Rogue avait effectivement tenu sa parole, réalisant peut-être qu'il ne pourrait plus rien extirper d'elle. Il n'y avait rien à faire : dès qu'ils étaient ensemble pendant plus d'une heure, les choses prenaient invariablement une tournure explosive, comme un chaudron oublié sur le feu. Cet homme est intelligent, brillant, et elle regrettait que les choses se terminent de cette manière.

Elle aurait simplement voulu le connaître davantage, lui qui comme elle, avait un père dépravé au sang non-pure.

Même par son comportement, Severus Rogue dégageait quelque chose de profondément moldu. Un lourd héritage, quand on fréquente Lucius Malefoy et qu'on représente Serpentard.

Mais pour son propre bien-être, c'était inévitablement la seule solution.

Aujourd'hui, Merlin soit loué, l'enfer des retenues avait pris fin depuis presque deux semaines, une période marquée par une étonnante consolidation de son amitié avec Viktor. Les félicitations d'Igor Karkaroff avaient été reçues, louant son "bon comportement" avec Rogue et exprimant sa satisfaction de voir ses deux élèves les plus importants former une alliance solide. Bien que son lien avec la maison des Serpentards demeurât solide, elle ne revela pas un mot quant à cet incident.

Elle avait conscience que de créé une ambiance de méfiance entre Rogue et ses propres élèves ne pourrait mener qu'au désastre. Ordinairement, ils étaient déjà nombreux à le craindre, alors Chouta se disait qu'ils n'avaient pas besoin de savoir qu'il lui avait lancé un sortilège impardonnable dans une endroit isolé, sans témoins, ou personne ne pouvait l'entendre hurler de douleur.

Pourtant, Drago et Pansy avaient deviné, par déduction, qu'il existait des tensions avec Rogue. Cependant, ils semblaient hésiter à lui poser des questions sur ce qui n'allait pas. Chouta ne leur en voulait pas, car ses derniers temps, elle se montrait vite agressive...

Parfois, certains conflits échappaient à la compréhension générale. Même Chouta ne parvenait pas à saisir comment les choses avaient pu dégénérer à ce point. Il n'y avait que Krum qui connaissait tous les détails de cet incident, et il avait su garder le secret. Celui-ci n'avait évidemment pas hésité à lui lancer le très connu " je t'avais prévenu ". Depuis lors, le Maître des potions ne lui avait plus jamais cherché querelle ; en réalité, il semblait presque l'ignorer complètement, une situation qui lui convenait parfaitement.

Aussi étrange que cela puisse paraître, Rogue n'avait pas changé le mot de passe, permettant ainsi à Chouta, il y a cinq jours de cela, de faire sa première entrée dans la somptueuse salle commune des Serpentards. Cette partie du château avait un charme indéniable. Tout y était élégant, baroque, dominé par les teintes sombres du noir et du vert foncé. Des canapés aux oreillers, en passant par les lits à baldaquin et la literie, tout était d'une qualité remarquable. Chouta ressentait comme une connexion spéciale entre cet endroit et elle, comme si c'était ici qu'aurait dû être sa place, si elle avait étudié à Poudlard.

Cela lui rappelait que sa mère, Aubaine, n'avait jamais eu la chance d'étudier dans une école de sorcellerie : ses parents avaient choisi de lui dispenser l'éducation à domicile, sans doute en raison de leurs idées conservatrices sur le sang-pur. À cette époque, cela n'était pas si rare. La Mort avait emporté son père alors qu'elle n'avait que quatorze ans, victime d'un objet maudit qu'il avait acquis chez Barjow et Beurk. Sa mère, noyée de chagrin, l'avait suivie dans la mort quelques années plus tard. Ainsi, Chouta n'avait jamais connu ses grands-parents. Aubaine, dépourvue de tout diplôme reconnu par le ministère de la Magie, avait dû survivre en enchaînant de petits boulots dans les hôtels jusqu'à ce qu'elle soit assassinée.

Hier soir, dans le dortoir des filles, Pansy lui avait fait découvrir des sucreries qu'elle avait déjà connues durant son enfance : les dragées surprises de Bertie Crochue. Comme un chat noire, Chouta avait inévitablement eu droit à des saveurs dégoûtantes, telles que crotte de nez, limace, jambon moisi, voire même crotte d'Hypogriffe. En revanche, Pansy avait eu la chance de déguster des saveurs agréables comme la barbe à papa, ail des ours, matcha ou encore mangue.

Pansy affirmait souvent que Chouta était la personne attirant le plus la malchance, mais que cette malchance portait bonheur à ceux qui l'entouraient.

L'élève de Durmstrang trouvait ça frustrant, mais vrai. Venant de la bouche de Pansy Parkinson, elle trouvait même presque ça mignon. Celle-ci savait que Chouta avait le cœur lourd, ces derniers temps, alors elle essayait de la faire rire.

Noël approchait à grands pas, une fête dont elle n'avait plus le goût depuis la disparition de sa mère. Non seulement parce qu'elle ne recevait jamais de cadeaux, mais surtout parce qu'elle restait seule à l'école alors que tous les autres rentraient chez eux, dans leurs famille. Cette année, le professeur Karkaroff avait consenti à ce qu'elle reste à Poudlard pendant toutes les vacances, à l'exception du réveillon du Nouvel An, où elle allait chez la famille de Drago. Elle se demandait souvent à quoi ressemblait leur demeure, ce manoir niché au cœur d'une sombre forêt. À ce propos, Chouta avait été heureuse d'apprendre que le professeur Karkaroff était également convié chez eux, l'idée qu'ils partent ensemble en diligence de Sombrales jusque là-bas la rendait impatiente. Plus que jamais, elle entretenait une relation familiale avec son directeur...

Les premières grosses chutes de neige avaient recouvert le paysage d'un manteau blanc comme s'ils étaient dans une boule à neige. Hagrid s'était lancé dans la coupe des sapins dans la forêt, ramenant deux par deux ces arbres épineux à travers la blancheur du paysage jusqu'au château, uniquement à la force de ses bras. Une fois là, ils étaient méticuleusement décorés par les elfes et les élèves, illuminant les couloirs de leur éclat festif.

Le demi-géant arborait toujours une expression bougonne en la voyant, comme s'il avait avalé une potion à la citrouille pourrie. Mais elle n'en avait que faire ; ce n'était pas de sa faute s'il avait du mal à accepter ses excuses.

Chouta sorta lentement de ses pensées, la lumière tamisée de la bibliothèque l'endormait presque...

- Tu penses que je devrais leur dire, à Drago et Pansy, que Voldemort prépare son retour? Demanda tout bas Chouta, son visage caché par le livre qu'elle tenait entre ses mains.

- Surtout pas, tu n'es pas leurs parents, répondit Viktor Krum, assis en face d'elle.

- Je n'arrive presque plus à les regarder dans les yeux, en sachant ce qui va se passer. Ils sont très gentils avec moi, tu sais.

- C'est parce que Dumbledore et Rogue t'ont dit des choses qu'on n'est pas sensé dire à une élève! Dit-il d'un ton protecteur.

Au beau millieu de la nuit, en pyjama, les deux élèves de Durmstrang passaient la bibliothèque au peigne fin, cherchant le moindre indice permettant de comprendre comment l'œuf d'or pouvait bien s'ouvrire. Les rumeurs de couloirs disaient que Fleur Delacour avait trouvé un moyen dès le premier jour où elle l'avait reçu, à savoir comme lui, à la fin de la première épreuve. Ils se remirent à feuilleter les pages d'au moins une centaine de livres en tous genres, persuadés que la réponse se trouvait ici.

- Lire ça ne sert à rien, se plaint soudainement Viktor, visiblement déçu de ne pas trouver ce qu'il cherche dans son livre.

- C'est pourtant dans les livres que se trouvent toujours les réponses, souligna Chouta qui ne leva pas ses yeux de sa lecture. J'en suis au passage sur les œufs Russe. Tu sais, comme les poupées qu'on emboîte...Mais à l'évidence, ce n'est pas la même chose que le notre.

Krum soupira profondément, et alors que Chouta leva enfin les yeux vers lui, elle réalisa qu'il tenait son livre à l'envers et qu'il faisait semblant de lire.

- Tu ne veux pas plutôt qu'on aille faire un tour en balais magique? Proposa-t-il comme si c'était la meilleure idée au monde. Moi je te dis que la réponse se trouve ici, quelque part dans le parc ou dans le château.

- Je n'aime pas les balais magiques, trancha Chouta. Je m'en sert uniquement en cas de dernier recours, quand on est sur le point de se faire manger par des araignées, par exemple.

- C'est pourtant la chose la plus géniale de monde, de voler.

- C'est génial quand tu es un joueur de Quidditch, grogna Chouta.

- Rien à voir! C'est la vitesse, se sentir libre comme un hibou...Qu'est-ce que t'as, contre ça?

- Je volais avec ma mère, parce qu'on vivait dans un appartement miteux, en bois, deux fois plus haut que Poudlard, d'accord? Se vexa Chouta. On était comme des oiseaux, avec un nid très haut. Je hais de Quidditch car si pour toi c'est un sport, pour nous c'était une obligation. Mon balais s'est cassé le jour où ma mère est morte, de toute manière.

Viktor l'avait toujours énervé avec son Quidditch, ça lui faisait beaucoup de bien de vider son sac.

- Ça va, j'ai compris, murmura-t-il avec sa voix suave, en baissant les yeux. Personne ne sait rien sur toi, alors ne t'étonne pas si on dit des choses qui ne te plaisent pas.

- Personne ne m'a jamais non-plus demandé de parler de moi, que je sache.

- C'est la dernière fois que je vais te le demander, pigé? Dit Krum, l'air autoritaire. Est-ce que tu veux qu'on aille voler? Ça te sera utile, si tu es en danger dans un endroit où tu ne peux pas transplaner.

Chouta trouva son arguments plutôt convaincant. Elle n'y pensait pas assez, à ce genre d'endroit...Comme les prisons, les écoles, les ministères.

- On va voler les balais de qui, comme tu n'as pas pris les tiens jusqu'ici?

- Ceux des Poufsouffle, voyons, répondit-il avec un sourire digne de Durmstrang.

Bonjour les amis. Je tenais à vous remercier de me lire, au plaisir de connaitre vos avis.