Je n'ai pas publié depuis très longtemps et je préfère être honnête avec vous, je ne sais pas si j'irai au bout de cette histoire. J'aimerais la continuer car j'ai pris beaucoup de plaisir à l'écrire donc je vais essayer mais je ne veux pas vous faire de fausses promesses.

Voici en attendant un chapitre que j'avais en réserve. J'espère qu'il vous plaira et vous fera sourire en cette période de confinement. Je tiens en tout cas à tous vous remercier pour vos retours, ça m'a vraiment fait plaisir ! Prenez soin de vous et bonne lecture !


Le lendemain, la maison resta silencieuse toute la matinée. Ce ne fut que vers midi que les danseurs de la nuit se réveillèrent. Elizabeth se prépara puis descendit. Les Bingley n'était pas encore là. Ce fut donc seule qu'elle prit son déjeuner. Le couple la rejoignit alors qu'elle terminait et ils discutèrent un peu. La jeune Bennet s'éclipsa ensuite pour leur laisser un peu d'intimité. C'était déjà généreux de leur part de l'inviter quelques mois alors qu'ils étaient encore dans les premiers mois de leur mariage et elle ne voulait pas abuser. Certes, leur lune de miel était passée, mais tout de même. M. Bingley avait épousé Jane pour être avec elle, et non pas pour avoir à supporter les sœurs de celle-ci. Sans compter qu'il avait été d'une très grande patience à l'encontre de sa famille (et en particulier avec sa mère et les deux cadettes), durant tous ces mois à Netherfield. Il en avait été de même, après s'être fiancé à Jane. Il devait donc en avoir assez de la famille Bennet. De plus, M. Bingley avait en ce moment beaucoup d'affaires à traiter, et ne pouvait être que peu présent la journée, Elizabeth tenait au moins à leur laisser l'intimité du petit déjeuner. Elle était sûre que l'homme n'aurait jamais osé dire, ni même penser, qu'elle les dérangeait. Elle était cependant tout aussi persuadée qu'il serait ravi de passer un moment avec Jane, et seulement Jane.

Elle se retira donc dans la bibliothèque des Bingley et y trouva un ouvrage qui lui faisait envie. S'installant dans un fauteuil confortable, elle lut un long moment. Il s'agissait de poèmes de Lord Byron. Elle était étonnée d'avoir trouvé l'une de ses œuvres car il s'agissait d'un auteur sulfureux. Elizabeth était une grande admiratrice de ses poèmes et même de l'homme en question qui savait non seulement parler de l'amour comme elle l'imaginait, mais portait aussi un jugement sur la politique et la société, qu'elle ne pouvait que partager. Ses idées nouvelles, qui allaient à l'encontre de la société établie, la ravissaient. Sans compter ses poèmes orientaux qui la faisaient voyager plus loin qu'elle ne le pourrait jamais…

Elle se perdit un moment dans son œuvre. Il s'agissait de poèmes d'amour et cela convenait très bien à son humeur du jour. Elle ne cessait de repenser à la soirée passée. Au ravissement que lui avait procuré la compagnie de M. Madden, à la facilité avec laquelle elle s'était attachée à lui. Jusqu'à la veille, elle n'avait jamais rencontré quelqu'un qui lui ressemblait autant par les goûts et les intérêts. Elle avait hâte de le revoir et de discuter à nouveau avec lui. Elle avait l'impression qu'ils étaient pareils et donc faits pour s'entendre.

Au contraire de M. Darcy. Cet homme semblait tout faire pour la contrarier, que ce soit voulu ou non. Elle le trouvait extrêmement désagréable et ne comprenait pas comment tous pouvaient en faire son éloge. Cet homme était l'arrogance même. Il s'était presque comporté comme le parfait gentleman, la veille. Mais il n'avait pas fallu beaucoup pour que son masque se brise et révèle à nouveau son regard hautain. Elle n'était pas mécontente d'elle, de lui avoir parlé de George Wickham. Elle savait qu'en ce faisant, elle avait encore davantage éloigné M. Darcy d'elle. Elle ne pouvait pourtant que s'en réjouir. Sa façon de la regarder comme pour détecter la moindre de ses erreurs et la lui rappeler, lui était désagréable. Elle ne se sentait pas à l'aise en sa présence et elle n'aimait pas la façon qu'il avait de se croire au-dessus de tout le monde. Pas étonnant qu'il ait l'air aussi seul. Il avait une attitude tellement hostile qu'il fallait un homme comme Bingley pour ne pas en tenir compte.

Elle releva les yeux en entendant quelqu'un s'asseoir sur le fauteuil voisin du sien et jeta un regard vers l'horloge. Cela faisait déjà une bonne heure qu'elle lisait.

– Charles est parti. Il a de nombreuses affaires à régler.

Lizzie ferma son livre sur ses genoux et posa sa main sur le bras de sa sœur.

– Il reviendra vite, j'en suis persuadée. Vous devez déjà lui manquer.

Jane esquissa un sourire.

– C'est possible. Il me manque déjà en tout cas.

Elles échangèrent un sourire puis profitant qu'elles soient seules, l'aînée en profita pour parler de la soirée de la veille.

– Ce fut une riche soirée.

– Je suis soulagée que la présentation soit passée. Cela m'avait beaucoup inquiétée.

– Oui. Finalement, tout s'est bien déroulé.

– M. Bingley était fier de vous présenter à ses amis.

Elizabeth vit sa sœur rougir et continua malgré tout :

– Il n'avait d'yeux que pour vous. Comme la plupart des hommes, d'ailleurs.

– Vous vous trompez, Lizzie. C'est vous que les hommes regardaient.

– Vous savez bien que c'est faux. Vous avez toujours été l'objet des regards.

Jane se montra plus hésitante.

– Avant, peut-être… Mais hier soir, c'est bien vous qui étiez au cœur des regards. J'imagine qu'une femme mariée est moins attirante qu'une femme célibataire.

Elle esquissa un sourire alors qu'Elizabeth se sentait rougir. M. Madden lui avait dit la même chose. Elle avait pensé que ce n'était là qu'une manière de la flatter.

– Dans ce cas, vous faites exception à cette règle. Au bras de votre mari, vous étiez plus resplendissante que jamais, hier soir.

– Lizzie...

– C'est la vérité !

– En attendant, je suis mariée et vous avait fait forte impression auprès de la gente masculine. M. Madden, par exemple…

Lizzie se sentit rougir à son tour.

– C'est un homme charmant, Jane. J'ai beaucoup apprécié danser avec lui et nous partageons de nombreux points communs. Nous aimons les mêmes choses.

– Il a l'air de vous avoir fait un grand effet. Je peux comprendre qu'il vous ait plu, c'est un homme intelligent et rempli de bon sens.

– Sans compter qu'il est beau garçon, plaisanta Elizabeth.

– Vous ne donnez pas votre estime facilement.

Ni son cœur. La remarque l'amusa cependant.

– Il est vrai. Peut-être sera-t-il mon M. Bingley ? Il est encore trop tôt pour le dire. Je le connais à peine.

– Il semble vous admirer déjà beaucoup.

– Les hommes s'attachent et se détachent plus facilement que les femmes. Peut-être m'a-t-il à cette heure déjà oubliée.

– Pensez-vous réellement qu'il soit ce genre d'homme ?

– Je ne saurais dire. Il s'est montré très flatteur et nous avons dansé deux fois ensemble. Nous avons aussi beaucoup parlé. Je l'ai cru sincère et je ne puis qu'espérer qu'il l'ait réellement été.

Un silence suivit ses paroles.

– Avez-vous hâte de le revoir ?

– Je ne sais pas. Il me semble… Sa compagnie m'est agréable.

– Cela faisait en tout cas longtemps que je ne vous avais pas vue sourire ainsi.

Elizabeth ne répondit pas. Elle avait en effet mal supporté le départ de Wickham. Elle avait été triste plusieurs jours avant de se reprendre. Elle avait tenté de le cacher mais Jane la connaissait mieux que personne.

– Cette soirée m'a fait beaucoup de bien.

– Vous pensez encore beaucoup à lui.

C'était une affirmation. Elizabeth comprit que sa sœur faisait référence à M. Wickham. Elle acquiesça.

– Moins qu'avant, cependant. Je ne l'aimais pas, je n'ai pas eu le temps pour cela… mais je crois que je l'aurais aimé. Si nous en avions eu la possibilité.

– Le destin en a voulu autrement. Ce n'est pas forcément une mauvaise chose. M. Madden a une bonne position. Si vos sentiments se développent mutuellement, sa situation lui permettra d'être souvent à vos côtés.

– Oui, mais nous n'en sommes pas encore là.

Les deux sœurs restèrent un moment silencieuses, chacune absorbée par leurs pensées. Elizabeth pensait à Wickham et M. Madden et se posait des questions sur son futur. Quant à Jane, elle n'avait pas encore osé aborder le sujet principal pour lequel elle était venue, au départ. Elle ne voulait pas mettre sa sœur mal à l'aise ou l'obliger à lui expliquer. Elle souhaitait cependant lui donner la possibilité de se confier. Elle attendait donc le bon moment pour ne pas la brusquer.

– J'ai beaucoup apprécier discuter avec Mme Green. Je suis sûre que vous l'aimerez aussi. Peut-être pourrions-nous l'inviter à prendre le thé ? proposa Elizabeth.

– Avec plaisir. Je n'ai pas eu l'occasion de discuter avec elle hier soir. Je serai ravie de faire sa connaissance.

– Je lui écrirai tout à l'heure pour l'inviter mardi. Je crois que nous n'avons rien de prévu ce jour-là.

– Nous le dirons à Charles quand il reviendra. Il pourra inviter M. Green également.

– Parfait.

Les deux sœurs discutèrent donc encore un moment avant qu'Elizabeth ne se lève pour aller chercher de quoi écrire. Jane avait renoncé à aborder le sujet. Sa sœur n'en avait pas parlé non plus et elle ne voulait pas se montrer intrusive. Ce n'était finalement pas le bon moment.

Mardi arriva vite et ils reçurent la visite des Green. Comme l'avait prédit Elizabeth, sa sœur s'entendit très bien aussi avec la jeune femme. Elle avait l'âge de Charlotte, leur amie à présent mariée à leur cousin, M. Collins – ledit homme dont Elizabeth avait refusé la demande en mariage. Elle avait une voix douce et était très gentille. Curieuse mais polie, elle s'intéressa aux deux sœurs et à leur famille et leur posa de nombreuses questions. Elles échangèrent notamment de nombreuses confidences sur leur enfance. Pendant ce temps-là, son mari et Charles Bingley discutèrent dans le bureau du maître de maison pour parler affaires. Alors que l'heure du thé approchait, les hommes se joignirent aux femmes. Jane et Elizabeth régalèrent le couple d'invités au piano. La plus jeune des deux se mit au piano et elles chantèrent en duo un morceau. On annonça alors quelqu'un mais prises par la musique, elles n'y firent pas attention. Ce ne fut qu'à la fin de la chanson qu'Elizabeth se tourna vers l'audience, après avoir souri à sa sœur. Quelle ne fut pas sa surprise de voir que M. Darcy se trouvait à présent aux côtés de M. Green et de M. Bingley ! Elle se leva et le salua.

– M. Darcy.

Jane l'imita, quoiqu'avec davantage de chaleur. Le maître de Pemberley s'inclina légèrement pour les saluer, son regard porté cependant vers Elizabeth. Il ne souriait pas mais il y avait quelque chose dans sa façon de regarder la brune qui ne trompa pas Jane. Une chaleur qui dénotait avec le reste de son visage. Peut-être parce qu'elle était elle-aussi réservée, Jane n'était au contraire de sa sœur, en rien offensée par les attitudes de Darcy. Elle le trouvait gentleman sous tout rapports et s'étonnait du comportement de sa sœur avec le maître de Pemberley.

Ce dernier s'avança davantage dans la pièce, laissant finalement apparaître une jeune femme élégante au visage avenant. Elle s'avança dans la pièce avec une grâce et une douceur sans pareil. Une candeur mêlée à une bonne humeur visible, amena un parfum d'innocence sur la nouvelle venue.

– Permettez-moi de vous présenter ma sœur Georgiana.

M. Bingley, dans son grand enthousiaste, fut le premier à saluer Miss Darcy qu'il connaissait bien de par ses nombreuses visites à Pemberley, en lui répétant à quel point il était heureux de la revoir et de la recevoir chez eux. Il fut suivi par Jane, qui eut l'impression de se revoir plus jeune, et les Green, qui connaissaient apparemment déjà les Darcy et échangèrent avec eux avec une grande cordialité. Elizabeth, qui se remettait tout juste de sa surprise, se reprit et salua également la jeune femme qui semblait disparaître dans l'ombre de son frère.

– C'est un plaisir de vous rencontrer, Miss Darcy.

– Plaisir partagé, Miss Bennet. J'ai entendu beaucoup de bien de vous. J'espère que nous serons amies.

Elle eut du mal à cacher la surprise que cette remarque provoqua chez elle. M. Darcy parlait-il d'elle en bien ? Elle comprit bien vite son erreur en réalisant que les généreuses paroles prononcées sur sa personne provenaient sans aucun doute de M. Bingley. Elle en éprouva un certain soulagement et se conforta dans l'opinion que jamais M. Darcy ne serait capable d'avoir une parole qui soit à la fois aimable et sincère à son égard. Il suffisait de voir de quelle manière il la regardait en permanence. Prêt à dénoter le moindre de ses faux pas, sans doute pour se conforter sur la basse opinion qu'il se faisait d'elle. Il était bien différent de sa sœur dont les manières étaient douces et sans prétention. Elizabeth adressa un sourire sincère à celle-ci. Elle lui faisait penser à Jane et cela ne la rendait que bien plus sympathique à ses yeux.

– Je serai heureuse de l'être, si votre frère nous le permet. J'espère cependant être à la hauteur de l'image que vous vous êtes faite de ma personne car je crains que les dires n'aient été fortement exagérés.

Surtout s'ils venaient de M. Bingley, qui avait une tendance à tout exagérer en permanence. Darcy, en entendant sa demande, se contenta d'acquiescer pour donner son autorisation, mais son regard, posé sur elles, était encore une fois étrange. Elizabeth ne s'y attarda pas et entreprit plutôt de faire la connaissance de Miss Darcy. Elle apprit notamment que celle-ci était une musicienne et lui demanda de jouer un morceau que la jeune femme exécuta à la perfection. Très vite, elle se prit d'affection pour la jeune sœur de Darcy et quand ils allèrent tous faire un tour au parc qui se situait non loin de la maison, Elizabeth se retrouva à marcher aux côtés de sa nouvelle amie. Jane, derrière elle, discutait avec Mme Green de la décoration de la maison et lui demandait des conseils. Quant aux hommes, ils fermaient la marche dans un échange très cordial. Même M. Darcy, apparemment à l'aise, semblait prendre une part active à la conversation – ce qui aurait surpris Elizabeth si elle n'avait pas eu son attention focalisée sur Miss Darcy. Celle-ci étant d'une nature timide, Elizabeth tourna la discussion sur un sujet qui semblait passionner la jeune femme : la musique. Elle l'avait vue jouer et se détendre durant la durée du morceau avant de se refermer davantage par la suite, sans pour autant porter préjudice à ses manières qui restaient parfaites. Elle prenait au minimum part à la discussion et Elizabeth jugea que cela devait être dû à la présence de son frère. Elles échangèrent avec délice sur différents compositeurs avant qu'Elizabeth ne termine par la complimenter.

– J'espère pouvoir un jour jouer du piano comme vous le faites, déclara-t-elle.

Cela eut pour effet de faire rougir de plaisir la jeune femme.

– Oh, vous êtes bien trop modeste. Je vous ai entendue jouer en arrivant. Vous n'avez rien à m'envier. Il est difficile de ravir mon frère et pourtant, vous y êtes parvenue.

Ce fut au tour d'Elizabeth de rougir. Ravir son frère ? M. Darcy ? Quand avait-il été ravi ? Elle ne l'avait jamais vu capable d'exprimer la moindre émotion positive. Sans doute Miss Darcy avait-elle une vision altérée de son frère, du fait de son affection pour lui. Ce qu'elle avait pris pour de l'admiration ne devait être que du mépris. Qui pouvait blâmer Miss Darcy de ne voir en son frère que des bonnes intentions ?

– Je sais me débrouiller mais je n'ai pas votre talent. Je suis certaine que votre frère serait d'accord avec moi.

– Fitzwilliam n'est pas objectif quand il s'agit de juger mes compétences. Pour le reste, j'ai une totale confiance en son jugement.

Elle admirait son frère et avait foi en ses paroles, Elizabeth pouvait bien le sentir. Alors elle n'insista pas, de peur de froisser Miss Darcy. Les paroles de celle-ci retournaient cependant dans sa tête. Elle avait du mal à concevoir que M. Darcy ait pu apprécier l'écouter jouer. Sa sœur, qui devait bien le connaître, en était pourtant persuadée. Son affection pour lui était réelle. À entendre les gens parler de M. Darcy, Elizabeth avait à chaque fois l'impression qu'on lui décrivait un autre homme que celui qu'elle se retrouvait obligée de côtoyer à de nombreuses reprises. Il était fort déplaisant d'être ainsi traité par un homme que tous admiraient. Était-elle donc la seule – hormis Wickham – à voir la vraie nature du maître de Pemberley ?