Mot de l'auteur : Salut !

Bon, ça fait à peu près un mois alors on est parti pour la suite !

C'était pas trèèès fructueux en termes de retours, mais heureusement la version anglaise existe et je me sens suffisamment motivée pour publier la suite ^^. On commence à entrer dans des chapitres que je qualifierais "d'exposition", car ils servent surtout à mettre en place le cadre et les personnages avec lesquels l'histoire va évoluer maintenant que l'introduction (le départ de Natsu et ce qu'il a causé) est passée. J'espère quand même que les quelques points qu'on apprend ici suffiront à vous garder en haleine.

Dernière chose, je le répèterai à la fin aussi, mais vous pouvez me suivre sur twitter Gzou Fanfics si vous voulez, par contre à partir de maintenant je vais commencer à écrire les tweets directement en anglais pour que ce soit plus facilement compréhensible pour tout le monde. Sur mon profil vous verrez un linktree qui vous donnera d'autres liens, comme le discord, si jamais vous voulez venir papoter :).

On reparle de tout ça plus bas. Pour l'instant, bonne découverte de ce chapitre :)

Scarlet777 : Salut !

Je suis contente de voir qu'il y a quelques personnes de l'autre site qui continuent de me suivre ici, c'est très agréable ^^. Surtout que c'est quand même triste qu'il soit mort, faut tout recommencer maintenant u_u.

Bref en tout cas je comprends que c'était compliqué de se mettre à la lire vu la densité qu'elle avait prise, avec certaines mises à jour je me retrouvais avec des chapitres beaucoup trop longs, autant pour vous que pour moi. Cette réécriture et ce "renouveau" en quelque sorte est utile à pas mal de choses, et l'un des objectifs c'était aussi de rendre tout ça plus digeste en coupant les parties trop longues. Du coup ça me rassure de savoir que ça a servi à quelque chose.

Merci en tout cas pour ton retour, sans toi j'en aurais pas eu du tout donc merci ! J'espère que ce chapitre te plaira !


Chapitre 4 : Ombres du passé

Les recherches débutèrent dès le lendemain. Lucy, Gray et Erza se rendirent à la grotte que Natsu et Happy avaient été chargés d'explorer et d'examiner, et découvrirent avec déception qu'elle s'était effondrée, ensevelissant de roche les éventuels indices dont elle aurait pu receler. Ils n'avaient rien découvert d'autre si ce n'était de nombreuses trainées de sang séché qui s'avéra appartenir à Natsu après analyse, mais cette vérité ne leur apporta malheureusement rien. Elle n'avait servi qu'à les perturber un peu plus, car elle témoignait de la souffrance extrême que lui avaient causée ses blessures. Pour laisser derrière lui d'aussi imposantes traces d'hémoglobine, le trajet retour avait dû être une torture. Pas étonnant qu'il se fût évanoui dès son arrivée.

Pour finir, ils avaient rendu visite aux villages voisins dans le cas où les deux compères y auraient fait halte, mais aucun de ses habitants n'avait vu ou entendu parler d'eux. Ils étaient donc rentrés à la guilde, les mains vides et démoralisés.

De leur côté, Mirajane et Elfman étaient retournés sur les lieux où ils avaient retrouvé les corps inconscients de Gray et Erza. S'agissant de l'endroit où Natsu et Happy avaient été vus pour la dernière fois, ils avaient espéré repérer un détail que la nuit aurait dissimulé. Comme Erza l'avait prédit, la pluie avait effacé toutes les traces, et ils décidèrent d'emprunter le sentier forestier qui se trouvait non loin. Ils le suivirent le plus loin possible dans l'espoir vain de croiser un élément capable de les mettre sur la bonne voie.

La team Shadow Gear s'était attelée à la tâche de faire des recherches dans la plus grande bibliothèque du pays, située à Crocus. Pendant plusieurs semaines, ils avaient feuilleté les livres et les documents sur tous les sujets qui auraient pu avoir un rapport avec Natsu, les Dragon Slayers, et même Igneel. L'intelligence et les connaissances de Levy ne furent cependant pas suffisantes, et le trio était revenu bredouille.

Enfin, après être rentrés de leur mission respective et avoir été mis au courant de la situation, Juvia et Gajeel étaient partis chacun de son côté, même si la mage de l'eau avait dû recourir à toute la force de sa volonté pour ne pas exiger d'accompagner Gray. Elle avait ainsi accepté de former un groupe avec Cana pour entreprendre leurs propres expéditions. Quant au Dragon Slayer de l'acier, il avait semblé se sentir particulièrement concerné par le départ de son semblable, mais avait décidé de ne se joindre à aucun groupe. Il n'était pas à la guilde la majorité du temps, alors même s'il n'acceptait jamais de leur avouer les raisons de ses absences et de ses déplacements, il était plus que probable qu'il fût aussi déterminé qu'eux à retrouver Natsu.

En excluant Makarov, qu'ils ne voyaient presque plus, seuls Macao et Wakaba n'avaient pris part à aucune recherche. Le père de Roméo passait le plus clair de son temps cloitré chez lui, tandis que son ami et son fils tentaient par tous les moyens de comprendre son comportement et de le pousser à confier ce qui le tourmentait tant. Ils s'étaient à chaque fois confrontés à un mur infranchissable et n'avaient jamais pu obtenir la moindre explication, pesant de plus en plus sur leur cœur, et particulièrement celui de Roméo.

Le garçon avait fini par abandonner tout espoir de le consoler, et après lui avoir exposé sa colère et son désespoir, n'était plus jamais retourné le voir. Makarov avait accepté de le loger à la guilde en attendant que la situation s'améliore, non sans tenter de le convaincre de ne pas se mettre en danger en participant aux recherches, en vain. Natsu avait toujours été pour Roméo sa plus grande source d'inspiration, son modèle, et il refusait de laisser son imbécile de père le détourner du plus important. Tout comme il ne pouvait laisser Makarov le convaincre du bien-fondé de sa décision de ne rien faire, qu'il rejetait et exécrait de tout son être. Malgré son jeune âge, il s'était aussi joint aux groupes pour retrouver Natsu, même s'il n'était pas autorisé à les accompagner au moindre risque de danger.

Les escapades se poursuivirent encore et encore. Sans relâche, jour après jour, les mages de Fairy Tail arpentaient le pays, remuant ciel et terre pour obtenir le plus petit indice sur l'objet de leur convoitise, dont ils ne trouvèrent pas la moindre trace.

Jusqu'au jour où ils se rendirent compte qu'ils s'étaient arrêtés de vivre.

Petit à petit, l'intensité et la fréquence des recherches diminuèrent, en même temps que leurs espoirs. L'argent vint à manquer, et la somme pharamineuse dépensée pour leurs voyages les contraignit à reprendre les missions, dont les affiches s'étaient entassées sur le tableau. Ils n'eurent d'autre choix que de retourner à la vie qu'ils avaient mise en suspens depuis cet événement, malgré les changements notables liés à l'absence démoralisante de leurs deux amis.

Les semaines se succédèrent jusqu'à se transformer en mois. Cent cinquante jours après leur départ, Natsu et Happy demeuraient toujours introuvables.

La guilde retrouva finalement un semblant de normalité, et même si elle n'avait pour autant pas récupéré sa lueur d'antan, les rires et les exclamations de ses occupants résonnaient dans les rues avoisinantes avec enthousiasme.

Au centre d'un immuable vacarme au sein du bâtiment, Gajeel n'admettait toujours pas la situation dans laquelle il avait été contraint de passer des journées à la fois moroses et éprouvantes. Depuis qu'il avait appris le départ de Natsu au retour de sa mission en solitaire, il n'avait cessé d'alterner entre recherches intensives et passivité ennuyeuse, l'épuisant à la fois physiquement et émotionnellement. Plus le temps passait, plus les doutes que l'absence de Natsu avait fait naître en lui se transformaient en tragiques certitudes.

Le destin était en marche.

Cela signifiait que Natsu s'était engagé seul dans une bataille perdue d'avance, dont l'issue quelle qu'elle soit entrainerait de graves conséquences. Une bataille à laquelle il était censé participer à l'instar de tous les Dragon Slayers du monde entier, même s'il était peut-être le seul d'entre eux à en avoir déjà conscience. Il connaissait parfaitement le rôle qu'il devait jouer dans cette histoire sordide, mais il n'avait pour l'instant pas trouvé le courage de prendre la décision ultime qui enliserait définitivement son existence dans un chaos émotionnel sans précédent. Sans compter qu'il n'avait pas la moindre idée de la façon dont il allait bien pouvoir rejoindre Natsu, où qu'il soit.

Même s'il refusait comme toujours de laisser une bribe de ses émotions paraître au grand jour, il supportait mal d'avoir été flanqué dans cette position inconfortable où il était forcé de mentir à la guilde entière tout en essayant tant bien que mal d'étouffer ses propres doutes. Agir comme s'il n'était au courant de rien alors qu'il savait tout ce qu'ils s'acharnaient tant à découvrir le consumait de culpabilité. Chaque fois qu'il observait l'équipe de Natsu partir, lutter contre la tristesse et le désespoir d'enchaîner ainsi les échecs et revenir les mains vides et encore plus démoralisés, il devait se battre contre le besoin irrésistible de tout leur dire.

Tout en s'assurant que personne ne se doutait de ses intentions, il avait lui-même passé ces cinq derniers mois à chercher le mage de feu sans succès, intensifiant exponentiellement son anxiété. Même ses connaissances de la situation ne lui avait permis de le retrouver ou même de découvrir où il était allé, et il était terrifié à l'idée d'arriver trop tard.

Même Makarov avait refusé de lui révéler quoi que ce soit sur sa position alors qu'il connaissait l'implication des Dragon Slayers dans cette affaire. Sûrement le maître avait-il peur de la dangereuse accélération que sa participation allait provoquer dans les projets de Natsu, c'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour retarder un tant soit peu le destin funeste auquel sont fils de cœur était promis. Il ne lui avait rien dit pour le protéger, pour avoir une influence sur le seul aspect de cette tragédie qu'il pouvait encore contrôler. C'était maladroit et inutile, un acte désespéré, mais Gajeel ne pouvait pas lui en vouloir.

Ainsi le maître ignorait-il encore jusqu'à quel point il était au courant de l'affaire, et n'avait-il jamais su ce qu'il avait lui-même appris de Metalicana des années auparavant. Des vérités dont personne d'autre que lui n'avait connaissance, y compris Natsu lui-même, et qui pesaient sur ses épaules depuis presque quinze ans.

Natsu était l'objectif de toute sa vie, en plus d'être l'un des rares hommes dont le respect lui importait, le seul qui lui inspirait une telle volonté de se surpasser. Même en dehors du devoir qui lui incombait de lui venir en aide, il ne pouvait le laisser seul face à la plus grande menace de son existence. Il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour le retrouver et l'aider à porter son fardeau.

Le tragique événement de son départ occupait toujours la mémoire de tous, mais les mages de la guilde s'étaient fait une raison avec le temps, réalisant que regretter des vicissitudes qu'ils ne pouvaient changer ne les mènerait à rien. Cela ne signifiait pas qu'ils avaient abandonné tout espoir et comptaient s'en remettre à la fatalité, mais ils reconnaissaient au moins qu'il était inutile de continuer à mettre leur vie en suspens.

Ils devaient avancer.

Sans pour autant agir comme si l'absence de Natsu et Happy ne changeait rien, c'était grâce à cet état d'esprit qu'ils parvenaient à supporter la perte de leurs amis. Leur souvenir demeurait malgré tout au centre de toutes les mémoires, notamment celles de Gray, Lucy et Erza.

Contrairement aux autres, le trio ne s'en était jamais remis et continuait de les chercher sans relâche. Makarov les avait plus ou moins forcés à lui promettre de ne pas essayer de les retrouver et de continuer leur vie, mais ils n'avaient jamais eu l'intention de lui obéir. Ils n'avaient pas passé un seul jour sans essayer d'obtenir des renseignements sur l'endroit où ils avaient pu aller.

Au fond ils étaient certains que toute la guilde, Makarov compris, savait pertinemment qu'ils ne vivaient plus que pour retrouver Natsu. Pourtant ils préféraient prendre toutes les précautions possibles pour ne pas éveiller les soupçons, sélectionnant spécifiquement des missions susceptibles de les aider dans leurs investigations. Jusqu'à présent, toutes leurs tentatives d'obtenir une quelconque information s'étaient soldées par un échec cuisant. Les quelques pistes qu'ils avaient pu trouver ne les avaient menés nulle part, contribuant à cribler leurs nuits d'insomnies agitées. Ils commençaient peu à peu à perdre espoir de le revoir un jour, et ils ne cessaient de se demander s'il était ne serait-ce qu'encore en vie.

Heureusement, Makarov n'avait jamais essayé d'utiliser des moyens radicaux pour les discipliner et attendait simplement patiemment qu'ils se découragent d'eux-mêmes. Ils avaient de nombreuses fois essayé de le convaincre de leur révéler ce qu'il savait, mais il n'avait jamais consenti à leur avouer quoi que ce soit, se plongeant chaque fois dans un profond mutisme.

C'était par une nuit sans lune que le trio de mages se préparait à se mettre en route pour la énième fois en direction d'un lieu susceptible d'avoir été foulé par le mage de feu.

Fatigués et engourdis par la frustration des échecs répétés de ces vingt dernières semaines, ce fut avec une détermination et un espoir volontairement mesurés qu'ils sortirent tous trois dans la pénombre nocturne de Magnolia. Bien que la matinée fût bien avancée, le clair de lune enroulait encore la ville dans un étau de noirceur déroutant qui ne participait qu'à l'entretien et à l'expansion de leurs doutes ; tout leur semblait sombre et impalpable, comme si le poids de leurs sentiments négatifs entravait leur perception sensorielle.

Faisant le plus possible abstraction de toute pensée capable de les freiner dans leurs objectifs, ils marchèrent silencieusement en direction de la gare de Magnolia. Ils devaient se rendre au Royaume de Lüditz, pays situé à l'ouest de Fiore et qui s'étendait jusqu'aux lointaines Plaines Brûlantes d'Ashan, pour y confirmer une rumeur selon laquelle un dragon de feu y avait été aperçu. Faisant aussitôt le lien avec leur ami, ils avaient jugé cet indice largement suffisant pour se rendre à l'autre extrémité du globe si nécessaire afin de vérifier ce renseignement. Si la finalité de leurs efforts était le retour Natsu, même si la probabilité d'une telle chance avoisinait le zéro pourcent, cela valait tous les risques du monde. Ils avaient conscience du voyage long et éprouvant qui les attendait, mais cette difficulté ne suffisait pas à les persuader de rebrousser chemin. Même si leur voyage ne devait être qu'une perte de temps, ils poursuivraient leurs recherches aussi longtemps et aussi loin qu'il le faudrait.

La destination finale de leur périple était donc la ville de Fürg, une des nombreuses cités souterraines de Lüditz et celle d'où la rumeur s'était propagée. Pour rejoindre les montagnes de Nalfein dans lesquelles ses rues avaient été creusées, ils devaient traverser la frontière de Fiore afin de poser pied sur les terres désertiques et montagneuses de ce pays inconnu. D'après les maints documents qu'ils avaient étudiés à son sujet, les ressources magiques que possédaient ses contrées demeuraient inexploitées, et l'usage de la magie y était interdit. Seules certaines personnes habilitées avaient l'autorisation de l'utiliser pour faire régner l'ordre au sein de la population ou dans le cadre de leur approvisionnement en eau. Une partie infime du territoire lüditzien renfermait des espaces boisés et fluviaux ; les trois quarts restants demeuraient affublés de déserts arides et de hautes montagnes.

Historiquement, Lüditz avait subi de nombreuses échauffourées qui avaient contraint ses populations à se réfugier dans les montagnes, où ils construisirent ces fameuses villes souterraines, appelées les U-Bahn. Ces cités servaient aussi de bases d'extraction où les ressources liquides de la roche étaient recueillies par des procédés magiques inconnus pour ensuite être acheminées vers les différentes villes de la région.

Ces violentes batailles avaient ravagé la plupart des régions forestières qui s'étendaient autrefois sur une grande partie de la surface du pays, et furent remportées grâce à l'aide des dragons. La plupart des écrits retraçant ces périodes lointaines avaient été perdus, tant et si bien que plus personne ne savait comment les dragons étaient apparus et pourquoi ils les avaient aidés. Depuis ces temps ancestraux, ils vénéraient ces créatures comme des Dieux, érigeant des monuments en leur honneur malgré l'incertitude qui planait encore à propos de leur existence. L'histoire de Lüditz était criblée de trous béants que de nombreux historiens lüditziens s'affairaient à essayer de combler, jusque-là sans succès.

Ces informations gravées dans leur mémoire et vêtus le plus légèrement possible afin de survivre à la chaleur de ces terres aréiques, ils se rendirent sur le quai avec une certaine nervosité. Pour atteindre Lüditzen, la capitale, ils devaient traverser le principal obstacle de leur expédition : la frontière séparant les deux pays. Après avoir pris le train jusqu'à Geffen, la ville de Fiore la plus proche de la frontière, ils devaient prendre contact avec Mirajane et Elfman. Ces derniers leur avaient jusqu'alors apporté une aide précieuse dans leurs recherches, et c'était grâce à eux qu'ils avaient pu obtenir ces nouveaux indices. Il ne s'agissait en vérité que de ouï-dire, ils n'étaient même pas sûrs que ces rumeurs parlent vraiment de Natsu, mais après avoir enchaîné les semaines et les mois sans obtenir la moindre information valable, cette piste n'avait pas de prix.

Ils avaient rapidement débuté les préparatifs du voyage pour rejoindre les deux frères et sœurs Strauss qui se trouvaient déjà sur place, la mission durant laquelle ils avaient entendu parler de cette rumeur s'étant déroulée près de Geffen. Ils les attendaient donc là-bas, en profitant pour organiser leur passage vers Lüditz et leur trajet pour sa capitale située à quelques jours de marche de la frontière.

La gare ferroviaire de Magnolia en vue, Gray, Erza et Lucy pressèrent le pas. Makarov n'avait pas eu l'air de s'être rendu compte de ce qu'ils préparaient, mais ils n'étaient pas à l'abri pour autant et préféraient ne pas prendre le risque de compromettre leurs projets. Si le maître décidait de les en empêcher sérieusement, ils n'avaient aucun espoir de passer à travers les filets du mage saint, qui les ramènerait alors à la guilde sans efforts. Ils comptaient presque sur sa négligence et sa désorientation de ces derniers mois pour leur laisser une chance de partir sans se faire remarquer, même si voir leur mentor aussi absent et éteint depuis ce jour-là leur faisait mal au cœur.

Lorsqu'ils pénétrèrent à l'intérieur, le train était déjà à quai et ne semblait attendre que les directives de son conducteur avant de démarrer. Réalisant qu'ils avaient perdu un temps précieux à convaincre Gray de ne pas voyager à moitié nu même si les déserts de Lüditz promettaient d'être brûlants, ils se hâtèrent de grimper à bord. L'appareil démarra presque aussitôt qu'ils se furent assis, et leur périlleuse aventure débuta ainsi, dans le silence le plus complet des trois voyageurs qui s'étaient retirés dans leurs pensées intimes.

Accoudé sur le bras de son siège, le menton calé contre sa paume, Gray contemplait avec une certaine fascination le paysage qui défilait par la fenêtre tout en s'enlisant dans des réflexions et des souvenirs aussi obsédants qu'ils étaient enrageants. Depuis son départ, il vouait à Natsu une rancœur farouche et rêvait à chaque instant de lui faire regretter ses paroles et ses actes, même en ayant conscience qu'ils étaient mensongers. Il ne cessait de ressasser encore et encore les images de cette fameuse nuit et les remarques odieuses qui leur avaient été destinées, qui lui avaient été destinées, et la douleur du rejet restait la même à chaque occurrence. Il ne s'était pas passé un seul jour sans que les mots prononcés ne lui reviennent en mémoire, déchirant son cœur toujours un peu plus et exacerbant son sentiment d'inutilité.

Il avait l'abominable impression de n'avoir été pour son rival qu'un parasite nuisible qui n'avait pas la moindre importance pour lui. Il lui avait balancé son aversion sans un accroc dans la voix, s'était battu contre lui sans une once de retenue au point de vraiment sembler prêt à le tuer pour l'écarter de son chemin. Gray n'arrivait plus à se défaire de cette conviction pourtant probablement erronée que Natsu le haïssait profondément. Il s'efforçait alors de se rappeler de ses derniers mots, tout de compassion et de culpabilité, mais même si ce souvenir apaisait son mal-être elle intensifiait en contrepartie sa colère.

Il l'avait manipulé pour prendre le contrôle de leur combat et avait usé de méthodes déloyales pour le vaincre, et Gray avait beau préférer ce moyen à celui qui consistait à se déchirer mutuellement, il ne pouvait lui pardonner. Ce sentiment d'impuissance qu'il avait éprouvé alors qu'il se battait pour que sa vie n'éclate pas en morceaux avait été si cuisant, plus jamais il ne voulait revivre ça. Car sa défaite avait signé le démantèlement pur et simple de son monde et le début de l'une des pires périodes de son existence. Il lui avait arraché une part de lui-même en partant et il comptait bien la récupérer.

Erza s'était retirée en elle, l'air imperturbable mais l'esprit ailleurs. Le dos droit et les mains posées sur ses genoux, elle observait avec absence le siège vide à côté de Gray, dont elle tentait d'ignorer l'agitation évidente. Ses pensées vagabondèrent auprès de celui qui aurait dû l'occuper et un sourire affectueux flotta sur ses lèvres. Elle l'imagina affalé devant elle, la langue pendante et le teint virant du bleu au vert, se lamenter sur les nausées que lui causaient leur moyen de transport en maudissant le créateur de cette machine démoniaque. L'affliction l'emporta ensuite sur la nostalgie et son sourire s'évanouit.

Il avait tant souffert de cette séparation, d'avoir dû ignorer son cœur qui lui ordonnait de renoncer à partir et à se forcer d'agir de manière aussi abjecte envers eux… Alors comment avait-il vécu depuis son départ ? Était-il hanté par leurs adieux autant qu'eux, ou avait-il réussi à surmonter ? Pensait-il encore à eux, ou essayait-il de les oublier ? En cinq mois tant de choses avaient pu lui arriver, et elle avait peur de découvrir quoi.

Elle ferma les yeux pour se concentrer sur ses souvenirs de son ami, son regard, son visage, sa voix. Malgré elle, les dernières images qu'elle avait de lui avant qu'il ne s'en aille s'imposèrent à elle et l'émotion lui monta aux yeux. Le témoignage d'amour inconditionnel qu'il lui avait exprimé avant qu'il ne la plonge dans l'inconscience lui revint en mémoire pour la énième fois ce jour, et elle eut l'impression de sentir la chaleureuse présence du jeune homme comme si elle avait remonté le temps.

« Je vous aime plus que tout au monde. C'est justement pour ça que je dois m'en aller, et que vous ne devez surtout pas me suivre. »

Elle avait été la seule à entendre ces mots, et ils l'avaient marquée à jamais. Toutes les autres paroles prononcées ce jour-là n'avaient aucune importance, aucune valeur à ses yeux. Car elles ne signifiaient rien pour lui non plus, il les avait uniquement utilisés comme un leurre destiné à servir son subterfuge. Elle avait tenté de nombreuses fois de raconter cette partie de l'histoire à Gray pour qu'il cesse de se torturer avec les horreurs que Natsu lui avait dites, mais elle n'avait jamais réussi, terrifiée à l'idée de craquer encore devant lui.

Depuis qu'elle s'était montrée si impuissante à les protéger cette nuit-là, elle avait inconsciemment renforcé sa peur maladive de laisser quiconque voir ses faiblesses, symbolisée depuis toujours par cette armure qu'elle portait en toutes circonstances. Elle était censée être leur guide et leur soutien dans la vie, et elle n'avait même pas été fichue de dominer ses peurs et se battre, obligeant Gray à le faire à sa place. Elle l'avait condamné à affronter Natsu alors qu'il n'en avait pas envie, l'abandonnant à un combat destiné à le torturer émotionnellement, et elle ne se pardonnerait jamais son incompétence.

S'il y avait au moins un aspect positif à cette douloureuse expérience, c'était la croissance exponentielle de sa détermination à le retrouver et à comprendre les raisons de son départ qu'elle avait engendrée. Elle s'était jurée de trouver les mots qui le convaincraient d'accepter leur aide, lui ferait comprendre que quels que soient les risques, agir seul n'était qu'un maladroit moyen de les protéger.

Elle était consciente que sa volonté de les éloigner de lui et du danger avait été inébranlable, car même les tortures infligées à son cœur pour l'inciter à ne pas briser les liens irremplaçables qui l'unissaient à eux et à Fairy Tail n'avaient pu la défaire. Elle admirait le courage dont il avait fait preuve pour être capable de sacrifier tout ce qu'il possédait et chérissait pour les préserver du malheur, mais il aurait dû savoir qu'ils perceraient l'imposture à jour. L'amitié qu'ils éprouvaient pour lui était trop profonde pour disparaître si facilement. Ils le connaissaient depuis trop longtemps pour se laisser berner par d'aussi gros mensonges, même s'il avait été plus que convaincant. Lui qui avait perdu si tôt celui qu'il considérait comme son propre père, qui avait enduré le vide qu'avait laissé la mort de Lisanna, il devait comprendre mieux que quiconque à quel point perdre un être cher pouvait être douloureux. Bien plus que d'être blessé ou même de mourir.

Alors elle ne comprenait pas. Pourquoi leur avait-il imposé son exil sans les laisser décider de ce qu'ils voulaient faire ? Pourquoi n'acceptait-il jamais de les laisser faire pour lui ce qu'il avait déjà si souvent fait pour eux ? Pourquoi ne s'était-il pas mis à leur place, et n'avait-il pas réalisé que jamais ils ne pourraient l'abandonner à son sort, comme il l'aurait fait lui-même si les rôles avaient été inversés ? Il avait tant de fois risqué sa vie pour la leur, elle n'arrivait pas à comprendre ce qui l'empêchait d'accepter leur soutien en retour.

Plus elle y pensait, moins elle comprenait, alors elle se contraignit à chasser ce genre de réflexions tout en prenant soin de ne pas en faire de même avec son sang-froid. Se résignant à l'évidence que les réponses à ses questions resteraient inaccessibles tant que Natsu le serait également, elle en profita pour affûter sa détermination à le retrouver en se concentrant sur son ardent désir de le revoir. Peu importait l'amertume et la peine qu'avait causées l'absence de Natsu ces cinq interminables mois, peu importait les dangers qui entraveraient leur route. Ils le retrouveraient, le ramèneraient à la guilde, et tout rentrerait dans l'ordre.

Portée par cette résolution, elle releva la tête qu'elle avait inconsciemment baissée sur ses mains au fil de ses errements introspectifs, sous le regard anxieux de Lucy qui l'observait discrètement.

Cette dernière, n'ayant aucune idée de ce que Gray et Erza avaient vécu cette nuit-là, se sentait terriblement exclue. Même si elle n'avait pas eu à endurer les adieux de Natsu et à vivre avec leur souvenir, la souffrance de se sentir négligée n'en était pas moins vive. Lorsqu'elle avait finalement rejoint le théâtre de désolation qui mettait en scène ses deux amis inconscients face au Dragon Slayer, elle avait eu l'impression que le monde s'écroulait autour d'elle. Le sifflement des oiseaux, le hululement des chouettes, la cymbalisation des grillons, le chant du vent glissant le long des feuilles, tous les sons lui avaient semblé se distordre et fusionner en un seul bruit strident, le seul parvenant à les surpasser étant la voix de Natsu. Le temps lui-même s'était arrêté pour ne laisser qu'elle et les mots cruels qui écorchaient son cœur à vif.

« Je me barre. Je n'ai plus rien à faire ici »

Et qu'en était-il d'elle, de ses sentiments ? Ne méritait-elle pas son intérêt, qu'il daigne la regarder en face ? Il ne s'était même pas retourné, comme si elle n'avait aucune importance à ses yeux, comme si la quitter et ne jamais la revoir ne lui faisait rien, et elle ne l'avait pas supporté. Elle l'avait regardé s'éloigner puis disparaître dans les ténèbres nocturnes, immobilisée par les sentiments glacés qui brûlaient en elle, par cette sensation foudroyante d'inutilité et d'impuissance.

Elle savait que ses actes n'avaient été qu'une tentative désespérée de leur cacher la vérité et qu'il n'avait jamais voulu leur faire de mal. Elle avait confiance en lui et en ses bonnes intentions, mais sa rancœur demeurait, indélébile. Elle lui en voulait terriblement.

Elle avait essayé de faire front à ce sentiment, mais ses nuits d'insomnies n'avaient engendré qu'une incertitude plus grande encore, et de cette incapacité à surmonter était née une immense culpabilité. Chaque fois que les visages de Gray et Erza lui apparaissaient, que cela fût en rêve ou dans la réalité, elle se sentait minable de ne rien pouvoir faire pour eux, et de se lamenter sur son sort alors qu'ils souffraient bien plus qu'elle. Elle ne comprendrait sans doute jamais la douleur des souvenirs qui les hantaient, elle à qui Natsu n'avait daigné dire un mot, mais elle espérait qu'un jour même lointain ils se confieraient à elle. Peut-être pourrait-elle alléger le fardeau de ce souvenir qui pesait sur leurs épaules s'ils la laissaient devenir le réceptacle attentif aux sentiments qu'ils gardaient enfouis.

En attendant ce jour, elle s'armerait de patience et les soutiendrait du mieux qu'elle le pourrait. Cette décision n'apaisait pas son mal-être et faire abstraction de ses propres tourments était difficile, mais ses amis méritaient qu'elle se batte pour eux.

Elle reporta son attention sur Erza, dont les traits exprimaient la force de ses résolutions nouvelles, qu'elle jalousa profondément. Lucy baissa les yeux et s'abrita dans un vide émotionnel forcé jusqu'à ce qu'un brusque arrêt de l'appareil ne la pousse en avant. Après avoir repris leurs esprits, les trois amis se concertèrent brièvement du regard et se levèrent de leur siège. Ils posèrent pied à terre et s'engagèrent dans les rues sinueuses de Geffen, qui ce jour-là baignaient sous le soleil.

À mesure qu'ils avançaient, des habitants de plus en plus nombreux s'amassaient autour d'eux. Après leurs voyages intempestifs dans des régions reculées du Royaume de Fiore où leurs recherches de Natsu les avaient guidés, le trio souffrait de ce soudain bain de foule, assommé par les rafales d'émotions incontrôlées et par le tumulte des voix et des cris enthousiastes. Ils ne comprenaient pas pourquoi un tel attroupement s'était formé autour d'eux et durent se pencher sur la question lorsqu'ils ne purent plus avancer.

Alors que Gray et Erza tentaient d'écarter la foule tonitruante de leur chemin, le visage de Mirajane apparut entre deux épaules puis vint à leur hauteur. Haletante, la barmaid se pencha en avant pour reprendre son souffle, les mains posées sur ses genoux. Lorsqu'elle eut retrouvé une respiration presque régulière, elle se redressa, découvrant à travers deux mèches de cheveux argentées son visage rayonnant.

- Vous êtes enfin là !

- Qu'est-ce qui se passe ici ? Demanda Gray en contemplant la foule à présent silencieuse.

- On a reçu le même accueil que vous, je vais vous expliquer. Allons discuter au calme. Les habitants nous ont prêté une maison aux abords de la ville le temps de nous préparer.

Ils acceptèrent sa proposition avec un signe de tête et la suivirent entre les maisons aux cheminées fumantes, imprégnant l'air d'une odeur de fromage de chèvre frais, de pomme de terre, de farine, de viande hachée et de charbon.

En face d'eux, un clocher d'une centaine de pieds de hauteur dominait la ville, ses ornementations d'or et d'argent scintillant à la lumière du soleil. À plusieurs kilomètres à l'ouest se dressaient les montagnes enneigées d'Ethar, vaste région inhabitée jonchée de glaciers impénétrables que personne n'osait plus explorer.

Le Royaume de Fiore ne se déployait guère à l'est, coupé par les remparts de la frontière lüditzienne. Au sud, les cimes des pins de la Forêt d'Okkar étaient perceptibles, et derrière elle avait été bâtie la cité d'Alimecia, ville abandonnée devenue le repaire de Dragon Lords, une puissante guilde noire dont les objectifs n'avaient jamais été découverts et dont les activités demeuraient obscures. Même les téméraires mages de Fairy Tail ne s'aventuraient pas dans cette zone, ces vastes contrées désolées étant devenues le spectacle d'incidents d'une telle gravité qu'elles furent surnommés les « Terres Obscures ». Le Conseil de la Magie lui-même n'intervenait pas dans cette région depuis que Dragon Lords y avait élu domicile et qu'elle avait été le théâtre de la décimation totale d'un peuple tout entier. Il fermait délibérément les yeux sur les atrocités qui s'y produisaient, comme s'il attendait que la guilde noire bouge d'elle-même pour agir.

Abandonnant les cris discordants de la foule derrière lui, le groupe s'orienta vers la périphérie de la ville. Ils entrèrent dans une modeste maison construite au sommet d'une petite élévation parsemée de fleurs jaunes et bordée par les eaux d'une rivière aux reflets azurs, où ils furent accueillis par un Elfman étrangement nerveux. Mirajane leur proposa d'un geste encourageant le confort de quatre fauteuils disposés en carré dans un coin de la pièce, au fonds desquels ils s'installèrent avec un soupir de soulagement. Elle leur servit trois tasses fumantes de tisane aux trèfles rouges et se laissa choir à son tour dans un fauteuil.

- Les nouvelles sont bonnes ? S'enquit Erza en portant le liquide bouillant à ses lèvres.

- Plus ou moins, répondit Mirajane. Je ne sais pas par où commencer.

Elle jeta un bref coup d'œil à Elfman. Debout à côté d'elle et les bras croisés tel un garde du corps, celui-ci acquiesça d'un signe de tête pour l'encourager. Elle but une gorgée de thé et baissa sa chope sur ses genoux.

- Natsu est passé par ici, les informa-t-elle d'abord en posant sa tasse sur la table.

Ses interlocuteurs se raidirent brusquement sur leur siège avec une exclamation de surprise, manquant de renverser leur boisson ou de s'étouffer. Embarrassée par l'intensité de leur réaction, Mirajane évita de les regarder en face et préféra s'intéresser au tapis de laine disposé à leurs pieds, suivant des yeux les frises géométriques usées qui en ornaient les contours. Oppressée par les regards interrogateurs posés sur elle et par leur silence, elle consentit à lever le sien.

- Ça fait un peu moins de cinq mois, poursuivit-elle. Il aurait franchi la frontière de Fiore pour se rendre à Lüditzen. Les habitants de Geffen l'auraient aidé.

- Cinq mois ? Répéta Lucy. Ça veut dire que…

- Oui. Il est venu ici juste après avoir quitté Magnolia.

Les trois amis ne surent d'abord pas comment réagir. Ils étaient bien sûr exaltés et soulagés d'avoir enfin retrouvé la trace de Natsu après l'avoir cherché si longtemps, mais le fait qu'il se fut rendu dans un autre pays ne leur facilitait pas la tâche. Fouler des terres totalement inconnues ne les dérangeait pas, mais il était ardu de rester optimiste en sachant que Lüditz était un pays deux fois plus grand que le leur.

Néanmoins l'espoir était là. Cinq mois entiers à enchaîner les tentatives infructueuses pour obtenir des informations sur l'endroit où Natsu était parti, à subir la destruction progressive de leur foi en un avenir où il serait de nouveau à leurs côtés. Enfin ils acquéraient une piste fiable, un chemin qu'ils pouvaient suivre sans hésitation et qui les guiderait à ce qu'ils avaient tant convoité.

Ce ravissement que Mirajane distingua sur leur visage lui réchauffa le cœur et lui remémora ce qu'elle avait elle-même ressenti à l'entente de cette nouvelle. Elle comprenait à quel point ils pouvaient être soulagés. Il en fut d'autant plus difficile de poursuivre ses explications, consciente de la déception et de l'affliction que la suite allait leur causer, notamment à Gray qui était plus que quiconque concerné par cette vérité.

- Pourquoi les habitants d'une ville aussi éloignée de la nôtre auraient aidé un inconnu à enfreindre leurs propres lois ?

La question d'Erza l'extirpa de ses pensées anxieuses, et elle la remerciait intérieurement de ne pas s'être engagée sur le sujet qui l'effrayait le plus.

- D'après le récit qu'on m'en a fait, la ville a été attaquée par une poignée de survivants d'un peuple qui résidait sur les Terres Obscures, les aliméciens, répondit-elle. Quand Natsu est arrivé, en volant d'après ce qu'on dit -elle réprima un rire en se remémorant combien le jeune homme ne supportait pas les transports-, la bataille faisait déjà rage. D'après les histoires écrites à ce propos, un, je cite : « Jeune homme aux cheveux flamboyants et son dragon aux écailles azur déchirèrent les profondeurs de la nuit du cri effroyable de leurs ennemis ».

Pour la première fois depuis longtemps, des rires francs et sincères résonnèrent dans la pièce, s'unissant à celui de Mirajane et Elfman. Le « dragon aux écailles azur », qui n'était autre que Happy lui-même, étaya leurs rires avec des images grotesques auxquelles il fut difficile de rester neutre. Ils s'imaginaient déjà le petit air fier de l'exceed pour avoir été qualifié de cette façon, et leurs rires se transformèrent rapidement en sourire affectueux puis en mine inquiète. Happy n'avait rien à envier à Natsu question loyauté, et tous éprouvaient une compassion et une reconnaissance infinies pour lui d'être resté aux côtés de son ami malgré les risques qu'il encourait. Il ne l'avait jamais abandonné, et pour cette raison il méritait toute la gratitude du monde.

- Quoi qu'il en soit, reprit Mirajane en remarquant le dangereux changement dans leur expression, il paraîtrait que Natsu -et son dragon de compagnie- ait vaincu une centaine d'aliméciens à lui seul.

- Ça me paraît beaucoup quand même, contesta Lucy, perplexe.

- Pff, les geffenois ont exagéré les choses, c'est tout, intervint Gray avec une pointe d'irritation. Ce mec est trop nul et trop débile pour réussir un truc pareil.

Le ton faussement méprisant qu'il avait employé fit sourire ses interlocuteurs, qui n'avaient plus entendu ce genre de remarques désobligeantes à propos de son rival depuis longtemps. Après son départ, il avait toujours évité de prononcer ouvertement son nom et ne s'était même plus délecté à l'insulter ou le blâmer pour ce qu'il avait dit ou fait. Chaque fois que quelqu'un parlait de lui, il se murait dans le silence ou s'isolait volontairement pour apaiser sa frustration, ses regrets, et surtout sa douleur.

Le voir de nouveau agir comme il l'avait toujours fait soulageait leur inquiétude, car c'était là le signe que chaque pas qui les rapprochait de Natsu était un pas de plus vers sa délivrance et sa guérison. Il semblait se rouvrir à chaque nouvelle information qu'ils parvenaient à glaner sur le Dragon Slayer et se libérer peu à peu de ses tourments, même si Erza savait que ses mots, eux, resteraient ancrés dans sa mémoire quoi qu'il advienne.

Ils se rendaient compte combien leurs disputes leur avaient manqué, et ils se sentaient encore plus dans l'urgence de retrouver Natsu. Pour pouvoir vivre à nouveau ces moments de joie et de fête, pour chasser enfin cette horrible sensation de vide que son départ avait laissée. L'heureuse perspective de revoir enfin leur ami disparu avait permis à Gray d'entrevoir le bout du tunnel, et ainsi de soulager les craintes de tous en plus des siennes.

- La force de Natsu n'est pas quelque chose qui se mesure, déclara Erza avec un sourire affectueux. Elle varie selon les situations.

- En tout cas, coupa Elfman, cet acte d'héroïsme lui a permis de passer la frontière sans problème. Et depuis, son nom et celui de Fairy Tail sont admirés par les habitants de cette ville.

- C'est pour ça qu'ils nous ont accueillis comme ça, conclut Lucy.

Elfman lui donna raison d'un hochement de tête.

- Et c'est grâce à ça qu'on va pouvoir passer la frontière de Lüditz aussi.

Les trois amis laissèrent échapper une silencieuse exclamation de surprise, et Erza faillit s'étouffer avec sa boisson.

- Vous comptiez nous accompagner ?!

- Pas exactement, répondit Mirajane, soudainement plus sombre.

Elle ne poursuivit pas immédiatement, craignant leur réaction. Elfman et elle leur avaient proposé leur aide, mais jamais il n'avait été question de les laisser les accompagner dans un endroit si dangereux. Ou du moins cela n'avait jamais été évoqué bien qu'ils en aient toujours eu l'intention, sachant pertinemment qu'il serait difficile de les convaincre. S'aventurer sur des terres inconnues aussi hostiles n'était pas sans risques, les Strauss en étaient d'autant plus conscients qu'ils étaient pour l'instant les seuls à connaître la raison pour laquelle Natsu s'y était rendu.

À ces risques il fallait ajouter celui de se voir banni de la guilde pour l'avoir quittée sans en avertir qui que ce soit pendant un temps certes indéterminé, mais très certainement long de plusieurs mois. Jamais Makarov ne le ferait de lui-même, cette éventualité ne leur avait même pas traversé l'esprit, mais le Conseil n'hésiterait pas une seconde à l'y obliger en le menaçant de dissoudre la guilde s'il n'obéissait pas.

Malgré tout ils devaient d'une manière ou d'une autre leur faire comprendre qu'ils avaient besoin de leur aide, et qu'ils ne pourraient pas y arriver seuls.

- Mon frère et moi allons à Ascalön, expliqua-t-elle en écartant une mèche de cheveux rebelle d'un revers de main. C'est un U-Bahn situé au sud-est du Royaume de Lüditz, c'est-à-dire à l'opposé de Fürg.

Soucieux mais pas totalement hostile à leur venue, le trio se contenta de les fixer, pesant le pour et le contre de leur requête. Au-delà du fait qu'ils étaient réticents à l'idée de les confronter au danger, ils ne comprenaient pas pourquoi cette ville dont ils n'avaient jamais entendu parler requérait leur attention alors qu'elle n'avait à priori aucun rapport avec Natsu. Sûrement restait-il des informations qui leur manquaient pour résoudre cette énigme, et ils préférèrent être au courant des détails avant de prendre une décision. Ou peut-être avaient-ils une tout autre raison de vouloir s'y rendre.

- Et qu'est-ce que vous comptez y faire au juste ? L'interrogea Gray en récupérant la tasse qu'il avait posée sur la table. À moins que j'aie manqué quelque chose c'est pas une ville dont on a déjà entendu parler.

Mirajane demeura figée, ressassant sans interruption cette question dans ses pensées. Elle avait longtemps songé à la réponse qu'elle leur donnerait lorsqu'elle lui serait posée, mais maintenant qu'elle devait l'affronter dans la réalité elle ne savait plus quoi leur dire.

- Parce qu'on a eu cette info hier, répondit Elfman à sa place, remarquant l'hésitation et l'atonie de sa sœur. Il parait que Natsu y est passé avant de retraverser le désert pour aller à Fürg.

- Et vous savez pourquoi ? Demanda Lucy.

Cette fois, même Elfman dut se retirer temporairement de la conversation pour trouver le courage de le leur dire, plongeant ainsi la pièce dans un silence oppressant. Sans s'en rendre compte il fixait intensément Gray, qui soutenait son regard insistant avec un soupçon de crainte et d'angoisse. Il avait l'inquiétante sensation que ce qu'ils hésitaient à dire le concernait, et ce sentiment se fit encore plus puissant lorsque Mirajane posa à son tour les yeux sur lui. Si ceux d'Elfman évoquaient la peur, ceux de sa sœur parlaient de compassion, de pitié presque, et ces émotions rassemblées laissaient présager que la suite de la discussion allait être douloureuse pour lui.

Le mage de glace était maintenant tellement tendu que Mirajane regretta de ne pas avoir déjà livré l'information au lieu de le contempler sans rien dire. La vérité lui ferait du mal dans tous les cas et il aurait été moins cruel de la lui révéler de but en blanc comme un pansement qu'on arrache plutôt que de le laisser mariner dans son angoisse.

Elle aurait voulu ne jamais avoir à le lui dire, mais ils avaient besoin de ces informations pour atteindre leur objectif, elle n'avait pas le choix. Elle inspira profondément pour rassembler son courage.

- Il cherchait Deliora, avoua-t-elle enfin, prenant soin de ne pas regarder Gray dans les yeux.

Confirmant leurs craintes, la réaction du mage de glace fut immédiate. Il tressaillit sur son siège en s'étranglant presque dans sa boisson.

- Q-Quoi ?!

Ses poings se serrèrent si fort que le récipient brûlant se fissura sous la pression de ses doigts. Sans y prêter la moindre attention, il tenta de se calmer en maîtrisant sa respiration autant que possible, au moins suffisamment pour se retenir de se lever de son siège et de casser tout ce qui pouvait l'être dans le salon.

Deliora ne pouvait pas être en vie. Il l'avait vu se détruire sous ses yeux, le corps corrodé par la glace qui l'avait emprisonné toutes ces années. Ul avait sacrifié sa vie pour ce miracle, accepter que ce monstre fût encore vivant revenait à admettre qu'elle était morte en vain. Il le refusait de tout son être.

Perdu, furieux, effrayé, Gray contempla Mirajane avec absence, espérant déceler la vérité dans son expression. Il n'obtint cependant pas la rassurance qu'il convoitait. La jeune femme plissait le front de compassion, soutenant avec peine son regard tourmenté. Elle ne mentait pas.

Certains souvenirs refirent surface pour hanter ses pensées, rouvrant une blessure profonde qu'il avait espéré cicatrisée à jamais. D'abord les ruines d'une ville, un monstre gigantesque, des cris de terreur et d'agonie. Puis des effusions de sang, un sentiment d'impuissance et de détresse suivi de désespoir, un deuil et une profonde souffrance. Enfin, le visage souriant de son maître, la personne qui l'avait élevé et qui avait donné sa vie pour la sienne. Son sourire était doux, aimant et bienveillant, il apaisait toutes ses craintes et tous ses doutes.

Quand ce monstre allait-il arrêter de lui ôter tout ce qui avait de l'importance pour lui ? Il lui avait pris son foyer, sa famille, son maître, et il venait maintenant lui prendre son ami ; il continuerait à jamais de lui arracher une à une toutes les choses qu'il aimait jusqu'à le dépouiller de sa raison, si ce n'était pas déjà fait. Même s'il ne savait pas comment c'était arrivé et pourquoi, le simple fait de savoir que c'était cette abomination qui avait poussé Natsu à partir en abandonnant ce qui lui était le plus cher lui donna la nausée.

Il ne lui pardonnerait jamais.

Jamais.

Le venin de la haine vint envahir ses veines et pondre dans son âme, le dévorant de l'intérieur. Ce regard coupable que Natsu lui avait adressé à son retour de mission, juste avant de s'effondrer dans ses bras, lui revint en mémoire. Il comprit d'où cette expression inhabituelle était venue, et la colère que Gray éprouvait envers lui gravit un nouvel échelon.

Il savait pour Deliora… et ne lui avait rien dit. Il lui avait sciemment caché la vérité, et peu importe combien la garder pour lui le rongeait de culpabilité, Gray n'en avait rien à faire. Natsu connaissait son passé, il savait combien Deliora avait marqué sa vie, alors pourquoi ?

Soudain son animosité se transforma en terreur, et son teint devint livide. Et si… ?

Et s'il avait l'intention de faire la même chose qu'Ul ? Et si c'était exactement pour cette raison qu'il s'était séparé d'eux, qu'il avait gardé le silence sur Deliora et qu'il le cherchait ?

La panique prenait racine de plus en plus profondément, et en la cumulant à sa haine on obtenait un Gray tétanisé. Dès la mention du démon qui avait détruit sa vie, Lucy et Erza avaient observé le mage de glace transiter d'une émotion à l'autre avec compassion et appréhension tout en luttant contre les leurs, moins douloureuses mais tout aussi accaparantes. Lorsqu'elles avaient vu cette haine prendre possession de lui et infecter ses yeux, elles avaient craint qu'il n'explose de fureur et ne déverse sa rage sur tout ce qui se trouvait à sa portée.

Pourtant à leur grande surprise rien ne se produisit, et il sembla même reprendre le contrôle car sa voix était curieusement sereine lorsqu'il exigea, avec quand même un brin de froideur.

- Ne me dis pas qu'il est vivant ou-

- Non, s'empressa Elfman, le coupant avant que sa colère ne risque d'exploser. Il est bel et bien mort mais…

- Explique.

Elfman fut pris au dépourvu par son sang-froid, et légèrement acculé par le contraste qui existait entre la frénésie animale qui brûlait dans ses yeux et la sévérité de son comportement et de sa voix.

- Quand Deliora a été détruit, son corps s'est divisé en plusieurs fragments qui se sont dispersés un peu partout, répondit-il, un peu effrayé par le risque que Gray ne se change en bête furibonde s'il le faisait attendre plus longtemps. A priori il y en aurait une dizaine environ, et leur puissance est vraiment colossale. Natsu serait allé à Ascalön pour avoir plus d'infos sur le sujet mais on sait pas pourquoi.

Il se tut, laissant le temps à ses interlocuteurs et surtout à Gray de digérer l'information. Même s'il était au moins rassuré sur le fait que Natsu ne comptait pas tuer Deliora tout seul, le mage de glace n'en restait pas moins furieux et perplexe. L'existence de ces fragments n'aurait pas dû changer si radicalement le cours de leur vie, qu'importe leurs pouvoirs. Il n'y avait aucune raison pour que Natsu se mette à leur recherche, et encore moins en s'infligeant le supplice de quitter la guilde dans ce but. Il y avait forcément autre chose, et il avait peur de découvrir quoi. Deliora avait déjà tant détruit de vies, il ne pourrait supporter qu'il anéantisse celle de Natsu.

Erza gardait un œil prudent sur lui et son évolution émotionnelle, inquiète que dans son désarroi il n'atteigne un dangereux point de rupture. Il était déjà miraculeux qu'il fût parvenu à garder son sang-froid jusque-là malgré la recrudescence des émotions négatives que l'évocation de Deliora avait occasionnée.

- Et pourquoi vous voulez aller là-bas ? Demanda-t-elle, s'assurant d'un coup d'œil discret que son ami restait calme.

Mirajane inspira profondément pour dénouer la tension de ses épaules et se recala contre le dossier de son fauteuil.

- Pour la même raison que vous d'aller à Fürg. Si Natsu s'est rendu là-bas, il doit y avoir une raison, qui doit être plus ou moins liée à ces fragments.

- Pourquoi ne pas voyager ensemble dans ce cas ? Proposa Lucy.

Mirajane hocha la tête de désapprobation.

- Non, le temps nous manque. Il faudrait une semaine pour nous rendre à Ascalön depuis Lüditzen, et une autre pour aller à Fürg, si ce n'est plus. Entre temps la situation aura pu changer et qui sait le temps dont on dispose vraiment avant qu'il ne soit trop tard. Natsu est déjà parti depuis cinq mois, on ne peut pas se permettre de perdre plus de temps. Il faut se séparer. On se fixera un point de rendez-vous dans un intervalle de temps précis.

Pendant quelques instants, on n'entendit que le murmure de la brise dans les branches, les glouglous du ruisseau, les jacassements lointains d'écureuils bavards. Lucy sentait Gray de plus en plus nerveux au fur et à mesure de la conversation.

- Est-ce que vous avez appris quelque chose sur cette histoire de dragon de feu ? Demanda-t-elle quand même, espérant que sa question ne devienne pas le détonateur de la bombe humaine assise à côté d'elle. C'est bien d'Igneel qu'il s'agit, n'est-ce pas ?

Mirajane ferma les yeux quelques brèves secondes.

- On n'a pas appris grand-chose sur le sujet, malheureusement. Les seules choses dont on est sûr c'est que Natsu est allé à Ascalön pour se renseigner sur les fragments de Deliora et qu'il a ensuite pris la route vers Fürg. On n'en sait pas plus que vous sur ce qu'il y a fait et sur ce qui l'a poussé à s'y rendre. On ne sait même pas s'il y est toujours, s'il est en train d'y aller ou s'il en est déjà parti.

Après une courte pause, sentant que ses amis s'étaient incroyablement tendus depuis le début de la conversation, elle tenta de les encourager.

- Ne baissez pas les bras. Rien n'est perdu.

Ce fut à cet instant que la bombe détona, faisant sursauter toutes les personnes présentes. Gray avait brutalement abattu son poing sur la table en se levant d'un bond.

- Je n'abandonnerai pas tant que j'aurais pas foutu une bonne droite à cet abruti pour lui remettre les idées en place !

Ne laissant le temps à personne de l'en empêcher, tendu comme un ressort, il sortit sans un regard pour qui que ce soit, claquant violemment la porte derrière lui.

Son départ explosif jeta un froid mordant sur les personnes restantes, qui s'échangèrent un regard confus et préoccupé avant de détourner brièvement leur attention sur la porte par laquelle le mage de glace venait de sortir. Aucun d'eux ne parla pendant un long moment, perturbés par leur inquiétude pour lui et l'atmosphère glaciale que son accès de rage avait laissée derrière lui.

Ils auraient voulu le suivre pour s'assurer qu'il allait bien, mais se continrent à contrecœur. Ils savaient mieux que de le confiner dans l'étroitesse de leur présence, qui l'empêcherait irrémédiablement de se laisser aller à ses émotions alors qu'il en avait tant besoin. Ils préféraient lui laisser le temps de converser avec elles avant d'interagir à nouveau avec lui, et ce fut donc non sans se faire du souci qu'ils se contraignirent à une passivité temporaire.

Il demeurait nécessaire que quelqu'un lui parle lorsqu'il aurait repris son calme pour l'aider à se retrouver à travers ce dédale de haine et de culpabilité dans lequel il commençait déjà à se perdre. Chaque fois que Deliora était impliqué il ne pouvait s'empêcher de se sentir responsable de tous les malheurs qu'il causait, et apprendre que Natsu était le prochain sur la liste de la créature avait achevé de consumer ce qui restait de son équilibre émotionnel. Ils n'osaient imaginer ce qu'il pouvait ressentir, sans compter qu'il considérait comme une trahison le fait que son rival ait décidé de s'occuper de Deliora sans lui en parler. Cela faisait beaucoup à gérer pour lui, et ils se devaient de le garder éloigné de son point de rupture à tous les prix.

L'atmosphère pesante devint rapidement insupportable pour tout le monde, encourageant Erza à rompre le silence prolongé.

- Comment vous avez su que les fragments de Deliora s'étaient dispersés ? Quel genre de pouvoirs ils renferment exactement ?

- Malheureusement je n'en sais rien, admit Mirajane, déçue de ne pouvoir satisfaire leur besoin de réponses. Si seulement on l'avait su… on aurait pu en déduire la raison pour laquelle Natsu veut en savoir plus sur eux.

C'était précisément ce qu'Erza avait espéré en posant la question, mais elle s'attendait à cette réponse.

- Quant à la personne qui nous a renseignés, continua Mirajane, c'est un conteur qui s'appelle Zexion. Avec Elfman nous avons essayé de trouver les liens qui auraient pu unir le Royaume de Fiore et celui de Lüditz en feuilletant des livres sur leur histoire respective, et on nous a conseillé d'aller le voir. C'est lui qui a écrit ce texte sur l'attaque des aliméciens desquels Natsu a défendu la ville. Du coup on lui a rendu visite et il nous a expliqué ce qu'on vient de vous dire.

Mirajane s'interrompit pour se plonger dans ses souvenirs de leur entrevue avec cet homme étrange.

- Qu'est-ce qui t'inquiète ? demanda Lucy, alertée par son air soucieux.

- Son comportement était vraiment bizarre, avoua-t-elle bien que toujours songeuse. On a bien essayé de lui demander comment il en avait appris autant sur Deliora, mais il a toujours habilement tourné autour du pot.

- Il parle un peu trop bien si vous voulez mon avis, renchérit Elfman. C'est comme s'il le faisait exprès pour nous embrouiller et c'est très énervant. En plus il donnait vraiment l'impression de connaître Natsu, mais on avait beau lui poser plein de questions il arrivait toujours à les esquiver. Ce mec est super chiant.

Malgré le sérieux des informations capitales qui se cachaient dans son petit discours, les filles ne purent s'empêcher de ricaner gentiment face à la bien trop évidente irritation que lui inspirait ce fameux Zexion.

- Je crois comprendre que tu l'aimes pas trop, Elfman, affirma Lucy avec un sourire taquin.

- Pas trop non. Il n'a pas l'air d'être un mauvais gars, mais il est vraiment exaspérant.

- Haha, je vois.

La jeune fille renforça son sourire, qui devint plus affectueux que rieur, et Elfman le lui rendit avec un air gêné. Rapidement l'atmosphère redevint méditative, notamment à cause de la probabilité que ce conteur connaisse vraiment Natsu et pourrait leur en apprendre plus que ce qu'il avait déjà bien voulu leur dire. Pourtant personne ne relança le débat, et la conversation se clôtura ainsi. Mirajane se leva, moralement épuisée d'avoir tant parlé.

- Allez chercher Gray. Je vais vous expliquer la suite des opérations.

- J'y vais, se proposa aussitôt Lucy, plus que pressée de s'assurer que le mage de glace allait bien.

Elle se leva à son tour et sortit, prête à tout pour fournir à son ami tourmenté le réconfort dont il avait besoin.


Les lieux s'étendaient en un dédale sinistre de couloirs étroits et oppressants, creusés à même la pierre brute noircie par l'humidité et le temps. Les murs suintaient d'humidité, dégoulinant de moisissures qui exhalaient une odeur nauséabonde de pourriture et de désespoir. Des flaques d'eau croupissante luisaient faiblement sous la lueur vacillante des torches qui jetait des ombres inquiétantes sur les murs, accentuant l'aura de malheur qui imprégnait l'endroit.

Les lourdes grilles de fer rouillé se succédaient telles des gardiennes d'horreurs oubliées. Le silence était absolu, seulement brisé par le goutte-à-goutte régulier de l'eau grisâtre qui s'aplatissait au sol, ajoutant à l'atmosphère lugubre et étouffante de ces lieux abandonnés. Dans cet endroit maudit, le temps semblait s'être arrêté, abandonnant les âmes piégées à une éternité de souffrance et de pénitence.

Des pas résonnèrent lugubrement dans le silence glacé, parcourant les couloirs jusqu'à une minuscule cellule. Le son régulier de ses bottes contre la roche dure était accompagné du bruissement continu d'un corps trainé sur le sol, résonnant comme une sinistre symphonie dans cet antre de désolation.

L'homme jeta son fardeau à l'intérieur de la geôle d'un geste désinvolte sans se préoccuper une seconde des dégâts occasionnés à sa charge, qui roula sur le sol en laissant une trainée de sang sur son passage. Malgré l'impact brutal de son corps brisé de toute part avec la pierre dure, le prisonnier n'émit pas le moindre son, totalement inconscient du monde extérieur et de ce qui lui était infligé. Un deuxième corps, plus petit, fut balancé sans précaution dans la geôle glaciale, dont la grille de métal fut ensuite refermée d'un geste brusque derrière leur ravisseur.

Ce dernier s'avança vers sa première cible, qu'il attrapa par les cheveux pour la trainer de force contre le mur le plus éloigné de la sortie, où une paire d'entraves en fer pendouillaient sinistrement. L'homme retira celles qu'il portait déjà, qui maintenaient fermement ses poignets dans son dos, avant d'y verrouiller les nouvelles avec un claquement sonore. Chacun de ses bras fut enchaîné de sorte qu'il reposait tristement le long de son corps inerte, relié au mur derrière lui par de lourdes chaînes en acier.

Celles-ci raclèrent le sol lorsque l'homme le souleva de nouveau, par la gorge cette fois, pour s'offrir une meilleure vue sur ce qu'il était parvenu à vaincre, torturer, puis capturer. Un sourire carnassier étira ses lèvres alors que le souvenir jouissif du craquement de ses os se brisant sous ses coups et de ses hurlements de douleur résonnait dans sa tête.

- Tu vas enfin obtenir le châtiment que tu mérites, jubila-t-il d'une voix glaciale. J'en frémis d'impatience.

Il le lâcha négligemment sans prêter attention à la manière totalement désarticulée avec laquelle son corps retomba à terre ou à sa tête qui heurta violemment le mur, endommageant un peu plus son crâne déjà fracturé.

- Tu vas rester avec nous quelques temps, jusqu'à ce le piège soit en place. On ne peut pas te laisser en liberté, ce serait dommage que tu fasses tout capoter en allant les sauver, pas vrai ? En plus comme tu le sais il y a quelqu'un qui veut te voir. C'est ce qu'on appelle faire d'une pierre deux coups.

Son sourire s'élargit tandis qu'il passait sa langue sur ses lèvres, tout en contemplant avec une fascination malsaine le corps déchiqueté affalé à ses pieds. Il en savoura la moindre plaie ouverte, la moindre facture, la moindre trace de sang, et surtout les traînées de larmes séchées qui creusaient ses joues. Sa victoire sur ce cloporte puant était totale, et il ne pouvait en être plus satisfait.

- Ne t'inquiète pas, on va bien s'occuper de vous deux. Je suis sûr que tu vas adorer ce qu'on a prévu pour toi. Profite bien de cette pièce confortable parce que tu ne vas pas la voir longtemps.

Sur ces dernières paroles, sans se préoccuper de sa deuxième prise toujours inerte dans le coin opposé de la cellule, Temenas fit volte-face et sortit, ce même sourire sinistre aux lèvres.

Il trépignait d'impatience d'être enfin félicité par Zeref.


Mot de l'auteur : Et voilàààà !

Quoi de mieux qu'une fin tout en douceur xD. Hâte de connaître vos hypothèses ! J'espère que c'est suffisamment clair et vague à la fois pour vous donner envie de savoir de quoi il retourne :).

Alors quelques petits trucs à dire ! Déjà y'a Gajeel, je tiens déjà à dire qu'il aura une place importante, un peu plus que les autres Dragon Slayers (sauf un que vous connaissez pas encore mais que vous verrez plus tard ;)). Mais ça vient aussi du fait que là où commence l'histoire, Gajeel et Natsu sont les seuls Dragon Slayers que l'on connaît. Le fait que ma fic ait mis plus de vingt ans à vraiment prendre forme a permis d'incorporer certains personnages que le manga n'introduit que plus tard, mais du coup les personnages ne les connaissent pas encore. Ils y seront pas forcément tous d'ailleurs, je peux pas incorporer tout le monde, vous allez voir c'est déjà suffisamment compliqué comme ça... J'ai des fichiers entiers de "Questions-réponses" pour être sûr de ne pas zapper certains éléments du scénario et faire en sorte que tout reste cohérent. Chaque fois qu'une idée me vient, même si je ne suis pas sûre de l'incorporer à l'histoire, je le note pour ne pas l'oublier. Bref, vous verriez mes fichiers c'est un bordel sans nom :p. Tout ça pour dire que voilà, l'histoire ne sera malheureusement pas cohérente avec ce qu'on sait plus tard dans le manga.

Ouais donc je disais, Gajeel va être le plus important, même si on ne le verra pas autant que d'autres persos. Je pense que ça se voit avec le paragraphe qui lui est dédié au début, c'est d'ailleurs pour ça que j'ai fait en sorte qu'il ne soit pas là dans les chapitres précédents. Il peut peut-être vous paraître trop attaché à Natsu qu'il le serait dans le manga, mais dans tous les cas ce comportement est entièrement justifié par le scénario, même si ce n'est pas forcément clair pour vous pour l'instant. J'espère que vous aimerez son développement.

Ensuite Lüditz. Sur ce point j'espère surtout avoir été suffisamment concise et claire pour que ce soit bien compréhensible sans vous ensevelir sous les informations et surtout les noms de lieux ou de villes. Dans tous les cas dites-vous que tout a son importance, que ce soit le fait que la magie soit interdite, son histoire, son rapport avec les dragons etc, et c'est d'ailleurs valable aussi pour le reste. De manière générale les détails qui peuvent paraître anodins ou qui sont brièvement évoqués finissent toujours par avoir une explication plus tard, je dissémine plein de petits indices un peu partout qui à la fin vont former un tout.

Et après y'a Deliora. Comme vous pouvez vous en douter ces fragments sont très importants dans ce qui va suivre, et j'ai tellement hâte de rentrer dans le vif du sujet... Parce que c'est loin d'être tout ^^.

Et en dernier y'a la fin ! Hé hé… Mais je dirais rien ! Je vous laisse le soin de me dire ce que vous en avez pensé ^^. Dans tous les cas comme je l'ai expliqué au début du chapitre 1, Zeref va être différent de ce qu'il est dans le manga.

Bon bah voilà, je crois que j'ai dit tout ce que j'avais à dire ! Je ne peux que vous supplier à nouveau de me laisser un tit quelque chose si ça vous a plu, en vrai c'est très dur de me retenir de publier la suite plus vite mais je préfère laisser le temps aux gens de découvrir la fic pour ne pas aller trop vite, donc pour l'instant j'essaye de me tenir à un chapitre par mois. Si assez de gens le veulent je publierai plus tôt ^^.

Sinon comme je l'ai dit au début, vous pouvez me suivre sur twitter Gzou Fanfics si vous voulez, par contre à partir de maintenant je vais commencer à écrire les tweets directement en anglais pour que ce soit plus facilement compréhensible pour tout le monde. Sur mon profil vous verrez un linktree qui vous donnera d'autres liens, comme le discord, si jamais vous voulez venir papoter :).

A la prochaine !