Salut tout le monde!

Petit cadeau pour la Saint-Valentin !

On espère qu'il vous plaira et on tient à vous dire qu'on ne lâche rien !

Bonne lecture!


Chapitre 12

"Harry ?"

"Mm ?" Harry fredonnait distraitement, en arrosant soigneusement la dinde avant de la remettre au four.

"Pouvons-nous garder le miroir au-dessus du lit ?"

Tout en se retournant et en s'essuyant les mains sur un torchon, Harry sourit à Draco : "Pervers".

"Bien", renifla Draco. "Je pensais juste que tu aimais ça, c'est tout", expliqua-t-il, le ton de sa voix suggérant qu'il ne s'en souciait pas plus que ça.

Harry rigola doucement et jeta la serviette sur le plan de travail. "Oui, Draco, on peut garder le miroir. En fait, j'en ai commandé un adéquat il y a une semaine, pour qu'on ne s'embête pas avec le charme réfléchissant. Je pensais qu'il serait déjà là", apaisa Harry en ébouriffant les cheveux de Draco alors qu'il passait devant sa chaise et commençait à ranger des piles d'assiettes dans l'un des placards.

Draco se sourit à lui-même. Ils étaient vraiment sur la même longueur d'onde à propos de tant de choses. "Tu n'as pas encore fini ?" demanda-t-il boudeur. "Je veux ouvrir ma chaussette de Noël."

"Une chaussette de Noël ?" interrogea Harry, d'une voix taquine et pleine d'humour. "Qu'est-ce qui te fait croire que tu en as une ?" Il s'était détourné du rangement des assiettes et se tenait adossé au placard, les bras croisés, un amusement contenu sur le visage.

"Le fait que tu sois désespérément sentimental à propos de Noël", l'informa Draco. Puis il avoua, un peu à contrecœur, "Et le fait que je l'ai vue accrochée dans l'armoire quand j'ai sorti ce T-shirt". Il tira sur le haut qu'il portait et fit un sourire complice à Harry.

"Tu es un putain de gamin," ria Harry en secouant la tête devant l'empressement à peine voilé de Draco. "Allons-y donc. Voyons ce que le père Noël t'a apporté, d'accord ?" Il s'éloigna du placard et tendit la main à Draco, qui l'a prit avec joie. Il finit par traîner Harry après lui dans son excitation à mettre la main sur ses premiers cadeaux du matin. Bon, d'accord. Ce n'était pas son premier cadeau. Celui-ci était arrivé environ une demi-heure plus tôt sous la forme d'une bouche chaude et humide qui l'avait doucement tirée du sommeil. Alors qu'il avait ouvert les yeux le matin de son premier Noël avec Harry, tout ce qu'il avait pu voir était une grosse bosse sous les couvertures, qui produisait des gémissements très excitants et par-dessus son érection reconnaissante, l'accompagnement parfait du voyage tranquille des lèvres, de la langue et des dents.

Quand Draco eut joui, Harry avait lentement rampé sur son corps, poussant son visage rougi hors des couvertures et souriant presque comme un drogué qui venait d'avoir sa dose. Quand il l'avait embrassé, Draco avait clairement pu se goûter, et il s'était demandé fugacement s'ils feraient cela tous les matins de Noël pour le reste de leur vie, un rituel festif pour accueillir la journée. Il avait pensé que cela pourrait être le début de quelque chose. Une façon de célébrer qui leur serait propre et un autre signe important de leur amour.

Draco grimpa sur le lit pendant qu'Harry sortait sa chaussette de l'armoire. "Oooh ! c'est une grosse !", dit Draco en riant, tandis qu'Harry l'étalait à côté de lui et s'écroulait à son tour sur le lit, le visage plein de chaleur et d'affection. "J'ai toujours rêvé de grands bas empaillés", dit-il à Harry de manière suggestive, sa voix devenant haletante et pleine de taquineries.

"Gah !" s'exclama Harry à voix haute, en s'agrippant la gorge et en se roulant sur les couvertures. "Quelle image hideuse !"

Draco regarda Harry devenir violet à force de rire, son visage se tordant de répulsion simulée. "Quoi ?" demanda-t-il, confus.

Quand Harry se tourna finalement vers lui, quelque peu calmé, il fit une grimace et dit : "J'ai eu cette image horrible de Molly Weasley dans ma tête quand tu as dit "bas empaillés". S'il te plaît, ne le dis plus jamais. Du moins, pas sur ce ton".

"Je parie qu'Arthur Weasley aime bien cette idée", marmonna Draco, en tirant le bas sur ses genoux et en le secouant avec curiosité. "Veux-tu la tienne ?" demanda-t-il à Harry avec précaution, sachant pertinemment que ce dernier s'attendait à ce que Draco soit nul pour acheter des cadeaux, et surtout pour faire quelque chose d'aussi enfantin que d'emballer des chaussettes de Noël.

"Tu m'as acheté un bas ?" demanda Harry avec un étonnement absolu. Lorsque Draco hocha la tête, il s'exclama : "Vraiment ? C'est fantastique !" Il se retourna vers l'endroit où Draco était assis et lui donna un gros baiser mouillé sur la bouche. "Tu n'étais pas obligé", dit-il, mais Draco se dit que de voir cette expression sur le visage d'Harry valait plus que la peine.

Draco récupéra la chaussette d'Harry dans un tiroir, et ils s'assirent l'un en face de l'autre, ressemblant à deux concurrents sur le point de commencer une course.

"Trois...deux...un. Go !" s'écria Harry, et ils prirent chacun leur cadeau par le haut et déchirèrent le papier d'emballage. Ils rigolèrent à gorge déployée quand il est devenu évident que Fred et George s'en étaient bien sortis tous les deux. Ils avaient chacun reçu deux ou trois cadeaux stupides de Weasley farce pour sorcier facétieux, ainsi que d'autres objets, tels qu'une plume d'oie auto-encreuse, une paire de boutons de manchette de Snitch et, plus particulièrement, deux jeux presque identiques de pinces à tétons. Les deux pour Draco, en fait, bien que celui-ci choisit de faire une offrande à Harry pour l'un des ensembles, donnant son consentement muet à leur utilisation sur son corps selon les caprices de son amant.

Lorsque tous les cadeaux furent déballés et que le lit fut recouvert de plus de papier déchiqueté que ne le justifiait un si petit nombre de colis, ils se rapprochèrent et s'enlacèrent. Les cheveux d'Harry venaient d'être coupés et Draco peigna rêveseument les mèches à l'arrière de sa nuque du bout de ses doigts, dessinant des motifs informes sur son cuir chevelu et faisant légèrement frissonner Harry.

"C'est agréable", soupira Draco, en souhaitant presque qu'ils puissent rester là, et ne pas avoir à recevoir des gens toute la journée.

"Mmm", souffla Harry en réponse, enfonçant son visage dans la courbe chaude du cou de Draco. "Devons-nous rester ici ?"

"Je suis sûr que ma mère serait ravie de prendre le petit déjeuner dans ta chambre avec nous", répliqua doucement Draco.

Harry se retira avec une certaine réticence. "Elle sera bientôt là", dit-il. "Je dois couper le saumon fumé." Il commença à se traîner hors du lit, mais se laissa arrêter quand Draco plaça une main sur son poignet.

"J'ai un autre cadeau que je veux te donner avant", dit Draco, en rencontrant les yeux d'Harry et en se demandant comment il réussissait à ne pas tomber dedans et à ne plus jamais refaire surface.

"Je pensais que tu me l'avais déjà donné", sourit Harry, se rappelant clairement la réponse reconnaissante de Draco au sujet de sa gâterie de ce matin. Draco plissa le nez en feignant d'être ennuyé, mais il ne répondit pas.

Harry le regarda avec curiosité, alors qu'il appelait d'un Accio un cadeau sous le sapin dans l'autre pièce, et qu'il tendit la main pour l'attraper. "Joyeux Noël, Harry", dit-il, l'affection étant évidente dans sa voix.

Harry lui sourit si sincèrement que le coeur de Draco manqua un ou deux battements avant de se calmer à nouveau. Il s'assit, souriant avec indulgence, tandis qu'Harry enlevait le ruban adhésif et soulevait le papier d'aluminium rouge pour ouvrir le cadeau.

"Wouah !" s'extasia Harry dans un plaisir respectueux. "C'est un vrai appareil photo de sorcier !" Draco gloussa et enfonça ses genoux dans sa poitrine. Il observa Harry lutter avec la boîte, puis il mit enfin la main sur la caméra, la retournant sans cesse pour pouvoir la regarder sous tous les angles.

"Je pensais que nous serions capables de faire nos propres photos de famille si nous en avions un", avoua Draco, se sentant un peu gêné du plaisir évident d'Harry. Il semblait frauduleux, d'une certaine manière, de rendre Harry aussi heureux avec un si petit présent.

"Oh, c'est tout simplement parfait !" Harry rit. "Je n'arrive pas à croire que tu t'en sois souvenu !"

Oh, Harry, pensa Draco. Si seulement tu savais. Je me souviens de tout ce que tu dis. "Il y a plein de pellicule dans mon tiroir à chaussettes. Je ne savais pas combien de photos tu voudrais prendre."

"Des tonnes", gloussa Harry, avant de bondir hors du lit à la recherche d'une bande. Une fois qu'elle fut chargée, Harry pointa l'appareil vers Draco (et dit) : "Dis cheese".

Draco fit mieux que cela. Il souffla plutôt un baiser, et Harry rigola avec plaisir en s'éloignant. "Allez", dit finalement Draco. "Mère va arriver d'une minute à l'autre." Il sortit de la chambre, souriant tout seul aux petits bruits des rires d'Harry et du cliquetis de Merlin ne savait quoi, quelque part derrière lui.

Draco salua sa mère devant la cheminée officielle dans le hall d'entrée principal. Elle s'était habillée de façon beaucoup plus décontractée que d'habitude pour un déjeuner, et Draco réalisa, alors qu'elle le serrait contre elle et lui embrassait la joue, qu'elle faisait de son mieux pour s'intégrer aux Weasley. Il lui dit chaleureusement à quel point elle était jolie, et elle lui répondit par un rire de jeune fille avant de partir à la recherche d'Harry. Draco regarda sa mère et Harry ensemble. C'était presque comme si elle l'avait adopté comme son propre fils. Elle le serra très fort dans ses bras et l'embrassa sur la joue également. Harry rougit sous ses attentions affectueuses, mais il les lui rendit sincèrement, et Draco fut réconforté de voir à quel point de dernier l'aimait sincèrement.

Harry réussit à préparer le plus délicieux des déjeuners au saumon fumé et aux œufs brouillés malgré ses photos à répétitions. Il devait avoir épuisé un rouleau presque complet avec Draco et sa mère, à l'exception des quelques photos que Narcissa réussit à prendre, d'Harry et Draco assis l'un à côté de l'autre, riant et plaisantant ensemble pendant qu'ils mangeaient.

Il leur fallut une éternité pour ouvrir leurs cadeaux, car il semblerait qu'ils aient tous dépensé sans compter. Et bien sûr, il y avait eu une photo à chaque déballage. Le monticule de paquets aux couleurs vives faisait plus de deux pieds de haut et ils les ouvraient à tour de rôle, se regardant avec des yeux avides et de grands sourires. Il y avait beaucoup trop de cadeaux à énumérer et la variété était incroyable. Le cadeau préféré de Narcissa semblait être une nuisette Chudley Cannons complètement hideuse, dans l'orange le plus acide qu'on puisse imaginer. Elle en riait si fort qu'elle en avait les larmes aux yeux. C'était l'idée d'Harry de l'offrir, mais Draco n'en était pas convaincu. Il haussa les épaules à son attention, admettant en silence qu'il avait eu tort, et il fut récompensé par un clin d'œil très effronté.

Bien sûr, Draco garda son meilleur cadeau jusqu'à la fin, et il y avait de vraies larmes dans les yeux de sa mère quand elle l'ouvrit. Elle resta silencieuse pendant plus d'une minute, regardant fixement la longue boîte de velours, sa bouche formant un petit "o" surpris, les yeux grands ouverts d'émerveillement. Narcissa portait rarement du rouge, mais Draco pensait toujours que c'était une erreur. Avec son teint, elle avait l'air spectaculaire avec de l'écarlate. Dans cette optique, Draco lui avait commandé une magnifique parure. Le collier était constitué de trois simples rangs de perles crème pâle, mais sa pièce maîtresse était un rubis rouge sang, le plus profond qu'on puisse imaginer, en forme de grosse larme. Les boucles d'oreilles étaient des larmes miniatures façonnées dans la même pierre. Harry avait approuvé son choix lorsque Draco avait suggéré l'idée, l'argent n'étant pas un problème lorsqu'il s'agissait de la remercier pour tout ce qu'elle avait fait et continuait à faire pour eux. Il fallut un certain temps à Draco pour se rendre compte qu'elle pleurait, car les larmes coulaient silencieusement. Bien sûr, elle avait dû apprendre à pleurer sans un bruit pendant toutes ces années avec Lucius. Le simple souvenir de son père lui rappela avec force la dernière fois qu'il l'avait vue pleurer. C'était dans le salon du manoir, un jour entre l'exécution de Lucius et son enterrement. Ils n'en avaient jamais reparlé, et Draco s'était toujours demandé si elle avait pleuré de tristesse ou de soulagement.

"Je n'en ai jamais eu", chuchota-t-elle. Sa voix était si basse que Draco et Harry durent se pencher pour l'entendre. "Beaucoup par héritage, mais pas de bijoux juste pour moi." Draco observa son visage tandis qu'elle regardait les rubis scintillants sur ses genoux, et il y avait de la tristesse dans son expression. Elle fronça soudain les sourcils et regarda Draco droit dans les yeux. "Vous les garderez, n'est-ce pas ?" demanda-t-elle, ou plutôt, plaida-t-elle. "Ne vends pas les bijoux, Draco. Un jour, il y aura peut-être d'autres Malfoys à qui tu pourras les passer." C'était une chose désespérément triste à entendre. Il n'y aurait pas d'autres Malfoys, et ils le savaient tous.

"Bien sûr que je les garderais", rassura-t-il, et elle se précipita sur le canapé et s'accrocha à lui. Il la serra contre lui et ressentit la douleur. Sa douleur. Il regarda Harry par-dessus l'épaule de sa mère et il y avait une certaine compréhension dans l'expression d'Harry que Draco ne pouvait pas comprendre. C'était quelque chose en rapport avec la famille et l'histoire, Draco en avait le pressentiment, mais au-delà de ça, ne pouvait pas savoir.

Il fallut à Narcissa une minute ou deux pour lâcher prise, et lorsqu'elle le fit, elle les remercia tous les deux à profusion et se mit à leur remettre un très gros paquet plat dans les mains. C'était un cadeau pour tous les deux, leur dit-elle, alors ils défirent le ruban adhésif ensemble, résistant à la tentation de déchirer le papier pour l'ouvrir plus vite.

C'était un tableau. Ou plutôt, un portrait. Il les montrait tous les deux ensemble, debout devant la grande entrée du manoir des Malefoy. Ils portaient tous les deux leurs costumes préférés et, lorsque le papier tomba, leurs portraits les accueillirent et les saluèrent de la toile. Draco était silencieux de stupéfaction, et Harry semblait ressentir la même chose. Ils s'agenouillèrent l'un à côté de l'autre sur le sol, fixant les détails exquis de la représentation et absorbant le décor et le cadre orné et doré. Lorsque le Harry peint se retourna et donna un baiser sur la joue de Draco, le prenant dans ses bras, le vrai Draco observa la façon naturelle dont ils se déplaçaient ensemble, et surtout, leur apparence parfaitement heureuse. Il sourit lorsque le vrai Harry imita le geste, et Draco se retourna et l'embrassa correctement, mais avec retenue, conscient de la présence de sa mère.

"Cissa, c'est magnifique", dit Harry doucement. "Merci beaucoup."

Draco regarda sa mère et lui sourit si chaleureusement que les larmes lui piquèrent à nouveau les yeux. Il savait que cette image était bien plus que ce qu'elle semblait être. Le décor du Manoir Malefoy était son approbation finale d'Harry comme son partenaire. En les montrant devant sa maison familiale, elle leur donnait sa bénédiction pour leur union. Le manoir serait à eux après que son temps soit écoulé. "Tu n'aurais pas dû", commença Draco, sachant que tout remerciement serait inadéquat pour ce cadeau incroyable. "Comment as-tu... ?"

Narcissa soupira joyeusement pendant un moment avant de répondre : "J'ai bien peur d'avoir dû ruser à propos de tout cela. L'artiste vous suit tous les deux depuis plusieurs mois maintenant. Il avait besoin de vous peindre dans la vie pour capturer le mouvement, voyez-vous". "Comme c'est sournois de votre part", dit Draco avec ironie.

Elle sourit sans honte. "Je sais", répondit-elle. "Ce n'est pas le seul tableau qu'il a fait, en fait. Il en a d'abord fait un petit, juste un portrait de la tête et des épaules de vous deux. Je l'ai accroché dans la galerie hier soir".

"Je parie que ça s'est bien passé", gloussa Draco, lourd de sarcasmes.

"Eh bien, Lucius avait certainement quelque chose à dire, vous pouvez l'imaginer", soupira-t-elle, un soupçon d'humour dans sa voix. "Je l'ai accroché juste en face de lui, et il a fait un tel scandale !"

"Mère !" Draco était sous le choc. "Ne pensez-vous pas qu'il aurait été sage d'aborder ma sexualité avec lui d'abord ? J'imagine que la vue d'Harry et moi ensemble l'a encore tué."

Narcissa agita la main avec dédain. "Oh, balivernes ! Ça fera du bien à ce vieux grincheux de te voir heureux", dit-elle avec malice. "Il n'a pas passé assez de temps à se préoccuper de ça quand il était en vie. Le moins qu'il puisse faire est de changer cela maintenant qu'il est mort. Mais vous auriez dû le voir se battre pour traverser toutes les autres peintures afin de pouvoir se rendre à la vôtre et vous dire sa façon de penser. Ce bon vieil arrière-arrière-grand-père Percival", sourit-elle. "Il a arrêté ton père avec son regard meurtrier."

Draco ricana. L'idée du portrait de son père qui s'agite et se déchaîne et qui laisse échapper une série d'obscénités homophobes était en fait assez amusante. Il devait se souvenir d'aller visiter la galerie quand il reviendrait au manoir. Il n'y était pas allé depuis des années. Il avait résolument évité l'inévitable confrontation père/fils, et la déception fâcheuse qui allait sans doute résulter des mots qu'ils pourraient échanger.

"Devons-nous l'accrocher au-dessus de la cheminée ?" demanda Harry, poussant Draco à sortir de sa rêverie. "Si nous sommes rapides, nous pourrions le monter avant que les Weasley ne commencent à arriver. J'ai une demi-heure avant de devoir mettre les pommes de terre à rôtir."

Il leur fallut toute la demi-heure pour accrocher la photo. Narcissa se tenait en retrait, "supervisant" sans aide, en murmurant : "Un peu à gauche...non, non...un peu à droite. Non... encore à gauche..." jusqu'à ce que même Harry en eut les nerfs à vifs. Mais au moins, le travail était fait, et il y avait le temps de ramasser le papier cadeau avant que le reste des invités n'arrivent.

~oOo~

La première personne à arriver fut Rémus Lupin. Il sortit de la cheminée et attira Harry dans un gros câlin, lui donnant une bonne claque dans le dos, apportant une luminosité bien nécessaire à son visage fatigué. Ils étaient visiblement heureux de se voir, pensa Draco.

Si Draco attendait un jugement de son ancien professeur, il était soit surpris, soit déçu, de ne pas en avoir. Lupin lui serra la main et lui sourit sincèrement, déclenchant une étincelle dans son œil qui rappela fortement Dumbledore à Draco. En fait, Harry soutenait souvent son opinion selon laquelle Lupin aurait été son choix de directeur pour Poudlard, malgré son respect très réel pour le professeur McGonagall. Lupin vivait à Grimmauld Place, et ce depuis la fin de la guerre. Harry l'avait encouragé à créer un refuge pour les victimes d'attaques au lycanthrope, et bien qu'incroyablement discret, l'association caritative que dirigeait Lupin était bien pensée. Draco devait bien l'admettre, cet homme avait du cran et de la détermination, c'était certain. Mais la plus grande surprise de l'entreprise était l'implication de Severus Rogue. Aujourd'hui directeur adjoint de Poudlard, Rogue avait continué à travailler sur les potions réparatrices et les inhibiteurs qu'il avait préparés il y a des années, lorsque Lupin était professeur de Défense contre les Forces du Mal, en les affinant pour ceux qui en avaient besoin.

Rogue. Malgré toutes les tendances de l'homme à paraitre froid, Draco le recontacta avec une réelle affection. Il savait que le maître des potions allait passer son jour de Noël à Poudlard, offrant une sorte de compagnie aux élèves qui restaient à l'école. Mais Draco le connaissait assez bien pour savoir que ce n'était pas une corvée comme Rogue le prétendait. Il y avait un cœur sous cette surface d'acier, bien qu'il ne s'exprimait que rarement. Draco et Harry avaient parlé de Rogue à de nombreuses reprises, et Draco souhaitait vraiment que la tension entre eux puisse être résolue. Il y avait trop d'eau qui avait coulé sous les ponts, semblait-il, pour réparer les torts du passé. Ils parvinrent à être brusquement polis lors des réceptions publiques, mais Draco souhaitait la fin des hostilités. Cependant, il ne voulait pas les forcer. Ce n'était pas son affaire, après tout.

Quelques minutes plus tard, un second rugissement retentit dans la cheminée, et Molly Weasley en sortit essoufflée, comme si elle avait couru de sa maison à celle d'Harry, et non pas fait irruption. Elle marmonna des "bonjours" distraits et se dirigea tout droit vers la cuisine, les bras chargés de bols de vaisselle et d'un assortiment de plats à moitié préparés. Elle était comme un mini-tourbillon et elle prit immédiatement en charge la cuisine d'Harry comme si elle y était née. Harry haussa les épaules en signe d'amusement et la laissa faire.

Le son de la musique de Noël remplissait l'appartement, et avec les lumières scintillantes, et l'odeur de la nourriture imprégnant chaque pièce, Draco se sentait vraiment comme à Noël. Il se pencha par l'embrassure de la cuisine et regarda Harry et Molly se battre pour la suprématie. Harry avait dit qu'elle aurait du mal à abandonner les rênes, et il semblait avoir eu raison.

Ron et les jumeaux arrivèrent ensuite, dans un grand éclat de rire avec le claquement, le bruit sec et le cri des feux d'artifice intérieurs qui explosaient. Les jumeaux étreignirent tous deux Draco, mais Ron se contenta d'une poignée de main, même si elle était authentique. Si Draco s'inquiéta du choix de salutation de Ron, il fut rassuré lorsqu'il regarda Ron serrer la main d'Harry. Il n'était manifestement pas très tactile. Pas comme les jumeaux qui, selon Draco, dépassèrent les limites en tripotant sa mère dans une étreinte pour lui souhaiter un joyeux Noël. Il secoua la tête de surprise en les regardant flirter outrageusement avec elle, ne s'interrompant que lorsque Molly aboya une réprimande depuis la cuisine.

Arthur, Hermione et les nouveaux jumeaux Weasley arrivèrent ensuite, frappant curieusement à la porte. Il s'avéra qu'Hermione avait reçu l'ordre de ne pas voyager par cheminette avec les bébés pendant encore deux mois, car ils étaient encore trop petits pour ça. Apparemment, Arthur Weasley avait sauté sur l'occasion pour venir en voiture à la place, et Draco souriait de voir l'heureuse frustration d'Hermione face à son enthousiasme débordant. Il parlait à toute vitesse "d'injection de poules" et de "tuyaux exhaustifs", alors même que Draco et Harry le saluaient tous deux d'une poignée de main.

Jouant le rôle du coanimateur poli, Draco se chargea de préparer les boissons pour ceux qui étaient arrivés, en partie pour aider Harry et en partie pour montrer à quel point il était à l'aise dans cet environnement. Il attira de temps en temps l'attention de sa mère, qui hochait la tête et lui souriait, exprimant son plaisir ainsi que sa surprise de le voir se comporter d'une manière si inhabituelle. Au manoir, les elfes de maison s'occupaient de tout le service. C'était exactement comme ça que Draco avait été élevé. C'était un Lord, après tout. Mais de la même façon qu'Harry n'était pas Le-Garçon-Qui-A-Vaincu chez lui, Draco n'était pas non plus Lord Malefoy. Ils n'étaient qu'Harry et Draco, jouant au couple dans le confort de leur propre maison. Sauf que contrairement à ses parents, qui avaient joué, Draco et Harry étaient un couple très heureux, et il était important, au-delà de toute mesure, que les Weasley l'acceptent parmi eux. N'importe lequel d'entre eux pourrait semer le doute dans l'esprit d'Harry, et Draco s'assurait de ne leur donner aucune munition à utiliser contre lui.

Il s'avéra que Bill et Fleur ne venaient pas. La grossesse de Fleur avait été annoncée plusieurs jours auparavant, et ils avaient pris la décision judicieuse de rester en France avec sa famille plutôt que d'entreprendre le voyage de retour en Angleterre. Percy avait pris un service de couverture d'urgence au ministère et ne les rejoindra donc pas non plus. Draco avait des soupçons à ce sujet. L'enquête sur les crimes de guerre avait montré que Percy était sur le point de prendre la Marque au moment de la chute de Voldemort. Il n'avait été sauvé de la disgrâce que par des témoignages peu concluants et des souvenirs ambigus. Draco

nota que Percy évitait d'être en sa compagnie à la moindre occasion. Il se demanda si Lucius avait joué un rôle clé dans le ralliement de Percy vers les Mangemorts, car cela pourrait peut-être expliquer sa réticence à s'impliquer avec lui sur quelque niveau que ce soit.

Il ne restait plus que Ginny et Charlie. Draco était inexplicablement nerveux de l'arrivée de cette dernière. Il pensa qu'il y avait quelque chose de bien pire que de lui arracher le tapis sous les pieds alors que ses parents étaient là. Il se demanda comment il allait gérer son humeur, et fut reconnaissant que Charlie ait été nommé son garde du corps non officiel.

Peu de temps après l'explosion au pub, Ginny avait volontairement été admise à St. Peerifool, une communauté thérapeutique qu'Hermione avait trouvée grâce à ses relations médicales. Le diagnostic de maladie mentale de Ginny n'avait surpris que peu de membres de la famille et d'amis proches, mais avait été la cause d'une grande tristesse pour tous. Les guérisseurs de St. Peerifool pensaient que la racine du problème de Ginny était l'incident du journal de Riddle. La proximité forcée avec la forme collégienne de Voldemort l'avait beaucoup affectée, mais son changement de comportement avait été considéré comme une crise d'adolescence à l'époque. Personne ne l'avait vu venir, mais quand Draco y pensait, c'était évident. Harry avait au moins eu une sorte de résistance face à Voldemort, grâce à l'Avada Kedavra auquel il avait survécu lorsqu'il était bébé. Un élément du Seigneur des Ténèbres était à jamais ancré en lui, et c'était sa protection contre le pire des stress. Ginny, bien sûr, n'avait pas cette capacité de résistance et était peut-être irrémédiablement altérée par son épreuve. Draco avait passé de nombreuses heures à réfléchir au diagnostic, et il se sentait en quelque sorte responsable, même si c'était purement la faute de son père. Sa culpabilité modifia ses émotions envers elle, et Draco se retrouva à avoir pitié plutôt qu'à haïr. Il ne pensait pas nécessairement que ce changement était une amélioration, et ce n'était certainement pas très "Serpentard".

Charlie et Ginny transplanèrent dans le couloir d'Harry peu après l'arrivée d'Hermione. Se tournant vers sa mère pour lui demander de l'aide, Draco remarqua qu'elle semblait également préoccupée, et il se demanda si elle ressentait la même responsabilité que lui. Ginny avait une expression absente, surtout dans les yeux. Elle avait l'air affreuse, avec une guirlande étincelante enroulée autour de son cou comme un foulard. Bras dessus, bras dessous elle se laissa guider en lenteur par Charlie jusqu'à la pièce principale, où Arthur Weasley lui sauta dessus et l'entraîna dans une étreinte effusive. Draco aurait pu jurer que les yeux d'Arthur étaient baignés de larmes pendant un instant alors que sa petite fille le serrait dans ses bras, mais il fut sauvé de l'état émotionnel dans lequel il se trouvait par l'interférence bruyante de Fred et George. Ils entraînèrent une Ginny rieuse loin de son père et la prirent dans leurs bras à tour de rôle, se battant avec bonté pour le privilège de passer en premier.

Lorsqu'elle se tourna finalement vers Draco, le visage de Ginny se décomposa dans un mélange d'expressions confuses. "Joyeux Noël, Draco", dit-elle, et il était sûr qu'elle avait un petit tic dans l'œil quand elle parlait.

Faisant de son mieux Draco lui sourit et se pencha vers elle pour lui embrasser la joue, comme il le ferait avec une vieille amie. Elle avait l'air terriblement triste quand il s'éloigna, et il y avait des remords dans ses yeux. Draco savait qu'elle voulait s'excuser, qu'elle allait probablement le faire, et il savait qu'il ne pouvait pas l'accepter, car elle était probablement comme ça à cause de son père. Sa bouche s'ouvrit pour parler, et il la coupa en douceur.

"Je pense qu'un verre s'impose", sourit-il. "Qu'est-ce que je te sers, Gin ?"

"Hum, je ne suis pas vraiment sûr", dit-elle distraitement.

"Que dirais-tu d'un petit Bucks Fizz ?" modéra-t-il. "Je te préviens, je fais un cocktail plutôt corsé."

Ginny avait l'air perdu. Elle regarda Draco comme s'il était un étranger, et de bien des façons, il supposa que c'était le cas. Finalement, elle sourit nerveusement. "Juste une goutte de champagne, alors. Je ne veux pas me ridiculiser."

Draco entendit le "encore" sous-entendu à la fin de sa phrase, et il lui frotta le haut du bras avec force, juste pour lui montrer que tout allait bien. "Une goutte c'est tout", dit-il dans la confidence, et il se détourna pour aller la servir. Harry avait observé l'interaction avec intérêt, et Draco le vit lui dire "merci" à travers la pièce. Il se sentait très heureux de pouvoir faire quelque chose de bien pour une fois en matière de sensibilité émotionnelle. Il était clairement en train d'apprendre !

Quand il revint avec son verre, Ginny se tenait silencieusement devant le portrait. Harry et Draco lui faisaient signe, et elle souria faiblement, leur faisant un hochement de tête pour les saluer.

"C'est magnifique", déclara-t-elle en prenant le verre.

"N'est-ce pas ?" dit Draco, en faisant un clin d'œil au tableau.

"Tu as de la chance", l'émotion était indéniable dans sa voix, mais contenue d'une certaine manière.

"Je sais", lui répondit-il, son visage lui montrant qu'il le pensait vraiment et qu'il aimait Harry plus qu'il ne pouvait le dire. C'était suffisant. Elle le salua avec son verre et s'éloigna vers Charlie. Il la regarda partir, et il se sentit plus en paix avec lui-même à ce moment-là. C'était un bon sentiment.

L'apéritif devint de plus en plus bruyant à mesure que les Weasley consommaient de l'alcool. C'était dans la bonne humeur, pensa Draco, et il se trouva engagé dans un débat long et passionné avec un Arthur Weasley en pleine forme sur les avantages des téléphones portables par rapport aux chouettes. La plupart des autres participants étaient à moitié en désaccord avec lui, mais c'était vraiment très amusant et il n'y avait aucune rancune.

Le véritable dîner de Noël était un chahut tout juste contenu. Ni Narcissa ni Draco ne savaient vraiment ce qu'il s'était passé, mais Harry et Hermione leur répondirent par un haussement d'épaules "c'est généralement comme ça". Ils se concentrèrent donc tous deux sur leur plaisir. Sans surprise, le repas fut un succès total. Draco avait été très touché lorsqu'Harry lui avait demandé de découper la dinde. Fred et George lui avaient fourni un roulement de tambour d'accompagnement lorsqu'il avait fait la première découpe, et des banderoles et des pétards avaient surgi dans l'air lorsqu'il avait commencé à servir la viande dans les assiettes.

À la fin, le repas mit près de trois heures à être consommé. De nombreuses blagues et histoires furent racontées pendant que les gens savouraient leur festin, et Rémus Lupin leur conta des histoires sauvages et passionnantes sur les légendaires meutes de loups-garous d'Europe de l'Est. Draco était complètement épuisé à la fin. Son ventre se frottait contre ses vêtements, et cela en disait long, car il avait pourtant choisi des jeans plus larges sur les conseils d'Harry.

Les jumeaux, Henry et Grace, dormirent la plupart du temps pendant les repas, même si Draco ne sut pas comment. Cela devait être comme essayer de dormir à côté d'un nid de Dragons affamés. De temps en temps, il observait sa mère, et la plupart du temps, elle regardait avec amour les bébés. Elle avait insisté pour les tenir tous les deux pendant qu'ils bavardaient avant de passer à table, et il y avait de nombreux aspects de son comportement qui rappelaient à Draco sa propre enfance avec une gratitude renouvelée. Le fait de la voir ainsi sans chercher à lui faire passer le moindre message fit réfléchir Draco sur les familles. Il regarda les Weasley autour de la table et vit combien ils étaient heureux ensemble. Inévitablement, ses yeux tombèrent sur Harry, et il fut fasciné de constater la douceur avec laquelle ce dernier observait aussi les bébés. Le monde de Draco bascula pendant de longues secondes lorsqu'il reconnut pour la première fois la force de l'instinct paternel chez Harry. Il regarda, avec des yeux écarquillés, Harry soulever Grace de son landau lorsqu'elle se réveilla et se mit à pleurer. Hermione était clairement reconnaissante de pouvoir finir son dessert en paix, et elle ne jeta pas un seul regard lorsqu'Harry se leva et fit des allers et retours avec Grace, la berçant doucement et la calmant avec de tendres baisers sur sa tempe. Il était naturellement protecteur.

Oh non. Harry voulait des enfants. Ça le frappa comme un sort entre les deux yeux. Draco ne savait pas quoi faire. L'idée d'être père ne lui avait jamais traversé l'esprit. Il n'y avait même pas pensé quand sa mère avait commencé sa croisade pour la reproduction. Mais en regardant Harry, Draco prit conscience du fait qu'il devait désormais tenir compte des sentiments de quelqu'un d'autre que lui. C'était juste que tout cela était trop tôt. Peut-être quand ils seront plus âgés ? Il trouva que le fait d'envisager la paternité était absolument terrifiant, et il se demanda comment les gens faisaient sans mettre leurs enfants dans un état lamentable. Selon lui, il n'avait pas d'instinct paternel, et il se sentait légèrement malade lorsqu'il envisageait cette perspective. Il était convaincu que ce n'était pas pour lui.

La table se calma vers la fin du repas. Les gens étaient repus et léthargiques et il y avait une ou deux paupières tombantes autour de la table. Harry avait informé Draco que c'était une tradition de la famille Weasley de nettoyer le repas et de faire une sieste d'environ une heure avant d'échanger les cadeaux familiaux. À ce moment-là, Draco avait pensé que c'était stupide, mais maintenant il pouvait voir que c'était vraiment une merveilleuse idée.

Le nettoyage dura moins de vingt minutes avec tout le monde à la tâche, et en moins d'une demi-heure, les canapés étaient pleins à craquer de corps vautrés qui s'installaient pour dormir. Bien que définitivement fatigué, Draco savait qu'il ne dormirait pas. Il se rendit dans la cuisine pour empiler tranquillement les assiettes, et laissa les autres se reposer.

Il n'y était pas depuis longtemps quand Hermione entra avec un bébé sur chaque hanche. Ils se sourirent et elle prit place à la table de la cuisine.

"J'ai besoin de les nourrir," dit-elle. "Cela te dérange-t-il ?"

"Bien sûr que non," répondit Draco. "Vas-y."

Quand Hermione commença à déboutonner son haut, les yeux de Draco s'élargirent comme des chaudrons et il s'exclama, "Oh ! désolé, Hermione, je n'ai pas réalisé ce que tu voulais dire." Il jeta le torchon et se dirigea vers la porte, détournant les yeux de la poitrine d'Hermione.

"Tu n'as pas besoin de partir", dit Hermione en riant. "J'ai l'habitude de les nourrir en public ces jours-ci", ajouta-t-elle, le rire étant toujours présent dans sa voix.

"Je ne pourrais pas", répondit Draco faiblement, mais en ralentissant tout de même.

"J'aurais probablement besoin d'une paire de mains supplémentaire, pour dire la vérité", dit-elle en se retournant sur la chaise pour le regarder. "Henry a tendance à se tortiller un peu quand il a faim, et je ne me le pardonnerais jamais si je faisais tomber l'un d'eux."

Lorsque Draco garda le silence, elle poursuivit : "Si cela te rassure, je te préviendrais quand j'en ferai sortir un. Il n'est pas vraiment nécessaire que tu regardes". Il y avait une sorte d'amusement ironique dans sa voix. Elle ajouta : "Je sais que tu es un homme gay, et je parie que de voir des seins de femme te donne la nausée".

"Ce n'est pas ça" dit rapidement Draco, espérant qu'il n'avait pas offensé la meilleure amie d'Harry. "C'est juste que c'est, euh, intime, je suppose."

Hermione rigola chaleureusement. "Quand tu as un bébé, rien n'est privé. Allez. Assieds-toi et aide-moi, tu veux bien ?"

Il céda et revint près d'elle en s'asseyant à la table. Lorsqu'elle déposa Grace dans ses bras, le sentiment d'extrême frayeur dans son regard devait être aveuglant. Hermione lui montra comment tenir Grace, et il concentra toute son énergie mentale à l'imiter exactement, en s'assurant qu'il le faisait absolument bien. C'était, selon Draco, comme essayer de tenir une gelée sans moisissure. Ses propres bras étaient raides et peu coopératifs, mais Grace se tortillait et gargouillait et lui montrait ses gencives en lui soufflant des bulles. Il ne savait pas s'il devait s'extasier ou vomir.

Du coin de l'oeil, Draco nota qu'Hermione avait relâché le bonnet de son soutien-gorge et avait sorti son sein. Il voulait regarder et il savait que c'était mal. Il avait jeté un coup d'œil vers elle alors qu'elle guidait son mamelon dans la bouche d'Henry avant qu'il ne puisse s'arrêter et, à sa grande horreur, elle le surprit en train de regarder. En une fraction de seconde, il devint écarlate et baissa hâtivement sa tête sur le bébé qu'il tenait dans ses bras, en souhaitant que le sol s'ouvre et l'avale tout entier.

Ensuite, le bruit de la succion remplit le silence et Draco se mit à trembler de gêne. Merlin, Henry suçait le sein d'Hermione ! C'était trop dérangeant pour être dit. Si quelqu'un lui avait dit à l'école qu'il serait assis dans la cuisine d'Harry Potter le jour de Noël, tenant un bébé Weasley roux et regardant Granger allaiter, il aurait été convaincu qu'ils étaient devenus fous. Ou alors ils auraient vu Sibylle Trelaway. Il savait qu'elle était folle à lier, et c'était le genre de prédiction qu'elle avait l'habitude de lancer.

"Tu n'as pas à être aussi mortifié", dit Hermione. Il grogna une réponse, mais ne leva pas la tête.

"Pourquoi ne pas simplement regarder ?" demanda-t-elle. "Il vaut mieux affronter sa peur en face."

"Je n'ai pas peur", dit-il, en la regardant avec un froncement de sourcils. Il réalisa instantanément qu'elle l'avait piégé, parce qu'un sourire aussi large ne pouvait rien signifier d'autre.

"Alors, finissons-en", dit-elle en secouant lentement la tête devant ses réticences.

Il se prépara et regarda la poitrine d'Hermione observant les traits reposés du visage d'Henry. Il était très satisfait, voyait-il, et la tranquillité qui semblait entourer Hermione était contagieuse. Draco se sentait détendu et tenait Grace avec un peu plus d'assurance. Il pencha la tête d'un côté, essayant de mieux voir le visage d'Henry, et il découvrit qu'il ne pouvait pas détourner le regard. La nature était vraiment une chose merveilleuse.

"Je te laisse seul pendant cinq minutes et tu vires ta cuti !" Draco sursauta en entendant la voix d'Harry et il sentit son rougissement se renouveler alors que ce dernier traversait la cuisine pour venir se mettre à côté de lui.

Il y eut un léger bruit de succion, et Hermione détacha Henry de sa poitrine pour tendre une main vers Grace. Harry se précipita et prit Henry, jetant pour une raison quelconque un torchon sur son épaule au préalable. Hermione lui sourit avant de prendre Grace à Draco, et toute la routine se répéta. Draco regarda Harry tenir Henry contre sa poitrine et lui frotter le dos, en le tapotant soigneusement jusqu'à ce qu'il rote. Ah. La présence du torchon devint soudain évidente lorsque Henry déposa une bouchée de vomi sur l'épaule d'Harry. Draco savait que son front était plissé de dégoût, mais il était fier d'avoir réussi à contenir son exclamation.

Finalement, il dit : "J'ai besoin d'un verre", et il se rua vers le réfrigérateur et tenant la bouteille à moitié vide de Zinfandel(1) blanc il en versa une grande quantité dans un verre, dont il avala la moitié en une seule fois. Lorsqu'il se retourna, Harry et Hermione se regardaient et secouaient la tête en signe de confusion.

"Quoi ?" dit-il.

"Chéri, si je dois te le dire, ça ne vaut pas la peine de l'expliquer", dit Harry en riant.

Il ne pouvait pas dire grand-chose à ce sujet.

~oOo~

Pour Draco et Harry, ce troisième tour d'ouverture des cadeaux fut de loin le plus divertissant. Ce n'était guère surprenant, car Fred et George offrirent les cadeaux en s'échangeant à tour de rôle le chapeau du père Noël, et chacun portait une belle barbe blanche bien fournie grâce à un Hairy Humbug (2), (brevet en instance). Molly Weasley était ronde comme une queue de pelle, après avoir dégusté son quatrième sherry (3) de la journée, et son rire hystérique était totalement contagieux. C'était loin d'être aussi sérieux qu'on pourrait le croire. Il y avait un grand nombre de paquets de taille similaire, tous de Molly et Arthur, et grâce à l'avertissement préalable d'Harry, Draco savait que ces paquets allaient être faits maison. Draco s'était entraîné pendant des semaines à travailler son visage "reconnaissant" dans le miroir, mais cela semblait avoir été plutôt vain. Molly était tellement bourré qu'elle devait probablement tout voir en double et n'était donc pas susceptible de constater un manque d'appréciation pour son travail.

Les jumeaux leur lancèrent leurs paquets en même temps, et ils s'assirent l'un à côté de l'autre, Harry déchirant joyeusement son papier, tandis que Draco réussissait un déballage tout à fait plus raffiné. Lorsqu'ils secouèrent leurs pulls, il devint évident qu'une erreur avait été commise entre les étiquettes. Harry en avait un vert avec un grand D gris sur le devant, et Draco en avait un bleu, avec un grand H jaune. Molly se moqua beaucoup de son erreur, mais Harry et Draco se regardèrent, haussèrent les épaules et enfilèrent celui qu'ils avaient reçu. Harry avait prévenu Draco que son pull serait peut-être un peu trop grand, mais le fait qu'il eut été fait pour Harry le rendait encore plus large. Malgré tout Draco s'en fichait. Il se sentait à sa place, et même s'il n'avait jamais rêvé de faire partie de ce groupe particulier, il ne doutait pas du bonheur qu'il ressentait.

Lorsqu'il ne resta plus que deux cadeaux, George et Fred en prirent chacun un et allèrent le distribuer.

"Pas celui-là", dit Draco, en montrant le petit paquet que Fred tenait. "C'est pour plus tard." Fred dut voir quelque chose dans le visage de Draco, car il ne fit aucune blague grossière. Il le glissa simplement sous l'arbre, et regarda George remettre le dernier paquet à la mère de Draco.

Ils regardèrent tous avec fascination Narcissa déballer son cadeau. Elle avait été exclue de la tournée des Pull-à-Molly, ce dont Draco savait qu'elle lui serait éternellement reconnaissante. En déchirant le papier et en le jetant, Narcissa s'assit et regarda un tube orange vif du tricot de Molly Weasley. Elle le souleva avec précaution, le regarda sous tous les angles et fit des bruits d'appréciation.

"C'est un manchon (4)", précisa Molly, sa voix était pâteuse et somnolente.

Il y eut des ricanements forts dans tous les coins de la pièce, et Fred et George durent se tenir l'un l'autre pour éviter de sombrer dans l'hystérie.

"C'est très gentil", déclara Narcissa en toute honnêteté. "Et je suis sûr que Griffin appréciera votre choix de couleur autant que moi." Draco regarda sa mère se lever de son siège et se diriger vers l'endroit où Molly était affaissée. Elle serra cette dernière dans ses bras et lui fit un bisou sur la joue. Draco pensa que Mme Weasley pourrait s'évanouir à cause du choc. "Je le porterai demain", ajouta Narcissa en retournant à son siège. "Ces rencontres de Quidditch le lendemain de Noël sont vraiment assez fastidieuses, vous ne trouvez pas ? Il fait beaucoup trop froid pour le sport. Mais grâce à vous, mes mains seront bien au chaud."

Draco sourit à Harry, songeant à quel point sa mère devrait faire de la politique.

"Qui veut un verre ?" s'écria Harry, prenant les commandes de la joyeuse populace alors même qu'il repoussait Draco vers la cuisine, pour terminer son rôle de barman de la journée.

Une heure ou deux plus tard, lorsque les têtes commencèrent à dodeliner, les invités se rassemblèrent et rentrèrent chez eux. Harry et Draco se tenaient côte à côte dans le couloir, les serrant dans leurs bras et leur embrassant les joues, même avec Ron qui cette fois surprit Draco en le prenant dans une prise assez forte pour faire sortir l'air de ses poumons. Des promesses furent faites de se retrouver dans un jour ou deux, et ils rentrèrent par cheminette ou se dirigèrent vers la voiture, jusqu'à ce qu'il ne reste plus que Narcissa. Elle les embrassa chaleureusement et leur souhaita de joyeuses fêtes. Ils la remercièrent une fois de plus pour son incroyable cadeau. Elle partait avec Griffin le lendemain, juste après le match. Ils passaient le Nouvel An en Suisse dans son chalet, et Draco et Harry lui souhaitèrent tous deux de passer de bonnes vacances.

Elle remua les doigts d'un petit geste lorsque la flamme verte flasha dans la cheminée, puis il ne resta plus que Draco et Harry. Le baiser qu'ils partagèrent était long et reposant. C'était toute la motivation dont ils avaient besoin pour continuer à s'occuper des restes du ménage.

~oOo~

Finalement, tout le rangement fut fait et le reste de nourriture soigneusement emballé. Draco et Harry s'étaient relayés sous la douche, trop fatigués pour penser à des préliminaires aquatiques pour une fois. Par consentement tacite, ils se retrouvèrent sur le canapé le plus proche du sapin de Noël, juste en face de leur nouveau portrait. Le feu crépitait de façon réconfortante et les vagues de chaleur brumeuses qu'il dégageait suffisaient à détendre leurs nerfs. Ils étaient allongés ensemble, leurs pyjamas amples s'emmêlant autour d'eux, tandis qu'ils se regardaient fixement dans le tableau. Comme pour le vrai, Draco pouvait regarder le portrait d' Harry pendant des heures.

"C'est une peinture incroyable, n'est-ce pas ?" murmura finalement Harry, rompant à peine le silence. "Nous avons beaucoup de chance d'avoir un cadeau aussi merveilleux. Ta mère, en est un, Draco." Cette phrase fut dite avec tant d'affection que Draco se blottit plus loin dans ses bras et frotta l'arrière de sa tête contre le menton de celui-ci.

"Il reste encore un cadeau à ouvrir", dit Draco, sa détente s'évaporant alors qu'il envisageait le cadeau final pour son amant. Il savait que le cadeau serait apprécié au-delà des mots, mais l'histoire et la force de l'émotion attachée à la longue boîte en bois garantissaient que leur journée parfaite se terminerait dans les larmes. Draco ne voulait pas que cela se produise, mais il ne pouvait pas trouver d'autre moyen de le faire.

Il s'arracha du canapé et marcha jusqu'au sapin pour ramasser la boîte. L'emballage était de couleur bleu métallique, avec un long ruban argenté en forme de nœud qui le décorait. Il ne faisait que perdre du temps, il le savait. Il devait donner le cadeau et laisser la situation se dérouler comme elle le voudrait.

Alors qu'il remettait le paquet à Harry et se recroquevillait au bout du canapé, Draco lui dit : "Souviens-toi combien je t'aime, Harry. Rappelle-toi combien nous t'aimons tous."

Le visage d'Harry était plein d'appréhension alors qu'il soupesait le cadeau, une petite ride se dessina entre ses sourcils tandis qu'il contemplait le papier d'emballage et qu'il accrochait d'un seul doigt la boucle du ruban d'argent. Draco avait le coeur au bord des lèvres, battant la chamade sous l'angoisse.

Il fallut un temps interminable à Harry pour défaire le papier, mais il finit par s'immobiliser, la longue et fine boîte en équilibre sur ses cuisses. C'était du bois ordinaire, et pas particulièrement de bonne qualité. Mais la boîte n'était pas le cadeau, et Draco savait que cela n'avait pas d'importance. Il fit un signe de tête à Harry pour qu'il l'ouvre, et Draco fut encore plus troublé de voir la main d'Harry trembler lorsqu'il la souleva et retira lentement le couvercle.

De l'endroit où il était assis, Draco ne pouvait pas voir à l'intérieur de la boîte, mais il n'en avait pas besoin. Il savait que la boîte contenait deux baguettes, deux baguettes ébréchées et brûlées. Elles n'avaient pas l'air spéciales, mais elles l'étaient.

"Je ne comprends pas", dit Harry, sans même lever la tête pour parler. "Je n'ai plus besoin de baguette." Draco resta figé, regardant Harry bouger comme au ralenti. Le cheminement de ses pensées était visible dans son expression, et Draco pouvait presque entendre le "Ceux sont-elles? N'est-ce pas?" le dialogue interne qu'Harry avait avec lui-même, trop effrayé pour se contenter d'y croire.

"Elles ne doivent pas remplacer ta vieille baguette", dit doucement Draco, sa voix n'étant guère plus qu'un murmure.

Il aurait été inutile d'acheter une baguette à Harry. Il n'en avait pas besoin ; il n'en avait pas eu besoin depuis des années. Pas depuis le dernier conflit, en fait. Lorsque la baguette d'Harry s'était transformée en un simple morceau de charbon de bois lors de son duel avec Voldemort, quelque chose était arrivé à sa magie. En termes simples, cela venait sa magie.

Au lendemain du conflit, il devint évident qu'Harry était plus que compétent en matière de magie sans baguette, en fait, sa magie semblait plus organique, plus que sa propre essence. Il sembla qu'Harry ne songea pas à remplacer sa baguette et il n'en acheta jamais une autre. Il était reconnu qu'il était adepte de la magie sans baguette et de la magie non verbale, bien que les gens en parlaient à voix basse, peut-être par peur d'attirer l'attention d'une personne si puissante qu'elle n'avait plus besoin d'un foyer artificiel pour son don. Draco s'était habitué à ce que des "choses" se passent autour d'eux, sans cause apparente. Comme le feu qui semblait s'allumer tout seul, ou un livre qui glissait de sa place sur l'étagère et flottait à travers la pièce dans la main d'Harry qui attendait. La manifestation de la magie était tellement ancrée en Harry qu'il apparut à Draco qu'il lui suffisait de penser à quelque chose, pour qu'elle s'en charge. Draco ne se souvenait pas de la dernière fois où Harry avait dû apprendre un sort. Probablement à l'école.

Harry ne faisait qu'un avec sa magie, et c'était une chose géniale à laquelle il fallait être confronté intellectuellement. Mais malgré toute sa puissance, Harry n'était jamais arrogant, ses attentes envers les autres n'étaient jamais déraisonnables.

Draco regarda, le souffle coupé, Harry lever une main au-dessus de la boîte. Il tendit un doigt à l'intérieur, caressant de celui-ci la longueur d'une des branches de bois battues. Harry fronça encore plus les sourcils et Draco pensa que c'était peut-être l'anxiété d'Harry qui faisait surface.

Une brise se fraya un chemin autour du corps de Draco, lui donnant la chair de poule en un instant, et il sut le moment où Harry la ressentit lui aussi. Draco aurait pu jurer que ses cheveux étaient ébouriffés alors que la brise s'intensifiait, et il était sûr que si le mouvement de l'air était visible, il s'enroulerait autour d'Harry et le tiendrait près de lui.

La bouche d'Harry s'ouvrit et il haleta, une forte secousse dans la poitrine. Le haut de son corps se tendit et se détendit et Draco regarda, hypnotisé, une lourde et grosse larme sortir de l'œil d'Harry et éclabousser sa main. Il tremblait. Harry tremblait, mais Draco ne pouvait pas dire pour quelles raisons. Tout ce qu'il pouvait voir, c'était le parcours douloureusement lent du doigt d'Harry le long des baguettes, et sa bouche ouverte, haletante. Les larmes continuaient à couler, mais elles étaient silencieuses, juste une gouttelette de temps en temps qui tombaient sur les genoux d'Harry, peignant des lignes salées sur ses joues. Draco voulait le toucher. Il voulait prendre Harry dans ses bras et ne jamais le lâcher, mais il avait peur de gâcher ce moment, car il pensait qu'il ne pourrait plus jamais être reproduit. Après une éternité de silence :

"Où?"

La voix d'Harry était étouffée et serrée.

Draco dut s'éclaircir la gorge, car quand il essaya de parler il n'y arriva pas. Il avala péniblement et répondit : "Enterré au fond d'un classeur du Département des mystères. Longtemps oublié par tous ceux qui y travaillent". Il aurait pu en dire plus, mais il ne le fit pas. Pour une raison quelconque, il lui semblait normal de rester silencieux.

Harry se tourna finalement pour le regarder, et le terrible mélange d'émotions qui façonnaient ses traits était presque trop douloureux à supporter pour Draco.

"Mais comment ?", demanda-t-il. Il y avait une véritable perplexité dans sa voix, comme si son cerveau s'était éteint et ne pouvait plus traiter de nouvelles informations.

Draco sentit son visage s'adoucir, et ses lèvres formaient le plus petit des sourires. "C'est une longue histoire", dit-il. "Je te raconterai tout ça quand tu auras eu l'occasion de t'y habituer." Il trébucha sur ses mots, ne sachant pas trop comment les formuler. Il ne voulait pas être le premier à dire leur nom.

"Tu pourrais me le dire maintenant ?" demanda Harry, et comme pour tous les autres aspects de sa vie avec lui, Draco ne pouvait pas refuser.

"Je ne sais même pas comment tout cela a débuté, vraiment", commença Draco, en enfonçant ses genoux dans sa poitrine et en se balançant légèrement. Il dut détourner son regard du visage d'Harry parce qu'il était trop distrait, et il songea qu'il pourrait s'effondrer s'il ne le faisait pas. Il regarda plutôt le tableau, observant avec attention les portraits qui s'embrassaient librement en le regardant. Harry ne le poussa pas à continuer, et Draco prit son temps.

"J'étais au ministère pour une raison ou une autre. C'était il y a quelques mois". Il fronça les sourcils, essayant de se rappeler la date exacte et le but de sa visite, mais les détails lui avaient échappé. "Il y avait un grand nettoyage au sein du Département des mystères. Il y avait des sorciers de déménagement partout, et je me suis fait piéger au neuvième étage par une pile de caisses qui ne lévitaient pas là où on leur disait". Il jeta un regard vers Harry, qui l'observait avec une concentration effrayante. Il détourna à nouveau le regard.

"J'ai commencé à parler avec la greffière des archives, et il s'est avéré que le service avait finalement dépassé l'espace disponible pour s'agrandir encore. Ils déplaçaient beaucoup de vieux objets vers un entrepôt situé hors du site. Tous les objets étaient sécurisés, bien sûr", ajouta-t-il rapidement, s'assurant qu'Harry savait qu'il n'y avait aucune raison de s'inquiéter de la réapparition d'une quelconque magie dangereuse au grand jour. Ce dernier était silencieux, et Draco ne pouvait pas non plus apercevoir de mouvement du coin de l'oeil.

"Il apparut qu'à un moment donné, pendant le nettoyage, un dépôt secret de reliques de guerre a été découvert. Des choses que personne n'avait pris la peine de cataloguer ou d'inspecter. Surtout parce qu'à l'époque, les gens s'inquiétaient de ce qu'ils pourraient trouver s'ils regardaient de trop près, mais plus tard, parce que la guerre a tout emporté, et les gens n'en avaient tout simplement pas la capacité". Il s'arrêta, se rappelant la voix claire et autoritaire de l'archiviste qui lui avait tout expliqué.

"On nous a fait attendre dans le couloir pendant très longtemps. Des heures, en fait."

"Je me souviens que tu l'as mentionné", dit Harry doucement, et quand Draco se retourna pour le regarder, la douleur dans son visage avait diminué et au lieu de cela, il était rempli de quelque chose de complètement différent. Quelque chose d'optimiste, peut-être.

Draco hocha la tête et sourit avant de poursuivre : "Il n'y avait nulle part où s'asseoir, alors je me suis appuyé sur ce très vieux classeur. L'archiviste a dit quelque chose comme : "Prenez ceci par exemple. Le tiroir du bas est plein de vieilles baguettes. Merlin sait seulement d'où elles viennent". Elle a ouvert le tiroir pour me montrer, j'ai regardé à l'intérieur et il y avait un fouillis de baguettes. C'était triste, comme de regarder un mémorial à tous les sorcières et sorciers qui sont tombés, au fil des ans. C'était mal qu'elles aient été cachées, et j'ai commencé à y penser. Combien de questions sans réponses pourraient être résolues par le contenu de ce tiroir ?" Et c'était triste. Jamais sentimental, Draco s'était interrogé sur sa réaction inhabituelle, et même après sa sortie du couloir, il n'avait pas oublié les baguettes.

"Nous avons discuté d'autres choses ; de la guerre en général, comme de toi", poursuivit-il, ne sachant pas vraiment comment expliquer à Harry la manière dont les choses se sont passées à partir de ce moment. "Et quand nous avons finalement été libérés du couloir, l'image de ces baguettes m'a hanté. Je me demandais sans cesse combien d'entre elles appartenaient à des personnes que mon père avait assassinées, et puis je me suis interrogé sur des personnes en particulier". Draco s'arrêta net. Finalement, c'était plus dur d'avoir cette conversation avec Harry qu'il ne l'imaginait. Il savait que ce serait difficile et qu'ils en avaient tous les deux besoin, mais cela ne l'a pas rendu plus facile à gérer.

"Continue", dit doucement Harry, en bougeant une main et en la plaçant sur le siège du canapé, quelque part entre eux.

"Un jour ou deux plus tard, après avoir rêvé des baguettes deux nuits de suite, j'ai écrit à Aldebaran au Département des mystères. Je lui ai demandé de me laisser revoir les baguettes. Il m'a répondu que non. Il m'a dit qu'il n'y avait aucune raison pour cela, que je n'aurais pas dû les voir en premier lieu, et qu'il n'y avait rien à gagner à fouiller dans de vieilles blessures pour les familles de ceux qui sont tombés".

Draco prit une grande respiration, ayant juste besoin de se ressaisir, de se calmer un peu. "J'étais en colère", dit-il, en jetant à nouveau un coup d'œil sur Harry, mais étant capable de s'attarder sur son visage cette fois, et de ressentir certains des sentiments d'Harry pour lui. "Je n'ai pas pris la peine de parlementer. Je suis allé directement au sommet." Il se mit à ricaner en se rappelant le sentiment accablant d'un but qui n'avait pas de racines, mais qui le rongeait jusqu'à ce qu'il fasse quelque chose.

"J'ai écrit à Perdita, et elle m'a invité à lui rendre visite. J'y suis allé tout de suite."

C'était la partie la plus difficile, celle que Draco avait lui-même du mal à gérer parce que si elle était réelle, alors il y avait en lui des talents qu'il n'avait jamais soupçonnés.

"Elle voulait savoir pourquoi j'y tenais tant. Cela semblait stupide de l'entendre à voix haute, mais elle ne s'est pas moquée de moi, ni n'a suggéré que je pouvais imaginer des choses". Il avala très fort. Le bruit fit comme un coup de tonnerre dans ses oreilles. "Je lui ai dit que je ne pouvais pas m'empêcher de penser aux baguettes, et chaque fois que je pensais à elles, je pensais à toi. Il y avait là un lien, et je jure, Harry, que je n'ai jamais été aussi certain de quelque chose pour quoi que ce soit d'autre."

Les larmes coulèrent de nouveau des yeux d'Harry. Draco les observa se remplir, et son regard ressembla à un miroir, mais avec une profondeur inégalable.

"Elle m'a cru." Il haussa les épaules. "Juste comme ça. Elle m'a cru, et elle a envoyé une directive à Aldebaran alors que j'étais assis là, lui ordonnant de me remettre toutes les baguettes" raconta Draco, revivant le soulagement qu'il avait ressenti à ce moment. Harry le regarda comme s'il était le centre de l'univers, et il songea qu'il ne méritait pas une telle adoration.

"Les baguettes étaient à mon cabinet quand je suis rentré de mon déjeuner avec elle. Je les ai toutes posées sur le bureau et je les ai observées, les retournant dans mes mains, à la recherche d'indices ou dans l'espoir de ressentir quelque chose qui pourrait limiter la recherche. J'ai dû abandonner au bout d'un moment parce que j'essayais trop fort". Il s'arrêta pour prendre quelques respirations, mais il interrompit sa pause, car le regard d'Harry, celui-ci disait attendre cela depuis si longtemps, qu'il pressa Draco de finir son histoire.

"J'ai essayé de les trier de toutes sortes de façons. De la plus grande à la plus petite, de la plus légère à la plus lourde. Cite n'importe quoi, je l'ai essayé." Il se frottait le front en se souvenant de sa frustration et Harry suivait le mouvement avec des yeux perçants. "À la fin, j'ai décidé de faire la chose la moins logique possible." Il haussa les épaules, embarrassé. "Je les ai classés par ordre de celles que j'aimais le plus. Pas celles qui me semblaient les meilleures dans ma main, mais celles qui me semblaient être à leur place dans ma tête quand je les regardais." Il hocha la tête vers la boîte, et les yeux d'Harry descendirent vers le contenu avant de remonter. "Ces deux-là étaient mes préférés, mais je ne pouvais pas dire pourquoi, et mon esprit rationnel me disait que ce n'était pas suffisant."

La main d'Harry s'immobilisa, dans la boîte. Elle était juste posée là, appuyant sur les baguettes, et Draco savait qu'il pouvait en savourer la texture contre sa paume.

"Patricia a suggéré de faire appel à un professionnel pour les peser et les tester, et elle a même cherché une spécialiste indépendante pour faire le travail. Nous avons retrouvé une fille en France, appelée Lillevander. Ses origines étaient la branche gauloise de l'arbre généalogique des Ollivander, et la fabrication de baguettes est une spécialité familiale, quel que soit le pays d'origine. Elle est venue et elle a fait beaucoup de tests sur les baguettes. C'est elle qui a confirmé que c'était bien eux. Elle m'a assuré que ça l'était sans aucun doute". Il regarda le visage d'Harry et sut qu'elle avait eu raison. Qu'ils avaient tous les deux eu raison.

Il y eut un très long silence. Bien plus d'une minute, pendant lesquelles on n'entendait que le crépitement du feu.

"J'ai toujours pensé qu'elles étaient détruites", dit finalement Harry, sa voix hésitant et trébuchant sur les mots. "Tu sais, quand ils étaient... quand maman et papa ont été tués." Draco se contenta d'acquiescer. Il n'avait aucune idée de ce qu'il fallait dire.

"Je n'ai même pas vérifié."

Les larmes tombèrent des yeux d'Harry en un flot continu, et Draco pensa que c'étaient des larmes de culpabilité, de négligence.

"Mais pourquoi l'aurais-tu fait, Harry ?" dit-il, se penchant en avant et plaçant sa main sur celle d'Harry, leurs doigts s'enlaçant autant par habitude que par confort. "Tu ne pouvais pas savoir. Personne ne le savait."

"Toi si", répliqua Harry, et les deux mots débordaient d'admiration et de gratitude à un niveau tel que Draco en était stupéfait.

"C'était un heureux hasard, Harry. Rien de plus."

"Ce n'est pas vrai !" répondit Harry. "Tu as un don spécial, Draco, et ce n'est pas parce que tu ne le savais pas avant qu'il n'est pas réel."

"Je ne peux pas l'expliquer", dit Draco, irrité contre lui-même parce qu'il ne le pouvait vraiment pas, et il détestait ne pas avoir le contrôle.

"Certaines choses ne peuvent pas être expliquées", déclara Harry. "Mais je m'en fiche. Tu m'as donné quelque chose que je croyais perdu à jamais, Draco. Il n'y a pas assez de mots pour exprimer ma gratitude." "Ce n'est rien", dit Draco, avec une autodérision.

"C'est tout !" s'exclama Harry avec force et enthousiasme. "Tu dois bien le voir ?"

Draco regarda Harry mettre la boîte de côté pendant un moment, même si c'était difficile. Il rampa sur le canapé et entraîna Draco dans une étreinte maladroite, les membres aux mauvais endroits pour le rendre confortable. Mais c'était sincère, et quand il le toucha, Draco eut le sentiment indéniable qu'Harry était la seule personne qui le toucherait à nouveau de cette façon. À l'intérieur comme à l'extérieur. C'était leur destin.

"C'est ma vie, dans cette boîte", marmonna Harry, le visage enfoui dans le cou de Draco. "C'est de là que je viens. Tu m'as rendu ma famille."

Tout ce que Draco pouvait penser, c'était qu'il s'agissait de deux simples morceaux de bois, et même dans ses rêves les plus fous, il n'aurait jamais pu prévoir la violence de leur effet sur Harry. Draco le serra dans ses bras, passant ses mains dans ses cheveux, le long de sa colonne vertébrale, et murmurant des mots réconfortants sans paroles qui firent craquer Harry dans ses bras de la manière la plus déchirante qui soit.

Harry se retira, et ils s'agenouillèrent l'un devant l'autre, les mains lâchement enlacées sur leurs cuisses, souriant et apprenant à vivre avec ce nouveau morceau de la vie d'Harry.

"Je peux sentir mon papa et ma maman, Draco", déclara Harry avec enthousiasme. "Je peux les sentir ici." Il tira leurs mains vers sa poitrine, et il posa la paume de Draco contre son coeur. Draco pouvait sentir les battements à travers la cage thoracique d'Harry, et quelque chose dans ce geste le réchauffait. "Je les ai déjà vus, et je les ai même entendus me parler une ou deux fois", bavarda Harry. "Mais je ne les ai jamais sentis avant. Cela semble stupide, mais je peux sentir le parfum de ma mère, et comment puis-je faire cela, alors que je ne me souviens même pas d'elle ?" Les mots d'Harry avaient un côté frénétique, et Draco savait que c'était juste l'excitation du moment, mais il était terrifié à l'idée que l'effet se dissipe et qu'Harry soit à nouveau en deuil.

"J'ai l'impression de les connaître enfin. Et pas seulement grâce à des histoires de seconde main d'étrangers bien intentionnés, mais convenablement, comme un fils devrait le faire".

"C'est merveilleux, Harry", dit Draco, et il sourit si largement qu'Harry sourit en retour, la plus simple des expressions.

Il retira lentement ses mains de celles d'Harry, lui donnant à la fois la permission et l'incitation de se concentrer sur son trésor. Il l'observa pendant dix ou quinze minutes. Harry tenait chaque baguette à tour de rôle, caressant avec révérence les surfaces marquées et cabossées. Le rire d'Harry était aussi agréable que celui d'un enfant, lorsque des gerbes d'étoiles scintillantes jaillissaient du bout de chaque baguette, tandis qu'il les faisait glisser dans l'air, apprenant à les sentir et ancrant les sensations dans sa tête.

Finalement, Harry les remit dans la boîte et, même si Draco sentit sa réticence à le faire, il vit aussi la joie qu'elles avaient apportée et sut qu'Harry avait toute une vie pour les apprécier. Ils se mirent au lit en silence, main dans la main, et Harry garda la boîte en bois, la plaçant sur la table de chevet à côté du lit pendant qu'il enlevait son pyjama et se glissait sous les couvertures.

Les lumières s'éteignirent et ils se blottirent l'un contre l'autre, Harry enroulant son corps autour du dos de Draco, son bras placé presque avec désinvolture, mais possessif de la meilleure façon imaginable.

"C'est le deuxième meilleur cadeau qu'on m'a jamais fait", soupira Harry, son souffle ébouriffant les cheveux à l'arrière du cou de Draco, avant qu'il ne se déplace pour y déposer un doux baiser.

"Oh ? répondit Draco, déçu, mais essayant de le cacher. "Et quel était le meilleur, alors ?"

Harry le serra fort et frotta son menton sur son épaule. "Toi", dit-il chaleureusement. "Tu t'es donné à moi et je suis l'homme le plus chanceux du monde."

Draco resta complètement silencieux. Personne ne lui avait jamais dit une chose aussi belle. "Mais je t'aime", dit-il enfin. "Que pouvais-je faire d'autre ?"

"Rien", chuchota Harry, et Draco pouvait entendre dans sa voix qu'il souriait. "Joyeux Noël, Draco", finit-il enfin en laissant son corps être emporté par le sommeil.

Fermant les yeux et s'éloignant, Draco marmonna : "Ça l'était, n'est-ce pas ?"

~oOo~

Draco ne fut pas surpris de se réveiller et de trouver le lit vide à côté de lui. Il lança un Tempus et vit qu'il était quatre heures moins le quart. Il étendit son corps douloureux et sortit du lit en enfilant son pyjama avant d'aller chercher Harry.

Bien sûr, il le trouva assis dans la pénombre, seules les lumières des guirlandes sur l'arbre illuminaient son visage. Il tenait une baguette dans chaque main, et elles reposaient sur ses cuisses. La pièce était froide, et Draco se déplaça pour allumer le feu avant d'aller s'asseoir aux pieds d'Harry.

"Qu'est-il arrivé aux autres baguettes ?" dit Harry, et il y avait une note tranchante dans sa voix que Draco lisait comme une peur que les autres soient encore dans un tiroir, en train de ramasser la poussière et oublier une fois de plus.

"Gabrielle Lillevander les a pris", rassura-t-il. "Je lui ai parlé il y a quelques jours, et il ne reste qu'une seule baguette non reconnue." Draco regarda Harry se détendre tandis que la tension refluait en lui. C'était tellement Harry. De faire passer les autres avant lui. Même dans sa propre euphorie, il ne les avait pas oubliées, ces autres familles qui pourraient enfin connaître un peu de paix. "Le ministère les a renvoyés au fur et à mesure que Gabrielle faisait part de ses découvertes", déclara Draco avec un sourire apaisant. "Certaines d'entre elles appartenaient aux Mangemorts. Toutes les baguettes n'ont pas été utilisées innocemment", ajouta-t-il. "Mais tout de même, les familles ont toutes été heureuses d'une manière ou d'une autre de voir le retour de tant de souvenirs."

"Mais elle va continuer à essayer avec la dernière ?" demanda Harry, sa voix pleine d'attente.

"Bien sûr", confirma Draco, en plaçant ses mains autour des mollets d'Harry et en les faisant glisser vers le bas. Ses pieds étaient glacés, et Draco les frotta, faisant de son mieux pour partager sa chaleur, pour rendre Harry plus à l'aise.

"Ils voulaient être trouvés, Draco", déclara Harry. "Ils voulaient que tu les trouves. Je n'en ai pas le moindre doute."

Draco put constater que c'était vrai. La force de sa conviction était étonnante.

"Tu ne le vois pas ?" plaida presque Harry. "Ils t'ont donné leur bénédiction. Ils ne sont pas là pour le dire, mais ils ont trouvé un moyen." Le visage d'Harry s'effondra d'émotion, mais plus aucune larme ne vint. Peut-être qu'il n'en restait plus. "Ils t'aiment, Draco. Tout comme moi."

Draco pouvait sentir l'émotion monter en lui, et il s'y opposa, convaincu qu'il devait rester calme pour Harry. "Alors j'ai de la chance, n'est-ce pas ?" murmura-t-il, voyant l'affection se lire sur le visage d'Harry.

Quand Harry sourit, le monde de Draco s'illumina. Il laissa Harry le tirer vers le haut, et il éteignit le feu alors qu'ils retournaient au lit. Draco installa Harry sous les couvertures avant qu'il ne s'y mette de lui-même, et il regarda son amant avec une tendresse sans bornes alors qu'il glissait les baguettes sous son oreiller et posait sa tête dessus.

Draco était allongé dans l'obscurité, écoutant les sons d'Harry qui dormait. Il resta éveillé pendant très longtemps. Lorsque l'obscurité se transforma en lumière du jour, et que toutes les ombres des sentiments effrayants disparurent, il jeta un dernier regard appuyé sur le beau visage d'Harry et ferma les yeux. Enfin, il était temps de se reposer.


(1) Le zinfandel est un cépage de cuve rouge cultivé principalement en Californie. Le zinfandel blanc n'est pas un cépage, mais plutôt une méthode de transformation du raisin zinfandel.

(2) Hairy Humbung : Hairy signifie poilu et Humbung veut dire foutaise ou tromperie. En gros, c'est veux dire qu'il s'agit d'un sort qui donne l'illusion d'être poilu. J'ai préféré le garder sous la forme originale pour éviter une traduction horrible à lire.

(3) Le sherry, aussi appelé Jerez ou Xérès, est un vin muté produit en Andalousie, dans le sud de l'Espagne.

(4) Manchon : Fourreau cylindrique pour protéger les mains du froid. (Quel super cadeau pour Narcissa ! XD)