Heyyy ! (Lisez impérativement la note de fin !)
Donc je l'ai dit en MP à certains et sur la page facebook (j'avais oublié de le préciser l'autre fois mais le lien est sur mon profil :)) aujourd'hui ça fait un an jour pour jour que j'ai commencé à écrire cette histoire :D ! Pour l'occasion, j'avais envie de partager avec vous ce chapitre, même si, vous allez vite le voir, c'est loin d'être la fête là-dedans.
Certaines choses pourraient (et vont) vous sembler WTF et vous choquer, et même si l'explication est pré-mâchée dans le texte, je vais y revenir à la fin. Angst lourd au programme. J'ai choisi de traiter de sujets épineux et sensibles, j'avais prévenu que la fic s'adressait à un public mature et qu'il y aurait de la réflexion, je crois que vous allez comprendre pourquoi ici.
Edit du 01/07/18 : Merci à Ookami97 pour la correction !
En vous souhaitant une bonne lecture !
Du sang.
Il y avait du sang.
Kanda crut bien qu'il avait la berlue… Mais non. Le cul du pyjama du gosse était tâché de rouge, et pas qu'un peu. L'alpha zyeuta avec circonspection, indécision et perplexité. La seule chose qu'il put murmurer fut un « Moyashi » effaré. Qu'est-ce qui se passait ?
Allen l'avait entendu, il se tourna vers lui, toujours en marmonnant des excuses, et les dents serrées. En apercevant son visage, Allen écarquilla davantage les yeux et demanda :
« Je… J'ai fait quelque chose ?... »
Il était confus et ne comprenait pas l'expression de panique interne de l'alpha. Kanda secoua la tête, et pressentit que l'oméga allait faire un scandale. À juste titre.
« Moyashi, tu… Tu saignes. »
Allen ne parut pas comprendre. Kanda continuait de s'interroger. Il s'était blessé ? Non, pas là, il n'y avait pas de raison que, il ne voyait pas comment il aurait pu… Et Moyashi n'était pas une fille. Il savait que les filles avaient leurs règles, car une fois, lorsqu'il venait à peine de rejoindre l'Ordre, alors qu'il était tombé sur une Lenalee en train de pleurnicher et qu'il s'était rudement moqué d'elle, elle le lui avait crié, de colère, et Kanda s'était renseigné. Ça ne pouvait pas être… Kanda s'approcha du gamin. Il le retourna, ce dernier se laissant faire, et se pencha sur lui. Le sang sentait fortement les phéromones. Kanda jugea cela étrange. Mais c'était bien de là que ça venait, pas de son dos, ni de ses jambes. Allen suivit bien vite son regard et porta instinctivement la main au derrière de son pantalon. En sentant l'humidité et la retirant tâchée de sang, il ne réagit pas. Il ne pleura pas, ne cria pas, ne dit rien. Il se contenta de regarder Kanda, la main ensanglantée tremblante, durant une bonne minute qui sembla interminable à l'alpha.
Il finit par parler, répétant ce que Kanda lui avait dit.
« Je… Je saigne. Kanda… Qu'est-ce qui m'arrive ? Je… »
L'épéiste accrocha son regard, ne pouvant rien faire d'autre.
« J'vais chercher l'infirmière, elle va t'examiner. »
Allen trembla et s'accrocha à lui, sa main sanguine tâchant la veste de son uniforme.
« Me laisse pas. Je t'en prie, me laisse pas. »
Il suppliait et quelque chose dans ses yeux tremblait autant que son corps, implorant pour son aide. Allen commença alors à pleurer, confusément.
« Je suis pas une fille, Kanda… J-Je devrais pas saigner, je suis pas une fille. Je suis pas une fille ! »
Il le répéta au moins trois fois de suite, haussant la voix à chaque fois, jusqu'à le hurler, et plongeant son regard dans le sien, pour appuyer ses propos, comme s'il cherchait à le convaincre. Putain, il perdait la boule. Perdu, sa propre confusion amoindrissant ses réactions, le brun serra les dents.
« J'le sais que t'es pas une fille, Moyashi. Calme-toi. Faut que je ramène l'infirmière, je pars pas longtemps, lâche-moi. »
Allen fit 'non' de la tête.
« J'ai peur, je veux pas que tu partes.
—Merde, calme-toi, si je vais pas chercher l'infirmière, tu pourras pas être soigné ! »
Kanda le poussa en arrière, pour le rallonger. Le blandin pleurait encore et luttait. En chaleurs, il n'était pas bien fort, mais Kanda avait quand même du mal à le pousser, le blandin forçant sur ses muscles et son emprise se resserrant sur ses bras. Il balbutiait gauchement ses inquiétudes.
« T-Tu crois que je suis b-blessé ? Je… vais me vider de mon sang ? Est-ce que je vais m-mourir ? »
Le kendoka cria :
« Mais non, pauvre con ! Laisse-moi aller chercher l'infirmière, et ferme ta gueule ! »
S'énerver n'était jamais bon, mais Kanda était inquiet lui aussi, et chez lui, tout sentiment était bon pour exciter ses nerfs. Moyashi ne lâchait pas ses bras, et Kanda se sentait presque trembler avec lui, le gamin tremblait tellement fort que ses os devaient sûrement s'entrechoquer. Allen était désespéré.
« J'en ai marre… Je peux plus supporter tout ça… J-je veux mourir, je ne veux plus être un oméga…
—Dis pas de connerie, Moyashi, tu vas pas crever ! »
Allen eut encore un mouvement de négation. Il n'arrêtait pas de trembler, de respirer bruyamment.
« Ça ne serait pas si mal… »
Kanda écarquilla les yeux. D'accord, le gosse était en train de devenir fou, et Kanda reconnaissait qu'il y avait de quoi. Mais qu'il se laisse abattre comme ça alors que ce n'était pas son genre… Kanda était en colère.
« Je croyais que t'abandonnais jamais, Moyashi ? Tu te rends compte que t'es en train de renier toutes tes belles conneries, bordel ? Crois-moi, si tu veux toujours crever après tes chaleurs, je t'arrangerai ça quand tu veux, mais que je t'entende pu dire ce genre de conneries maintenant ou je t'arrache la tête. Il faut que tu me laisses aller chercher l'infirmière. »
Allen eut une lueur de honte dans le regard. Il percutait sa propre faiblesse et l'exhortation à reprendre le contrôle de Kanda, mais ne pouvait pas s'arrêter de sangloter, de lourds sanglots qui faisaient redresser son corps en avant, ne voulait résolument pas le lâcher. Il était en train d'être anéanti, lentement.
« Je vais t'en coller une, Moyashi, si tu me lâches pas. »
Aucun effet. Kanda ne préférait pas le frapper dans cet état, et pour être franc, il ne pouvait même pas récupérer assez d'emprise sur ses bras pour ça. Il ne savait pas ce qui se passait chez l'autre, mais Moyashi semblait vouloir lui briser les os, et il aurait pu. Il serrait tellement fort qu'il réussissait à lui faire mal, à lui. Kanda ne voyait aucune solution pour le calmer. Lui aussi allait finir par exploser. Il n'aimait pas être retenu contre son gré, et n'avait aucune putain d'idée de comment réagir. Il prit une profonde inspiration, ferma les yeux, et, puisant dans ses forces, poussa violemment le blandin en arrière, de sorte à le faire tomber sur le matelas. Comme Allen était accroché à lui, Kanda atterrit au-dessus de lui, son corps écrasant celui du blandin, qui émit un gémissement endolori. Kanda savait que c'était prendre le risque qu'il s'excite encore, mais il réussit à faufiler ses bras autour du cou du gosse, et se maintint contre lui.
Il avait préféré un contact physique à une violence, et il sentit à son corps tendu qu'Allen était surpris. Sans doute était-il aussi tendu à cause de sa crise. Quant au sentiment de surprise, pour être franc, Kanda l'était tout autant. Kanda ouvrit la bouche, adoptant un parler sec et autoritaire :
« Respire un bon coup et détends-toi, Baka Moyashi. Tu vas arrêter de dire des conneries, de paniquer, et je vais ramener l'infirmière. Elle va nous dire ce qui se passe. Faut que tu fasses ce que je te dis. »
Allen gémit, ses bras se refermant autour du dos de Kanda. Il tremblait encore et n'était absolument pas calmé. Il ne le serait pas avant d'avoir vu l'infirmière, de toute façon.
« Je suis désolé, Kanda… J'ai tellement peur… Je suis désolé, désolé… »
Il pleurait toujours. Kanda gronda.
« Fais ce que je dis, et ça ira. »
L'Asiatique l'espérait, du moins. En faisant semblant d'être maître de la situation pour calmer Allen, Kanda mentait. Il ne maîtrisait que dalle. L'Anglais le libéra de son étreinte, et articula, la voix toujours blanche :
« J'aimerais me laver d'abord. Je veux pas rester plein de… de sang. »
Kanda hocha la tête. Il se redressa. Il sentait encore l'emprise du gamin sur lui, et il était sûr que s'il enlevait sa veste, il verrait des marques.
« Tu peux te lever ? »
Allen essaya. Sans grande surprise, même avec l'aide de Kanda, il n'arrivait pas à tenir sur ses jambes. Sa respiration était rapide, et l'alpha pouvait dire qu'il s'accrochait à sa senteur. Il le voyait frissonner longuement, se retenant sans doute de perdre le contrôle, et ses odeurs de peur et d'excitation s'entremêlaient. Kanda fut, lui, aux prises avec un sentiment qu'il jugeait tout à fait dérangeant, absolument inapproprié. Ça commençait à l'exciter. Les odeurs d'envie de l'oméga, et même sa peur. Il savait que c'était un instinct primal enfoui en lui dû à son statut d'alpha, la vue d'un oméga en pleine chaleurs perdu face à lui l'émoustillait. Pourtant, Kanda n'était pas un animal, il était un être humain avec une conscience, même si elle était questionnable.
Ce ressenti lui faisait l'effet d'être très malsain, monstrueusement tordu, et il s'engueulait intérieurement pour ça.
Pour le moment, ça restait gérable. Il pensait pouvoir se retenir. À la longue, en revanche, lui aussi s'inquiétait. Il n'avait pas gueulé sur Allen en entendant qu'il avait réfléchi à ça, mais il s'obstinait à penser pouvoir se contrôler. En sentant les odeurs, putain, Kanda déchantait net.
Marmonnant un 'merde' rageur, Kanda se concentra sur le blandin à moitié suspendu à son épaule, ses jambes ne pouvant aucunement le supporter. Kanda s'aperçut que le lit avait été tâché, il faudrait changer les draps.
« Je vais te porter jusqu'à la salle de bain et je t'amènerai de quoi te changer.
—Ne me porte pas. Laisse-moi m'appuyer sur toi et avancer comme ça. S'il te plaît. »
Kanda voyait sa détresse, voyait qu'il essayait de se raccrocher comme il le pouvait aux bribes de sa dignité qu'il croyait annihilée, mais il insista :
« Moyashi, je peux pas te tirer, tu tiens pas debout. Range ta fierté dans ta poche. »
Il savait que c'était une demande gonflée de sa part, vu qu'il n'en aurait pas été capable à ce stade. Le regard déchiré de Moyashi était révélateur.
« Laisse-moi cette fierté, pour le peu qu'il m'en reste. »
Kanda consentit à le traîner avec lui. Le blandin sembla reconnaissant. Kanda le fit asseoir sur le cabinet de toilette, coulant un regard vers la douche.
« Tu vas pas pouvoir faire ça seul, Moyashi. »
Allen baissa les yeux.
« Contente-toi de régler l'eau, j'irai habillé dedans. »
Kanda obéit.
Une fois la température tiède, il aida le blandin à s'asseoir au sol dans le bac à douche, et son pyjama fut trempé. Kanda se retourna, comprenant qu'il allait ensuite l'enlever. Il resta silencieux en attendant que l'oméga termine de se laver, lui ramenant de quoi se changer et déposant les vêtements et draps sales dans un coin. Il les porterait à laver plus tard. Allen prenait son temps, mais Kanda ne fut pas impatient, comprenant son souci. Il lui demanda juste s'il saignait encore, ce à quoi le blandin répondit d'une petite voix qu'il n'avait plus l'impression. Cela le soulagea un peu, mais pas totalement. Évidemment, c'était pire pour l'oméga. Bientôt, Allen termina. Kanda lui donna une serviette pour cacher son intimité, et le fit à nouveau asseoir sur le cabinet de toilette, lui donnant ses vêtements un par un. Le blandin s'habilla et lorsqu'il tenta de se lever, Kanda ne vit aucune tâche. Cela ne l'empêcha pas de prendre une deuxième serviette pour la poser sous le gamin, juste au cas où.
Il aida Allen à s'installer dans l'autre lit, et rencontra son œil peu sûr. Kanda reprit son parler ferme et sec.
« Bon, j'en ai pour pas plus de dix minutes. Je vais aussi emporter le linge sale. Ça va aller, Moyashi ? »
Le blandin hocha la tête.
« M-Merci pour tout, Kanda, et… vraiment désolé.
—Tch. T'y es pour rien, pauvre crétin. »
Allen était pâle et déglutit avec peine. Il était déboussolé, Kanda pouvait le sentir à plein nez, avait la gueule d'un fantôme et l'alpha avait peur pour lui. Il partit, et se dépêcha de ramener l'infirmière, en lui expliquant rapidement la situation.
Tout comme la première fois, elle commença par un examen de routine, constatant en entrant dans la chambre que l'odeur de peur d'Allen était assez forte pour qu'elle puisse la sentir. Allen se taisait et se laissait faire docilement, sous le regard attentif de Kanda. L'Asiatique s'assit au bord du lit, juste à côté du blandin, au moment où l'infirmière s'écarta, ayant tiré la chaise de bureau pour s'y poser. Allen ancrait son regard dans le sien, à la recherche de soutien. Kanda avait un visage totalement exempt d'expression, neutre, mais durcit pourtant sa façade, essayant de signifier qu'il lui en donnait. Il venait d'agréer à entretenir une entente amicale de circonstance avec lui, et avec ce qui venait de se produire, il s'inquiétait pour l'oméga. Il ne voulait pas penser à ce que ça impliquait. Leurs deux bras étaient côte à côte et se touchaient presque, sa peau nue, comme il avait dû faire laver sa veste tâchée, côtoyait le tissu de pyjama du blandin, mais Kanda se ficha de l'invasion de son espace personnel.
L'infirmière demanda :
« Donc, il a eu d'importants saignements anaux ? »
Allen baissa les yeux, mais acquiesça en même temps que Kanda. Il demanda à son tour, d'une voix effrayée que Kanda n'avait jamais entendue :
« Madame… Est-ce que… Est-ce que c'est normal ? Je suis un garçon. » Il l'affirmait d'une voix tremblante. « Je ne devrais pas avoir des menstruations ! Ce n'est pas… Je ne peux pas être… N'est-ce pas ? »
Ses yeux gris tournés vers l'infirmière exprimaient le choc et l'incompréhension. La femme, pour toute réponse, eut un rire. Kanda savait que c'était mal de frapper une femme, comme de frapper n'importe qui, mais il aurait bien décroché la tête de cette vieille mégère. L'infirmière se reprit.
« Excusez-moi, vous ne saviez donc pas.
—Savoir quoi ? » Kanda coupait agressivement.
La femme ignora sa verve.
« Ce n'est pas les mêmes menstruations que connaissent les femmes, » expliqua-t-elle, « ne vous en faites pas. Lors des chaleurs, il arrive que les omégas sécrètent un peu de sang. Ça montre que le corps est prêt et c'est aussi un moyen de secréter plus de phéromones et d'attirer l'attention des alphas. Ou plutôt, de votre alpha. Le plus important, c'est que vos crises sont arrivées, vous n'aurez donc plus qu'une semaine à passer dans cet état. »
Allen était éberlué, encaissant l'explication.
« C'est exactement comme les animaux… »
Mais au fond, de quoi était-il surpris ? Les chaleurs et les ruts étaient aussi une caractéristique animale. La femme haussa les épaules.
« Ne vous sentez pas dévalorisé. On peut établir la même comparaison avec les menstruations féminines, encore que ce n'est pas tout à fait pareil, et pour vous non plus. Ce que je veux dire, c'est que les saignements se produisent chez une femme en l'absence de grossesse, chez un oméga, c'est pour signaler que le corps est prêt à concevoir. Quoiqu'il en soit, c'est une conséquence du cycle utérin. Vous êtes un homme, mais vous êtes capable d'enfanter, vous avez un utérus, alors votre corps possède des caractéristiques propre à cela. Les omégas et les alphas fonctionnent différemment des bêtas, vos caractéristiques sexuelles ressemblent peut-être plus à celles des animaux, mais il ne faut pas oublier que nous sommes des mammifères, après tout. »
Allen semblait visiblement peu ravi d'apprendre tout ça, étant donné que ça lui causait de nouveaux problèmes, et avait l'air de réfléchir à ses propos. Inquiet par son manque de réaction, Kanda, lui, était énervé.
« Vous auriez pu nous le dire, bordel ! »
L'infirmière le remit à sa place, fronçant les sourcils :
« Comment étais-je censée savoir que vous n'étiez pas au courant ? Si vous avez d'autres questions, posez-les. »
Allen échangea un regard avec Kanda. L'épéiste se tut, le laissant s'exprimer, c'était lui que ça concernait. Allen demanda fermement, avec une sorte de colère, de sorte que Kanda comprit qu'il était lui aussi fâché qu'elle n'ait pris soin de leur en décocher mot :
« Est-ce que je risque d'avoir d'autres surprises du même genre ? Est-ce que j'ai d'autres particularités avec mon statut d'oméga ? »
La femme soupira.
« Et bien, si vous êtes vierge, ou peut-être l'avez-vous déjà expérimenté, vous risquez de saigner lors du premier nouage avec un alpha. » Devant le visage interdit du blandin, elle n'eut pas de mal à deviner qu'il n'en savait rien. « À cause de la formation et de la présence de votre utérus, une paroi s'est formée aussi. C'est une sorte d'hymen, mais ça ne se présente pas de la même façon que chez une fille, pour des raisons évidentes. Ce n'est pas placé au même endroit, et ce n'est pas la pénétration en elle-même qui peut être source de saignements, mais à la fin du rapport sexuel, lorsque l'alpha pénètre la cavité utérine pour se nouer à l'utérus, cette paroi se perce. Certains omégas n'en possèdent pas, tout comme il existe des femmes qui n'en possèdent pas également, même en ayant jamais eu de relations sexuelles. Ce n'est pas non plus un gage de virginité. »
À nouveau, Allen était troublé. Sans porter de jugement sur ce qu'il entendait, Kanda dut avouer qu'il était largué par un élément.
« C'est quoi, ça, le nouage ? »
Le maudit écarquilla les yeux et même l'infirmière eut l'air surprise.
« Tu ne sais pas ce que c'est ? » s'exclama Allen.
Kanda cracha son 'tch'. Conscient qu'il venait de passer pour un imbécile, il se crispa. Non, il n'avait jamais entendu parler de ça, et se demandait bien pourquoi son vieil idiot de maître ou les scientifiques de la branche Asiatique ne lui avaient rien dit, vu que ça concernait son statut d'alpha. Il croyait savoir ce qui était important. L'infirmière soupira, reprenant ses explications.
« Le nouage se produit à la fin de chaque relation sexuelle entre un alpha et un oméga. Le pénis s'étend à l'intérieur de l'anus, jusqu'à pénétrer la cavité utérine, dans laquelle il se coince pendant cinq à dix minutes en moyenne. C'est un moyen de garantir la fécondation, et c'est pour ça qu'il est primordial de se protéger lors des chaleurs. »
Pour le coup, Kanda comprenait ce que devait ressentir Moyashi, à apprendre des trucs comme ça. En vérité, il ne parvenait absolument pas à se représenter comment son pénis pouvait faire ça. Son expression dut, pour une rare fois, sortir de sa neutralité, car l'infirmière entreprit de le rassurer :
« C'est inconfortable au début, mais ça ne fait, en général, pas mal. Pas plus qu'à l'oméga, en tout cas. »
Kanda croisa les bras. Quand il verrait le vieux con, il l'engueulerait, en tout cas. Il aurait vraiment dû lui dire. Allen interpella encore l'infirmière :
« Il y a quelque chose d'autre ?
—Rien qui me vient à l'esprit. »
Kanda tiqua, et Allen rétorqua vivement :
« Ne vous fichez pas de nous, s'il vous plaît ! »
Avec sa politesse et sa colère mélangée, ce 's'il vous plaît' sonnait quelque peu flippant, et encore plus menaçant. Kanda était content que le Moyashi récupère un peu de véhémence.
« Je ne me fiche pas de vous. Maintenant, parlons de vos crises. Je vous ai déjà donné des consignes, mais vous semblez perturbé, et vous aurez sûrement besoin d'être apaisé. Là-dessus, j'imagine que vous savez comment vous calmer. J'espère que vous parvenez à mieux vous entendre. N'oubliez pas qu'il faut vous entraider, car en étant liés et en chaleurs, ça va tous les deux vous perturber. »
Kanda réagit :
« C'est normal que ses états émotionnels se répercutent sur moi ?
—C'est fréquent. Si vous le laissiez sentir vos émotions, il aurait aussi ce problème. Toujours est-il que vous allez vous désirer l'un l'autre, et j'ai amené avec moi de quoi vous protéger. »
Fouillant dans une petite mallette, elle en sortit un assemblage de préservatif. Kanda jugea qu'il y en avait beaucoup. Trop, alors qu'ils n'en utiliseraient même pas un.
« Prenez-les. »
Kanda croisa le regard du blandin. Il n'en voulait pas, mais en pensant à ses arguments et à ce que ses odeurs lui faisaient, il ne dit rien. Allen les saisit et les donna à Kanda, qui partit les ranger dans un tiroir.
« On s'en servira pas.
—Très bien, mais il faut mieux en avoir, au cas où. »
Le Japonais ne pouvait rien dire. L'Anglais se mordit la lèvre.
« Par rapport à mes crises… Je n'aurais plus mal ?
—Normalement, non. Pour parler franchement, vous serez surtout préoccupé par vos besoins sexuels.
—Comment je dois le gérer ? »
Allen n'était pas expérimenté par rapport à tout ça, et il avait besoin de conseils de quelqu'un qui s'y connaissait. Kanda, qui n'y connaissait pas grand-chose non plus, était également intéressé par la réponse de l'infirmière.
« Je vous l'ai déjà dit, un oméga en pleine chaleurs a besoin de boire, de se reposer, d'être dans un climat de confort émotionnel et physique, et de se soulager. C'est quelque chose qui peut être fait seul en temps normal, mais ça dépend aussi de l'oméga.
—Comment ça, 'ça dépend de l'oméga' ? rugit Kanda.
—Je ne vous en ai pas parlé pour ne pas vous inquiéter tant que ce n'était pas un problème, mais il y a certains omégas qui ne supportent que le toucher de leurs alphas durant leurs chaleurs, car leur besoin de l'autre est trop fort avec le lien. C'est encore plus vrai que votre oméga est fortement stressé. »
Allen se taisait, estomaqué, Kanda eut un long, très long, moment de flottement intellectuel.
« Vous êtes en train de dire que faudra peut-être que je le branle ? »
Ça n'allait simplement pas être possible. C'était ça, s'occuper d'un oméga en chaleurs ? Kanda était prêt à accepter de bien se comporter avec lui et d'être relativement sympa (très relativement, il restait lui) avec lui. Mais ça… Fallait pas déconner ! Le maudit ne le réprimanda même pas, preuve de son propre égarement.
« Les phéromones vous pousseront peut-être à bien plus que ça. Je suis sincèrement embarrassée pour vous. » Elle avait en outre un air contrit. « Je sais que vous n'êtes pas un couple, et vous n'êtes pas en bon terme. Ça rend la situation d'autant plus difficile, ce pourquoi je vous recommandais de vous entendre. Peut-être que vous ne serez pas concernés par ce problème, je n'en sais strictement rien, mais je vous en informe. La plupart des gens liés entretiennent des relations, ou se mettent d'accord sur des limites lors de ces moments. Vous devriez voir comment les choses se passent et en établir, mais je ne peux rien vous dire de plus. À part que, bien sûr, vous ne devez en aucun cas vous forcer à quoique ce soit, l'un comme l'autre. S'il y a encore un autre problème, rappelez-moi. »
Elle partit, Kanda claquant la porte derrière elle, fulminant. Le maudit était tête basse et yeux éteints. Kanda ne savait plus comment réagir, et était définitivement dépassé par tout ça.
« Écoute, Moyashi, je crois que va falloir qu'on cause sérieusement. Je vais te le dire direct, je sais pu quoi faire. J'étais pas au courant de ça, moi. »
Allen releva la tête vers lui, ayant un regard d'impuissance. Kanda eut peur qu'il ne recommence à pleurer, mais ce ne fut pas le cas.
« Cette fois-ci tu pars ? »
Kanda se fâcha.
« Arrête avec ça, putain ! C'est pas de ça que je veux qu'on cause. C'est de ce qu'on va faire. »
Allen soupira. Ses pupilles tremblaient. Rien ne débordait, mais…
« Tu peux commencer par te rapprocher, s'il te plaît ? »
…Sa voix était quand même faible. Kanda se rassit à côté de lui. Allen tendit son bras dans sa direction. Kanda approcha le sien. Ni l'un ni l'autre n'osait concrétiser de geste, Kanda car il ne voulait pas non plus initier ces contacts, bien qu'il lui faille les tolérer, et Allen car il ne voulait pas lui demander de le faire, dans un souci d'orgueil, ridicule à ce stade, mais également tout aussi compréhensible. Kanda lâcha un soupir.
« Ça me fait chier. »
Allen fit de même.
« Moi aussi. J'en ai vraiment marre de ces chaleurs. »
Sa voix était atone. D'un geste vacillant, l'oméga avança sa main, qu'il posa au-dessus de celle de l'alpha. Toujours ce même regard déchiré. Kanda ne le repoussa pas.
« Kanda… Je vais te le redemander. Tu as dit que tu acceptais qu'on s'entende, tu as dit qu'on serait 'copains', mais je veux vraiment vérifier que tu n'étais pas influencé. Tu l'es toujours ? »
Le kendoka était bien conscient qu'il ne pouvait pas reculer.
« Tch. Oui, je le suis.
—Malgré tout ça ?
—Malgré tout ça, Moyashi. Ne me fais pas répéter. »
Allen serra sa main. Il avala sa salive, et pencha sa tête en arrière. Kanda savait qu'il retenait des larmes. Il renifla.
« Tu t'es fâché quand j'ai dit qu'on s'amusait bien et tu me dis qu'on sera amis pour mes chaleurs… T'es hyper contradictoire, tu sais ? »
Kanda eut un rictus semi-irrité.
« C'est parce que c'est moi qui l'ai décidé, imbécile de Moyashi, et c'est parce qu'on se parlera plus après. Ce qui se passera durant tes chaleurs restera là. On oubliera après. C'est ce que tu veux aussi, non ? »
Allen eut un fin sourire, sans joie.
« Oui, c'est mieux comme ça, autant pour toi que moi. Donc tu ne t'énerveras plus contre moi si on a une interaction positive, tu agiras comme un ami ?
—Oui, mais je te préviens, je suis pas bon comme ami, Moyashi. »
Allen lui fit encore un sourire, plus sincère. C'était juste comme le premier soir où ils avaient été réunis, Kanda assis à côté d'Allen à lui tenir la main avec plus ou moins de bonne volonté alors que la nuit tombait et qu'ils réalisaient tous deux qu'ils étaient dans cette immense mouise ensemble. Kanda aborda vite le sujet contrariant, sans prendre de gants.
« Pour tes crises, vaut mieux que tu essaies de te branler tout seul. Honnêtement, j'aime pas tellement les moments câlins, alors ça, j'ai pas envie de m'y lancer. Si je dois t'aider… On verra bien ce que faudra faire. Essaie d'abord. »
Ça valait mieux aussi car Kanda avait peur de se laisser emporter par les phéromones si le blandin prenait du plaisir devant lui et grâce à lui. Allen fronça le nez. Kanda sentit un relent d'odeur apeurée.
« Je comptais rien te demander pour ça, Bakanda ! Mais honnêtement, j'ai aucune envie de me toucher dans ces conditions. »
Kanda le toisa.
« Il va bien falloir.
—Mais…
—Faut d'abord te détendre. »
Allen secoua la tête. Ses odeurs émotionnelles s'emballaient encore.
« Tu veux que je parle honnêtement, moi aussi ?! Je viens d'apprendre que mon anatomie comporte autant de similitudes avec les femmes qu'avec les hommes. Comment tu veux que je me détende ?! Je suis complètement perdu ! »
Kanda ôta sa main de sous la sienne et la plaça sous son menton. Le gamin venait de baisser la tête.
« Pourquoi t'es perdu ? T'es toujours un mec, Moyashi. T'es juste un oméga. »
Allen était surpris, mais il était tout aussi irrité.
« C'est facile pour toi de dire ça, tu es un alpha, tu peux pas comprendre ce que je ressens ! » Il avait du ressentiment. « Puis tu veux dire quoi par 't'es juste un oméga' ? Qu'est-ce que c'est, un oméga, pour toi ? J'aimerais être un garçon comme tous les autres, je veux pas qu'on puisse penser de moi que je suis une fille avec un pénis, ni que je suis un mélange garçon-fille, je suis un homme, Kanda ! »
Le Japonais leva les deux sourcils, sa main quittant le menton d'Allen. Quand avait-il dit le contraire ? Il était justement en train d'encourager le maudit à ne pas penser ça. Puis il vit qu'il était rouge de honte, de colère, et de tristesse mêlées. Ses yeux rougissaient, il se retenait avec peine de pleurer. Pour l'heure, c'était ses propres doutes qu'il avait exprimé. Kanda grogna.
« Est-ce que tu t'es déjà considéré comme une fille avant aujourd'hui, Moyashi ?
—Je t'interdis de dire que je me considère comme une fille !
—Alors ne commence pas à dire ça. Tu dis vraiment beaucoup de conneries aujourd'hui, continue pas. »
Allen se tut, comprenant parfaitement ce à quoi l'alpha faisait allusion. Kanda poursuivit :
« Pour moi, un oméga est pas moins un homme que moi, juste différent. Ces problèmes de qui est un homme et qui ne l'est pas me laissent indifférent. T'as une bite, t'es un homme. Et si ce n'était pas le cas et que tu voudrais quand même être un homme, je vois pas l'intérêt mais au fond, je m'en bats les noix. »
Allen était vraiment étonné.
« Kanda, tu…
—Quoi ? »
Allen déglutit.
« Je ne t'imaginais pas être du genre à penser ça. C'est plutôt le genre de trucs que je pense, moi… Alors… »
Kanda haussa les épaules. Ils étaient d'accord sur un point. Il le toisa avec un dédain encoléré, détachant lentement ses mots :
« Avoir honte d'être un oméga te mènera à rien, de toute façon, espèce de con. T'es pas comme les autres mecs, ça te perturbe, mais tu dois pas douter de ce que t'es, sinon, t'es pas rendu. » Kanda marqua une pause. « Tch. J'viens bien d'apprendre que ma bite peut se nouer, et j'en fais pas toute une histoire. »
Allen rougit.
« Mais t'es con, Kanda ?! Ça n'a rien à voir avec ce que j'ai, moi !
—Toi aussi, t'es con. C'est pas pour autant que ça me plaît, Baka Moyashi. »
Allen leva les yeux au ciel, puis lui lança un regard que Kanda ne comprit pas. Pas tout de suite du moins.
« Merci, Bakanda. C'est bizarre alors que tu m'insultes, mais tu m'as remonté le moral. Pas complètement, mais un peu. »
Il lui fit un sourire. De la gratitude. Allen tapota la place à côté de lui. Kanda s'y coucha. Il savait qu'il devrait le détendre, au moins jusqu'à ce que son odeur de peur insoutenable disparaisse. Moyashi avait toujours besoin de profiter de son odeur. Aussi, d'un ton indolent, il demanda :
« Tu as besoin de me sentir, Moyashi ? »
Allen baissa les yeux en hochant la tête. Kanda l'attira à lui. Le plus jeune sembla apprécier l'étreinte, frémissant longuement contre lui. Sa crise avait été stoppée par la peur, sa douche et les révélations de l'infirmière, mais elle menaçait de revenir. En sentant les phéromones l'envahir, Kanda fronça le nez. C'était si fort. Il grommela :
« T'excite pas comme tout à l'heure. »
Cramoisi, le blandin rétorqua, fermant les yeux en s'enfouissant contre lui, bouffé d'une honte à l'odeur putride :
« J'ai pas les mots pour dire à quel point je suis désolé pour m'être laissé emporter comme ça. Ça… ça venait d'arriver et je n'ai compris que lorsque tu m'as repoussé… Je te demande pardon, je n'aurai jamais fait ça consciencieusement. Je me sens si stupide, j'ai l'impression de ne pas valoir mieux qu'une bête… Mon dieu, Kanda, je suis si désolé… ! »
Kanda plaça une main dans son dos. Il pouvait comprendre cette impuissance et cette colère de ne pas pouvoir se contrôler. Lui l'avait ressenti pour moins que ça.
« C'est bon. Je le sais. »
Ils restèrent dans cette position quelques instants, Allen le humant agréablement, Kanda essayant de ne pas perdre la face avec le déferlement d'odeurs. Moyashi n'avait jamais senti si bon. Et ça le faisait encore plus chier. Retenir son irritation était difficile, mais Kanda n'avait pas le choix. Bientôt, le blandin releva des yeux perdus sur lui, où Kanda vit briller la même absence que la dernière fois, mais contenue.
« Kanda… Je crois que… »
Allen se mordit la lèvre.
« Ça arrive ? »
L'oméga hocha vivement la tête. Kanda vit la panique dans ses yeux.
« Qu'est-ce qu'on fait, Kanda ? »
Le kendoka le regarda frémir longuement, alors qu'un gémissement sortit de ses lèvres lorsqu'il frôla involontairement ses côtes en bougeant. Putain. Ce son suffit pour le faire frémir également.
Le blandin répéta les mêmes paroles, une main accrochée à Kanda. Son agitation interne se reflétait amplement dans son regard. Une vraie tempête grisâtre.
« Kanda, mon corps… Je… »
Il ne lui obéissait plus. Allen déglutit difficilement. Il était plus que perdu. Il aurait aimé dire qu'il se sentait proche d'une rupture dans son esprit, il avait traversé ce stade au moment où ses crises s'étaient déclenchées, au moment où il avait vu le sang, mais à présent il ne ressentait plus rien. Juste des pensées teintés de sentiments qui l'avaient traversé mais ne l'habitaient plus à présent. Que du vide. Une mollesse de l'âme abîmée. Du néant.
Allen avait été très perturbé aujourd'hui. Il avait été déboussolé de s'être retrouvé seul la moitié de l'après-midi, très largué par les réactions de Kanda, qui passait du jour à la nuit d'orage avec lui, puis de la tempête au grand jour brillant. Ils avaient convenu d'une amitié, mais Allen hésitait à avoir confiance. Il avait peur que s'il disait quoique ce soit qui déplaisait à Kanda, quelque chose qui allait trop loin, l'autre ne le rabaisse et ne recherche à l'éloigner avec violence. Il voulait croire en ses belles paroles sur les promesses, mais c'était dur… Il avait été perturbé par sa perte de contrôle, par sa réaction de se frotter contre Kanda comme un animal. Il ne supporterait plus ça à nouveau. À chaque fois qu'il perdait le contrôle, qu'il pleurait comme un bébé ou se laissait aller, commettait le moindre impair, il se disait que c'était la dernière fois, qu'il arriverait à redevenir lui, mais il ne pouvait pas.
Ses chaleurs tuaient quelque chose en lui, et Allen avait peur. Lorsqu'il s'était frotté contre Kanda comme un vulgaire chien en rut, il avait senti que son estime de lui-même s'effondrait. Il avait si honte de ce que l'alpha devait penser de lui et de ce qui lui-même pensait. Il avait peur de ne pas s'en sortir indemne. Ses problèmes restaient les mêmes. Concilier son caractère de battant, de jeune homme qui voulait avancer plus que tout, avec l'affaiblissement de ses chaleurs. Mais au fond, il réalisait que Kanda avait raison. Les craintes qui le laminaient avant ses chaleurs ressortaient. Il n'avait pas assez accordé à ses sentiments de s'exprimer, s'était trop négligé, et il payait au centuple. Tout s'entortillait en lui et finissait lentement par disparaître.
Ce qu'avait révélé l'infirmière l'avait laissé pour le moins sur le carreau. Ça ressemblait à une mauvaise blague. Imaginer qu'il ne serait peut-être pas capable de se toucher lui-même, imaginer qu'il ne serait peut-être pas maître de son plaisir. Que ce serait encore l'alpha, que Kanda serait le seul à pouvoir le contrôler, le seul à pouvoir l'apaiser, le seul à avoir de l'effet sur lui. Qu'il viendrait à posséder son corps, la moindre parcelle de lui-même. Allen était profondément indigné, il ne voulait pas de ces réactions-là, ne voulait pas que ça se passe comme ça. Mais il ne pouvait rien faire si ça devenait le cas, et l'impuissance le rongeait.
Quant au reste, il le mettait dans le même sac. C'était déplaisant et si perturbant. Pas que ça le dérangeait tant que ça, au fond, il se fichait de posséder ou non une sorte d'hymen, se fichait beaucoup moins des saignements en début de chaleurs, mais ce qu'il n'aimait pas, c'était que ces caractéristiques le rapprochait des femmes. Il n'avait rien contre les femmes et n'avait jamais eu de doute sur son identité sexuelle : il était un homme, il avait toujours parlé de lui comme un garçon, et quand il était petit, il se fâchait si quiconque lui disait de ne pas faire quelque chose parce qu'il était un oméga, ou essayait de le traiter comme une fillette. Il avait toujours été contre ce fait d'être traité différemment des autres garçons à cause de son statut, et l'idée même que les omégas étaient si différents. Jusqu'à présent, rien ne différait chez lui. Certes, ces caractéristiques ne changeaient pas grand-chose, au final. Il savait que ses doutes premiers avaient été stupides. Son petit dilemme interne était stupide. Mais il n'aimait simplement pas que ces choses donnent raison à ceux qui pensaient qu'un oméga était féminin, et le fait qu'il ne prenait conscience de cette part de lui-même que maintenant le perturbait et le foutait littéralement en pétard. Encore plus que l'infirmière lui avait appris ça devant un alpha. Fusse-t-il son lié, c'était Kanda. Sa fierté avait été blessée, et si c'était bête, il avait ressenti un besoin de s'affirmer face à Kanda. Besoin inutile, puisque, ô surprise, le Japonais avait un avis plutôt ouvert sur la question.
Grâce à ses paroles, il avait réussi à se reprendre et savait qu'il ne devait pas avoir honte de lui. Au contraire, il devait en tirer une fierté et être plus fort. Au fond, il savait qu'il ferait mieux de recourir au même procédé avec tout ce qu'il endurait, mais il lui faudrait du temps pour encaisser ça. Or, il avait l'impression d'en manquer. Son calme apparent, sa clarté d'esprit, n'étaient que le fruit d'une panique folle qu'il refoulait pour que sa raison subsiste, s'il la lâchait… Il avait peur de ne pas pouvoir s'en remettre.
Alors, au comble de la contradiction, l'oméga choisissait consciencieusement de se remettre à l'alpha. Il n'avait plus la force de lutter, plus la force de gérer toute cette fichue merde. En lui demandant ce qu'ils devaient faire, il lui laissait le contrôle et essayait de voir s'il pouvait vraiment compter sur lui, s'il pouvait avoir confiance. C'était comme un test, une sorte de test très dangereux, et il espérait qu'il ne le regrettait pas. Allen n'était pas le genre à s'en remettre à un autre. Jusqu'à présent, il avait toujours nié son besoin de se laisser aller avec quelqu'un. Mais avec tout ce qui s'était passé aujourd'hui entre eux, c'était le moment où jamais de voir s'il pouvait réellement accepter qu'il soit son alpha dans cette situation. Que Kanda soit celui avec qui il dénudait sa fierté et posait ses armes semblait si dérisoire, mais il était sa seule source de soutien, comme ils étaient liés. Allen n'en pouvait plus, cette journée était trop longue, et en conséquence, il acceptait de montrer qu'il avait besoin d'aide. Cette crise, son corps qui le chatouillait de partout et ses picotements qui naissaient intimement… Allen avait l'impression qu'il pourrait perdre l'esprit.
« Qu'est-ce que… je fais, Kanda ? »
Sa voix pleura pratiquement le nom du Japonais si ses yeux s'y refusaient. Ce dernier le poussa un peu plus en arrière.
« Faut que tu te touches, Moyashi. »
Allen secoua violemment la tête. Son corps réclamait de l'attention, mais il n'avait pas la moindre envie de se prendre en main ou de se caresser. Il n'était pas dans cet état d'excitation consciente et assumée, il ne pourrait jamais faire ça comme ça… !
« Je ne suis pas assez détendu, je ne peux pas… »
Tout ce qu'il voulait, c'était sentir Kanda. Ça stimulait sa crise, mais il voulait sentir Kanda. L'Anglais gémit au moment où il sentit la main du brun se poser sur sa hanche et le ramener contre lui. Comment Kanda pouvait lui faire tant d'effet avec rien qu'un toucher ? Il se perdait. Définitivement. Il se raccrochait à son odeur. L'Asiatique respirait un peu plus fort, mais Allen ne s'en inquiéta pas.
« Moyashi, tu devrais vraiment faire passer ta crise. Ça ne s'arrangera pas si tu ne fais rien.
—Je veux pas… »
Il s'accrochait au débardeur de Kanda, respirant son odeur à plein nez. Kanda le repoussa à nouveau, retenant son visage entre ses paumes.
« Fais pas l'enfant, Moyashi. Tu dois le faire. »
Sa voix était si sévère. Il le sentait éloigné. Ils avaient beau avoir décidé d'être 'amis', ça venait juste de se faire, tout arrivait si vite et ça ne changeait pas grand-chose. Mais Allen avait besoin de se sentir compris.
« Mais Kanda, s'il te plaît, ne me force pas à… »
Il chercha de l'indulgence sur le visage de l'autre, mais il avait droit à cette expression perpétuellement fermée. Kanda se contenta de souligner l'évidence.
« Tu as peur. »
Allen ouvrit de grands yeux.
« Non. J'ai juste pas envie. »
Kanda ne laissa pas son visage partir, même lorsqu'Allen voulut se dégager.
« Si, tu as peur, je le sens alors ça sert à rien de me le cacher.
—Et alors, qu'est-ce que ça fait que j'ai peur de toute façon ?! »
Il avait levé la voix. Allen ne comprenait pas où voulait en venir Kanda. Le Japonais grogna.
« J'aime pas ceux qui mentent et font semblant d'être forts alors qu'ils tremblent de trouille. Tu dois dire ce que tu penses vraiment, sinon je pourrais pas t'aider, triple andouille de Moyashi. »
En quoi ça changerait quoique ce soit à leur problème ? Alors qu'il avait réussi à se reprendre, pourquoi Kanda le voulait à nouveau faible ?
« Je veux juste ton odeur pour me calmer.
—Mon odeur te calme pas, elle t'excite encore plus. Et il faut y faire quelque chose. Il va falloir qu'on prenne une décision, et que tu arrêtes de repousser ça parce que tu flippes.
—Je ne veux pas y faire quelque chose ! Que j'ai peur ou pas, ça change pas le problème !
—Il faut te calmer Moyashi, voilà ce que ça change. »
Ses yeux bleus sombres avaient l'air de sonder son âme. L'oméga se sentit agressé, et indigné. Il voulait que Kanda l'aide, pas qu'il joue encore à l'enfoncer. Prenant une longue inspiration, Allen tonna :
« C'est toi qui m'énerve, et maintenant arrête de me dire ça ! Je ne le supporte pas, tu me stresses, c'est infernal ! Je n'en peux plus, Kanda. Je ne sais pas quoi faire, mais je ne veux pas craquer, je l'ai trop fait ! Je… Je ne maîtrise plus mon corps, je ne sais pas comment réagir avec toi, j'ai besoin que tu m'aides, j'ai besoin d'avoir confiance en toi. Laisse-moi juste me calmer de la façon dont j'en ai envie ! »
Kanda se tut. Il laissa Allen s'enfouir contre son torse.
« J'avais raison. Tu sens tout de suite meilleur quand tu dis ce que tu penses. »
Allen avait effectivement libéré ses pensées. Reprenant son souffle, il lâcha, faisant fi de toute politesse :
« Je t'emmerde, Bakanda. »
Kanda eut un rictus.
« Moi aussi. Maintenant, reprends-toi, Moyashi. Tu peux avoir confiance, mais c'est à toi de décider de quoi faire. Pas à moi. »
Allen baissa les yeux.
« Je…Je sais que c'est à moi de le faire, Bakanda ! Mais je… sais pas…
—Il va falloir prendre une décision.
—T'es marrant, toi ! C'est super embarrassant pour moi !
—Tu veux que je sorte ou que je reste avec toi ? »
Se retrouver seul terrifia Allen. Pas encore. Mais faire ça avec Kanda à côté…
« Non !
—Non à quoi, Moyashi ? »
Allen se cacha le visage dans ses mains, mais Kanda les lui ôta de force. Son expression se contractait, signe d'énervement.
« Je sais pas… Kanda, mets-toi à ma place deux minutes !
—T'es en chaleur, tu dois le faire, ou tu vas encore être malade. » L'Asiatique soupira. « Est-ce que tu t'es déjà touché, Moyashi ? »
Allen devint cramoisi. Mais pourquoi lui posait-il cette question ?! Sans doute qu'il voulait savoir si c'était totalement nouveau pour lui, ou s'il était déjà un minimum expérimenté, mais bon sang…
« K-Kanda… ! »
Il sentait son rougissement s'étendre. Kanda ne s'adoucit pas.
« Réponds, ou je te découpe. »
Allen ne répondit pas. C'était trop gênant.
« Moyashi, réponds, bordel, je suis un mec, moi aussi ! Si tu l'as déjà fait, je ne dirai rien, et sinon, je m'en fiche aussi, c'est toi que ça regarde. »
Évitant au mieux de croiser le regard du kendoka, Allen murmura :
« Ça m'arrive…
—Bon, alors fais comme d'habitude. »
Il secoua violemment la tête de gauche à droite.
« Mais Kanda… »
Le Japonais parut comprendre.
« Je vais partir de la chambre.
—Non, s'il te plaît, non !
—Je reste à côté alors ? »
Allen était perdu. Il sentait les larmes remonter, et s'il refusait de les laisser sortir encore, s'il voulait résister, il n'y arriverait plus bien longtemps.
« Je…
—Merde, Moyashi, tu me soûles, je me tire, je reviens dans dix minutes, t'as intérêt à t'être fini d'ici là. »
En le voyant se lever, Allen agrippa son bras de toutes ses forces en suppliant :
« Kanda, s'il te plaît, Kanda, je vais le faire, mais t'en vas pas ! … Ne regarde pas… »
L'alpha avait une expression meurtrière, Allen voyait bien qu'il n'aimait pas être retenu de force. Allen s'en excusa intérieurement, mais était trop sonné pour le dire à voix-haute. Il lâcha Kanda, le Japonais restant assis au bord du lit, mais tourné dans l'autre direction, sa main glissant dans la sienne. C'était la première fois qu'il était celui qui initiait réellement leurs contacts physiques, à part cette fois où il était à moitié endormi. Allen devinait qu'il avait soit conscience qu'il avait besoin d'être rassuré, soit qu'il était influencé.
Il eut peur.
« C'est bon, Moyashi. Je me tourne. Je te tiens la main. Fais ce que t'as à faire. »
Allen hésita. Il fixait son propre bas de pyjama, avec la protubérance certaine qui se dessinait au niveau de l'entrejambe. L'odeur de Kanda l'avait excité, il avait envie d'être soulagé, mais il ne se sentait pas apte à le faire. Son autre main s'approchant de l'élastique de son vêtement, il jeta un œil à Kanda, de dos.
« C'est vraiment difficile… »
La main du Japonais serra méchamment la sienne, et il rugit :
« Tu sais quand même où est ta bite et ce que tu dois faire avec, bordel !
—Ça n'a rien à voir ! »
Kanda était implacable.
« Fais-le, ou je ne resterais pas gentil avec toi longtemps. »
Allen avait envie de lui rétorquer qu'il ne l'était pas, de lui demander ce qu'il voulait dire par cette menace, mais si, Kanda était incroyablement gentil pour le moment.
Il avait si peur, il était au comble de la gêne, et ne savait pas comment il faisait pour ne pas sombrer définitivement.
Allen passa enfin une main tremblante dans son caleçon. L'approchant de son pénis érigé, il essaya de le caresser comme il le faisait habituellement, l'enfermant dans sa paume et mimant un va-et-vient. Il poussa un petit gémissement, mais la sensation de plaisir n'était pas comme à l'accoutumée. Avec ses chaleurs, elle aurait dû être plus forte, ou équivalente. Elle était moindre. Pourtant, Allen s'acharna. Il ne voulait pas se reposer sur l'idée de compter sur Kanda, en outre, cette idée était loin de le reposer. Il ne pouvait pas faire ça, il ne voulait pas lui donner tout contrôle sur lui, ne voulait pas ne pas se maîtriser, au moins un peu. Il avait déjà réfléchi à l'idée de coucher avec Kanda par accident, s'y était résigné comme une possibilité déplaisante, mais le fait qu'il ne puisse même pas se masturber… Non, Allen avait cru qu'il pourrait au moins se gérer personnellement. Ils ne pouvaient pas faire ça. Paniquant de plus en plus en se rendant compte qu'il ne parvenait pas à se faire jouir, et que ses caresses devenues rudes finissaient par lui apporter plus de douleur que de plaisir, il eut peur d'être un de ces omégas incapables de jouir sans le toucher de leurs alphas. Encore à cause de ce lien. Allen se sentait si en colère contre le lien, et contre ce statut, qu'il se jura de faire disparaître son lien avec Kanda après ses chaleurs. Il ne voulait plus jamais avoir à endurer ça.
Il voyait Kanda raidit, mais en apparence si neutre, et Allen se mit à pleurer. Il n'y arriverait pas.
« Je ne peux pas… Je suis désolé… Je ne peux pas.
—Tu ne peux pas parce que tu as peur ou parce que tu n'y arrives vraiment pas ? »
Une certaine froideur était dans sa voix. Allen se sentait horriblement perdu. Seul, perdu face à un autre.
« Je ne peux pas parce que ça fait mal… »
Kanda soupira. Il lâcha sa main, et se retourna.
« Laisse-moi faire, alors. »
Allen cacha son entrejambe, secouant la tête sans s'arrêter.
« Ne me touche pas. Je veux pas, Bakanda. Je veux pas. Je veux qu'on laisse la crise passer toute seule, je t'en supplie, je… »
Ses larmes lui brouillaient la vue. Il voulait mourir, tout pour ne plus subir ça. Kanda gronda :
« Il faut que tu te soulages, merde, ça passera pas tout seul ! C'est perturbant pour toi, je sais, et ça m'enchante pas non plus, mais laisse-moi faire.
—Ne me touche pas, Kanda ! »
Allen commençait à avoir très peur. Kanda attrapa ses mains et grimpa sur le lit. Il le maintint sous lui. Allen se débattit, effrayé en voyant qu'il n'arrivait pas à prendre le dessus.
« Tu perds le contrôle, avoue-le ! Kanda, reprends-toi, pitié, tu n'en as aucune envie et je ne veux pas que… »
L'alpha colla pratiquement son visage au sien, le laissant observer ses réactions du plus près. Kanda appuyait ses mots :
« Oui, j'en ai aucune putain d'envie, et j'irai pas plus loin. Regarde-moi, je me contrôle parfaitement. » Son visage était des plus résignés, le regret étant visible. Il ne le faisait pas de gaieté de cœur. « Si tu n'arrives pas à le faire, je le ferai. Rappelle-toi que l'infirmière a prévenu que ça arrivait. C'est parce qu'on est liés. Aie confiance en moi, Moyashi. »
Allen voulait bien le croire. Mais il était si perdu…
« C'est pas que je ne te fais pas confiance, c'est embarrassant ! E-t-t Kanda, p-pourquoi tu ferais ça pour moi… ? »
Les yeux du maudit tremblaient, de même que son cœur. C'était une question bête, il en avait conscience, il savait pourquoi Kanda ferait ça pour lui. À cause du lien. Seulement, comment pourrait-il encore supporter d'être avec Kanda s'ils faisaient ça dans de telles conditions… ? Comment pourrait-il se supporter lui-même ? Ce n'était pas aussi radical que coucher ensemble par accident, Allen le savait aussi. Mais il n'était absolument pas prêt à ce qu'un autre le touche ainsi alors qu'il en était incapable seul, alors que sa crise était si violente et qu'il était si perdu. Le blandin n'était pas prêt à ce que ça arrive maintenant !
Kanda était crispé comme jamais, Allen voyait qu'il forçait pour avoir une expression indifférente et qu'il était, lui aussi, dépassé par tout ça. Ils étaient aussi impuissants l'un que l'autre. Ça rassura brièvement Allen, à peine.
« Tout ça, c'est parce que je suis ton foutu alpha. On l'a dit, ce qui se passe pendant tes chaleurs restera pendant tes chaleurs. Ça me fait pas plaisir. Alors calme-toi, et laisse-moi t'aider. Tu as confiance, Baka Moyashi ? »
Allen fut convaincu.
Essayant de se calmer, de se convaincre que c'était normal entre un alpha et un oméga liés, qu'ils n'y pouvaient rien, Allen hocha anxieusement la tête et ne bougea plus.
Il consentit à s'abandonner au brun, à se laisser faire comme si Kanda était réellement son alpha. Il n'avait pas le choix, alors autant être fort et l'endurer.
Les mains de l'alpha se posèrent sur son corps, et alors que ses larmes voulurent sortir à nouveau à cause de la honte, Kanda posa une main sur sa joue. Il redressait son visage pour croiser son regard, avec une certaine délicatesse. Allen ne l'aurait pas imaginé être doux dans un moment pareil… Il n'aurait jamais vraiment imaginé un moment pareil avec lui, en fait, mais s'il avait dû… Kanda n'avait vraiment pas le profil du type doux. En vérité, si Allen avait été en meilleur état, et que le contexte avait été autre, il lui aurait demandé sérieusement de ne pas lui arracher le pénis, comme Kanda était toujours brutal. La pensée de la tête de l'épéiste face à une telle demande lui tira un faible sentiment amusé. Un peu d'humour ne tuait pas dans sa situation.
Pourtant, le Japonais le colla tout contre lui, et finalement, le souleva de manière à l'installer entre ses jambes. Ainsi, Allen profitait de sa chaleur et son contact mais ne voyait pas son visage. Il essayait de rendre la chose moins embarrassante pour lui, et plus confortable. Allen était étourdi, mais reconnaissant. C'était toutefois humiliant. Il aurait voulu plus de contrôle dans un tel rapport. Être maître de ses réactions. Avoir plus d'initiative. Allen n'était certainement pas quelqu'un de passif. Et encore plus avec Kanda, à cause de leur petite rivalité et de la façon dont l'autre faisait réagir sa fierté à force de la heurter. Ironiquement, Kanda était devenu celui devant qui il ne cessait d'étaler les parts les plus faibles de lui-même. Il était le seul.
Égaré dans le silence, ses yeux restèrent fixés sur la main de l'Asiatique qui s'anima en lui donnant du plaisir, et ce fut bon. Ses gémissements firent bientôt tressauter ses cuisses et cambrer son dos, gémir sa bouche et la fièvre laminait son visage. Il se laissa complètement faire, ses mains osant à peine s'agripper aux cuisses de Kanda.
S'il commençait à se tranquilliser, la morsure du stress demeurait dans sa cage thoracique et son ventre. Il avait peur pour 'après'.
Enfin, la délivrance arriva, Allen tourna son cou en arrière de manière à regarder le visage de son bourreau.
Il le découvrit blasé comme on pouvait s'y attendre, mais en voyant son air perdu, Allen le vit se pencher, lèvres tendues qui embrassèrent son front. Allen goûta son orgasme accompagné du baiser de Kanda. Le Japonais sortit du lit, dérangeant leur position, pour chercher de quoi les nettoyer, et il revint finalement à ses côtés, toujours si proche, toujours si étrangement doux. Car il y avait de la brusquerie, mais il était prévenant. Il prenait soin de lui. Ça se sentait parfaitement. Allen sentit ses peurs s'évanouir, il se sentit si bien qu'il s'endormit contre Kanda instantanément, sans aucune autre pensée. Un 'merci' franchit néanmoins ses lèvres. Sa dernière sensation fut la main du brun qui se posa sur son crâne. Il ne caressait pas. Mais de sa poigne lourde, Allen se sentait réconforté.
Kanda, lui, était mortifié. Il en avait vécu des situations glauques et pénibles depuis sa 'naissance', mais tout cela virait au cauchemar. Il savait qu'il devrait s'expliquer pour ce geste au réveil d'Allen. Ce serait encore une humiliation. La réponse était la suivante : il n'avait rien trouvé de mieux. Il s'était rappelé des senteurs émotionnelles calmes lorsque Lenalee embrassait le blandin. Pour éviter qu'il ne panique, si son odeur et le plaisir ne suffisaient pas à le calmer, il avait rajouté un contact affectif. Kanda se faisait l'effet d'être aussi débile que Moyashi, mais il avait dû réagir. Depuis que l'infirmière était partie, les odeurs du gamin étaient terribles. Les phéromones et le lien étaient pour beaucoup dans les réactions de Kanda. Ce désir de protection envers le blandin avait muté en affection sous sa propre excitation. Les putains de phéromones de merde de l'oméga lui faisaient toujours cet effet dégueulasse. Quant à sa douceur avec le gosse, c'était simple. Il n'avait pas besoin d'être Sherlock Holmes pour deviner à ses réactions qu'il n'était pas expérimenté, et même s'il l'avait été, Kanda avait beau n'être pas commode et peu porté sur les échanges affectifs, il savait très bien qu'il y avait des contextes où il fallait être un minimum complaisant. Moyashi était terrifié, sa terreur était sans aucun précédent. C'était aussi pour sa propre culpabilité… Moyashi l'avait imploré, et quand bien même il avait fini par accepter, Kanda avait la sensation de l'avoir violé. Il n'avait pas tenu à le faire, mais un oméga en chaleurs devait être soulagé, et si Moyashi ne pouvait pas le faire seul, alors en tant qu'alpha… Kanda grinçait des dents. Ça le foutait en colère, il ne savait pas contre qui, mais il ressentait une fureur meurtrière.
Kanda en était arrivé à un point où il avait compris qu'il devrait faire passer le blandin avant lui-même. Tout arrivait si vite, mais il devait s'adapter. D'autant que Kanda avait toujours le sentiment d'avoir aggravé les choses en le laissant seul. Il savait qu'il lui avait fait peur, dans sa pulsion égoïste de lui faire du mal, et il se blâmait pour ça. Le gosse était perdu. Il avait déclaré qu'il voulait mourir, avait voulu qu'il prenne une décision pour lui… Ça ne lui ressemblait pas. Moyashi allait avoir besoin d'être épaulé pour ne pas ressortir de ses chaleurs avec des séquelles et complètement bousillé. Kanda n'aimait toujours pas ce gamin, il ne savait pas dans quoi il se lançait en ayant accepté son amitié temporairement, et si maintenant il devait l'aider à se soulager… Ils n'étaient, ni l'un ni l'autre, prêts pour ce genre de choses. Kanda ne voulait quand même pas qu'il soit détruit, et c'était en train de se faire. Les chaleurs gangrenaient son être.
Ces sentiments le partageaient.
Contemplant le corps endormi de l'oméga contre lui, Kanda passa son bras dans son dos afin de le maintenir proche. Allen ne se réveilla pas, mais il frotta doucement son visage contre son torse, avec une douce expression de bien-être. Pour l'heure, Kanda préférait ça. Tout ce qu'il espérait était qu'Allen soit soulagé, et qu'il ne ferait pas de deuxième crise directement. Kanda allait avoir besoin de temps pour récupérer.
À suivre...
J'avais prévenu pour le côté WTF :')).
Bon bon, j'imagine qu'après tout ça vous devez avoir des réactions et vous étonner de ce virage, aussi de certaines idées. Je vais commencer d'une façon linéaire, avec le passage où Allen saigne et la visite de l'infirmière. Je voulais faire bref car je tenais juste à nuancer mais la note est très longueeeee, je suis désolée, mais s'il vous plait lisez jusqu'au bout avant de consolider votre avis, c'est important :).
Les omégas ont donc un utérus, et comme expliqué dans le texte, si l'utérus est fertile et fonctionne, il faut bien qu'il y ait des cycles et qu'il ne marche pas tout seul, si on veut du réalisme. Le prompt de l'omégaverse introduit les chaleurs, mais je trouvais logique de pousser et d'introduire des saignements avec l'idée qu'il y a bel et bien certains animaux qui perdent du sang pendant leurs chaleurs, et que si on suit la logique de l'utérus chez une femme, le corps humain fonctionne en sécrétant du sang, c'est donc encore une fois plausible. Puis ça participe à la petite parodie de l'omégaverse, car en plus d'une certaine animalisation, il est vrai qu'on peut dire que légitimer le fait qu'un oméga mâle puisse avoir un bébé car il a un utérus, c'est une certaine façon de camoufler la féminité dans l'idée de base et d'en faire presque un être intersexué. Il ne faut pas oublier que le prompt de base s'appuie sur un certain sexisme, et si c'est lui-même à des fins satiriques pour justement dénoncer cette féminisation des uke dans les yaois, j'ai eu envie de faire une satire de la satire :-p.
Pour l'hymen, si ça fait penser au cliché qu'on trouve dans les lemons mal écrits d'auteurs assez jeunes qui transposent trop le sexe hétéro sur le sexe homo, et qui, à nouveau, a été repris volontairement pour parodier, je ne vous apprends peut-être rien, mais c'est effectivement une paroi qui se créé quand l'utérus se forme, et qui n'a donc techniquement rien à voir avec la virginité. C'est vrai que des filles n'en ont pas, d'autres si. Encore une fois, avec ça, ça rajoute du réalisme et d'un côté c'est intéressant puisque ça va permettre d'aborder les stéréotypes sur la virginité. (Je ne vais pas rentrer dans un grand débat féministe, mais si on y réfléchit, c'est pas faux que la société met pas mal de pression sur les filles pour leur virginité).
Je voulais aussi revenir sur le petit dilemme d'Allen et son choc d'avoir appris ça. Comme dit dans le texte, il est instable, il a peur et il s'est senti humilié d'avoir appris ça devant un autre garçon. S'il vacille si vite en remettant en doute son identité sexuelle et n'aime pas que ça le "rapproche" des femmes, c'est parce que, comme on le voit depuis le début, les omégas sont dénigrés sur leur condition d'homme. C'est complexe pour eux de se construire. Pas que je tienne à faire passer l'idée que la notion de genre binaire est hyper importante, mais je trouvais simplement logique qu'en situation de déséquilibre/jugement arbitraire des autres par rapport à ça à cause de leur second-sexe, les omégas ressentent le besoin de se réclamer homme et puissent être potentiellement ébranlés dans leurs identités. Ce sera encore développé, btw. Concrètement, ça revient à ce que j'ai instauré depuis le début, Allen est biologiquement un homme, et il n'aime pas voir son identité remis en question.
Le thème de l'omégaverse gomme certaines différences anatomiques entre les hommes et les femmes au niveau de la reproduction par lui-même, ce que, en mettant de côté la parodie de la féminisation, je trouve intéressant en sortant justement les choses des cases binaires, et en l'accentuant ici, le récit affirme qu'il ait ces caractéristiques ou non, ça ne change rien à ce qu'il est. Disons que c'est paradoxal, mais en accentuant d'un certain côté la "féminisation", ça sert à déféminiser le personnage. Le montrer choqué et déstabilisé, pour la dernière fois, me semblait logique, car il est perdu et émotionnellement perturbé. En écrivant ce passage, je voulais surtout rendre compte de cette confusion légitime.
Passons à la fin et au fait que Kanda soit "obligé" de toucher Allen, qui a dû clairement vous choquer pour le coup. J'avoue avoir peur que ça mette certains lecteurs en position d'inconfort, car ça a été assez dur à écrire pour moi et j'ai vraiment fait de gros efforts pour bien traiter le sujet.
J'avais pas mal réfléchi à l'histoire du lien, les âmes-sœurs, le fait que ça se déclenche au hasard, qu'il n'y ait pas de choix de partenaire et que ce soit plus fort que les persos. Dans beaucoup de fics ça créé des réactions étranges chez les personnages, et je suis partie du principe qu'il pouvait y avoir un côté négatif avec le fait qu'il y ait alors de l'influence émotionnel de manière assez excessive. Pour l'effet des chaleurs sur les omégas, il y a de base une certaine problématique autour de ça : l'oméga est en chaleurs, donc excité et délirant dans beaucoup de fics, peut-il consentir si l'alpha essaie quelque chose ? Quant à l'alpha, quand il est sous l'emprise des phéromones, est-ce qu'il sait ce qu'il fait ? Beaucoup de problèmes qui créent des controverses, et je pense qu'il fallait les traiter.
Le lien est comme une sorte de mariage arrangé, et dans ce cas de figure, il veut les inciter à consommer, d'où le fait qu'un oméga ne puisse plus se contrôler. C'est encore une fois terrible pour Allen, non content d'avoir été chamboulé avec une crise identitaire, il perd aussi le contrôle de son corps et le pouvoir sur son plaisir, ce qui est quand même non négligeable psychologiquement. Évidemment, il vit cette perte de contrôle et cet abandon comme un acte forcé, car il n'a pas d'autre choix que de s'en remettre à Kanda.
Quant à Kanda, je trouvais normal qu'il s'en veuille. Allen a accepté qu'il le touche, mais Kanda est à même de comprendre ce que la situation peut causer comme ressenti chez lui. Avoir fait ce qu'il a fait ne l'a pas rendu à l'aise, surtout en étant pris de court. Dans beaucoup de yaois, avec la même situation, Kanda aurait touché Allen en mode yolo et la question de si ça pouvait être problématique ou pas n'aurait pas été abordée. Ici ce n'est pas le cas. Je n'ai pas voulu écrire quelque chose de tordu, je suis contre le fait de faire passer une culture du viol avec des récits qui rendent compte de situation sexuellement ambigu sans que ça ne soit réfléchi ou assumé comme tel. Au contraire, je suis parfois sincèrement affolée de cet apparent manque de conscience de certains auteurs, et j'espère justement vous sensibiliser un peu à ces choses-là. Donc non, je ne tiens pas à ce que ça parte en viol ou irrespect entre les deux personnages décrit comme un acte naturel, rassurez-vous.
Néanmoins, Kanda n'a pas le choix non plus. Comme Allen, c'est une victime du lien. Ici le lien prend une figure très antagonique, et il va leur causer beaucoup de soucis. C'est assez dark, ça ne sera clairement pas la fête, mais encore une fois, c'est justement une façon de montrer l'importance du consentement mutuel. Les personnages vont douter, se poser des questions, et chercher à ne pas se forcer. Si j'ai bien fait le boulot, vous devriez donc ressentir cette réflexion et ne pas être complètement mal à l'aise. Je sais que ce n'est sûrement pas ce que vous avez l'habitude de lire et que c'est sans doute nouveau pour vous, ou du moins un nouvel angle d'attaque du problème, mais j'espère que vous laisserez une chance à ma façon de gérer l'histoire :).
J'attire également votre attention sur le fait que la situation risque d'être tendue dans les prochains chapitres à cause de ça et d'exprimer toutes ces problématiques, surtout le suivant, attendez-vous à ce que ça soit lourd niveau charge mentale et culpabilité des deux côtés. Je vous le dis parce que je veux que vous le lisiez avec un certain recul, et que vous le verrez bien vous même. Je me répète car je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté là-dessus, faites-moi confiance, les personnages vont, malgré la situation clairement malsaine, faire leur possible pour se respecter et ne pas outrepasser les limites.
J'espère vraiment que vous avez apprécié le chapitre et que mes notes vous ont éclairé, peut-être convaincu par rapport à certaines choses :).
Allez... Review ? X) Ne restez pas sans réagir s'il vous plait ! J'ai vraiment envie de discuter de tout ça avec vous, peut-être si vous avez des questions, des remarques, des choses que vous voulez que je nuance auxquelles je n'ai pas pensé, c'est à ça que ça sert :). Puis c'est les un ans de la fic haha !
Je pense que techniquement c'est mieux que je ne laisse pas passer deux semaines après le tournant potentiellement déstabilisant pour vous, donc le 18 sortira vendredi prochain. A partir de là, il y aura un décalage :). (De même que j'avais parlé d'extrait pour la page fb, ça commencera au 19 pour ceux que ça intéresse, j'en reparlerai x3)
A la prochaine fois !
