Bonjour à tous !

Et voici le nouveau chapitre du Sanctuaire de Dionysos ! Chapitre qui s'ouvre sur la baie de Venice Beach à Los Angeles… Mais pourquoi diable notre petit groupe se trouve ici ?

Je vous laisse le découvrir, bonne lecture !

isa1977 : merci pour ta review ! Contente que le passage avec Excalibur t'ai plu ^^ et oui ! Enfin une revanche pour notre Shun (quoiqu'il souhaiterait probablement en avoir d'autres… Je dis ça…) Pour le Sanctuaire d'Athéna, aaah… pas encore ;) mais bientôt !


Los Angeles, plus précisément sur les plages de Venice Beach

- Champagne shower ! cria Dionysos alors que le bouchon d'une bouteille de champagne partait à toute vitesse.

La foule cria aussi d'allégresse et firent également exploser les bouchons de cet alcool gazeux. La musique pulsait, diffusant ses ondes positives.

- Et je lève mon verre à mes sublimes, que dirent, mes divines et courageuses ménades, qui avaient en plus un chef de haute qualité ! continua le dieu du vin, vêtu d'un jean et d'une simple chemise bleue, ses longs cheveux longs bouclés flottant au vent.

Les dites ménades étaient près d'un bar construit en bois de cocotier. Elles levèrent leur verre tandis que Shun riait, un peu gêné d'être le centre de l'attention comme ça.

Ils avaient atterri pour faire la fête dans cette partie de Los Angeles réputée pour ses sublimes plages mais aussi pour sa culture hippie et ses artistes underground. Par ailleurs, Ils logeaient dans la villa d'une connaissance de Dionysos qui le leur avait prêté gratuitement pour une durée illimitée.

- L'aisance avec laquelle Dionysos, alors qu'il est fauché comme les blés, arrive à négocier des logements et de la nourriture de haute qualité pour nous sans dépenser le moindre sou m'étonnera toujours, fit remarquer Shura a Shun alors qu'il buvait une bière mexicaine

- Ah j'avoue ! Répondit Shun en riant. Il est vraiment pas croyable.

- C'est Dionysos, leur fit remarquer avec un clin d'œil Cilia.

Plus loin, ils pouvaient voir Shunrei et Saor se baigner dans la mer qui avait pris une teinte orangée et rose avec le coucher de soleil. Le temps était chaud et agréable. Une excellente soirée s'annonçait. Cilia était parti faire du roller, son baladeur en poche. Eliotis, qui avait pris une apparence humaine, avait étendu une serviette sur un transat et buvait une pina colada dans une coque de noix de coco. Le tout accompagné d'une tranche d'ananas et d'un petit parasol en papier.

- Ça c'est la vie ! Aaaah…. Fit il en s'allongeant, lunette de soleil sur le nez.

Plus cliché tu meurs… fit Shun a Shura par la pensée.

Ce dernier se retint de rire et laissa Shun rejoindre Shunrei et Saor. Après ce qu'ils avaient vécu, ils avaient bien mérité cette pause. Il quitta le bar et s'en alla vers la piste de danse. C'était sur un immense plancher en bois posé à même le sable que les danseurs effectuaient leur plus beau pas de danse (ou non). Une boule à facette faisait resplendir les guirlandes lumineuses accrochées de part et d'autre au-dessus d'eux. Au milieu des danseurs, il vit Esther. Elle semblait dans un autre monde, comme si son corps était devenu la mélodie. Il pouvait bien voir qu'elle aimait ça.

Appuyé contre un mur et la tête renversée en arrière, il se mit alors à repenser à ces petits spectacles de rue qu'ils faisaient pour gagner de l'argent. Il jouait de la guitare et elle, elle effectuait des pas de flamenco.

Il grimaça en sentant une pichenette sur son nez.

- Allo la terre ? Ici ta sœur.

- Aïe. Pas la peine de faire ça.

- T'étais en train de planer, dit-elle en lui tendant un soda.

Il sourit et resta silencieux alors qu'elle se mettait à côté de lui. Puis, il se lança à l'eau :

- Esther, je te dois des excuses, je…

- Non, moi je te dois des excuses.

Shura se tourna vers elle, surpris.

- J'ai eu tort de mépriser autant Athéna et ses chevaliers. J'avais beaucoup de rancœur et de colère à l'idée que tu aies rejoint ses rangs. Je me disais que c'était à cause d'elle que nous avions été séparés alors qu'en réalité, ce n'était que la faute de la fatalité. Je me rends aussi compte maintenant… Que ça t'a forgé. Que tu es devenu cet homme noble et courageux grâce à elle. Et que oui, grâce à cela tu as reçu l'éducation et le rang que tu méritais.

Elle lui adressa un doux sourire tandis que Shura sentait les dernières digues qui entouraient son cœur se briser.

- T'as toujours eu l'âme d'un chevalier Shura. Déjà tout petit ça se voyait. Tu étais fait pour ça.

- Si tu parles des moments où je mettais un drap en guise de cape et je brandissais un bout de bois pour l'épée…

- C'était un spectacle sensationnel à voir ! Dit Esther en riant

- T'étais pas mieux en plus ! Attends, t'en faisais voir à Nonna de toutes les couleurs.

- En même temps elle voulait absolument me faire une robe de princesse. Moi ce que je voulais c'était une robe et un chapeau de sorcière. Je ne supportais pas l'idée d'être une princesse.

- Au point où quand on jouait tu lui chipais ses cartes de tarot pour je cite « être une vraie sorcière »

- Et ça valait le coup !

Ils rirent de bon cœur à l'évocation de ces souvenirs mais… quelque chose n'allait pas pour Shura. Ses souvenirs, qu'il avait si longtemps enfouis, étaient en train de ressurgir.

Papa… Nonna… la caravane…

En réalité… ta famille et Esther te manquaient affreusement…

Esther fronça les sourcils quand elle vit une larme rouler sur les joues de son frère.

- Shura… Est ce que ça va ? Demanda-t-elle, inquiète.

- Ils me manquent Esther… Ils me manquent beaucoup…

Le cœur de la salamandre se serra en entendant ça : Shura n'avait jamais réellement fait le deuil de leur famille.

- Je sais… dit-elle en le prenant dans ses bras tandis qu'il lâchait toutes ses larmes.

OoOo

La nuit était déjà bien avancée pourtant les gens continuaient de danser et de chanter. Dionysos s'occupait de la musique accompagné par Shunrei. Après une heure de confession et de danse, Shura s'était isolé pour reprendre son souffle. Il avait repéré ce groupe d'hippies qui avaient amené leur instruments. Après une brève présentation, il leur demanda s'il pouvait emprunter une de leur guitare pour la soirée.

L'instrument en main, il alla dans une des pièces de la villa, une sorte de petit salon à la décoration baroque. Il se mit à la fenêtre et regarda l'instrument : c'était une guitare typique andalousienne. Il toucha le bois, appréciant ce contact nostalgique puis la mit en place. Il pinça une corde et fit jouer une note. Il l'accorda et essaya de se rappeler une mélodie ou du moins une chanson qu'il avait écouté durant la journée. Il se souvint alors qu'il avait entendu une chanson de Madonna à la radio cet après-midi. "Like a Virgin" s'il se souvenait bien.

- Ça faisait comment… dit-il en essayant de recréer la mélodie.

Après quelques essais, les notes sortirent distinctement et Shura put jouer la chanson sans trop de heurt.

OoOo

Saor rejeta la tête en arrière dans un cri de jouissance tandis que Shun mordait une de ses épaules offertes. Il continua encore quelques mouvements de bassin alors qu'ils étaient à genoux sur un lit et que le dos de la naïade était plaqué contre son torse puis finit lui aussi par il atteindre le pic de son plaisir.

Ils tombèrent tous les deux sur le matelas, essoufflés, un sourire aux lèvres.

- C'est bien ce que je pensais, dit Saor en riant. En plus d'être beau gosse, t'es bon au pieu.

Shun laissa passer un rire gêné et se tourna vers la naïade.

- Je ne t'ai pas fait trop mal ? Dit il en faisant référence à la légère morsure qu'il avait faite tantôt.

- Pff non ! T'inquiètes ! Et puis c'était moi qui t'avait dit que j'aimais bien ça.

Shun sourit et accepta la cigarette que lui proposait son camarade alors qu'il s'allongeait de nouveau à côté de lui. Les dernières effluves d'alcool passaient dans son corps. Bientôt, la fatigue prendrait le dessus. Andromède regarda du coin de l'œil Saor. Il y avait quelque chose qui le taraudait depuis qu'il avait rejoint ce sanctuaire : parmi les ménades, Saor était le plus doué en arts martiaux et en combat. Comme s'il avait reçu une formation digne des chevaliers d'Athéna. Ce qui est très étrange pour une ménade.

Malheureusement, son œillade n'échappa pas à son partenaire.

- Qu'est ce qu'il y a ?

- Hein ? Ah… Rien… Enfin… C'est juste que… Tu as un sexe féminin et un sexe masculin ? Tenta Shun pour ne pas dire le fond de sa pensée.

- Yep, complètement opérationnel, comme toute naïade qui se respecte. Nous sommes hermaphrodites. Ce soir, t'as couché avec la partie femelle.

- Ça j'entends mais c'est juste… je trouve ça dingue en fait.

- La Nature mon petit. La Nature. Elle trouve toujours son chemin.

Shun pouffa puis continua dans ses questions existentielles.

- Mais du coup… La partie mâle se présente comment ?

- Ben comme la plupart des poissons en fait.

- C'est-à-dire ?

Saor utilisa alors ses deux mains pour mimer une fente et fit passer son index droit entre les deux comme symbole.

- Ah ouais… fit Shun, ébahi.

- Tu verrais ta tête ! Répondit Saor en riant

- Excuse moi, c'est juste que c'est quelque chose de nouveau pour moi.

- Je taquinais.

Shun sourit puis décida de se rhabiller. Saor en profita pour le questionner :

- Même si tu as pris ton pied, tu as l'air de vouloir passer à autre chose.

- C'est-à-dire ?…

- Arrêter les coups d'un soir et commencer une relation amoureuse, je me trompe pas non ?

Shun mit la main sur son cœur pour mimer que la naïade avait touché juste.

- T'as pas tort, dit-il dans un soupir. Ça me trotte dans la tête depuis un bon bout de temps à vrai dire. Le sexe est sympa oui… Mais…

- Tu aimerais vivre ce que ça fait d'être amoureux. De te réveiller à côté de la personne chaque matin. De lui dire je t'aime et qu'il ou elle t'aime en retour ?

- Exact… Mais j'ai toujours ce sentiment tenace que ça ne va pas marcher parce que je suis quelqu'un de trop étrange aux yeux de beaucoup de monde.

- Foutaises. Ça veut pas dire que tu n'es pas digne d'amour. Écoute Shun, tu es dans la cour de Dionysos. Ici, peu importe qui tu es, tu es digne d'être accepté et d'être aimé. Ne crois pas toutes ses sornettes.

Shun esquissa un léger sourire.

- Merci Saor.

- De rien. En vrai je t'encourage à trouver l'amour. C'est une sensation merveilleuse, risquée à éprouver certes, mais ça vaut largement le coup.

- Tu as l'air de connaître ?

Le regard turquoise de la naïade se voila d'un coup de tristesse. Il dévisagea son chef avec un sourire du même ton :

- Honnêtement, j'ai rien à te cacher Shun mais… là ce soir… Si j'aborde mon passé, ça ne va pas le faire niveau moral. C'est le double tranchant de mon hypersensibilité.

- Ah… Excuse moi je…

- Mais tu es une ménade comme moi et tu mérites de me connaître davantage. Alors ne t'en fais pas, un jour je t'en parlerai. Juste… pas ce soir s'il te plaît… j'ai envie de finir ma soirée sur la pensée d'un orgasme et non d'un souvenir triste.

Shun sentit qu'il disait la vérité et eut un sourire compatissant.

- Ne t'en fais pas. Prends tout le temps qui te sera nécessaire. Sur ce, dors bien et merci.

Saor lui fit un signe de la main et il se réfugiait dans les draps quand Shun claqua la porte de la chambre.

OoOo

Shura était tellement absorbé par son exercice de guitare qu'il ne remarqua pas l'arrivée de Shun dans la pièce.

- Sympa ! Fit ce dernier alors que la dernière note était jouée.

Shura sursauta

- Ah c'est toi.

- Et oui. Tu aimes Madonna ?

- Pas spécialement. Je ne connais pas vraiment à vrai dire. J'avais jamais entendu cette chanson avant cet après midi

Shun leva un sourcil. Il ne comprenait pas comment Shura était arrivé à retranscrire à la note près une mélodie qu'il n'avait jamais entendu de sa vie. Devinant son interrogation, le Capricorne s'empressa de préciser.

- J'ai l'oreille absolue si tu veux tout savoir.

- L'oreille… Non ! jure ! Dit Shun en s'approchant.

- Il n'y a rien d'extraordinaire à cela.

- J'ai jamais vu quelqu'un avec l'oreille absolue. Ça donne quoi ?

- En fait. Pour faire simple, j'interprète en note de musique chaque son que j'entends, je les retiens et je les traduit en accord. Comme cette chanson de Madonna.

- Tu dis ça comme si c'était facile !

- Haha ça l'est pour moi.

- Chance…

Et Shura se remit à jouer la mélodie. Shun s'installa en face de lui et alluma une cigarette.

- Je suis content que tu aies retrouvé Excalibur Shura.

- Merci Shun… Mais… C'est surtout grâce à vous. J'ai pu comprendre la vraie nature d'Excalibur et avoir un vrai objectif.

Alors qu'il n'était pas habitué auparavant à se confier, voilà qu'il se lançait face à cet individu pour lequel il sentait qu'il pouvait tout dire :

- Ça m'a aussi permis de me réconcilier avec mon passé. Enfin… de là où je venais avant le Sanctuaire.

- Tu veux en parler ? Demanda Shun, comprenant où il voulait en venir.

Shura eut un rire, se détourna du regard vert de Shun et se lança :

- Tu connais les gitans ?

Il s'attendait à ce que le chevalier d'Andromède, compte tenu de sa nationalité d'origine, ne connaissent pas cette population mais sa réponse le surprit :

- J'en ai entendu parler.

- Comment ça ?

- J'ai passé cinq ans en France. Un soir, je rentrais d'un week-end à Marseille. Le train avait été annulé car un incident avait eu lieu. Un contrôleur nous avait alors dit que des gitans avaient dérobé le cuivre des poteaux électriques. Moi je ne savais pas ce que c'était alors, j'ai demandé à Nikos, mon ami qui m'accompagnait. Il m'a alors dit que c'était des gens du voyage, c'est-à-dire sans domicile fixe.

- Il t'a dit quoi d'autres ?

- Il m'a dit qu'on ne savait pas trop d'où ils venaient même si la plupart se trouve en Espagne. Il m'a aussi dit qu'il fallait s'en méfier car ils étaient violents et volaient très facilement, comme ce soir-là.

Shura rit légèrement en entendant ça.

- L'histoire de ma vie, dit-il doucement, trop peu pour que Shun ne l'entende pas. Et toi ? T'en pensais quoi ?

- Et bien… Bon j'avoue j'étais un peu énervé qu'il y ait un tel incident parce que j'étais crevé et j'avais envie de rentrer chez moi mais à vrai dire… Ça m'a choqué que toute une population soit désignée comme ça. Jugée sans connaître qui ils sont réellement.

- Ah… C'est plutôt rare les gens comme toi.

- Tu me demandes ça parce que tu es gitan ?

- Oui.

Il fit chanter les cordes avec une mélodie typique andalousienne

- À une époque, je t'aurais dit que j'étais d'origine gitane, tellement je n'assumais pas. Toute ma famille était gitane et vivait sur les routes depuis des générations. Mon père était le cliché même du gitan : très brun, la peau foncée, une chaîne en or plutôt remarquante autour du cou et il entourloupait tout le monde pour vendre de la camelote, faire un spectacle, voir voler quand il en avait l'occasion. Il avait rencontré ma mère à l'âge de 21 ans. Elle avait 16 ans et était gitane comme lui.

- Oh elle était jeune !

- Oui très. C'était les mœurs à l'époque. Elle n'était jamais allée à l'école et ne savait ni lire ni écrire. Ils se sont mariés et mon père racontait toujours ça comme le plus beau mariage de la famille. Je veux bien le croire sur le coup : comme les mariages sont importants chez nous, ils sont toujours beaux.

- Elle ressemblait à quoi ta mère ?

Shun se demanda s'il n'avait pas gaffe car Shura garda un temps le silence.

- D'après mon père, elle avait la peau blanche et de longs cheveux bruns bouclés. Elle avait aussi un très joli visage selon lui. Je ne peux pas te dire grand chose en plus malheureusement, je n'ai jamais eu de photos d'elle. Elle est morte un an après son mariage en nous donnant la vie à Esther et moi. C'est ma grand-mère et mon père qui nous ont élevés.

- Oh je suis désolé…

- T'en fais pas.

Il se remit à jouer une mélodie que Shun écoutait d'une oreille.

- Ça a pas mal ébranlé mon père. D'autant plus qu'il devait assurer la charge de nous élever tout seul. Heureusement, notre grand-mère, donc sa mère, était là pour nous. Mais elle était âgée. Comme on était trois bouches à nourrir dont deux enfants, Papa mettait les bouchées doubles niveau négociation, commerce et spectacle pour avoir suffisamment d'argent. Mais parfois ça ne suffisait pas. Et on avait pas mal de carences avec Esther.

- C'était comment vos journées ?

- Oh… On allait d'une ville à l'autre en fonction des besoins locaux ou des spectacles à mener. On avait une petite caravane typiquement gitane, peinte en violet et tirée par une mule. La nuit, on dormait soit à l'extérieur, soit à l'intérieur s'il faisait trop froid. Durant la journée, on ne pouvait pas rentrer dedans car ma grand-mère disait la bonne aventure avec ses cartes de tarot. Quand on a été en âge de parler et de gesticuler correctement, mon père m'a mis une guitare dans les mains, Nonna a appris à Esther à danser et on faisait des petits spectacles devant la caravane sur la place d'une ville ou d'un village.

- Non sérieux ?

- Oui sérieux. Il faut m'imaginer avec une petite veste noire et une chemise blanche, haut comme trois pommes avec une guitare plus grande que moi. Esther elle dansait avec une robe de flamenco rapiécée.

- Vous deviez être trop mignons.

- On l'était, répondit Shura avec un sourire. Malheureusement, les gens ne pensaient pas souvent ça. La réputation de notre communauté nous précédait. Cela se voyait trop qu'ils se méfiaient de nous et que si nous n'étions pas des enfants, ils nous chasseraient hors de la ville.

- À ce point ?...

- Tu sais, les gitans ont vraiment une mauvaise réputation, partout en Europe. Je ne peux pas te calculer le nombre de fois où on s'est fait insulter sur les routes et traiter de voleurs et de vermines. Même en Espagne où les gitans sont plus nombreux.

- Mais… C'est horrible…

- Ça l'était oui. Enfin… ça a surtout atteint son pic lors de l'incendie. Ce fut ce jour-là où j'ai perdu toute ma famille.

Shun retint son souffle en entendant ça et sentit les larmes lui monter aux yeux. Shura, lui, ne voyait pas encore son état car il était plongé dans ses souvenirs, les yeux rivés sur la guitare. Pour la première fois de sa vie, il allait parler de ce qu'il s'était passé.

- Comme je t'ai dis, mon père faisait son possible pour nous nourrir. Et un jour, Il a fait ce qu'il fallait ne pas faire. Il a fait de la contrebande d'armes. Le problème, c'est que le client était un groupuscule de communistes catalans anti-Franco, le dictateur qui était en place en Espagne jusque dans les années 70. Il est tombé dans un piège le jour de la vente d'armes tendues par les flics à Séville en Andalousie. Il a pu y échapper heureusement mais les flics l'ont retrouvé et… ils ont foutu le feu au terrain vague sur lequel on avait pris place avec d'autres membres de notre communauté.

Il sentit son menton trembler et tenta de garder tout son self-control pour ne pas craquer.

- Ce jour-là, j'ai échappé de justesse aux flics grâce à Saga. Il venait chercher le nouveau chevalier du Capricorne qui, selon les divinations de Shion, se trouvait là. Esther, elle, a été trouvée par le dieu Pan qui la remit à Dionysos pour qu'il l'élève. La suite, tu la connais.

Il expira et contempla la baie qui s'étendait par-delà l'horizon. Les reflets nacrés de la lune se baignaient à la surface. Il entendit un reniflement et tourna la tête. Il vit avec surprise de grosses larmes rouler sur les joues de Shun qui avait énormément de difficultés à les retenir. Comme il ne s'attendait pas du tout à ce type de réaction, Shura fut un peu gêné et ne sut comment réagir.

- Euh… Je… Ne pleure pas…

- Désolé mais comment veux-tu que je fasse autrement ? répondit Andromède en prenant un mouchoir. Ça me fait tellement de peine… C'est horrible… Je ne comprends pas comment on peut arriver à détester l'autre autant…

Shura le dévisagea. Il était… extrêmement touché en réalité. Ce passé dont il avait toujours eu honte, voilà que quelqu'un comprenait ce qu'il avait pu ressentir durant son enfance. Il eut alors un doux sourire.

- Merci…

- Hein ?

- Merci de partager ma peine.

Shun le regarda avec surprise puis comprit le message. Il tenta alors de sourire lui aussi malgré la tristesse qui lui ravageait le cœur. Il eut un autre temps de silence et Shura reprit la parole.

- J'ai eu des rapports assez compliqués avec mon père. On était l'opposé lui et moi. Il était foncé alors que j'étais plutôt pâle de peau. Il était solaire alors que moi j'étais aussi froid que la lune. Parfois, les autres gitans se demandaient comment je pouvais être son fils.

- Et Esther ?

- Esther… Elle ressemblait à Nonna un peu. Elle adorait apprendre des mouvements de danses avec elle et les exécuter devant les gens. Elle se fichait de leur regard. Même maintenant ça reste toujours le cas.

- Elle a une forte personnalité en effet, dit Shun avec un sourire.

- Oh ça oui.

- Merci de m'avoir dit tout ça.

- Je t'en prie, merci à toi, répondit Shura avec un léger sourire.

Il continua une mélodie sur sa guitare tandis que Shun allumait une cigarette. Il reconnut alors la mélodie de « Jolene » de Dolly Parton.

- Tu connais aussi cette chanson ?

- Je l'adore. J'aime beaucoup Tracy Chapman aussi. Tiens d'ailleurs, tu connais la recette miracle des tubes qui passent à la radio ?

- C'est-à-dire ?

- Tu as quatre accords seulement, do majeur, sol majeur, la mineur, fa majeur, et avec ces quatre là, tu peux faire une chanson connue.

- Non t'exagères.

- Pas du tout.

- Prouve le !

Shun avait lancé cette phrase sur un ton de défi. Il en fallu de peu pour que Shura lui lance un regard du même style.

- Très bien… Est ce que tu reconnais celle là ? Dit il en faisant une mélodie

- Bien sûr, c'est "Don't stop believin" de Journey.

- Okay… Et maintenant ?…

Et toujours en jouant ces quatre accords, Shura se mit à chanter une tout autre mélodie :

- Forever YoungI wanna be forever young

- Okay… Alphaville mais ça ne prouve…

- I'm from Down under

- Non..

- Take on me

- Non mais c'est pas vrai !

- I can't live… With or without you

- Non mais non !

- I bless the rains down in Africa

- Oh non ?! Même Toto ?!

Shura avait de plus en plus de la difficulté pour ne pas rire en voyant la mine déconfite et stupéfaite de Shun face à cette révélation musicale. Les mélodies s'enchaînèrent et ils finirent dans un grand éclat de rire tout en fredonnant les musiques. En observant Shura rire pour la 2ème fois seulement, Shun se dit que parmi tous les chevaliers, Shura était certainement l'un des plus courageux.

Quand le Capricorne fit sonner la dernière note et qu'il lança sur lui son regard abyssal, Shun rectifia sa pensée : Shura était le plus courageux.

OoOo

- Ba dee ya… Do you remember… Ba dee ya

L'aube avait remplacé la nuit de ses lances roses mais cela ne dérangeait pas Shun. Il se promenait tranquillement sur la plage, les chaussures à la main. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas été aussi joyeux. Il leva la tête et regarda la mer. S'il devait se l'avouer, c'était surtout la partie confidences et guitare avec Shura qui lui avait le plus plu. Finalement, il était content de bien s'entendre avec lui, comme toutes les autres ménades. Cette aventure à Asgard n'avait fait que renforcer leurs liens. Il espérait de tout coeur que cela soit pareil dans le futur.

Il tourna la tête vers la droite et vit Dionysos sur une chaise longue. Il avait la fin d'un cocktail dans la main et regardait lascivement le ciel.

- Fin de soirée ? demanda Shun en s'asseyant à côté de lui sur le sable.

- Hm ?... Ah c'est mon jeune prodige ! Oui c'est ce que j'aime dans les fêtes : cet instant de calme avant d'aller dans les bras de Morphée.

Shun le lui rendit. Il appréciait la simplicité de ce dieu ainsi que sa capacité à devenir très humain. Puis, il se rendit compte qu'il regardait toujours le ciel.

- Vous observez ce qu'il reste d'étoiles ?

- Oui. Une en particulier. Tu vois cette constellation au-dessus de nous ?

- Hm, oui. C'est laquelle ?

- La Couronne boréale. Celle que j'ai réalisée en l'honneur d'Ariane.

- Oh…

Les souvenirs de ce qu'il avait vu dans le mausolée vinrent le frapper et il se rendit compte que Dionysos avait un regard mélancolique.

- Qu'est ce qu'elle représentait pour vous ?

- Tout. C'était mon âme sœur. Ma meilleure amie. Mon amante. Elle n'était pas seulement une femme. Elle était… LA femme.

Shun écoutait avec émotion cette déclaration. Vraiment, Dionysos le touchait avec cet amour pour Ariane.

- Concernant votre dernière mission…

- Je suis désolé, je n'ai pas été…

- Arrête de te dévaloriser tu veux ? Tu as tenu ce rôle de chef avec brio et intelligence.

- V-vraiment ?...

- Si je te le dis… répondit Dionysos avec un doux sourire. C'était une situation difficile oui je te l'accorde mais tu as réussi à t'en sortir en faisant confiance à tes acolytes et en leur insufflant le courage nécessaire pour continuer.

Sentant la chaleur de la joie s'emparer de son cœur, Shun détourna le regard et mit sa tête sur ses genoux. Puis, il la releva et appuya sa bouche contre ses poings.

- Quelque chose te taraude non ? Demanda le dieu

- Je me posais une question. Vous savez, nous faisons en sorte de garantir la paix et l'amour sur Terre. Ça nous a conduit à combattre des monstres et à aller sur les terres d'autres dieux pour les empêcher de nuire aux hommes. Je me demandais : est ce qu'on peut aller… disons plus loin ?

- Qu'entends-tu par là ?

- Est ce qu'on peut empêcher un dieu de s'incarner dans le corps d'un être humain ?

Un silence se fit, seulement troublé par le bruit des vagues. Loin d'être surpris, un éclair de contentement passa dans les yeux de Dionysos.

- Cela n'a jamais été tenté… Mais qui ne tente rien n'a rien comme on dit. Encore faut-il savoir quand sera la prochaine réincarnation. Et il n'existe pas 36 moyens de le savoir.

- Vous pensez à quel moyen ?

Il y eut un autre temps de silence, comme si Dionysos s'apprêtait à lancer une bombe.

- Il existe un dieu avec qui j'aurai pu bien m'entendre mais le destin en a décidé autrement. Un enfant de Zeus lui aussi. Il est connu pour être le messager des dieux.

- Hermès…

- T'as tout bon. Lui seul serait en mesure de savoir qui serait le prochain dieu à se réincarner.

- C'est une mission risquée ?

- Plus ou moins. Tout dépendra de lui et de son esprit de coopération. Il a beau avoir cette image de dieu fidèle, il n'en reste pas moins qu'il est capable d'intercepter les plans des dieux si jamais cela va à l'encontre des siens. Aussi, il y a un avantage : il n'a pas de sanctuaire.

- C'est un bon point pour nous effectivement…

- Enfin… Je te laisse y réfléchir. Mais sache que ta détermination ne m'a pas laissé indifférent. Et que je serais à vos côtés, quoiqu'il en coûte.

Shun sourit puis se releva pour aller se coucher. Il devait être aux alentours de 7 heures du matin maintenant. Et le ciel était déjà bleu.

- Au passage, demande au serveur une vodka rock pour moi s'il te plait, dit Dionysos

- Mais c'est l'heure du petit déjeuner…

- … Avec une tartine beurrée dans ce cas.


Prochainement… L'arc Hermès !

J'espère que le chapitre vous aura plu, à bientôt pour le prochain chapitre !