Hello !
Ce chapitre est super long, ça faisait longtemps et j'imaginais clairement pas dépasser les 8k words, pourtant c'est arrivé x'D. Venant de moi, c'était à prévoir :p. J'aurais pu le couper, mais ça s'enchainait mieux en terme de dynamisme dans un seul "shot" à mon sens !
Sinon, le chapitre comporte une petite surprise x'D.
Merci à Ookami97 pour la correction !
Bonne lecture à vous :) !
Réponses anonymes :
Guest : Contente que le Allen jaloux t'ait plu et bonne vacances à toi :) !
Un énorme bruit d'explosion réveilla Allen dans un violent sursaut. Alerte, il regarda par la fenêtre. Un long et épais nuage de fumée s'élevait au loin, en direction de la place centrale.
Ça avait recommencé.
Il se prépara en vitesse et descendit les escaliers quatre à quatre, prêt à porter assistance à Kanda. La nuit était encore noire. Il devait être quatre heures du matin à tout casser. Link courrait derrière lui. Allen le prévint qu'il partait devant et redoubla de vitesse. Il activa son Innocence, se pressant pour gagner la place. Il était encore fatigué, mais tout ce remue-ménage l'avait bien réveillé. C'était peut-être l'occasion de découvrir ce qui se tramait ici. Ces explosions ne pouvaient pas continuer indéfiniment. Les dalles et les murs de pierre défilèrent rapidement devant ses yeux quand il parvint devant son ami.
Kanda se tenait à un mètre du bâtiment qui venait d'être incendié, Mugen dégainée. Il lui jeta un regard de côté, le reconcentrant ensuite devant lui. Allen reconnaissait l'hôtel de ville. Le feu s'était répandu très vite, les flammes gonflaient au-delà des fenêtres éclatées. Des hommes se ruaient en criant hors des maisons pour essayer d'atteindre la pompe du village. Ils balançaient des œillades apeurées autour d'eux, vérifiant que l'endroit était dégagé et qu'aucun monstre n'était à l'horizon. Les Exorcistes et Link présumaient que c'était criminel, mais sans plus d'informations, eux croyaient encore que c'était des Akumas.
Allen pensait qu'ils devaient être prêts à toute éventualité.
« Qu'est-ce qui s'est passé ? le blandin héla son ami.
—Je viens d'arriver et ça a pété d'un coup. »
Sur ces paroles, Kanda s'en alla au-devant de la bâtisse, Allen sur ses talons. Ils remarquèrent encore les robots sur le sol, répartis devant toute la façade. Il y en avait quatre. La chaleur et l'odeur étouffante de brûlé les frappèrent. C'était difficile à dire comme de le souffle des flammes s'élevait de partout, Allen n'était pas bien sûr de lui, pourtant, il eut l'impression que ces faux-Akumas fumaient eux aussi. Kanda fit encore un pas en avant. Ses sourcils se froncèrent subitement.
« Y a quelqu'un là-bas. »
Allen disséqua la nuit au bout de la rue. Une petite silhouette encapuchonnée s'y trouvait, à moitié dissimulée grâce au bâtiment d'à côté. L'oméga réalisa qu'il n'avait peut-être pas eu tort quand il avait cru discerner quelque chose l'autre fois. La silhouette s'enfuit. Ni une ni deux, les Exorcistes se dépêchèrent dans sa direction. Il était temps que cette supercherie s'arrête ! Kanda pointa du bout du menton une autre rue, un pâté de maison plus loin.
« Les deux rues donnent sur une même place derrière, j'vais par là. Poursuis-le de ce côté. »
Il allait essayer de le prendre à revers. Sa patrouille n'avait au moins pas été vaine s'il connaissait un peu mieux les lieux. Kanda avait visiblement un meilleur sens de l'orientation que lui. Allen ne tarda pas, s'engageant à la poursuite du mystérieux inconnu, perçant le nuage de fumée. Il redoubla de vitesse. Il ne désactivait pas son Innocence. Ce serait peut-être mieux s'ils affrontaient un humain. Il hésitait. Sans savoir, c'était plus sage d'attendre. Ses chaussures claquèrent contre le bitume, le son de la course poursuite se mêlant à l'agitation paniquée sur la place. Main devant la bouche et le nez, il courut plus vite, se retenant de tousser. Sa gorge le brûlait. Ce n'était pas suffisant pour se protéger… Enfin, il déboucha à un carrefour. Allen grogna. Bon sang, il n'y voyait rien ! Se concentrant, l'oméga perçut un mouvement à droite. Il suivit son instinct, s'y lançant promptement.
Il avait eu raison. Une personne filait droit devant lui. Remarquant que la silhouette était de petite taille, encore plus que lui, il accéléra, se sentant à deux doigts de l'atteindre, malgré la fumée qui le désorientait un peu. Enfin, poussant dans les muscles de ses jambes, Allen fut assez prêt pour tendre la main, ses doigts frôlant d'abord la cape que portait cette personne.
Un dernier effort, il put la saisir, dans le dos, et tira avec force. L'inconnu tomba, déséquilibré, Allen basculant sur son corps avachi au sol. Il le lâcha dans la chute, l'inconnu se préparant à se lever. Kanda arriva au même instant.
Qui que ce soit, il n'avait plus le choix. Ils l'avaient coincé. Devant le katana qui menaçait dangereusement sa tête, l'individu n'essaya même pas de protester.
Allen se releva, le pointant lui aussi de son arme anti-Akuma. Il avança sa main pour lui baisser la capuche avec une certaine appréhension. Était-ce un nouveau stratagème du Comte, finalement ? Ils allaient bientôt le découvrir…
Le tissu chut lentement. Le blandin recula avec un mouvement surpris. Surprise partagée par Kanda. Comme escompté, l'œil d'Allen ne s'activait pas, ce qui ne signifiait qu'une chose : c'était bien un humain, et il ne s'agissait nullement d'un Noah. C'était bien ce qui était bizarre. Ils avaient devant eux un adolescent, d'à peu près l'âge du maudit. Il avait les cheveux blonds, les traits revêches et des yeux fatigués. Le nez de l'oméga lui indiqua qu'il s'agissait d'un jeune alpha. Ses cheveux blonds étaient un peu plus foncés que ceux d'Alphonse. Quelque part, Allen trouva qu'il lui ressemblait un peu.
« Qu'est-ce que… ? » s'étonna Allen.
Sans s'adoucir, Kanda appuya la lame de son katana contre la carotide du garçon, grondant sévèrement :
« C'est toi qui fait ça ?
—J'dirai rien. »
Kanda allait gueuler, et Allen ne fut pas loin d'avoir la même réaction, quand une voix retentit au loin :
« Edward ! »
Deux autres adolescents arrivèrent en courant. Un brun aux cheveux courts à l'air sérieux malgré son inquiétude, et une jeune fille blonde.
« Roy, Win', je vous avais dit de rester en arrière !
—Tu crois que je suis le genre à t'obéir, minus ? »
Le grand brun venait de parler, ses traits virant goguenards. Alors qu'il se rapprochait, Allen put le sentir : il était un oméga. Le petit blond devint furibond :
« Tu vas arrêter de me traiter de minus, espèce d'emmerdeur ?!
—Ah non, » intervint la fille, une bêta, « ne commencez pas à vous disputer, tous les deux ! Vous êtes vraiment agaçants quand vous êtes comme ça, et c'est pas le moment ! »
Le dénommé Edward serra les dents, toisant alternativement Allen et Kanda avec une lueur de défi tenace dans l'œil. Allen décida de prendre la parole :
« Vous devriez nous dire ce qui s'est passé et ce que vous faites là. La ville a appelé les Exorcistes pour enquêter sur les incendies. C'est grave. Vous avez quelque chose à voir là-dedans ? C'est vous qui déposez ces robots ? »
Edward détourna le regard, Kanda appuyant encore sa lame. La jeune fille croisa les bras, réticente, mais les traits résignés.
« Ed, on devrait leur dire la vérité. Tu t'es fait attraper, s'ils préviennent la police…
—Ils doivent être de leur côté, Winry, réfléchis ! »
Le blandin échangea un regard avec le kendoka. Il désactiva son Innocence sur le champ, affichant un sourire amical.
« Écoutez, on a pas encore prévenu la police. On aimerait juste que vous nous disiez ce qui s'est passé. Kanda, tu peux le laisser partir. »
Kanda ne broncha pas. Le regard des trois jeunes gens était posé sur lui. Allen comprit qu'ils mettaient sa bonne foi en doute à cause de ça.
« Bakanda, je t'ai dit de le laisser partir, qu'ils nous fassent confiance, un peu ! »
Kanda grogna.
« Moyashi, refais pas ton naïf. Tu sais que j'aime pas ça. J'vais pas le laisser partir avant qu'il se soit mis à table.
—Bon sang, Kanda…
—C'est bon, je vais parler. Enlève ta lame, le gros balourd. »
Le Japonais émit un « tch », ôtant son katana. Allen ne disait rien, mais il se tenait prêt à l'empêcher de fuir/le rattraper en cas de tentative. Qu'il veuille les mettre en confiance ne voulait pas dire qu'il n'était pas du tout méfiant. Edward se releva. Il était vraiment petit, il ne lui arrivait pas tout à fait au menton !
C'est vraiment étonnant pour un alpha, pensa Allen.
Puis, il se morigéna. Après tout, l'idée de la grandeur des alphas était un apriori.
« Ces robots ne nous appartiennent pas. Enfin, si. Ils ont été construits par un homme qui a perdu sa femme il y a longtemps, tuée par des Akumas. Il en est devenu obsédé, alors il a fabriqué des sculptures réalistes. Avec Winry, on s'amuse à les refaire. Ils ne servent à rien, concrètement. On les utilise comme distraction en y cachant des fumigènes, le temps qu'on pose les véritables bombes à l'intérieur des bâtiments. Les gens croient qu'ils sont des Akumas, et on crée un vent de panique.
—Mais pourquoi ça… ?
—Parce que le maire refuse de céder face à nos revendications. »
Le brun, qu'Edward avait appelé Roy, s'exprima cette fois-ci. Il s'avança, reprenant la parole :
« Une loi va être votée sur l'île. Elle interdira aux omégas l'accès à certains métiers, imposera un couvre-feu, et l'obligation de trouver un lien. Sans quoi un mariage arrangé pourrait avoir lieu si un oméga reste non-lié passé un certain âge. Edward a un petit frère qui est un oméga, et on refuse que l'île devienne une dictature. On a déjà quitté l'Allemagne pour sa mentalité trop restrictive, il est hors de question pour nous de vivre dans un endroit où le gouvernement cautionne ces pensées. Ce type de loi avait été aboli il y a plus de trente ans. Certains pays régressent sur les droits des omégas, en ce moment. Nous nous y opposons. »
Allen fut choqué. Il avait entendu dire assez vaguement par Link, et pas de manière positive, que l'Allemagne était beaucoup plus réfractaire aux droits des omégas que l'Angleterre. Il y avait déjà été pour des missions, bien sûr, mais il s'était passé peu de temps. Allen n'y avait donc jamais vécu de grosses discriminations, hormis un certain sexisme ordinaire qui pouvait aussi être présent ailleurs. À l'entente des proportions que ça prenait sur cette île… le jeune oméga était en colère. Link déboula au même instant, ses sourcils froncés montrant qu'il avait assisté au discours, lui aussi.
« Vous vous croyez malins, à faire passer vos revendications politiques pour des attaques d'Akumas ? » cracha brutalement Kanda.
Le blandin se tourna vers son ami. Il fut quelque peu irrité par cette réaction. Kanda et lui avaient beau être devenus proches, ça ne voulait pas dire qu'ils étaient toujours d'accord, ni que Kanda avait arrêté d'être un gros crétin sur les bords à certains moments. Il était mitigé lui aussi, bien sûr, mais tout de même, il ne pouvait pas cautionner ça.
« D'accord, c'est irréfléchi, mais leur cause est juste, ne dis pas le contraire ! s'exclama l'oméga, courroucé.
—Je me contrefous que la cause soit juste, » claqua l'Asiatique. « Cette mission n'est pas de notre ressort, on est pas des foutus diplomates. Je vais à l'auberge me coucher. Tu ferais bien de faire de même, Moyashi.
—Ne me dis pas de faire comme si de rien était, Kanda ! On peut quand même bien essayer de faire quelque chose pour eux, non ?! »
Il s'énervait. Le brun soupira, semblant irrité lui aussi.
« Qu'est-ce que tu veux faire ? Mettre l'île à feu et à sang, comme ces gosses à la noix ? »
Des sons frustrés retentirent derrière eux. Allen serra les poings. Son expression se ferma. Il se sentit pris de court.
« Bien sûr que non, mais…
—Mais y a rien à faire. C'est con, je dis pas que je suis d'accord avec ça, mais c'est comme ça. J'me casse. »
Kanda s'engagea dans la ruelle menant à la grande place. Link vint poser une main sur l'épaule d'Allen, qui regardait l'alpha s'éloigner avec un ressentiment palpable.
« Il est brusque, mais il a raison. Réfléchis, Walker. On ne peut rien faire. On est des représentants de l'Ordre Noir, on ne peut pas intervenir dans ce genre de conflit. »
Allen savait, bon sang. Mais ça n'empêchait pas que c'était terriblement frustrant et qu'il comprenait la colère des autres adolescents.
« Quant à vous, » intervint Link, « ce n'est pas en brûlant des bâtiments que vous ferez passer vos revendications. Avez-vous essayé d'en discuter pacifiquement ?
—Mais bien sûr, pauvre imbécile ! » cingla Edward, surprenant un peu Allen par la violence de sa colère. Il devinait cependant que les paroles sèches de Kanda n'y étaient pas étrangères. « Ils s'en foutent. Y a pas que nous trois, qui gueulent. Tous les jeunes de l'île se rebellent. C'est nous qui faisons les attentats, mais même ça, ça dissuade pas le maire. Il sait bien que c'est nous, et pas des Akumas. Ils vous ont appelé pour nous faire peur, et vous savez quoi ? Ben ça marche pas. »
Allen regardait alternativement Edward, Roy et Winry. Les trois jeunes gens avaient le même visage déterminé, figé par la colère. Il respectait leur détermination. Néanmoins, leur façon de faire risquait effectivement de ne pas aboutir à grand-chose, même lui le reconnaissait.
« On est là seulement parce qu'on pensait qu'il y avait des Akumas, » précisa Allen avec bienveillance. « Mon coéquipier a été grossier, mais il n'a pas tort, on ne peut pas interférer dans les affaires de la ville. Autant en votre faveur que dans celle du maire. Je trouve cette loi profondément injuste et révoltante, je suis un oméga moi aussi, j'aimerais pouvoir faire quelque chose, mais… »
Il serra de nouveau les poings. Ce n'était pas la première mission où il était confronté à des injustices, à des cas qui donnaient envie de se battre ou de s'énerver. C'était toujours tellement dur d'être impuissant.
« C'est impossible, malheureusement, » conclut-il. « Et vous devriez vraiment arrêter ça. »
Link croisa les bras.
« Je suis désolé, mais il va falloir que je prévienne la police.
—Attends, Link… ! » s'écria Allen. « On peut quand même trouver une autre solution ! »
Ce dernier soupira, comprenant qu'il lui reprochait sa réaction.
« Enfin, Walker, on ne peut pas les laisser s'en tirer comme ça. La ville a demandé notre soutien, je te rappelle. Ce n'est pas à nous de le gérer, mais on peut au moins leur amener les coupables.
—Ils ont simplement voulu protester contre une injustice !
—En mettant le feu partout ? Je préviens la police. C'est un crime, Walker. Ils auraient pu causer des morts, tu t'en rends compte ? »
Pour le coup, Allen l'avouait volontiers, Kanda et Link lui tapaient fortement sur le système.
Il parvenait à saisir qu'ils n'étaient pas d'accord avec la loi non plus, mais de là à aider des officiers d'un état qui préconisait la discrimination… Ça le dérangeait. D'accord, leur attitude était une forme d'obéissance aux lois et un respect la mission. Mais c'était injuste. Allen n'était pas naïf, contrairement aux dires de ce crétin de Kanda, il savait qu'il y avait de l'injustice dans la vie et que tout ne pouvait pas être parfaitement rose dans le métier d'Exorciste. Il n'était pas idiot non plus. Lui aussi ne cautionnait pas les fausses attaques, les incendies. C'était stupide. Ça ne changeait rien au fait qu'il n'arrivait pas à se dire que les livrer à la police était une bonne solution. En tant qu'oméga, il se sentait concerné par ces préoccupations. Quand il pensait qu'il avait justement dit à Alphonse de ne pas être timide envers les alphas, qu'il avait les mêmes droits, alors que son pays allait les discriminer… Il était en rogne.
Link parut le comprendre.
« J'imagine que tu es déçu. Crois-moi, ça ne m'enchante pas non plus. » Il s'adressait tout autant aux autres qu'à Allen. « Je soutiens vos revendications, mais pas la façon dont vous le faites.
—On peut au moins les laisser partir s'ils promettent de ne plus recommencer ?
—On nous a demandé de trouver ce qui s'est passé, Walker. Je les dénoncerai, n'insiste pas. Ton raisonnement est très enfantin.
—Absolument pas ! Je suis simplement compréhensif ! Je commence à en avoir marre d'être traité de naïf ou d'enfant sous prétexte que je me montre bienveillant ! »
Le blond tenta de rester calme devant sa colère, ce qui ne faisant qu'énerver Allen davantage.
« C'est ton caprice qui est stupide, Walker, rends-toi compte de la situation.
—Ah parce que maintenant je fais des caprices ?! Merci de ton respect, Link !
—Ne vous disputez pas, on va se rendre. »
Edward venait de parler courageusement. Les deux autres ne protestèrent pas. Link émit un autre soupir. Allen, quant à lui, gardait les poings furieusement serrés.
« Tu t'occuperas de les amener au poste, alors. Je pars me coucher. » Le blandin grinça des dents. « Je sais que tu tiens à respecter les protocoles, Link, mais en dehors des règles, il y a aussi une réalité humaine, et tu devrais peut-être la prendre en compte de temps en temps !
—Walker…
—Il y a quelque chose dans le ciel ! »
La voix de la fille blonde, Winry, venait de retentir. Link se retourna, laissant échapper l'agacement qu'il devait retenir :
« Bon sang, vous n'allez pas encore recommencer vos balivernes ?! »
Mais Allen s'était lui aussi retourné. C'était la vérité. Quelque chose tâchait le bleu de la nuit, plusieurs mètres au loin. Il ne voyait pas encore ce que c'était. En revanche, chose sûre, ça venait vers eux. Dans le même instant, des pas pressés retentirent.
Un nouvel adolescent fit son arrivée… qu'Allen reconnut.
Alphonse.
Allen fut surpris, encore plus quand le jeune alpha qu'ils avaient interpellé s'exclama :
« Al, qu'est-ce que tu fais là, tu ne dors pas ?!
—Tu n'es pas rentré, maman et papa sont inquiets ! Puis comment tu veux que je dorme avec le feu sur la place ! »
Voilà donc pourquoi Allen trouvait qu'Alphonse et cet Edward se ressemblaient. Ils étaient frères.
Il ne put s'attarder sur ça. Fondant la nuit noire, le point dans le ciel devint plus discernable. Allen n'en crut pas ses yeux. Son œil gauche réagit immédiatement.
« C'est un Akuma ! » s'écria Allen.
Des cris de stupeur jaillirent des bouches terrifiées des adolescents. Le dénommé Edward regarda Alphonse, traits pétrifiés, alors que l'Akuma se posait au bout de la rue, à quelques mètres de son petit frère.
« Al, cours ! »
Allen vit que le jeune oméga était glacé de peur. Pour être franc, lui paniquait aussi dans cette situation. Ce n'était pas un Akuma banal. C'était un niveau 4.
Alphonse fit l'erreur de jeter un œil par-dessus son épaule, se retrouvant nez-à-nez avec l'Akuma. Son corps squelettique, mais pourtant semblable à celui d'un bambin avec son ventre rond, le pentacle sur son front… L'Akuma leur souriait. Allen écarquilla les yeux, le voyant lever son bras. Il allait le transformer en canon.
Il allait… Le symbiotique sentit son sang ne faire qu'un tour.
Alors que les trois autres criaient de terreur en observant la scène, il activa Crown Clown et fonça au moment où l'Akuma fut sur le point de tirer.
Le cri d'Edward déchira l'air. Alphonse hurla lui aussi.
En une fraction de seconde, Allen avait bloqué le tir de l'Akuma avec son épée. Derrière lui, Alphonse était transi d'effroi.
« Est-ce que ça va ? » articula Allen, tout en essayant de repousser l'Akuma, qui papillonnait des ailes, ravi de lutter contre un Exorciste.
Alphonse pleurait quand Allen croisa son regard en se retournant.
« Cours rejoindre les autres ! » s'écria-t-il en donnant un brusque coup d'épée en avant, repoussant l'Akuma de quelques mètres.
Alphonse ne se fit pas prier. Il courut dans les bras de son frère, qui se mit à l'engueuler copieusement d'être sorti si tard tout en pleurant. Réaction de choc. Allen ne s'en occupa pas. Voyant que l'Akuma recommençant à charger, il paniqua pour la vie des humains environnants.
« Link, va les mettre à l'abri, je vais le retenir !
—Walker, tu ne vas pas pouvoir affronter un level 4 tout seul.
—Je sais. Mais mets-les à l'abri et va chercher Kanda. Je tiendrai jusque-là. »
Sans protester, l'Allemand s'exécuta. Allen se prépara à lutter, l'Akuma lançant déjà quelques invectives. Il sursauta quand son œil s'activa de nouveau.
Un autre Akuma venait de faire son entrée.
Qu'est-ce qui se passait, soudainement ?!
Kanda marchait en direction de l'auberge, pour le moins crevé.
Il avait bien compris que Moyashi était énervé et l'imaginait encore en train de s'engueuler avec le chien de Luberrier sur ce qu'il fallait faire des autres adolescents. Ses odeurs étaient particulièrement mauvaises en réponse à l'injustice à laquelle ils faisaient face. Kanda découvrait d'autant plus qu'il avait raison sur Allen : il était vraiment sensible et prenait vite les choses à cœur. Ça risquait de lui jouer des tours, à la longue, comme ça avait pu lui en causer par le passé. En ayant passé du temps avec lui, Kanda n'avait plus un apriori méprisant envers ses réactions. Il restait agacé car il savait bien que le gamin en serait emmerdé. En un sens, il reconnaissait que c'était assez touchant, et que ça pouvait même être une qualité, qu'il soit si impliqué. Ça lui donnait de la force. Mais, et ce n'était pas vraiment positif, Allen était tout de même trop pur pour ce foutu monde. Ce qui faisait qu'il en souffrait inéluctablement. À Allen d'évoluer dans sa propre direction, cependant. Kanda préférait être anesthésié contre l'injustice pour ne pas en pâtir. Il arrivait à comprendre qu'un autre puisse préférer l'inverse, si ce n'était pas la voie la plus sûre ni celle qu'il validait.
L'épéiste soupira.
Qu'à cela ne tienne, ça passerait à Moyashi quand ils quitteraient les lieux. À condition qu'il suive son conseil et ne traîne pas avant d'aller se pieuter. Kanda ne lui disait pas de se reposer pour le plaisir d'être sur son dos ni de le materner, ça n'avait jamais été son genre, s'il avouait qu'il s'inquiétait pour lui. De temps à autre, il admettait même qu'il était confus sur ses sentiments envers le blandin. Il l'appréciait, certes. Leur relation gardait le même côté complice qu'ils avaient gagné pendant ses chaleurs, s'ils s'engueulaient toujours copieusement lorsqu'ils n'étaient pas d'accord l'un avec l'autre. Depuis que le lien s'était renforcé, il se retrouvait néanmoins sensible à sa fatigue et à ses émotions, ce malgré lui. Il imaginait qu'il devait en être de même de son côté.
Pareillement, Kanda se demandait bien ce que cette évolution de leur lien allait apporter. Des emmerdes, sans doute, pour pas changer. Surtout avec cet enculé de Luberrier. Il n'avait pas apprécié qu'il fasse des allusions à son passé devant Allen comme si de rien était. Il n'était pas prêt à lui en parler. Pour être franc, il ne comptait pas le faire pour l'instant. Allen avait bien compris qu'il n'était pas du genre à trop s'ouvrir et respectait ses réserves, leur amitié marchait aussi. Bien sûr, Kanda voyait qu'il voulait se rapprocher de lui. Il laissait faire, que ce soit par des petits contacts physiques qu'il pouvait initier lui-même quand il sentait qu'il stressait ou qu'il en avait simplement envie. Oh, c'était très déroutant, mais Kanda avait parfois envie de le toucher, de le sentir. Il y était habitué à cause du lien, cela étant.
Puis, il se doutait que ses sentiments n'y étaient pas étrangers non plus. Sans qu'il ne soit trop affectueux, avoir un peu de geste affectif ne le dérangeait pas. Ça lui venait même assez naturellement, fallait pas que ça dure trop, mais il ne ressentait aucun malaise à agir comme il le faisait. C'était comme un vieil instinct enfoui, il ne savait pas où.
Marchant tranquillement, Kanda jeta quand même un coup d'œil en arrière. Il entendit une brusque explosion – comme un coup de feu. Et le chien de Luberrier arriva à vive allure.
« Kanda ! Il faut que vous alliez rejoindre Walker, tout de suite.
—Pourquoi ?
—Des Level 4. J'ai à peine eu le temps de prévenir les villageois de se cacher. Un premier est apparu, l'autre est arrivé ensuite. Walker les combat seul. »
Tout de suite, le sang de Kanda ne fit qu'un tour.
Son instinct d'alpha sembla en panique, il ressentit une agitation dans ses muscles, comme si tous ses sens lui martelaient que son oméga se trouvait en position délicate. Kanda grogna entre ses dents contre le lien qui lui faisait appréhender la situation d'une approche trop émotionnelle à son goût. En dehors de l'instinct, l'étonnement. Il n'y avait pas de foutus Akumas sur cette île, ni aucune putain d'Innocence, qu'est-ce que ceux-ci foutaient là soudainement ? Y avait un vrai bordel dans les plans des Noahs, à rien piger.
Sans plus attendre, sachant que Moyashi avait besoin de son aide, il regagna la place au pas de course. Le Japonais s'inquiétait. Allen était fragilisé par les entraînements. S'il s'était repris et était fort, qu'il avait considérablement progressé à ses côtés, il avait peur qu'affronter deux Akumas de niveau 4 d'un seul coup soit trop pour lui. C'était trop pour la plupart des Exorcistes. Ces connards étaient redoutablement forts.
Étouffant sa crainte, Kanda déboula sur la place. Le bâtiment flambait toujours, ses murs s'effondraient, comme le combat empêchait les pompistes de s'occuper du feu. Sur la place, les tirs des Akumas avaient détruit une partie de l'asphalte, ainsi que quelques maisons à proximité. Il remarqua plusieurs villageois tapis dans celles intouchées, observant Allen affronter les deux Akumas d'un œil médusé. Vu le sexisme ambiant, ils devaient être étonnés qu'un oméga soit capable de rivaliser avec la force brute de deux Akumas. Kanda dégaina sa lame en voyant Moyashi se faire projeter au sol par l'une de ces deux saloperies, l'autre s'apprêtant à attaquer à son tour. Allen se tenait péniblement debout, et Kanda sentait à ses émotions qu'il flanchait. Il remarqua qu'il était blessé à la tête. Un peu de sang s'écoulait d'une vilaine entaille, autour de laquelle se formait une croûte. Il s'était tout de même bien défendu. Beaucoup auraient fini à terre avant son arrivée.
Sans perdre de temps, le Japonais invoqua les illusions de Mugen.
Avant que l'Akuma ne le repère, il lui enfonça son sabre à travers le poitrail. Celui-ci poussa un gémissement suraigu, imitant la douleur, tout en hurlant : « Quoi, un autre Exorciste ?! »
Kanda eut un sourire narquois. Il fit pénétrer sa lame plus profondément. La technique de Mugen atteint son point culminant.
« Crève, charogne. »
Il retira son épée brutalement. L'Akuma s'effondra au sol. Il n'était pas encore détruit. Avant qu'il ne puisse se relever, Kanda le coupa en deux. Cette fois, l'Akuma fut exorcisé. Ça avait été rapide. L'alpha ne s'envoyait pas des fleurs pour autant : c'était seulement parce qu'Allen avait dû réussir à l'atteindre avant, sans ça, ses coups auraient fait mouche. L'oméga avait accompli le gros du travail.
L'autre Akuma fulminait.
Kanda donna la main à Allen, qui s'en saisit pour se relever. Il lança, avisant son front blessé :
« Fais gaffe à pas t'abîmer, l'nabot.
—Je te signale que je fais ce que je peux, espèce de Bakanda ! »
Le blandin lâcha sa main une fois remis sur ses jambes. Il lui sourit.
« Je l'avais presque achevé avant que t'arrives, tu sais.
—Tch. Il en reste encore un. »
La même détermination se miroitait dans leurs yeux. L'Akuma n'allait pas faire long feu.
« Voyons voir si vous arriverez à m'arrêter, Exorcistes ! »
Le rire métallique du monstre résonna.
Kanda comprit alors ce qui allait se passer.
« Putain, l'enfoiré, il va crier ! »
En effet, le Level 4 se mit à hurler d'un cri si puissant qu'il déstabilisa les deux Exorcistes. Kanda s'effondra au sol, dans l'incapacité de se synchroniser avec Mugen. Il réfléchit à toute vitesse. Allen était symbiotique, il avait de fait un meilleur taux de synchronisation que lui. Il serait aussi désorienté moins longtemps par le cri. L'Innocence faisait partie intégrante de lui, ça deviendrait plus simple de prendre le dessus. L'oméga récupérait difficilement. S'étant reçu sur ses genoux, il s'appuyait faiblement sur son immense épée, le manteau de Crown Clown virevoltant autour de lui, comme pour le protéger des vibrations sonores insoutenables.
Allen gémit, Kanda puisant dans ses dernières forces pour avancer vers lui.
Il fallait agir. L'alpha se savait hors d'état de combattre pendant quelques minutes avec ça, et si Allen ne se reprenait pas, ils allaient être dans la merde.
« Prends ma main, Moyashi. »
Le cri du monstre, long et perçant, leur déchirait toujours les tympans.
Allen tourna la tête vers lui.
« Maintenant ?!
—Fais ce que je dis. »
Allen opina, approchant son bras droit, manieur de l'épée. Kanda mit sa main au-dessus de la sienne sur la garde de l'arme, essayant de se concentrer. Ils avaient déjà remarqué que lorsque Mugen était activée, un courant flottait entre elle et Crown Clown, comme un partage d'énergie. S'il parvenait à atteindre ne serait-ce que la moitié de sa synchronisation normale et à la transmettre à Allen… Le maudit serait peut-être plus fort. Il ignorait si c'était réellement possible, s'il pouvait le maîtriser, mais Kanda voulait essayer.
Mugen dans la main gauche, la main d'Allen dans celle de droite, il tenta d'activer son Innocence, dirigeant intentionnellement l'énergie vers l'arme du blandin. Comme lors de l'épreuve de la synchronisation, un léger halo lumineux se forma.
Les deux liés se toisèrent, médusés. Kanda continua. Il avait mal à la tête. C'était difficile de se concentrer. L'Akuma avait arrêté de crier.
« Alors, les Exorcistes, c'est tout ce que vous savez faire ? Bien, je vais pouvoir m'attaquer aux humains, dans ce cas. »
Kanda plissa le front à l'extrême. Il sentait qu'il avait bientôt transmis le maximum de sa force.
« Kanda… Il faut que je…
—Deux secondes. »
Enfin, le brun lâcha la garde de l'épée, s'effondrant de nouveau en arrière, Mugen tombant devant lui. Allen fit un geste vers lui, inquiet. Kanda haletait mais il le repoussa.
« Vas-y Moyashi, maintenant ! »
Allen ne se le fit pas dire deux fois. Il s'élança sur l'Akuma, sautant pour l'atteindre. Les liens de la ceinture du Clown se préparèrent à le restreindre, pour le cas où il essaierait de s'envoler hors de sa portée. Dans un mouvement circulaire de lame, il coupa le bras changé en canon du monstre. L'Akuma parut s'enrager et essaya de s'échapper. L'ayant perçu, Crown Clown le retint. Allen le poignarda en plein cœur, avec peine. C'était difficile de percer la « peau ». Plus ils augmentaient de niveaux, plus les Akumas étaient résistants.
Il voulut forcer sur la garde, quand soudain, quelque chose se passa.
Une forte puissance, telle une onde de choc, résonna dans l'épée, la parcourant. Elle vrombissait et débordait d'énergie. Allen la lâcha presque dans la surprise, mais se raidit pour tenir bon. Les muscles de sa main étaient bandés et douloureux alors qu'il luttait pour ne pas se faire engloutir par son propre pouvoir.
L'Akuma, lui aussi, s'étonna. Transfiguré, il rugit, sonnant à la fois aussi rageur que paniqué :
« Qu'est-ce qui se passe ? Ça fait mal ! Arrête ça, Exorciste ! »
Au même instant, un déferlement d'énergie fusa dans la lame. Comme agissant d'elle-même, elle trancha le corps de l'Akuma. L'âme se désintégra, purifiée. Allen fut choqué. Ça ressemblait plus à une attaque de Mugen qu'à sa propre attaque.
Se remettant de son choc, l'oméga retomba au sol, les jambes flageolantes.
« Repose en paix, » murmura-t-il.
Kanda s'approcha finalement, interdit. L'oméga le fixa :
« Tu as vu ce qui s'est passé ?
—Ouais. J'en étais pas sûr, mais je vois que ça a marché. Je t'ai prêté ma force. Ça va ? »
Sans savoir pourquoi, ses jambes flanchaient terriblement. Allen trébucha, Kanda le rattrapant. Allen le repoussa gentiment, réussissant à se remettre debout.
« C'est étrange, mais oui. Ça fait juste… beaucoup de pouvoir d'un coup et d'énergie. »
Le brun opina. Il posait quand même une emprise sur l'épaule d'Allen, l'aidant à rester en place. L'Anglais s'était bien battu. Mieux que lui, sur ce coup. Kanda était encore un peu désorienté et il savait qu'à sa place, il n'aurait pas tenu. Malgré ses capacités surhumaines. Sans doute avait-il aussi réussi à transmettre un peu de sa force physique à Allen. C'était pour ça qu'il était chancelant.
« Ils étaient pas si forts, » observa Kanda. « On aurait dit qu'ils venaient d'évoluer. Normalement, c'est plus long de les battre.
—Ou notre… combinaison… était puissante. C'est rare de voir un Akuma supplier. Ça m'a presque fait pitié. »
Kanda faillit rétorquer qu'il ne fallait pas avoir pitié, mais il s'abstint. C'était encore le produit de leur approche personnelle de la situation qui différait. Clair que ses « crève, charogne » et les « repose en paix » de Moyashi s'opposaient drastiquement. Il ne pouvait pas s'empêcher de penser que ce gosse possédait un sens trop aigu de la compassion.
L'alpha soupira. Il s'apprêta à tendre la main, voulant lui coller une pichenette semi-attendrie, semi-agacée, quand les villageois arrivèrent en courant vers eux, le stoppant dans son entreprise. Link était là aussi. Ils reconnurent également le maire, qu'Allen toisa avec une certaine hostilité, chose rare chez lui qui était toujours avenant. C'était un homme d'un âge avancé, un alpha, aux traits tirés et aux tempes grisonnantes.
« Je vous remercie de nous avoir débarrassé de ces Akumas, » entama le maire.
Allen jeta un coup d'œil à Link, comme pour demander s'il avait révélé les agissements des adolescents. Ce dernier secoua la tête.
« Surtout vous, jeune oméga. »
Le blandin fut pour le moins indécis, n'ayant pas l'habitude d'être appelé par son statut.
« Vous avez fait preuve d'une grande bravoure et avez su exterminer le dernier monstre alors que votre coéquipier, un alpha, était à terre. »
Edward, qui n'était pas loin, émit un reniflement cynique qui n'échappa pas à Allen. Le maire poursuivit, regardant l'assemblée avec une expression pincée :
« Les omégas semblent être des individus plein de ressources, je dois dire que ça me surprend.
—C'est parce que c'est ce que nous sommes, » se risqua Allen devant les regards étonnés de tous. « Des individus. Pas juste des statuts. »
Comme embarrassé, l'homme se racla la gorge. Edward sourit au blandin et prit alors la parole.
« Parlant des omégas, nous aurions des revendications à vous soumettre, moi ainsi que quelques jeunes de l'île, à propos de votre prochaine loi. Vous aviez refusé de nous écouter la dernière fois. »
Un nouveau raclement de gorge retentit. Roy, Winry et Edward l'acculaient totalement. Parmi la foule, des villageois commençaient à chuchoter, remettant en question l'attitude du maire, au point que celui-ci allait certainement être obligé de lâcher du lest. Il tenta d'apaiser les chuchotements de la foule en relevant les mains, un sourire factice aux lèvres :
« Je pense qu'il serait mieux d'en reparler demain à tête reposée, plutôt qu'après une attaque au milieu de la nuit. Je promets d'écouter vos discours. Rentrez tous chez vous, nous ferons une réunion demain. Quant à vous, les Exorcistes, reposez-vous. Vous avez, encore une fois, toute ma reconnaissance. »
Allen regarda Link d'un air entendu. Ils n'allaient pas dénoncer les trois jeunes. La foule commença à se disperser. Edward allait traîner son frère vers l'auberge, mais celui-ci échappa à son étreinte, courant au-devant d'Allen.
« Je suis désolé.
—Pourquoi ? »
Le symbiotique était étonné.
« Quand j'ai dit qu'un oméga n'était pas suffisamment fort pour nous protéger… J'ai été stupide. Tu es très fort. »
Le plus petit baissait la tête, penaud. Allen sourit, lui caressant gentiment le crâne.
« Ce n'est rien.
—Al, viens ! »
Roy et Edward l'appelaient. Ils se tenaient par la main. Allen comprit alors qu'ils étaient liés. Les deux adolescents firent une place au plus jeune entre eux, qu'ils tinrent chacun par une main, retournant à l'auberge. Allen regarda la scène avec un certain attendrissement.
« Tout cela n'explique pas pourquoi ces Akumas sont sortis de nulle part, » intervint Link. « Il faudra demander au Traqueur d'aller explorer les lieux, il y a peut-être une Innocence.
—Ils étaient peut-être perdu, ce ne serait pas la première fois. »
Le blond haussa les épaules. Quoiqu'il en soit, il était impératif de le vérifier.
« Retournez à l'auberge, je me charge de transmettre les instructions au Traqueur.
—Tu ne diras rien à propos des autres ? »
Allen avait cru le comprendre, il voulait toutefois le vérifier.
« Je ne dirai rien. Les Akumas ont été détruit, on a rempli notre mission.
—Merci, Link. »
À nouveau, l'Allemand haussa les épaules. Kanda prit lui aussi la direction de l'auberge, Allen à sa suite, remarquant qu'il l'attendait. L'alpha lui jeta un regard.
« Tu t'es remis ?
—Oui, mes jambes vont mieux ! »
Comme pour illustrer ses propos, il voulut marcher plus vite, mais trébucha malencontreusement dans une dalle. Proche de faire une rencontre faciale avec le sol, il sentit les mains de Kanda retenir ses hanches, ce qui le fit rougir sous la surprise.
« Fais pas le con pour prouver que t'es résistant. Je sens tes émotions.
—Je suis résistant, la dalle est simplement traîtresse ! »
Finalement, Allen ricana, reprenant son équilibre.
« Tu vas bien, toi ?
—Crevé. »
Allen abdiqua, recommençant à marcher, doucement en revanche.
« Bon, je le suis aussi, j'avoue. »
Kanda remarquait le tremblement toujours présent dans ses jambes.
« Je vais te porter, à ce rythme-là, on sera pas à l'auberge avant dix mille ans, » fit-il, sarcastique.
Allen grommela :
« Mais n'importe quoi, Bakanda, je me démerde !
—Il y aura beaucoup de dalles traîtresses sur ce sol de merde, Moyashi. »
Il accentuait moqueusement l'adjectif. Le maudit bougonna et soupira. Kanda se tenait prêt à le soulever, il s'en aperçut.
« J'accepte, mais je monte sur ton dos, alors. Hors de question d'être porté comme une princesse, Bakanda.
—Je t'ai jamais proposé de te porter comme ça, crétin. »
L'alpha nota son orgueil mal placé. Allen grimpa sur son dos, sans répartir. Enfin, ils purent avancer à une allure plus vive. L'oméga colla timidement la tête proche de sa nuque.
« Ça faisait longtemps que j'avais pas senti ton odeur comme ça. »
Aussi étonnant que cela puisse paraître, Kanda rougit. Pour un peu, ayant lui aussi un orgueil mal placé, il aurait été tenté de le faire redescendre. Il se contint et l'ignora, en dépit de son visage cuisant. Il était content de la nuit qui camouflait ses émotions futiles. C'était vrai qu'à part lors des méditations, leurs contacts étaient fugaces. Kanda s'en foutait, tout comme il s'était foutu de proposer de le porter plutôt que de le laisser en arrière ou d'avancer à vitesse d'escargot. Il le faisait pour l'aider, parce que ses muscles avaient souffert et qu'il sentait qu'il en avait besoin. Mais pas sans le taquiner, cela dit. Kanda restait toujours lui. Ça restait gênant. L'instinct lui soufflait encore de prendre soin de l'oméga, et l'affection… sincère… qu'il avait pour lui ne le faisait toujours pas plus rechigner à la tâche que les touchers légers.
Ils marchèrent enfin. Allen finit par s'endormir sur son dos. Link les rattrapa. Quelque peu inquiet, il leva la voix :
« Est-ce que Walker va bien ?
—Il pionce. »
L'autre alpha opina.
« J'ai vu ce que vous avez fait en combattant. Luberrier avait raison. Quelque chose se passe entre vos Innocences. »
Kanda garda le silence. Pour être franc, il ne savait pas s'il pouvait faire confiance à Link. Allen paraissait s'y fier. L'alpha avait confiance en Allen, il n'était pas stupide, mais il se fiait vite aux autres à son goût et avait même pitié des Akumas… Autant dire que ce n'était pas une preuve irréfutable qu'il faille faire confiance à Link à ses yeux.
Ils parvinrent à l'auberge. Kanda était relativement content de se dire qu'ils en avaient fini avec cette mission merdique.
Quand Allen s'éveilla, le jour était déjà haut, visible par l'interstice des volets fermés en cliche. Il devina qu'il avait dormi longtemps, après la nuit d'hier pour le moins débordante d'émotions.
Peinant à situer ses pensées en vrac, il eut des souvenirs assez confus, puis, la première chose qu'il réalisa, non sans se sentir stupide, c'était que Kanda avait tenu à le porter après le combat. Il en avait été pour le moins embarrassé au début, et n'en avait pas cru ses oreilles. Kanda initiait peu, mais quand il le faisait, il ne déconnait pas. Quelque part, il initiait de plus en plus, en fait. Il semblait s'inquiéter pour lui, prenait même soin de lui. Comme il lui avait promis. Allen se rappelait de ses mots « tant que je serai ton alpha, je prendrai soin de toi quand il faudra ». Il était touché de voir qu'il le mettait réellement en application. Ça semblait peut-être peu, mais connaissant Kanda, c'était forcément le signe qu'il tenait à lui.
Leur complicité se solidifiait. Allen en fut content. Il se savait peut-être mièvre, mais bon sang, c'était humain.
Néanmoins, derrière ces préoccupations quelque peu sentimentales, avec ce qui s'était passé, il était obligé de s'interroger encore sur ce qui s'était produit entre leurs Innocences. Quelles seraient les réelles conséquences d'une telle symbiose ? Allen avait presque ressenti la terreur de l'Akuma quand il l'avait poignardé. Peut-être avait-il trop d'empathie, mais ça lui glaçait le sang.
Comme pour beaucoup de choses, et comme beaucoup de fois, la conclusion frustrante était qu'il fallait attendre. Seul le temps lui répondrait.
Se redressant dans son lit, scrutant la chambre qui baignait dans une douce obscurité solaire, signe qu'il faisait beau au dehors, il remarqua que le lit de Link était vide. Allen fit sa toilette, s'habilla, puis descendit. Il trouva Link et Kanda attablés, et en regardant la pendule murale, il réalisa qu'il était midi. Voilà pourquoi il avait si faim !
Il salua les deux autres. Link le prévint qu'il avait transmis leur rapport à Komui. Un train les prendrait dans la soirée. Le Traqueur était revenu bredouille, il n'y avait rien ici. Ils avaient quartier libre en attendant. Link l'informa aussi qu'il avait fait état de la synchronisation entre Mugen et Crown Clown. Le Chinois les attendait pour examiner leurs Innocences une fois au QG. Le blandin opina.
Son repas lui fut servi, qu'il se mit à dévorer en moins de deux. Pendant que Link lisait le journal local, en Allemand, Kanda quitta la table. Allen lui demanda où il allait, le Japonais répondant qu'il allait pioncer toute l'après-midi. En lui intimant de se reposer, Allen n'eut comme réponse qu'un « va pas faire le con, toi », qui le fit râler. Alphonse était plus loin, avec son frère et l'oméga plus âgé, mais il ricana en entendant Allen et Kanda se rabrouer.
Le blandin mangea en discutant avec Link.
« Au fait, fit Allen, je compte aller me balader cette après-midi. Tu veux venir avec moi ?
—J'ai quelques papiers à faire, mais je te laisse y aller seul si tu veux.
—Ça marche. »
L'Anglais sortit donc après le repas. Il s'assit sur les marches du perron, réfléchissant un peu, avec le projet de faire le tour du village calmement tout à l'heure. Il sentit une odeur familière et devina qu'Alphonse venait de le rejoindre.
« Tu t'es super bien battu hier ! »
Sur un grand sourire, le petit oméga se laissa tomber à côté de lui. Allen lui rendit le sourire.
« Merci du compliment.
—Merci à toi de n'avoir rien dit à propos de mon frère et des autres. Ed' m'a dit que tes coéquipiers voulaient le faire mais tu les as défendus. C'est gentil. »
Allen regarda ailleurs, embarrassé.
« J'ai surtout fait ce qui était normal, et me semblait juste. »
Alphonse sourit encore. Il donna un petit coup de coude étrangement… complice à Allen. Ce que ce dernier ne comprit pas.
« Diiiis, tu peux me le dire, hein, mais ton alpha, tu sors vraiment pas avec ?!
—Mais qu'est-ce que tu as encore avec ça ? »
Le symbiotique était étonné qu'il insiste à ce point. Alphonse soupira.
« Je sais que je me mêle de ce qui me regarde pas, mais ça se voit vraiment que tu l'aimes, et lui aussi ! Vous vous lanciez des piques tout le temps à table ! Puis vous étiez vraiment beaux quand vous avez combattu ! »
Le gamin était toujours rouge, limite s'il n'avait pas des étoiles dans les yeux. Allen en fut quelque peu abasourdi. D'accord, Alphonse était visiblement le genre à s'emballer vite et à se faire des scénarios quelque peu obscurs dans le crâne. Il était encore un jeune garçon, ce n'était pas surprenant. Mais le maudit devenait de plus en plus perplexe.
D'où ça se voit que j'aime Kanda, et d'où on dirait que… Kanda… m'aime ?
Allen vira également cramoisi.
« En fait, tu es vraiment têtu, Alphonse ! C'est un bon ami mais ça s'arrête là.
—Rooh… Je suis désolé si j'insiste beaucoup, » rétorqua le gamin, rouge pivoine et visiblement déçu, « Mais vous avez le même genre de relation que mon frère et son oméga ! Roy, le grand brun. Il n'a pas froid aux yeux et il est hyper provocant, c'est vraiment drôle. Il adore embêter mon frère. Faut dire que c'est facile, Ed' démarre au quart de tour. »
Allen s'autorisa à ricaner.
« J'aimerais bien être comme lui, » avoua Alphonse. « Ou fort comme toi. Je suis vraiment trop simple.
—Tu n'as pas besoin d'être fort et provocant pour te faire respecter. Ne pense simplement pas que tu vaux moins bien que les autres parce que tu es calme et gentil, et impose-toi tel que tu es. »
Sur ces mots, le blandin offrit un visage assuré à son homologue. Alphonse déglutit, les yeux grands.
« C'est la chose la plus encourageante qu'on m'ait dite, merci. »
Le silence s'installa entre les deux omégas. Alphonse demanda :
« Au fait, ça veut dire quoi « Moyashi » ? Il t'appelle tout le temps comme ça, c'est un nom affectueux ? »
Là, Allen s'étouffa carrément avec sa salive.
« Absolument pas ! Il me taquine avec ça ! En gros, il me traite de minus.
—Oh, Roy appelle tout le temps Ed « minus ». Mais c'est parce qu'il l'aime. C'est marrant, parce qu'ils ne se supportaient pas avant leur lien. »
Réfractaire, ne faisant pas attention au fait que ces deux-là lui rappelait effectivement son cas avec Kanda, Allen refusa de penser que le brun l'appelait Moyashi par affection. Ce fichu crétin savait qu'il détestait ça. Il eut une moue. Au même instant, des pas se firent entendre derrière eux, ainsi que des voix. Allen reconnut celle d'Edward et Roy.
« Tiens, Al, t'es là ! » s'exclama l'alpha blond.
Alphonse sourit à son frère. Edward se tourna vers le blandin.
« Tu t'appelles Allen, c'est ça ? »
Le maudit opina. Edward lui tendit la main.
« Merci d'avoir sauvé mon frère. »
Allen secoua la tête, arguant qu'il faisait simplement son travail, mais accepta la main tendue. Roy sortit alors quelque chose de son manteau. Un robot… à l'aspect quelque peu spécial. Il le lui tendit.
« Winry et Ed' l'ont fabriqué cette nuit. C'est pour toi.
—Euh… ? Merci, il ne fallait pas… ! Puis, il n'y avait pas que moi ! »
Allen était quelque peu étonné du cadeau. Edward rigola.
« C'est aussi pour nous avoir défendu hier. C'est, hm, supposé être l'Akuma d'hier, en fait. Je sais pas si tu reconnais. »
À bien regarder, c'était plutôt ressemblant. Son ventre rond, son visage défiguré de haine représentaient bien un niveau quatre dans toute sa splendeur. Le blandin n'était pas sûr qu'avoir une sculpture en forme d'Akuma soit bien vu au sein de l'Ordre, mais il accepta le cadeau.
Roy et Ed les saluèrent, puis partirent plus loin. Alphonse resta à discuter avec Allen, et lui proposa de lui faire visiter le village, après qu'Allen eut annoncé qu'il voulait en faire le tour. Le blandin partit mettre son présent dans sa valise avant cela, les deux omégas partant se promener. Au détour d'une ruelle, ils retombèrent sur Roy et Edward occupés à s'embrasser avec passion. Au vu de leur écart de taille, Roy menait le baiser et Edward devait se hisser, avec une apparente difficulté, pour l'atteindre. Virant cramoisis, Alphonse et Allen préfèrent ne pas déranger le couple.
Le reste de l'après-midi se déroula sans encombre jusqu'au départ.
Dans le train, en pensant à Roy et Edward, Allen se prit à repenser également au baiser échangé avec Kanda. Embrasser son lié était vraiment quelque chose d'exceptionnel. Ils avaient de la chance. Il fut bientôt dans une transe rêveuse.
Cependant, il ne changeait pas d'avis. Son amitié avec Kanda lui convenait toujours. Les gens pouvaient penser ce qu'ils voulaient, ce n'était pas de l'amour. Du moins, Allen ne le croyait pas. Pour être tout à fait honnête, il ne savait pas exactement comment caractériser le sentiment amoureux. Il savait qu'il tenait beaucoup à Kanda, voilà tout. Pourquoi presser les choses ? Quel intérêt ?
Allen n'en voyait aucun.
À suivre...
Alors entre Roy, Edward, Winry et Alphonse… Oui, je fais intervenir des personnages de FMA, toutafé, mini-Crossover AU que personne n'a demandé xD. Dès que j'ai trouvé le nom "Alphonse", je m'étais dit que ça pourrait être drôle, et finalement j'ai pas pu résister. Ah, et, of course, pas d'apologie du terrorisme ici, hein. Juste une sorte de débat implicite sur la façon de traiter l'injustice.
Otherwise, ça avance un peu, et il y a enfin un point de vue de Kanda ! J'espère que ça vous a plu :3.
Encore un changement d'ambiance à venir pour la suite :p.
Une petite review ? :)
Merci d'avoir lu !
