série."
"Faites cela. Je risque de ne pas être de retour avant minuit."
Je le tourne vers moi pour l'embrasser. "A tout à l'heure."
"J'y compte bien, my Lady." attrapant ma main pour en embrasser délicatement le dos.
Les yeux d'Undertaker s'ouvrent à la volée. Une présence. Et pas de celle qu'il apprécie !...
Appel de la Sotoba, enfilage rapide de soutane, accueil immédiat de l'indésirable nuisible.
"Par quelle audace te sens-tu habité, dis-moi, démon ?"
"Le fait est que... vous vous êtes emparé de quelqu'un à qui je tenais particulièrement."
"Je t'ai défait tant de fois, démon, que tu sembles en avoir perdu le compte..."
Grimace de Sebastian.
"... ainsi que la mémoire."
Sebastian s'avance tandis qu'Undertaker demeure statique, faisant simplement apparaître la véritable forme de sa faux comme ultime coup de semonce, raffermissant sa prise.
"Je veux la voir."
Petit ricanement d'Undertaker. "Elle est venue trouver refuge ici, démon. Penses-tu vraiment que je te laisserai l'approcher à nouveau ? La comédie a assez duré." brandissant le tranchant de sa faux entre eux. "Personne ne t'a jamais demandé d'apparaître en ce monde." sec.
"J'ai été appelé." reniflant. "Votre mémoire me semble courte, elle aussi. Sans mon intervention, l'unique héritier y passait aussi."
Undertaker crispe la mâchoire. "Tu t'es sauvagement nourri de l'âme de l'un et posé un contrat sur l'autre."
"Vous ne digérez pas, n'est-ce pas ?"
"Même si je ne fais plus partie de leur caste, je comprends l'aversion des Shinigami pour les créatures de ton espèce."
"Venant de la part d'un être qui trafique les lanternes cinématiques et brave jusqu'aux lois mêmes de la mort, la remarque me paraît fort déplacée."
"Ce que tu penses de moi m'est profondément égal, démon. Je..." notant ma présence derrière lui.
"Sebastian. L'amusement est terminé. Il me faut aller de l'avant, à présent." dis-je.
"Et c'est avec lui que vous comptez le faire ? Well. Good luck."
"Cela ne te concerne plus, Sebastian."
"Jamais je n'aurai pu penser que vous demeuriez une adepte de ce type de fuite, Mademoiselle." méprisant.
"Pour le peu que tu puisses comprendre des cœurs, démon, cela ne m'étonne guère." tranche Undy.
"J'en comprends bien davantage que vous voulez m'en accorder." pincé.
"Tu ne penses qu'avec ton estomac, démon."
Ouch ! Ça, c'est envoyé !...
Je n'attends pas longtemps avant d'avoir le premier SMS : "T'es où, Shachi ?..."
"A l'abri, Floyd."
"Hein ? Qu'est-ce que ça veut dire ?"
"Que je traverse une période difficile."
"J'ai fait quelque chose de mal, Shachi ?"
"Non, ce n'est pas toi, Floyd."
"... tu pars comme ça, quoi... ça me rappelle de mauvais souvenirs."
Imaginer sa bouille me fend le cœur...
"Désolée, Floyd. On peut se voir en terrasse pour un café ?"
"J'sais pas, j'vais y réfléchir."
Je ne souhaite faire aucun mal à Floyd. Par contre, il en est un autre que je compte bien rendre fou.
