Salut à toustes!

Voilà un nouveau chapitre, plus court que les précédents, mais très important. Mouhaha.
J'avoue que j'ai été assez dégoûtée de voir le peu de réactions qu'à suscité le précédent mais hé, si j'écrivais pour la fame ça se saurait. Après bon, je publie pour vous plutôt que pour moi, et avoir un retour est mon principal bénéfice dans l'histoire. Quoiii qu'il en soit j'étais dégoûtée, donc, et puis Isy est arrivée. Isy, c'est quelqu'un qui ne va pas lire ce chapitre à sa sortie, parce qu'elle en est pas encore à ce point de l'histoire, mais je lui tire bien bas mon chapeau. UNE REVIEW PAR CHAPITRE mes aïeux! Ça, ça m'a mise de bonne humeur! Donc merci beaucoup Isy, et merci Tiph!
(et vous inquiétez pas les autres hein, j'arrête de me plaindre et d'encenser les reviewers ici. Je suis contente qu'on lise l'histoire déjà, et pour qu'on la lise faut que j'arrête de raconter ma vie)
Bon, tant qu'à en être aux remerciements, merci à Canulear pour ses avis au fur et à mesure que j'écris^^
Sur ce, je vous laisse profiter du chapitre, et à la prochaine^^


Le lundi, j'évite activement Arthur. Je n'ai pas envie de lui faire face, pas envie de lui parler, que ça se finisse encore en dispute… J'ai pris du retard sur mes recherches de toute façon. Plutôt que de rejoindre les autres dans la grande salle, à midi, je retourne dans ma tour pour lire des livres que j'ai récupérés à la bibliothèque du château. Au repas, le soir, il est attablé avec les autres, et je m'assois à la lisière de notre groupe d'amis. Quand il me voit, il a l'air de vouloir dire quelque chose, puis son visage se crispe et il détourne le regard, poursuivant sa conversation avec Ewald comme si de rien n'était.

Le mardi, je profite de mon absence de cours pour passer la matinée à la bibliothèque. Je cherche des livres qui pourraient permettre de me comprendre ce qui m'arrive, sans rien trouver de convainquant. Ewald me rejoint aux alentours de dix heures, et je m'empresse d'aller ranger les livres avant qu'il ne se pose des questions. Je doute fort que les documents que je lisais soient au programme de première année. Lorsque je me rassois, Ewald me demande :
« Tu veux parler de ce qu'il se passe avec Arthur ?
-Non merci. » je refuse, un peu sèchement. Le serpentard hoche la tête avec un sourire qui me paraît un peu triste, mais n'insiste pas. Quoi qu'il en soit, je suis frustrée, et je finis par craquer.
« On peut faire du duel ? J'ai besoin de me défouler un peu.
-Certainement. » fait mon ami avec un léger sourire.

Nous nous entraînons jusqu'à ce qu'il soit l'heure de manger, et même si je suis bien sûr toujours à des années lumières du niveau d'Ewald, je vois nettement les progrès que j'ai accomplis sous sa tutelle. Je suis capable d'esquiver tout en lançant mes sorts, de réagir rapidement, j'ai aussi appris à maîtriser une bonne dizaine de sortilèges plutôt utiles, à force, même si ils sont très simples. Et j'arrive de mieux en mieux à les lancer sans hurler les formules. Nous finissons par arrêter notre séance, transpirants, et Ewald se lance un sort pour se nettoyer rapidement et remettre ses vêtements un ordre, avant de me jeter un regard. Je passe ma main dans mes cheveux, tentant d'apporter un semblant d'ordre à mes épis. Il a un petit ricanement devant mon embarras, puis dirige sa baguette vers moi. J'ouvre les bras, résignée, et il me lance la même série de sorts qu'à lui.

Le soir, je mange seule en sa compagnie, puisque Arthur est avec sa copine, à mon grand soulagement, et qu'Al' est avec l'équipe.

Mercredi est semblable aux jours précédents. Vide et frustrant. Je continue à éviter Arthur, je me coupe, je suis tellement frustrée par mes recherches qui ne mènent à rien… J'essaye de me changer un peu les idées, je vais voler, puis je me promène dans la forêt interdite. Un peu plus profond que la fois d'avant. C'est toujours un plaisir de me retrouver dans les bois, même si le temps est glacial.

Jeudi soir. J'arrive dans la grande salle un peu en retard, un peu dans les vapes. Je vois que les autres sont attablés tous ensemble, et je n'ai pas vraiment envie d'être avec eux. J'envisage de faire demi tour, mais Al' m'a déjà vue et me fait signe de les rejoindre, lui, Ewald et Arthur, au bout de la table des Poufsouffle. Je n'ai pas très fin, mais je me force à me servir un bonne assiette de nourriture quand même, histoire d'éviter d'attirer l'attention. Ou des remarques. Mon bras gauche me démange un peu. Je crois que j'ai abusé un peu ce matin. Les garçons parlent de Quidditch. Le prochain match aura lieu dans un peu plus de deux semaines, entre Poufsouffle et Serdaigle. Pour une fois, Arthur participe à la conversation, même si ce n'est pas son sujet de prédilection, vu qu'il s'agit de sa maison et qu'il connaît personnellement les joueurs. Je porte machinalement ma fourchette à ma bouche, puis tends l'autre bras pour me servir à boire. Al' tend son verre. Soudain, il interrompt son discours sur les meilleurs joueurs de l'équipe de serdaigle pour demander :
« Euh, Vivian ? On dirait du sang sur la table, tu es blessée ? »
Les deux autres se tournent à leur tour vers moi. Machinalement, je remonte ma manche. De toute façon, mes glamours sont actifs, donc je ne cours aucun risque. Je me fige. Sur mon bras, gravé en lettres de sang, il y a marqué « OUBLI ». Je rabats ma manche sur mon bras. Les autres ont vu aussi, je le sais. Je bredouille un :
« Je dois faire un truc. »
Je m'enfuis. Al' dit quelque chose que je ne comprends pas. J'atteins les portes de la grande salle sans courir, j'entends Arthur me dire d'attendre. Je sors. Je me mets à courir dans les couloirs, pour m'éloigner de la grande salle au plus vite. Je sors par une fenêtre, enfourche mon balais et vole jusqu'au septième étage, jusqu'à rejoindre ma tour, pour être au calme.

Une fois que je suis assise sous le toit, la trappe refermée, je relève à nouveau ma manche. Les coupures sont toujours là, formant ce mot en majuscules, maladroitement tracées. J'ai dû faire ça à la hâte, ou en essayant de me cacher. On a effacé ma mémoire. Qui ? Pourquoi ? C'est arrivé dans la journée, puisque mon glamour ne le cachait pas. Et vu l'état des coupures, sans doute l'après midi. J'essaye de me souvenir de ma journée, mais je ne trouve que des bribes, un peu comme si j'étais endormie. Un contrecoup du sort qu'on m'a lancé, ou c'est intentionnel ? Parce qu'on m'a lancé un sort. En essayant de me concentrer, je retrouve des souvenirs du matin, même du repas de midi, mais j'ai du mal. Et l'après-midi n'est qu'un immense trou noir, jusqu'au moment où je rejoins les autres. Le pire, c'est que je suis même pas sûre que j'aurais réalisé tout ça sans cette marque inattendue sur mon bras, je me serais sans doute couchée sans réfléchir, parce que je n'aurai pas eu de raison de me souvenir… Je désactive mes glamours. Les blessures que je me souviens avoir faites ce matin sont bien là, en tout cas. Qui m'a fait perdre la mémoire ? Pourquoi ? Peut-être qu'avec l'occlumencie, je pourrais trouver mes souvenirs ? Je suis trop fébrile.

Un bruit venant d'en bas me fait sursauter. J'entends la voix d'Arthur qui appelle mon nom. J'étouffe un juron, je réactive mes glamours. Comment il m'a trouvée ? J'ouvre la trappe, je saute devant lui. Il a l'air brièvement soulagé. Je lance les hostilités.
« Qu'est-ce qu'il y a ? C'est Ewald qui t'a dit où j'étais ?
-Ewald.. ? Non. Et ce n'est pas la question. Fais voir ton bras. Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
-J'en sais rien » je fais, parce que c'est la stricte vérité. Le regard d'Arthur s'assombrit.
« Vivian…
-Là regarde, y a rien ! » je fais, en tendant mon bras dans sa direction et en remontant la manche, ignorant la brûlure que le geste provoque. « Je me suis soignée.
-Arrête de me prendre pour un imbécile. » La voix d'Arthur est amère, et sa colère est clairement visible. Sa peine aussi, je crois.
« Je…
-Si tu t'apprêtes encore à me sortir une excuse, te fatigue pas. J'en ai assez, Vivian.
-Moi aussi, j'en ai assez. Pourquoi tu te sens obligé de toujours forcer ? Tu peux pas me faire confiance, tout simplement ?
-Te faire confiance ? La question n'est pas là, tu le sais, je le sais. Le problème c'est que tu nous prends tous pour des imbéciles, que tu refuses catégoriquement que quiconque s'approche trop près, que quiconque aie la moindre idée de ce que tu traverses. Sauf que tu vois, tu ne peux pas te comporter comme une amie, et penser que c'est à sens unique. Je ne suis pas là juste pour le fun, tu sais ? Surtout quand c'est évident que tu as des problèmes. Graves en plus. Je ne peux pas continuer à supporter ça. Parce que c'est insultant, déjà, que tu croies me berner si facilement. Et surtout, ça fait mal, de te voir t'isoler délibérément, comme si je ne comptais pas et c'est épuisant d'attendre que tu daignes laisser tomber la moindre goutte d'information pour que je puisse t'aider. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, l'amitié. »

Je me sens trembler de rage, de frustration et de tristesse à la fois. Ma voix est mal assurée quand je réponds : « Je suis désolée Arthur, tu aurais du le comprendre il y a longtemps… Mais je n'ai pas d'amis. Je n'ai rien contre toi, ou Al', ou Ewald, mais je ne veux dépendre de personne. Je n'ai pas besoin d'amis. J'aime passer du temps avec vous, on s'amuse bien, mais c'est tout. »

Il fait un pas dans ma direction, l'air de vouloir me secouer un bon coup, puis il s'arrête, et ses bras retombent le long de son corps.
« N'importe quoi. Tu aurais pu ne pas nous parler, rester dans ton coin avec des gens de ton année, et faire semblant, mais au lieu de ça tu t'es rapprochée de nous. D'Ewald et d'Al', qui ne te connaissaient pas. Tu m'as dit que j'étais ton meilleur ami, maintenant tu vas me dire que c'est un mensonge, juste parce que ça t'arrangerait que j'y croie ? Tu m'as écouté quand j'avais des choses à te dire, tu as passé des vacances chez Alphonse. C'est ça que t'appelles ne pas avoir d'amis ?
-Appelle ça comme tu veux. Je suis désolée pour toi, je sais que tu es quelqu'un de gentil, mais tu t'attaches trop aux gens, tu te projettes trop. J'ai traîné avec vous, parce que je m'amusais bien avec vous, et parce que vous étiez plus intéressants que les gens de mon année. Oui, j'ai dit qu'on était amis, parce que ç'aurait été blessant pour toi que je le fasse pas, et que je t'apprécie sincèrement. Mais je n'ai besoin de personne, à plus forte raison si c'est pour me faire harceler.
-Très bien. J'en ai vraiment assez de tes conneries. Tu veux que je te fiche la paix ? Okay. Je ne vais pas me battre tout le temps, puisque ça ne sert à rien, et que je dois aussi penser à mon bien être, et à celui des gens qui veulent bien de mon aide. Mais, Vivian ? Je serai toujours là, quand tu auras décidé de parler, que tu auras compris que ça ne sert à rien de t'enfermer dans ton silence. »

Il reste un instant à me regarder en silence, les yeux brillants, comme si il attendait une réaction de ma part. Je ne réponds pas. Il secoue la tête et il part sans se retourner.

Une fois qu'il est parti, je remonte dans mon grenier, et je claque la trappe, tandis que quelques larmes coulent sur mes joues. Je ne sais plus si je ressens de la colère ou de la tristesse, la seule chose certaine et que j'éprouve une frustration immense. Frustration de ne pas savoir pourquoi je suis en vie, frustration et rage qu'on ai touché à ma mémoire et que les souvenirs m'échappent, frustration et tristesse en pensant à Arthur… En me rapprochant de mon hamac, je remarque un petit colis sur le sol, qui contient deux romans d'heroic fantasy moldus ainsi que des biscuits fait maison et quelques bonbons. Un mot de mes parents y est joint pour me souhaiter un bon anniversaire. Je crois que je l'ai reçu ce matin, mais mes souvenirs sont un peu flous. Je me revois quand même donner quelques biscuits à Alphonse. Il a mangé avec moi ce matin.. ? C'était mon anniversaire aujourd'hui, c'est vrai. Le même jour que l'anniversaire de ma mort. Y repenser me fait inévitablement repenser à Quentin et aux autres. Florian, Maeva, Élias, et même Mélanie, qui avait déjà quitté ma vie avant que je la quitte moi même. Quentin aurait beaucoup aimé Arthur. Putain, ça m'apprendra à m'attacher aux gens, et surtout à les laisser s'attacher à moi. Et c'est pas comme si je le savais pas en plus ! Je le savais. J'ai été trop coulante. Incapable de me détacher du confort d'avoir des gens à qui parler, des compagnons. C'était stupide. Ça ne se reproduira plus. Au moins, le problème Arthur est réglé, probablement. Je me coupe de dépit, pour me punir aussi d'avoir blessé le poufsouffle, autant que pour l'avoir laissé s'attacher. Ça ne me calme pas. Mais je ne craque pas. Pas encore.

Je n'ai pas vraiment le temps de me remettre de mes émotions que j'entends à nouveau du bruit en bas. Sérieusement ? Cette fois-ci, je n'ai pas le temps de descendre, parce que la trappe s'ouvre déjà, pour révéler Ewald. Il a l'air calme, mais je sens qu'il ne l'est pas. Je le vois à son léger essoufflement, à la tension dans ses épaules, à mon instinct qui me le crie. Il n'est pas dans son état normal. Je lui demande, d'une voix pas totalement stable :
« Qu'est-ce que tu fais ici ? »
Il soupire.
« Montre moi ton bras, je vais te soigner.
-Pas besoin, j'ai rien. »
Pour prouver ma bonne foi, je dénude à nouveau mon avant bras gauche. Il soupire à nouveau.
« ça ne sert à rien de me mentir, Vivian. »
Il sait. Il sait ? Est-ce qu'il sait ? Une partie de moi panique un peu. L'autre décide de se comporter de façon odieuse, pour qu'il me fiche la paix, lui aussi. Parce que j'en ai marre. J'ai besoin de calme pour réfléchir à comment retrouver la mémoire, et ni lui ni moi n'avons du temps à perdre.
« Je ne sais pas pourquoi tu m'accuses de mentir, mais j'aimerais que tu me foutes la paix. Vous en avez pas marre d'être sur mon dos tout le temps ? Je sais pas si c'est Arthur qui t'a demandé de venir, ou si tu t'es senti obligé, mais y a rien à voir, rien à dire. Je sais pas ce que tu penses avoir vu mais tu te trompes. Et j'adorerais pouvoir finir mes devoirs avant demain, donc si tu pouvais me laisser en paix j'apprécierais beaucoup.
-Je t'ai laissé gérer, parce que tu semblait te débrouiller, et parce que je laissais Arthur faire ce qu'il jugeait bon. J'ai bien compris que tu es indépendante, que tu es forte, et que tu n'aimes pas du tout qu'on se mêle de tes affaires. Sauf que là, ça va trop loin. Au passage, sache que je n'apprécie pas du tout la façon dont tu as traité Arthur, mais ce n'est pas la priorité pour le moment. Tu as fait ce que tu pouvais, mais l'intelligence c'est aussi de savoir quand tu ne suffis plus. Ne t'inquiète pas, je ne vais pas chercher à en savoir davantage que nécessaire. Mais je veux t'aider, et pour ça je vais avoir besoin de quelques réponses.
-Je n'ai rien à te dire. Tu n'as rien à faire là, putain ! Je l'ai dit à Arthur, je vais te le répéter : ma vie ne regarde que moi, et l'affection que vous avez ou non sur moi ne vous donne aucun droit. Nous ne sommes pas amis.
-Tu as fini ? » me demande Ewald avec un air presque amusé.
« Oui. Pars maintenant, s'il-te-plaît.
-Le problème pour toi, c'est que je ne suis pas comme Arthur » dit Ewald, en refermant négligemment la trappe du pied, comme pour mieux s'installer. Je veux m'enfuir. Il prend une petite inspiration, et ses yeux se font plus froids, sa voix perdant aussi toute trace d'amusement. « Je ne partirai pas, parce que j'ai besoin de réponses à mes questions, parce que j'ai suffisamment attendu et assez fermé les yeux. Tu dis que ta vie ne me regarde pas ? Si tu tiens à voir les choses comme ça, dis toi que tu ne m'as pas demandé mon avis pour t'incruster dans mes problèmes, le soir où Alphonse et ses amis m'ont coincé dans un couloir. Alors je ne vais pas te demander ton avis non plus. Maintenant, dernière chance. Laisse moi soigner ton bras, et après on va discuter. »
Je prends une grande inspiration, et à nouveau je lui mens :
« Il n'y a rien à soigner sur mon bras ! Je préparais une blague, et j'avais oublié d'enlever le maquillage. Je suis partie parce que j'avais pas envie d'ENCORE me disputer avec Arthur. De toute évidence, c'est raté. »

Silence. Même moi, je sens que je ne suis pas vraiment crédible. Ewald secoue la tête, et pointe sa baguette vers moi avant que je n'aie le temps de réagir, pour prononcer simplement : « Finite ». Mes glamours tombent. Ewald pâlit un peu. Je le regarde avec un air de défi, mais à l'intérieur je suis figée. L'idée de l'attaquer, de lui effacer la mémoire peut-être m'effleure l'esprit, rejetée aussitôt. Même si j'avais été capable de la mettre à exécution (et ce n'est pas le cas), je suis trop attachée à Ewald. Il ne dit rien d'ailleurs, mais je vois l'effort conscient qu'il met à réinstaller son masque impassible sur son visage, celui qu'il porte quand il est avec les Serpentard, celui qu'il laisse toujours tomber quand il est avec Arthur, et qu'il a aussi fini par abandonner avec moi. J'avais presque oublié, presque pas remarqué, mais à ce moment où il reprend son expression de pierre, je réalise à quel point il s'était détendu avec moi. J'ai peur de ce que cette expression me réserve.

Néanmoins, c'est avec délicatesse qu'il franchit la distance entre nous et attrape mon poignet. Les ongles de ma main droite, cachée derrière mon dos, s'enfoncent profondément dans la paume de ma main. Je veux me mordre, mais il le verrait. Je me laisse faire, intimidée, et il murmure un sort de soin en passant sa baguette au-dessus des lettres de sang qui se referment une à une, laissant ma peau intacte. Enfin, si tant est que le croisillon de cicatrices qui la parcourt puisse être qualifié d'intact. Je n'ai jamais, jamais montré mes cicatrices à quiconque dans cette vie, toujours protégées par mes glamours et avant ça par d'autres subterfuges. Pour une fois, je vois mes bras d'un point de vue extérieur. Les cicatrices ne sont pas forcément larges, même si elles sont un peu plus profondes que celles que je me faisais quand j'étais encore Aurore. Par contre, elles sont nombreuses. Des centaines de traits fins formant un maillage serré sur mon bras, entrecoupés de quelques cicatrices plus larges, là où j'ai coupé trop profond, des fois.
« L'autre bras, s'il-te-plaît » dit doucement Ewald, en relâchant mon bras gauche. Je regarde mon bras, machinalement. Les dernières coupures que j'ai faites, même pas dix minutes auparavant, suintent encore un peu. À contrecœur, je m'exécute. Il traite mes plaies avec la même délicatesse qu'auparavant, et je n'ose pas le regarder dans les yeux. Il laisse échapper mon bras, et demande, d'une voix où perce un peu de colère, et une autre émotion, que j'ai du mal à nommer (de la peur?) :
« Il y en a d'autres ? »
Muette, je me contente de secouer la tête, sans oser vraiment le regarder dans les yeux. Il me laisse le temps de parler, de commenter peut-être, mais devant mon mutisme il me demande :
« Explique moi.
-T'expliquer quoi ?
-Pourquoi tu fais ça ? Depuis quand ?
-Je n'ai pas envie d'en parler.
-Je ne veux pas t'offenser, mais c'est plutôt évident. Sauf que ce n'était pas vraiment une proposition. Enfin, si tu préfères, si c'est plus facile pour toi, commence par m'expliquer ce qu'il s'est passé aujourd'hui. Tu ne peux plus fuir, Vivian.
-Je peux toujours essayer » je marmonne, avec un ton boudeur. L'expression sur le visage d'Ewald, lorsque je le regarde subrepticement, réduit mes espoirs à néant. Je me résigne à parler, alors, puisque je suis piégée. Et puis, ça me tue de l'admettre, mais c'est sans doute nécessaire. Au moins, Ewald pourra probablement m'aider pour le problème lié à ma mémoire. Je plante mes ongles dans mon poignet sans le regarder, pour rassembler la force de commencer. Sa main se pose sur la mienne avec une hésitation, avant de décrisper mes doigts.
« Prends ton temps, Vivian, mais ne te fais pas de mal comme ça.
-Qu'est-ce que t'en as à foutre ? » Je fais, sur un ton agressif plutôt qu'interrogatif. Je ne lui laisse pas le temps de répondre, et je continue, sans cesser de regarder tout sauf lui alors que je lui parle. Parce que c'est plus facile.
« Ce que vous avez vu, au repas… Le problème est justement que je ne me souviens pas l'avoir fait. Si j'ai marqué ça, et que je ne m'en souviens pas, ça veut dire que non seulement on m'a effacé la mémoire, mais que je savais qu'on allait le faire et que je voulais m'en souvenir. J'ai besoin de savoir qui a fait ça.
-Déjà, il faudrait déterminer de quelle façon ça a été fait. Il y a plusieurs façon d'effacer la mémoire à quelqu'un, et la plupart laissent des marques caractéristiques, si on sait ce qu'on cherche.
-Tu saurais faire ça ? » je demande, avec un soupçon d'espoir dans la voix.
-Je peux essayer. Mais tu as une idée de qui pourrait vouloir te faire ça ? Parce qu'à première vue ça n'a pas de sens. Tu es une première année, et nous sommes à Poudlard. Même si je sais que tu as des problèmes avec certains, aller jusque là c'est beaucoup, et ça n'aurait que peu de sens dans le cadre d'une querelle entre élèves. Et surtout, surtout, ce genre de magie est hors de la portée de l'immense majorité des élèves…
-Je ne sais pas du tout qui aurait pu faire ça, c'est bien le problème ! » je crache, frustrée. « Sauf si... » je réfléchis, tout haut. Parce qu'Ewald a raison, que ce n'est probablement pas un élève, que tout est étrange dans cette histoire. Est-ce que ce serait totalement déraisonnable d'imaginer que ça puisse être lié à mon passé, à mon autre vie ? Je ne vois pas comment ça pourrait être lié, mais d'un autre côté à part ça, il n'y a rien de spécial avec moi. Enfin, ça et l'épisode du pédophile...
« Sauf si quoi ? » demande Ewald, qui sent mon hésitation. Je soupire.
« Je te propose un deal. Il y a certaines choses… je veux bien t'en parler. Mais que si tu m'aides à retrouver la mémoire en échange, si c'est possible, et à comprendre ce qui s'est passé. Et aussi, je ne vais pas tout te dire à la fois, et tout ce que je te dirai doit rester strictement entre nous. Je veux que tu me le promettes.
-Ça me paraît acceptable… Je te promets de faire de mon mieux pour t'aider, et de garder pour moi ce que tu me diras tant que tu le voudras. »
Je prends le temps de réfléchir à ce qu'il a dit, au cas où il se serait ménagé un échappatoire, une porte de sortie qui lui permettrait de passer outre mes exigences, mais je ne trouve rien. Alors, je lui fais signe de s'asseoir.

« Ça risque de prendre un peu de temps… Et, Ewald ? Ne me pose pas de question, s'il-te-plaît. Je te dis ce qui est nécessaire, mais je ne vais pas te donner plus. Pas pour le moment.
-Si j'ai des questions, je te les poserai, mais y répondre ou pas sera ton choix, d'accord ?
-D'accord. » je fais, d'une petite voix, dans laquelle ma fragilité est audible. Il rajoute.
« Je me réserve le droit de te reposer les questions un autre jour, si elles sont vraiment importantes, par contre. Parce qu'il y a certaines choses que je n'accepterai pas, à commencer par ta manie de tout cacher. »
Je ne réponds rien, parce que ce n'est pas le moment de négocier. À la place, une fois qu'il s'est assis soigneusement non loin de moi, je détourne le regard et prend le temps de rassembler mes idées, passant ma main devant ma bouche pour me mordre discrètement. Ewald attend patiemment. Enfin, je commence à parler.
« Je sais que ça va te sembler dur à croire, mais comment dire… Je ne suis pas juste une gamine de onze ans. En fait, je suis… J'étais… J'ai vécu une autre vie. Je m'appelais Aurore, j'étais française. Je suis morte quand j'avais dix-sept ans. Sauf que je me suis réveillée, dans ce corps. J'ai mes souvenirs depuis que j'ai trois ans, mais je ne sais pas comment ça se fait. Parce que jusqu'à preuve du contraire, la réincarnation, ça n'existe pas. Je n'ai trouvé aucune mention crédible d'un cas comme le mien. Quand j'ai appris que la magie existait, j'ai cru que ça pouvait expliquer des choses… Sauf que je n'ai toujours rien trouvé. »
Ewald garde le silence quelques temps, suffisamment pour que je lui demande :
« Tu ne me crois pas, c'est ça ? »
Il lève la tête vers moi et croise mon regard, pour la première fois depuis qu'on a commencé à parler.
« C'est un peu difficile à croire, comme tu l'as dit il n'est nulle part mention, à ma connaissance, d'un cas comme le tien. Pourtant, tu n'as pas de raison de mentir, et ça explique des choses sur toi. Pas mal de choses en fait. Et ça fait naître beaucoup de questions. Je ne sais pas vraiment par où commencer. Quand est-ce que tu vivais ? Je veux dire, la toi d'avant ?
-Je suis née le 2 février 1990. Je suis morte le 15 novembre 2007. Je suis née dans ce corps le même jour. »
Un rire tordu m'échappe, et me surprend, alors que je donne ma date de naissance, la vraie, celle d'Aurore. La vérité, si longtemps tue. La dire ne m'apporte aucun soulagement, juste de la peur, parce qu'Ewald sait déjà trop de choses. Et pourtant, je n'arrive qu'à penser à mes anciens amis. Ceux avec qui j'ai grandi, avant de mourir. Ewald me tire de mes pensées, et son ton de voix m'évoque celui de quelqu'un devant un casse-tête particulièrement complexe :
« Et tu n'as aucun début d'explication ? Tu étais une sorcière ?
-Non, juste une moldue, sans rien de spécial à part une bonne vie de merde. Ça ne sert à rien de parler de ça de toute façon, j'ai eu onze ans pour y penser, enfin, huit, et ça n'apportera pas de réponse.
-Huit ?
-Mes souvenirs sont revenus quand j'avais trois ans. Mais peu importe. Comment on peut faire pour déterminer comment on m'a effacé la mémoire ? »
Ewald a les sourcils froncés, et semble vouloir ajouter quelque chose, approfondir le sujet, mais heureusement n'insiste pas, préférant se concentrer sur le problème que je lui soumets.
« Je pense que le plus simple sera de faire un examen de légilimencie, mais ça demande pas mal de concentration, des deux côtés, donc je pense pas qu'on va faire ça ce soir.
-Je pense que je peux me concentrer assez.
-Peut-être, même si j'en doute, mais je sais que pour moi, ce serait difficile.
-Pourquoi ?
-J'ai pas mal de choses à penser, vu ce qu'il vient de se passer. Mais il faut qu'on ne tarde pas trop à faire ça, parce que certaines magies sont assez volatiles, du coup on s'en occupera demain. Le problème c'est que j'ai cours jusqu'à l'heure du club de vol, sauf en deuxième heure le matin.
-Et moi je n'ai cours qu'en deuxième heure le matin. Et j'ai astronomie à vingt-trois heures. »
Ewald réfléchit un instant, puis dit :
« On se retrouve ici à 16h30 dans ce cas.
-D'accord. »
Le silence retombe un instant, et je m'attends à ce qu'Ewald parte, parce qu'il commence à se faire tard, mais au lieu de ça il me demande :
« Et les coupures du coup ? Pourquoi tu fais ça ?
-Qu'est-ce que t'en as à foutre ?
-Sérieusement ? »
Il me regarde. Je croise son regard, avec une pointe de défi dans les yeux. Qu'est-ce qu'il en a à foutre ? On se connaît à peine, et ça change rien pour lui. Il ne devrait pas s'en soucier.
« Tu as beau être intelligente, je trouve ta question singulièrement stupide.
-Je ne vois pas ce que ça change pour toi. Je ne vois pas en quoi cette information peut t'intéresser. Ou bien c'est de la curiosité morbide peut-être ? »

J'ai la vague impression qu'il se retient de me frapper. Pourtant, il n'a fait aucun geste dans ma direction, et je met quelques secondes à comprendre d'où provient la sensation. Inconsciemment, sans doute, il a légilimencé. Nôtre lien mental est presque formé, tant sa volonté est concentrée sur moi, sans doute. Mes murailles le bloquent. Instinctivement, je m'ouvre au contact, pour comprendre ce qu'il se passe, et au moment où je m'ouvre, il le réalise. Et son inquiétude me frappe comme une gifle. Il a peur. Il se reprend vite néanmoins, et ses émotions, que je ressentais par le biais du lien, s'estompe un peu. Il me fixe.
« Désolé, je n'ai pas fait exprès. »
Je ne réponds rien, un peu choquée. J'ai du mal à appréhender l'énormité de ce qu'il se passe. Ewald, faire quelque chose comme ça par erreur ? Il est vraiment paniqué. Il est vraiment paniqué, et à cause de moi. À cause de ce qu'il voit. Et je ne peux même pas me dire qu'il fait semblant, ou le soupçonner d'avoir voulu sonder mes pensées en douce, parce que j'ai senti ses émotions. Mal à l'aise, je prends ma baguette pour relancer mes glamours. Si voir mes cicatrices le met dans un tel état… Il pose sa main sur la mienne, de façon un peu raide.
« Tu n'as pas besoin de les cacher.
-Je pense que c'est préférable.
-Ne t'inquiète pas, c'est juste que j'ai été surpris, et que j'ai besoin de savoir pourquoi tu fais ça. Mais ça ne sert à rien de les cacher, je sais qu'elle sont là de toute façon. Que je les voie ou pas ne va rien changer, mais tu n'as aucune raison de les cacher devant moi.
« Okay » je murmure presque. J'ai la gorge serrée. Je me sens à la fois vulnérable, sans défense, coincée, reconnaissante, touchée par son souci de moi, et effrayée. Sa main est toujours sur la mienne quand je la baisse. Ce contact est une torture pour moi, tant il me soulage et dans le même temps me renvoie à tout ce que j'ai perdu. Étonnamment, il ne me dégoûte pas, et c'est l'une des premières fois que ça arrive, depuis Quentin. Je me sens fragile, ce geste est fragile, mais je resserre un peu mes doigts sur sa main, même si j'ai peur qu'il retire la sienne, mais à cet instant là je n'arrive pas à m'en empêcher. Je me sens tellement seule ! Sa main accepte le contact, se resserre à son tour sur mes doigts. Je ne le regarde pas.
« S'il te plaît, explique moi pourquoi tu te coupes. » Sa voix est assez calme, mais je ne m'y trompe pas. Après tout, notre lien mental est toujours formé, et même si ses émotions sont très atténuées, je sens toujours son inquiétude. Et même si je n'ai pas envie de parler, qu'une part de moi me fustige parce que comment je n'ai pas compris qu'il s'attachait à moi, pourquoi je l'ai laissé s'attacher à moi, je lui dois une réponse. Il en a besoin.
« Je me coupe parce que ça me soulage. Quand je vais pas bien, ça me permet de me calmer. Des fois aussi, c'est symbolique. Certaines cicatrices sont des rappels. » J'hésite un instant, puis tire le col de mon tee-shirt, feignant de ne pas remarquer l'expression qui traverse brièvement le visage d'Ewald lorsque la base de mon cou est découverte (et ses cicatrices avec). Je dévoile la marque sur ma clavicule gauche, celle que j'ai faite chez Arthur la première fois que j'y suis allée « Celle là par exemple, c'était le jour où j'ai tué le pédophile. »
« Tu n'as pas d'autres façons de faire, qui seraient moins destructrices ? Pourquoi tu ne parles pas à Arthur quand tu vas mal ? Ou à moi ?
-Ma vie ne regarde que moi. Je suis dans ce monde, comme une clandestine, depuis des années. Je me suis toujours débrouillée seule. Et je n'ai pas vraiment de raison ou l'envie de ne pas me couper. Ça ne me pose pas de problème de le faire.
-Mais c'est dangereux. Et tu n'as pas à être seule. Au cas où tu ne l'aurais pas compris, je suis là, que tu le veuilles ou pas.
-Je sais ce que je fais. Et je suis déjà morte une fois, j'ai l'habitude du danger.
-Comment… Comment tu es morte ? »
Je me ferme comme une huître. Hors de question d'admettre que je me suis suicidée, les coupures l'inquiètent déjà suffisamment et il ne faut pas qu'il comprenne la vérité… On sait jamais, si il voulait m'arrêter… Il pourrait être un obstacle vraiment gênant.
« Je ne répondrai pas à cette question. Je n'ai pas franchement envie de parler de ma mort, y a plus cool comme sujets, non ? »
Je sens la tension qui habite toujours Ewald, mais il n'insiste pas. Nous restons quelques temps en silence, et je finis par lui dire, parce que je lui dois bien :
« C'est gentil d'être là et de vouloir m'aider, mais tu ne devrais pas t'attacher à moi.
-Pourquoi donc ?
-Je ne suis pas quelqu'un de bien. Et je ne veux pas de liens. Ça ne sert à rien, et les gens finissent toujours par te laisser tomber. T'attacher à moi, ça ne va t'apporter que de la souffrance.
-Déjà, tu n'as rien fait pour étayer ta première hypothèse. Pour le reste, je crois que ce que tu ne veux pas, ce n'est pas des liens, mais la souffrance qui accompagne leur rupture. Et pour ce que m'attacher à toi me fera ou pas, c'est mon choix, et je suis prêt à en assumer les conséquences. Et c'est un peu tard pour que je te tourne le dos.
-Comme tu veux » je soupire. Ce n'est pas la peine de discuter. De toute façon, je ne devrais plus vivre si longtemps que ça. Huit mois. Moins si on réussi à récupérer mes souvenirs, et qu'ils m'apportent des réponses, même si j'y crois pas trop.

Nous gardons le silence quelque temps, puis Ewald finit par se redresser, lâchant ma main, me laissant une sensation de froid sur la peau.
« Il se fait tard, je devrais rentrer. Ça va aller ?
-T'inquiète. »
Il me regarde dans les yeux, et je n'ose pas détourner mon regard.
« Merci de m'avoir dit tout ça.
-J'ai pas franchement eu le choix, je rechigne
-Et je sais qu'il y a encore plein de choses que tu gardes encore pour toi… soupire mon ami. Enfin, essaye de te reposer pour ce soir, demain il vaut mieux qu'on soit le plus concentrés possible pour travailler sur ta mémoire. »

Enfin, il ouvre la trappe et disparaît dans l'ouverture. Je lance un tempus par réflexe. Le couvre-feu est passé. Je referme la trappe doucement. J'attends d'être certaine qu'il ne reviendra pas pour me détendre. La nuit est tombée, et je m'allonge dans mon hamac sans prendre la peine de lancer un lumos.

Je n'arrive pas vraiment à m'endormir ce soir là, trop de choses tournent dans ma tête. Déjà, l'énormité de ce qu'il vient de se passer. On m'a fait perdre la mémoire. Arthur, Ewald et Al' on vu les mots sur mes bras. La dispute avec Arthur. Je l'ai blessé, je le sais. Je suis à la fois triste et soulagée qu'il aie laissé tomber. Ça devait finir par arriver de toute façon, mais ça blesse quand même, mais en même temps je vais enfin avoir la paix, et je ne le blesserai pas davantage. Quand je mourrai, il aura déjà eu le temps de m'oublier un minimum. Ce qui me préoccupe le plus, c'est ma mémoire disparue, et Ewald. Qui a fait ça ? Pourquoi ? Comment ? J'ai beau essayer de me souvenir, rien ne vient. Et Ewald… Je lui en ai dit beaucoup. Plus qu'il ne demandait, d'une certaine façon, pour m'assurer qu'il n'oserait pas poser davantage de questions après. Sa main dans la mienne me manque et je me hais d'avoir envie de ce contact, d'en avoir besoin, d'être si faible. Et je hais de me rappeler de ce jour où j'avais tenu la main de Quentin dans la mienne. Mes pensées reviennent à Ewald. Il a vu mes cicatrices… Il s'est attaché à moi. Je m'en veux pour ça, je m'en veux pour la douleur qu'il va ressentir en me fréquentant, et pour celle qu'il va ressentir quand je mourrai, si il ne m'a pas laissée tomber avant, ou que je n'ai pas réussi à me débarrasser de lui avant.

Je retravaille la cicatrice en croix sur ma main, celle que j'ai faite en rappel de ne pas laisser les gens s'attacher. Puis, ce soir, j'ai envie de couper profond. Alors, je réfléchis à où le faire. Je finis par arrêter mon choix sur mon ventre, et j'enfonce la lame autant que je l'ose. Je m'en veux de ne pas réussir à aller vraiment loin. Je m'encourage à aller plus profond. Une part de moi même est terriblement détachée alors que cette fois, le sillon que je creuse est plus prometteur. Seulement, ça n'atténue pas vraiment mes pensées. Je continue à me couper, mécaniquement, et je me dis qu'il faudrait vraiment que je trouve une potion non addictive qui me permettrait de m'assommer, les soirs comme ça, juste pour pouvoir dormir. Je finis enfin par sombrer dans un sommeil agité, par épisodes, me réveillant sans cesse. Quentin revient me hanter dans mes rêves. Pourtant, ça devrait être aux morts de hanter les vivants, pas l'inverse… Je me demande si il rêve de moi, des fois. Si il pense encore à moi. Et je n'arrive pas à décider si je préfère ou pas que ça soit le cas.

xxx

« Je me souviens que lorsque ma vie a basculé, d'un jour à l'autre, personne n'a rien remarqué. Même si sur le moment c'était surtout le choc qui m'a fait agir normalement, personne n'a rien remarqué non plus plus tard, dans les semaines, les mois qui ont suivi, lorsque j'ai commencé à me couper, lorsque je passais mon temps avec un masque, à faire semblant, à exagérer ma joie pour qu'ils y croient. Personne n'a rien compris, personne n'a réalisé. »

-SMS envoyé par Aurore Berger à Quentin Lemage, 09/07-


Et voilà pour ce chapitre. Pas mal, hein? Je serais curieuse de voir vos théories sur qui a effacé la mémoire de Vivian, et pourquoi.
(je lirai avec les plaisir les réactions horrifiées devant sa dispute avec Arthur, aussi xD)
Et Ewald, il est flippant, non?

à la prochaine,

signé: l'oursin majestueux de la voie lactée de l'infini