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De retour à Washington, Sam retrouva Daniel, Teal'c et Janet qui l'attendaient. Craignant de s'effondrer, elle leur dit simplement:
– Ce sera sans lui.
– J'avais pensé qu'il viendrait, déclara Teal'c.
– On se débrouillera, trancha Sam.
Daniel fit mine de poser une question mais, le regard sombre et glacé de son amie l'en dissuada. Manifestement, leurs retrouvailles ne s'étaient pas faites sous les meilleurs hospices.
– Teal'c, tu devrais retourner sur Chulak. Il faut éviter que les Aschens soupçonnent quelque chose. Nous te préviendrons lorsqu'il sera temps.
– Entendu. Je serai prêt.
– Daniel et moi, nous irons au SGC, voir si nous pouvons trouver un GDO.
L'archéologue approuvaet le groupe se sépara.
Épuisée nerveusement, Sam rentra chez elle. Jo ne devrait pas tarder. Elle se servit un verre de vin blanc, prit un bain puis s'allongea sur son lit et attendit.
Elle s'était presque assoupie lorsque son mari poussa enfin la porte de leur chambre.
– Eh! souffla-t-il en la voyant couchée. Est-ce que ça va? Mollem a dit que tu avais quitté le laboratoire de bonne heure…
Sam se redressa tandis que Jo s'asseyait à côté d'elle et lui prenait tendrement la main.
– Nous réessayerons le mois prochain… lui dit-il dans l'espoir d'atténuer son chagrin de n'être toujours pas enceinte.
La colère explosa en Sam comme une bombe à retardement.
– Non Jo! Ça n'arrivera pas! Plus personne n'aura d'enfant!
Il la fixa avec surprise, sans comprendre ce qu'elle disait.
– De quoi parles-tu?
– Des Aschens!
Lorsqu'elle lui parla de ses découvertes, Sam sentit que Jo retirait sa main de la sienne et se levait pour arpenter la pièce. Son cœur s'arrêta lorsqu'il déclara finalement d'une voix à peine troublée:
– Il doit y avoir une erreur… Cela ne devait baisser que de 30%...
Sam réalisa brusquement qu'elle ne connaissait pas vraiment l'homme qu'elle avait épousé.
– Tu étais au courant? demanda-t-elle d'une voix brisée.
– Les Aschens tenaient absolument à cette mesure. Notre croissance était trop rapide, nous épuisions les réserves de la Terre…
Sa voix sonnait comme un plaidoyer justifiant leur trahison. Ils avaient vendu la Terre aux Aschens en toute connaissance de cause.
Sam dut lutter pour refouler la nausée qui montait au bord de ses lèvres.
– Tu m'as menti! lâcha-t-elle, anéantie.
– Non! C'était confidentiel! Ce n'est pas à toi que je vais apprendre ce qu'est le secret défense!
Jo tenta de l'apaiser, de lui dire qu'il devait sûrement y avoir un moyen pour qu'elle tombe enceinte mais Sam était hors d'elle.
Il ne comprenait pas ce qui se passait. Il ne voyait pas qu'il n'était pas question de lui ou d'elle, ou de leur désir de devenir parents! Il en allait de l'extinction de toute l'humanité!
– Je vais aller parler au Président… Je suis sûr qu'il pourra voir ce qui se passe avec les Aschens… commença Jo.
– Non!
Le mot était prononcé avec une telle force que l'ambassadeur se rappela soudain que sa femme était un major de l'Armée de l'air avant tout ça et qu'elle n'avait jamais vraiment cessé de l'être.
– Tu ne diras rien! ordonna-t-elle. Je vais essayer d'arranger ça…
– Quoi? Mais comment? Sam!
Elle lui fit signe de ne pas la toucher et partit sans se retourner.
Jo Faxon entendit la porte claquer en bas avant d'avoir pu faire un mouvement pour la retenir.
oOo
Il était près de minuit lorsque Janet se dirigea pieds nus à la porte de son domicile en se demandant qui pouvait bien sonner aussi tard. Elle jeta un regard par l'œilleton et sursauta en découvrant son amie, transie de froid sur le pas de sa porte. Ouvrant, elle la fit entrer.
– Sam… Mais qu'est-ce que tu fais ici à cette heure? Est-ce que ça va?
Sam ne put retenir ses larmes plus longtemps.
Janet l'attira dans ses bras et la serra fort contre elle avant de la guider vers le salon. Elle la fit asseoir près d'elle dans le canapé et tira le plaid sur ses épaules pour la réchauffer.
Sam était partie sans même son sac ou son manteau.
Lorsqu'elle fut suffisamment calmée et réchauffée, l'ancien major murmura:
– Il était au courant…
Janet mit quelques secondes avant de comprendre.
– Qui ça? Jo?
Sam hocha sinistrement la tête tandis qu'une larme roulait sur sa joue. Elle l'effaça d'un geste sec, presque agacé que ses émotions la trahissent ainsi alors qu'elle avait besoin d'être forte.
Il fallait à tout prix corriger le passé… Elle n'avait pas le choix… Parce que sinon, cela voulait dire qu'elle avait renoncé à l'homme le plus juste et le plus droit qu'elle connaissait pour épouser un menteur et un traître…
Janet la serra à nouveau contre elle, la berçant doucement en murmurant les paroles apaisantes que Sam avait besoin d'entendre.
– Tu veux boire quelque chose? proposa Janet. J'ai du soda, du thé? ou du vin blanc…
Sam eut un rire amer et répondit:
– Je crois qu'il va me falloir quelque chose de plus fort…
Janet lui tapota gentiment la cuisse et revint avec deux verres de liqueur.
L'alcool était fort et lui brûla agréablement sa gorge lorsque Sam en avala une gorgée. Elle n'avait jamais été du genre à se noyer dans l'alcool mais, ce soir, un peu d'oubli semblait une bonne chose…
SJSJSJSJSJ
Le lendemain – Ancienne base de Cheyenne Mountain – Colorado.
Daniel et Sam avaient dû se grimer un peu et avaient attendu patiemment l'heure de la dernière visite pour pouvoir entrer dans le SGC sans se faire remarquer. Le groupe de visiteurs était suffisamment dense pour que personne ne fasse vraiment attention à eux, pas même lorsqu'ils passèrent devant un portait de leur ancienne équipe.
C'était étrange de se retrouver ici après toutes ces années.
Les couloirs familiers, l'odeur tenace de la poudre d'arme à feu… En fermant les yeux, Sam pouvait encore entendre le martellement des bottes sur le béton et le hurlement des alarmes. Une bouffée de nostalgie l'envahit et elle sentit la main de Daniel serrer la sienne. Il partageait sans doute les mêmes émotions.
La guide était agaçante et récitait son texte comme une machine. Lorsqu'ils entrèrent dans la salle d'embarquement, Sam retint son souffle. Bien sûr, la Porte des Etoiles n'était qu'une réplique en plastique mais, elle pouvait presque entendre le bruit des chevrons et celui du kawoosh de la formation du vortex.
Alors qu'elle était perdue dans ses souvenirs, elle aperçut soudain une silhouette familière qui la dépassait en sens inverse en lui murmurant ce que la guide n'arrêtait pas de répéter «et la visite continue!».
Le Colonel O'Neill la fixa avec une intensité qui la troubla et disparut avant qu'elle ait eu le temps de réagir. Il avait une casquette vissée sur le crâne et des lunettes de soleil pendues à son cou, comme autrefois. Il s'était rasé de près. Il ressemblait au Colonel de ses souvenirs, celui qui faisait battre son cœur bien trop fort.
Sam déglutit et échangea un coup d'œil avec Daniel. Il l'avait également vu.
Ils attendirent que la foule s'éparpille pour visiter la salle d'embarquement et profitèrent de la distraction de leur guide pour fausser compagnie au groupe. Ils passèrent rapidement sous le ruban qui bloquait l'accès à l'escalier conduisant à la salle de contrôle et au bureau du chef du SGC.
Lorsqu'ils y parvinrent, Jack était déjà assis derrière le bureau de Hammond. Il griffonnait sur un carnet lorsqu'ils entrèrent.
– Vous en avez mis du temps… grogna-t-il.
– On a dû attendre la dernière visite… plaida Sam.
– En vous attendant, j'ai fait quelques courses…
Jack montra les Zat posés sur la table, parmi les papiers.
– Les Zat, c'est bon mais, ça, ça va poser un problème… indiqua-t-il en poussant du bout de son stylo le GDO qu'il avait récupéré.
Sam examina l'appareil et déclara:
– C'est un faux.
O'Neill grimaça son accord.
– Ils sont tous pareils. Est-ce qu'on peut s'en passer?
Sam réfléchit rapidement.
– Non…
– Et un signal radio? proposa Daniel.
– Il y a des brouilleurs dans le terminal… Je ne suis même pas certaine que le signal du GDO pourra passer alors un simple signal radio, c'est exclu, déclara Sam.
– Alors, l'histoire s'arrête là.
Jack avait raison. Sans GDO, le plan tombait à l'eau.
Une silhouette passa à l'entrée du bureau et gronda qu'ils n'avaient pas le droit d'être là.
Jack se redressa en reconnaissant le Sergent Harriman. Ce dernier écarquilla les yeux et les scruta l'un après l'autre:
– Colonel O'Neill? Major Carter? Dr Jackson ? qu'est-ce que vous faites ici? Oh, je vois, vous vous replongez dans les souvenirs!
– Oui, c'est tout à fait ça… euh… Walter, c'est ça? demanda O'Neill en faisant manifestement un effort pour se soutenir le prénom du Sergent.
– Oui, Monsieur.
– Qu'est-ce que vous faites ici, Sergent? questionna Jack, intrigué.
– Oh! Je travaille ici. Je suis leur consultant technique…
Avisant les Zat et le GDO sur la table, Walter fronça les sourcils:
– Où avez-vous trouvé ça?
– À l'armurerie, répondit Jack comme si c'était l'évidence même.
– Vous ne pouvez pas emporter ça, c'est interdit!
– Non, on n'en veut pas, c'est un faux, dit-il en désignant le GDO. À propos, dites, vous ne sauriez pas où en trouver un vrai?
– Le seul exemplaire restant se trouve à Washington, dans le bureau du Président.
Jack croisa le regard de ses amis et souffla:
– Oh le coquin! Il a gardé un souvenir!
Puis, revenant à Walter, il ajouta:
– On emporte les Zat.
– Non! Vous n'êtes plus Colonel et je ne suis plus Sergent! Vous n'avez aucune autorité ici…
– Walter, c'est secret défense!
– C'est important, Sergent, laissez-nous faire, plaida Sam.
Perplexe, l'homme sentit son assurance vaciller. Ces hommes étaient l'ancienne équipe SG1. Ils avaient sauvé le monde plus de fois qu'il ne pouvait s'en rappeler. Ils n'auraient jamais rien fait qui ne soit pas dans l'intérêt de leur pays et de planète. Même si la logique lui dictait de les en empêcher, son instinct d'ancien du SGC, lui criait de leur faire confiance.
– Je vous les rapporterai… jeudi, ajouta O'Neill pour le convaincre.
– Jeudi? Et vous promettez de tout m'expliquer à ce moment-là?
– Oui. C'est promis, mentit O'Neill sans sourciller.
– Entendu. À jeudi alors.
Walter leur adressa un discret signe de tête et disparut dans le couloir.
– Qu'est-ce qu'on fait? demanda alors Daniel.
– J'ai peut-être une idée… murmura Sam songeuse.
– Jo? devina Daniel.
Sam hocha la tête.
– Il nous aidera.
Sa voix se voulait forte et affirmative mais, son cœur ne l'était pas autant.
– Ok, on embarque déjà les Zat, déclara Jack.
Sam, Jack et Daniel dissimulèrent au mieux les armes sous leurs vestes et reprirent la queue de la visite guidée pour quitter la montagne.
Une fois dehors, ils se regroupèrent sur le parking près de la voiture de location de Jack. Ils rangèrent les Zat dans un sac de sport dans le coffre de son véhicule.
– Je suis descendu à l'hôtel Lombardy, sur Pennsylvania Avenue, lui dit l'ancien Colonel. Si vous parvenez à trouver un GDO, appelez-moi, je suis dans la chambre 106.
– Entendu…
Son ancien grade flotta sur les lèvres de Sam mais, elle y renonça.
Après tout, ils n'étaient plus SG1 et elle n'était plus sous son commandement.
Jack serra la main de Danny et monta rapidement dans sa voiture.
Daniel regarda le véhicule s'éloigner et sortir du parking avant de demander:
– Tu es sûre de toi pour Jo?
Sam soupira:
– Non… Mais, ça vaut le coup d'essayer.
– Et s'il te dénonce?
– Sans GDO, pas de retour en arrière. Alors, franchement, je me moque de ce qui pourrait m'arriver.
L'esprit songeur et inquiet, Daniel prit le volant et les ramena au téléporteur, direction Washington.
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– Il n'en est pas question, Sam! Es-tu devenue folle?
À voir la colère de Jo, Sam comprit qu'elle n'aurait pas gain de cause.
Il était leur dernier espoir et elle avait vraiment mal joué ce coup-là…
– Jo… plaida-t-elle.
– Je n'ai même pas besoin de savoir ce que tu comptes en faire! Je sais que si tu as besoin d'un GDO, c'est que cette histoire tourne autour de la Porte des Etoiles! Sam! Il n'y a pas d'endroit au monde plus sécurisé que le terminal de la Porte! Tu vas te faire tuer si tu t'en approches!
– Si nous ne faisons rien, l'humanité est condamnée! Et ce sera en grande partie de notre faute!
Jo tournait en rond comme un lion en cage mais, il ne semblait pas fléchir.
Finalement, il s'immobilisa et la regarda droit dans les yeux:
– Je suis désolée, chérie mais, je ne peux pas faire ce que tu me demandes… Imagine que les Aschens le découvrent…
Sam sentit le désespoir l'envahir.
Leur maigre tentative avait échoué avant même d'avoir commencé…
– Très bien, lâcha-t-elle entre rancune et lassitude.
Elle quitta le salon d'un pas vif et monta l'escalier quatre à quatre. Une fois dans la chambre, elle attrapa un sac de voyage au fond de l'armoire et fourra dedans tous les vêtements qui lui tombaient sous la main. Elle fit de même avec la commode et était en train de vider les tiroirs de la salle de bain lorsque Jo pénétra dans la pièce.
La voyant s'activer, il demanda d'une voix blanche:
– Qu'est-ce que tu fais?
Sans lui adresser un regard, elle continua sa tâche, rangea ses produits de beauté, sa brosse à dents et sa brosse à cheveux dans le sac et tira la fermeture éclair d'un geste.
– À ton avis?
– Sam!
Jo la saisit par le bras fermement, espérant l'obliger à le regarder.
– Retire ta main immédiatement!
L'ordre était dur et laissait entendre qu'elle ne plaisantait pas.
Sam n'avait pas révisé récemment ses techniques de combat au corps à corps mais, elle faisait encore de la salle trois fois par semaine et courait dix kilomètres tous les jours.
Ses yeux d'ordinaire si bleus étaient comme embrasés lorsqu'elle daigna enfin le toiser.
Jo libéra son bras en déglutit lourdement.
– Je t'en prie, ne pars pas… On devrait en discuter…
– Je crois que tout a été dit, Jo.
Sam balança son bagage sur son épaule.
– C'est terminé.
Elle dévala les escaliers, son mari à ses trousses. En arrivant dans le hall, elle attrapa son sac à main et fouilla dedans jusqu'à en sortir une liasse de documents. Elle la posa rageusement sur la tablette avant d'ôter sa bague de fiançailles et son alliance et de les jeter sur la pile de papiers.
Attrapant ses clés de voiture, elle ajouta sans se retourner:
– Signe ces papiers, Jo! Je ne veux plus jamais te voir !
Elle sortit en claquant la porte, laissant l'ambassadeur stupéfié jeter un œil sur les documents: une requête en divorce…
Avec amertume et chagrin, Faxon réalisa que Sam avait prévu de le quitter et qu'il n'avait rien fait pour l'en dissuader.
oOo
Jack ouvrit la porte de sa chambre d'hôtel, pensant accueillir le livreur de pizza mais, à la place d'un jeune en tee-shirt jaune et casquette, il trouva Carter. Elle avait un air défait et un sac de voyage était posé à ses pieds.
Sans un mot, il s'écarta et ouvrit plus grand la porte pour la laisser entrer.
– Merci… souffla-t-elle.
– Asseyez-vous.
Au même moment, on toqua à nouveau. Cette fois, Jack récupéra sa commande et paya le livreur.
Jetant un coup d'œil vers son ancien Second, il proposa:
– Je suppose que vous n'avez pas mangé… Peppéroni, fromage et olives, ça vous dit? On peut partager…
Sam hésita et demanda:
– Pas d'oignons?
Jack lui fit un sourire doux en ouvrant le couvercle et en venant s'asseoir près d'elle:
– Pas d'oignons!
Elle en prit une part et Jack fouilla dans l'autre paquet à la recherche des boissons.
– Je n'ai que des bières mais, je peux descendre au distributeur vous prendre un soda, si vous préférez?
– Non, ça ira bien. Merci…
Elle était avare de mots mais, malgré les années de séparation, Jack pouvait voir qu'elle ruminait sa colère et sa souffrance.
– Mangez pendant que c'est chaud! ordonna-t-il gentiment en voyant ses yeux se brouiller.
– Oui, Monsieur…
Il grogna en mâchant et rétorqua:
– Jack va bien…
Un peu surprise, elle mit quelques secondes pour comprendre ce qu'il voulait dire. Lorsque ce fut le cas, elle hocha lentement la tête.
Ils mangèrent dans un silence qui se détendit peu à peu.
Une fois leur repas avalé, Jack sortit jeter les déchets. Lorsqu'il revint, Sam se leva et déclara:
– Je devrais redescendre à l'accueil… Le gérant m'a dit que ma chambre serait prête dans une demi-heure…
– Ah…
Alors qu'elle saisissait son sac de voyage, Jack osa finalement oser la question qui lui brûlait les lèvres:
– J'imagine que tout ne s'est pas passé comme prévu avec votre ambassadeur…
Il n'était jamais parvenu à l'appeler autrement que par sa fonction. C'était trop dur pour lui d'admettre qu'il était celui qui lui avait ravi le cœur de Carter… Les années n'y changeaient rien.
Sam inspira un coup avant de lâcher:
– Pas vraiment, non.
– Donc… Pas de GDO?
Elle secoua la tête, incapable de prononcer un mot de plus.
Jack laissa passer quelques secondes durant lesquelles Sam se demanda si elle devait simplement bouger et sortir de là.
Puis, il dit enfin:
– Bon… Alors on passe au plan B.
Carter leva soudainement la tête:
– Quel plan B?
Il haussa les épaules:
– Il y a toujours un plan B, Carter!
Incapable de retenir son geste, il posa une main chaude et apaisante sur son épaule et ajouta:
– Allez prendre votre chambre et reposez-vous un peu. On en parlera demain matin au petit déjeuner. Vous avez besoin de dormir.
– D'accord… finit-elle par accepter. Sept heures?
Il sourit:
– Ce sera bon pour moi mais, si vous voulez dormir un peu plus…
– Non. Ce sera bien. Je n'ai jamais perdu les vieilles habitudes, vous savez…
– Ouais… Moi non plus.
Elle ouvrit la porte et sortit mais, juste avant qu'il ne referme derrière elle, elle se tourna et murmura:
– Merci, Jack…
– Pas de problème. Bonne nuit, Sam!
Carter ignorait pourquoi elle avait choisi de s'échouer ici alors qu'il y avait des hôtels plus proches de chez elle – enfin, son ancien «chez elle».
Elle aurait pu simplement passer un coup de fil à Jack pour le tenir au courant mais, en réalité, elle avait besoin de le voir. Besoin qu'il la rassure. Et c'était exactement ce qu'il avait fait.
Plan B… Qu'est-ce que ça pouvait bien être?
Sam prit sa carte auprès du réceptionniste et gagna sa chambre. Elle posa son sac sur le lit et fouilla dedans pour en extraire ses affaires pour la nuit. Puis, elle se glissa dans la salle de bain, prit une longue douche chaude avant de se pelotonner sous la couette. Elle était persuadée qu'elle ne fermerait pas l'œil mais, étrangement, sa tête avait à peine touché l'oreiller qu'elle dormait déjà.
Elle s'éveilla en entendant l'eau couler dans la chambre voisine. Jetant un œil à sa montre, Sam se leva, se rafraîchit et s'habilla pour descendre au petit déjeuner. Un hématome assez large fleurissait sur son bras mais elle le dissimula sous un pull à manches longues.
Jack était déjà attablé devant un café et un plateau bien garni. Il lui fit un petit signe de la main en l'apercevant auquel elle répondit d'un sourire. Sam se servit un café au lait, des œufs brouillés et des toasts avant de rejoindre son ancien Commandant.
– Bonjour! Bien dormi? lui lança-t-il en avalant une nouvelle gorgée de café.
– Comme une souche… J'étais plus fatiguée que je ne le croyais…
Parfois la fatigue psychologique était bien pire que l'épuisement physique. Elle avait l'air d'un enfer mais même sans sommeil, elle était plus belle que dans ses souvenirs…
Sam commença à manger avant de dire:
– Alors? Quel est le plan?
Jack jeta un coup d'œil à la salle de restaurant. Il n'y avait pas grand-monde en cette heure matinale: un couple de randonneurs qui chuchotait amoureusement et un commercial, tous de l'autre côté de la pièce.
– On devrait peut-être attendre que Daniel soit là. Je l'ai appelé. Il arrive.
– Oh? Bien! D'accord.
Il hésita puis demanda:
– Est-ce qu'il vous a blessée?
Sam n'eut pas besoin de demander de qui il parlait. Après un soupir, elle choisit de lui dire la vérité. Ils s'étaient cachés trop de choses au cours des années. Il était temps que ça change si elle voulait qu'il lui refasse confiance un jour.
– Il m'a saisie par le bras…
Le muscle se serra sur la mâchoire de Jack, témoin de sa colère silencieuse.
Elle lui sourit tristement et ajouta:
– Il m'a lâchée lorsqu'il a compris qu'il risquait de finir à l'hôpital…
Le visage de Jack se changea en un sourire fier et, même s'il ne contenta d'un léger hochement de tête, elle sut qu'il était heureux de voir que les années ne l'avaient pas tant changées que ça. Elle était toujours la guerrière qu'il avait connue.
Après un moment complice, elle dit encore:
– J'ai demandé le divorce.
Jack cilla, l'air surpris par cet aveu.
– Je ne peux plus lui faire confiance. Il m'a menti. Il savait ce que les Aschens prévoyaient de nous faire au moment des négociations et il a laissé faire. Il a vendu l'humanité à ces monstres!
Sa voix était basse, presque un murmure mais, Jack pouvait sentir la blessure présente dans chaque mot.
Il savait qu'il aurait dû lui rappeler qu'il avait aussi toutes les raisons de ne plus lui faire confiance. Après tout, elle l'avait aussi trahi à sa manière…
Mais, elle avait agi ainsi parce qu'elle était persuadée que c'était le mieux pour la Terre. Il ne pouvait pas lui reprocher d'avoir choisi la mission plutôt que lui. C'était ce qu'il l'avait poussée à faire tout au long de ces années… Chaque fois qu'ils auraient pu faire des choix différents pour être ensemble, il l'avait incitée à choisir le SGC plutôt qu'eux. Il avait initié tout ça, sans vraiment s'en rendre compte. Il n'aurait pas dû être surpris lorsque ça s'était finalement retourné contre lui.
Jack n'avait jamais été à l'aise avec les mots alors, il fit la seule chose qu'il savait faire. Il posa sa main sur la sienne et la serra doucement, essayant de lui transmettre par ce simple geste toute la tendresse et l'amour qu'il avait pour elle.
Sam leva les yeux et, après un moment de trouble, elle lui sourit. Il sentit sa main bouger sous la sienne et l'instant d'après, leurs doigts étaient étroitement mêlés.
Daniel descendit du taxi et aperçut la silhouette de ses amis à travers la vitre de l'hôtel. Il poussa la porte et entra pour les rejoindre. Jack le vit arriver et lui fit un signe de tête de bienvenue. Comprenant qu'ils avaient de la visite, Sam tourna la tête et vit son ami. Elle tira doucement sur sa main pour la retirer de celle de Jack. O'Neill la libéra. L'archéologue les salua et s'assit à côté d'eux.
– Tu veux un café? demanda Jack.
– Oui, merci.
Jack se leva et alla lui commander une tasse.
Lorsqu'il revint, il sut à la tête de Daniel que Sam lui avait raconté sa soirée de la veille.
– Alors? demanda Daniel, sa curiosité piquée au vif.
– Bois ton café, on en parlera dans ma chambre quand tu auras terminé, répondit Jack en terminant son petit déjeuner.
Quinze minutes plus tard, les trois amis étaient assis en rond dans la chambre de Jack. Sam et Daniel s'étaient installés sur le lit, côte à côte et Jack avait pris une chaise pour être face à eux.
– Je pense qu'on devrait demander un coup de main à Thor, proposa enfin Jack.
– Nous n'avons plus de contact avec les Asgards depuis la signature du traité d'alliance avec les Aschens… soupira Sam, craignant que le brillant plan B ne tombe également à l'eau.
– Ils sont plus malins que nous… Ils devaient savoir pour les Aschens. Mais, vous savez comme ils sont à cheval sur la question de non-ingérence… grogna Jack. Je suis certains qu'ils pourraient nous aider.
– Mais, nous n'avons aucun moyen de les contacter, objecta Daniel avant que Sam ne puisse le faire.
– Eh bien… Ce n'est pas tout à fait vrai…
Jack sortit de sa poche une boule grise et brillante.
– Vous avez un communicateur Asgard! s'exclama Sam.
– Ouais… Cadeau de Thor la dernière fois que je l'ai vu. Mais, il ne fonctionne pas. J'ai essayé.
– Est-ce que je peux regarder? demanda-t-elle, les yeux brillants.
Il le lui tendit avec un sourire amusé.
– Peut-être que les piles sont mortes… se moqua-t-il.
– Je ne crois pas, non, dit-elle en esquissant un sourire tout en faisant tourner l'appareil dans ses mains. Je crois plutôt que ce sont les brouilleurs Aschens qui bloquent le signal.
– Des brouilleurs? demanda Daniel.
– Oui, j'ai découvert ça par hasard il y a quelques mois… Mollem m'a dit que c'était pour éviter les interférences avec la technologie Aschen mais, à présent, je me demande si ce n'est pas simplement pour nous empêcher de communiquer avec l'extérieur.
– Bien. Donc il suffirait de s'éloigner de la Terre pour qu'il fonctionne à nouveau?
– Je pense que oui mais, je crois me rappeler que ces engins étaient conçus pour prévenir Thor que nous voulions lui parler lorsque son vaisseau était en orbite dans notre galaxie… ajouta Sam.
Jack fronça les sourcils, se rappelant de ce problème.
– Mais, la Galaxie où vivent les Asgards est plutôt loin si mes souvenirs sont bons… déclara Daniel. Il nous avait fallu un supplément d'énergie pour appeler leur Porte des Etoiles et leur adresse de porte avait un chevron de plus.
– C'est exact. Il nous faudrait un vaisseau pour atteindre leur galaxie. Je pense qu'ensuite, le communicateur préviendrait Thor de notre présence dans les parages, confirma Sam.
– Je suppose que personne n'a une navette spatiale planquée dans son garage? plaisanta Jack.
Sam roula des yeux et Daniel eut un léger sourire, heureux de retrouver son ami d'autrefois malgré les dissensions passées.
– Est-ce qu'on a un moyen de contacter la Tok'ra? demanda plus sérieusement O'Neill.
Sam écarquilla les yeux: Jack n'avait jamais vraiment apprécié les Tok'ra, il fallait qu'il soit désespéré pour envisager de demander leur aide. Elle hésita puis répondit:
– J'ai les coordonnées d'une de leurs dernières bases. Papa me les a données la dernière fois que je l'ai vu, il y a huit ans, en me faisant promettre de les garder secrètes.
– Pour quelle raison?
Jack avait les sourcils froncés et s'était penché légèrement en avant, les coudes appuyés sur les genoux. Le regard qu'il posait sur elle lui rappelait tellement son ancien Commandant qu'elle faillit se mettre à garde-à-vous pour répondre.
– Eh bien… Leur base précédente avait été attaquée. La Porte des Etoiles avait été activée et un projectile rempli de gaz en était sorti. Le poison qu'il contenait avait tué tous ceux qui se trouvaient sur la base en exterminant les symbiotes qu'ils portaient. Par chance, Papa était en mission à ce moment-là. Les quelques rescapés se sont repliés sur un monde tenu secret.
– Un poison à symbiote… Plutôt élaboré comme arme…
Jack croisa le regard de Daniel et soupira:
– Cela ressemble assez aux armements ciblés des Aschens.
– Quoi? Tu penses qu'ils ont essayé d'anéantir la Tok'ra? Mais, ils étaient nos alliés! Nous les leur avons présentés!
– Oui et je ne pense pas que cela ait beaucoup dérangé les Aschens! Ils exterminent des peuples pour s'emparer de leurs richesses, Daniel! Ils ont détruit les Goa'ulds parce qu'ils représentaient une menace pour leurs plans. Les Tok'ra n'étaient que la suite logique. Ils disposaient d'une technologique qui leur aurait permis de détecter ce que les Aschens préparaient et peut-être de nous prévenir avant qu'il ne soit trop tard…
Daniel baissa la tête et soupira lourdement, réalisant que leur manque de jugement n'avait pas eu des conséquences que sur leur propre monde mais aussi sur leurs alliés.
– C'est aussi ce qu'a laissé entendre mon père mais je ne l'ai pas cru à l'époque… soupira Sam, réalisant désormais l'étendue de son erreur.
– Est-ce que ces coordonnées sont toujours valables? questionna Jack, revenant à leur problème.
– Je l'ignore. Papa m'a dit de ne les utiliser qu'en cas d'urgence, si ma vie était menacée…
– C'est le cas, trancha Jack. Bien, je suppose qu'on ne peut pas arriver au terminal Reed et composer l'adresse de notre choix?
– Non, en effet. Nous ne pouvons aller que vers les planètes autorisées par les Aschens.
– D'accord… Je n'ai pas vraiment suivi mais, est-ce que Chulak fait aussi partie de la Confédération?
– Non mais, il y a des accords commerciaux entre les deux planètes donc il y a des traversées régulières entre nos deux mondes. C'est ce qui permet à Teal'c de venir nous voir de temps en temps.
– Parfait! Il est temps d'aller lui rendre une petite visite à notre tour!
Sam lui lança un regard perplexe:
– En quoi ça nous aide à trouver un vaisseau? Les Jaffas survivants n'ont plus d'Al'kesh depuis que la majorité des Grands Maîtres ont été anéantis.
– En fait, je comptais juste utiliser leur Porte…
Oui… Cela se tenait. Aller sur Chulak, de là, composer les coordonnées de la planète Tok'ra puis, avec un vaisseau Tok'ra, partir dans la galaxie d'Ida à la recherche de Thor.
Sam sentit un espoir refleurir dans son cœur.
C'était fou mais, ça pouvait marcher…
– Il va falloir des faux papiers, déclara-t-elle en continuant à réfléchir pour construire le plan plus en détails.
– Pourquoi? questionna Daniel en remontant ses lunettes sur son nez. J'ai un laisser-passer pour aller sur Chulak et toi aussi il me semble…
– Oui, mais je doute que ce soit le cas de Jack…
Ce disant, elle tourna son regard vers O'Neill lui acquiesça.
– J'ai refusé les vaccins… Donc je n'ai pas le droit de quitter la Terre, expliqua-t-il. En fait, si j'en crois les lois Aschens, je n'ai même plus d'existence légale, ironisa-t-il.
– Je devrais pouvoir arranger ça, dit Sam. Je connais quelqu'un qui pourra me procurer ce qu'il faut mais je dois aller le voir en personne. Pas question que les Aschens surprennent ce genre de conversation par téléphone. Et nous devons aussi prévenir Teal'c.
– Janet a proposé d'aller le tenir au courant, déclara Daniel.
– La Doc est dans le coup? s'étonna Jack.
– Oui, en fait, c'est grâce à elle que nous avons découvert ce que nous cachaient les Aschens, expliqua Sam.
– Je comprends. Combien de temps pour me procurer des papiers?
– Deux ou trois jours, je pense.
– Bien. Je vais rester ici en attendant et établir une liste de ce dont nous pourrions avoir besoin. Vous autres, retournez à vos activités, il ne faut pas éveiller les soupçons des Aschens.
