Diagnostic

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Zero pénètre dans le hangar au moment exact où Jelle se rétablit devant Harlock.

— Nom d'une outre à vodka ! s'effraie-t-il. Lydia !

Savoir que les gars sont équipés de matériel théoriquement « non létal » ne le rassérène pas : il connaît les dégâts que peuvent causer les fusils à impulsions électriques et il est absolument certain que Lydia ne s'en relèverait pas.
Sans parler du fait que Lydia est actuellement dans les bras d'Harlock, et qu'Harlock, même de façon non-intentionnelle, pourrait avoir un geste malheureux en voulant se défendre.

Tochiro le retient alors qu'il s'apprête à courir et faire barrage de son corps s'il le faut pour arracher Lydia à la mêlée.

— 'tendez, doc… Je crois que Jelle gère le coup.

Jelle va se faire balayer, grince Zero. Elle s'imagine quoi, à mains nues contre Harlock ?
Il ne veut pas voir ça, décrète-t-il tout en ouvrant grand les yeux pour mieux voir.
Il n'aurait pas parié un kopeck sur Jelle, et il doute que quiconque à bord s'y soit risqué, et pourtant…

— Nom de…

La surprise lui coupe l'inspiration. Peut-être devrait-il utiliser les loutres de Lydia, songe-t-il avec une pensée attendrie pour la façon dont la fillette s'est réapproprié son expression.

Harlock a cédé sans combattre. C'est bien la première fois.

Zero n'attend plus : s'il en juge le pantin désarticulé affalé dans les bras de Jelle, il va avoir beaucoup de boulot. Mais il lui faut d'abord s'assurer que Lydia est indemne.

— Grand-père ! Le capitaine il est très très très malade ! Il faut que tu lui donnes du sirop contre la fièvre tout de suite !

Zero remarque avec une grimace que son genou est éraflé, toutefois vu comme elle court partout ce ne doit pas être bien grave. Elle a eu peur, c'est évident, mais visiblement cette petite aventure n'a pas fait tomber Harlock du piédestal sur lequel elle l'a placé. Et elle a de la suite dans les idées, aussi.

— Il a beaucoup beaucoup beaucoup de fièvre ! insiste-t-elle.

Assez pour agresser une jeune fille et enlever une enfant ? persifle Zero in petto. Et pour les deux gars sur l'épave ? La fièvre également ?
Zero secoue la tête tout en se penchant sur Harlock pour prendre son pouls. Un pli soucieux barre son front. Pas besoin de thermomètre pour estimer que la température atteint des niveaux critiques. Le médecin élabore mentalement son plan de bataille : compresses rafraîchissantes, injections, douche froide au besoin… Puis il hausse un sourcil, considère d'un air incrédule le poignet du capitaine, revient sur son visage. Harlock est constamment ébouriffé, et ses cheveux donnent toujours l'impression de croître dans un monde merveilleux où les brosses seraient inconnues.

Mais jamais autant.