Chapitre 12: Mais qui m'a f… un abruti pareil!
Quelques jours plus tard, je me tournais et me retournais dans mon lit incapable de trouver le sommeil. Je n'avais pas encore eu le temps de convoquer Albus pour l'interroger à propos de leur petite virée dans la librairie abandonnée et au demeurant interdite d'accès, mais ce n'est sûrement pas cet incident qui m'empêchait de m'endormir. Encore et toujours, je coinçais sur cette potion destinée à transformer Delphini Black en Voldemort et cela m'obsédait au point que j'étais devenu incapable de me reposer la nuit.
Cette insomnie me dispensa d'un réveil en sursaut quand le Baron Sanglant entra dans ma chambre en passant à travers la porte sans s'être fait annoncer et se mit à hurler:
«Une attaque! Vite, Professeur Rogue! Une attaque dans notre Maison!»
Je sautai sur mes pieds aussi vite que si quelqu'un avait lancé un Bombarda dans ma chambre et je partis en courant vers la salle commune des serpentards, en pyjama, ma baguette à la main, sans prendre le temps de passer une robe de sorcier, ni de me chausser. J'entendis des cris avant de voir, par la porte entre-ouverte, les lueurs inquiétantes des sorts qui s'échangeaient à l'intérieur. Je cherchais une solution pour rentrer là-dedans sans me faire inutilement tuer, car à l'instant où j'allais m'encadrer dans la porte j'allais constituer une cible immanquable.
«Vas-y, je te couvre.» souffla dans mon dos la voix du loup-garou que je n'avais pas entendu arriver.
Je n'hésitai pas, je fonçai. Le Bouclier de Lupin détourna de moi les sorts des assaillants, le temps pour moi de m'abriter derrière un canapé renversé. Grâce à mon propre Bouclier, le loup-garou eut vite fait de me rejoindre. Il se mit à distribuer des sorts à tout va, j'en profitai pour apprécier la situation. Ils étaient quatre. Trois sorciers et une sorcière. Parmi eux aucun visage connu. L'un des trois sorciers, visiblement blessé au bras, s'adossait au mur, il était déjà hors de combat. En revanche, les deux autres nous balançaient une pluie de sorts. Pas de qualité particulière, mais des combattants très entrainés. La sorcière qui nous tournait le dos, se battait dans l'escalier avec Albus. L'étroitesse de l'escalier n'avait heureusement pas permis aux autres assaillants de lui venir en aide au risque de la toucher elle en attaquant Albus. Quelques têtes effrayées apparaissaient ça et là au seuil des dortoirs. Les petits crétins inconscients, c'était un coup à ramasser un sort perdu! Je me lançai un Sonorus pour leur ordonner:
«Rentrez dans vos dortoirs et enfermez-vous. Immédiatement!»
Toutes les têtes disparurent instantanément. Parmi les élèves, il ne restait plus qu'Albus sur le champ de bataille. J'observais le dos de la sorcière qu'il affrontait en me demandant comment lui venir en aide, quand, ayant échappé de peu à un Doloris, Lupin tourna vers moi une mine fumasse.
«Surtout prends ton temps!C'est pas comme si j'avais besoin d'aide!» grogna-t-il.
J'ensorcelai alors deux des fauteuils renversés au sol qui se précipitèrent sur les assaillants comme des mouches sur une tarte au sucre. Comme espéré cela détourna de nous l'attention de nos adversaires obligés de se concentrer sur les fauteuils volants pour éviter de se faire assommer.
J'allais me précipiter pour aider Albus, quand il désarma son adversaire. Il récupéra la baguette tombée au sol en la faisant venir à lui d'un Accio. Puis, je le vis pointer sa propre baguette sur la sorcière qui était tombée assise sur les marches de l'escalier. Cette dernière plaqua sa main sur sa bouche avant de s'écrouler dans un spasme. J'avais vu mourir assez de gens dans ma vie pour comprendre qu'elle venait de succomber. Un frisson d'angoisse me traversa. «Albus ne l'a quand même pas tuée après l'avoir désarmée!» espérai-je.
Au même instant, la confusion la plus totale se mit à régner dans notre salle commune. McGonagall prévenue sans doute elle aussi par les fantômes arrivait avec les secours, à savoir une douzaine d'Aurors, Harry en tête. Ils eurent tôt fait de s'emparer des trois assaillants, pendant que je me précipitais vers Albus, Harry et Lupin sur les talons. Mon petit-fils quitta son adversaire du regard pour lever les yeux vers nous.
«Qu'est-ce qu'elle a fait?» demanda-t-il d'une voix blanche.
Il ne l'avait donc pas tuée, j'en ressentis un immense soulagement, vite tempéré par l'idée qu'il l'avait vu mourir sous ses yeux. J'écartai la main que la sorcière avait plaquée sur sa bouche, les débris d'un flacon de verre et une odeur caractéristique.
«Elle a avalé un poison très puissant, elle devait le garder dans un petit l'a … utilisé après que tu l'ais désarmée.» murmurai-je en réponse.
«Mais pourquoi a-t-elle fait ça?» s'écria Lupin.
«Elle ne voulait surtout pas se faire prendre.» expliqua Albus. «Elle n'arrêtait pas de penser à ça. J'aurais dû comprendre ce qu'elle allait faire, mais je n'y ai pas pensé.»
J'étais plus que soulagé qu'il ne l'ait pas tuée, mais il n'était pas question qu'il se reproche sa mort.
«Tu ne pouvais pas le prévoir et …» assurai-je avant d'être interrompu par l'arrivée de mes collègues Flitwick et Eole et surtout par les hauts cris que se mit à pousser ce dernier.
«Mais vous faites erreur! Ce sont des amis à moi.» s'écria-t-il bêtement en essayant de retenir les collègues d'Harry qui emmenaient nos trois agresseurs.
«Des amis à vous!» braillai-je «Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire?»
«Oui, des amis que j'ai rencontrés l'été dernier. J'étais en vacances en Italie, nous …» commença-t-il.
«Je me fiche de vos souvenirs de vacances!» criai-je. «Vous avez dix secondes pour m'expliquer comment vos chers amis ont pu se retrouver dans ma salle commune en plein milieu de la nuit!»
«Mais, je ne sais pas du tout. C'est vrai que la semaine dernière ils ont insisté pour venir prendre le thé à l'école dans mon bureau en passant par le réseau des cheminées, et …» dit-il vaguement gêné.
«Et vous, vous avez accepté de les faire rentrer dans l'école alors que vous saviez parfaitement que qu'il y a chez les serpentards une élève nécessitant une protection particulière. Ensuite, vous avez oublié de rebloquer l'accès à votre cheminée, et puisque les protections magiques ordinaires ne s'appliquent pas aux sorciers que vous avez-vous-même autorisé à entrer, cela leur a permis de revenir tranquillement cette nuit pour s'en prendre aux élèves de ma Maison. Mais quelle espèce d'abruti, êtes-vous?» beuglai-je sans me préoccuper de savoir si quelqu'un avait pris la peine de lancer un Assurdio pour empêcher mes serpentards d'entendre les cris que je poussais.
«Mais je ne vous permets pas …» tenta-t-il.
«Vous ne me permettez pas, vous ne me permettez pas!» hurlai-je «Vous allez voir ce que je vais me permettre moi!»
En même temps, j'avais brandi ma baguette sans même y réfléchir. Avec les réflexes affûtés par son métier d'Auror, Harry me subtilisa celle-ci. Cependant, j'étais tellement en rage que je me ruai sur Eole, prêt à l'étriper à mains nus. Mais Lupin me ceintura, histoire de laisser à ce demeuré de Zephyrus Eole le temps de s'enfuir.
Sur le seuil de la porte, il bouscula Madame Pomefresh venue s'enquérir de notre état. Celle-ci se mit à pousser des hauts cris en apercevant Albus, dont le visage présentait plusieurs contusions et le bras gauche portait une large brûlure. Notre infirmière nous regarda avec sévérité en grommelant des mots parmi lesquels j'entendis «totalement inconscients». Elle nous reprochait manifestement de ne pas lui avoir amené Albus plus tôt, mais je dois dire que son état physique n'était pas ma principale préoccupation. J'étais bien plus inquiet de ce qu'il n'avait pas bougé d'un pouce, qu'il regardait toujours fixement l'endroit où la sorcière qu'il avait combattue, s'était écroulée, alors même que les Aurors avaient emmené le corps depuis de longues minutes. Je me demandais, s'il avait seulement entendu mon altercation avec Eole.
«Vous allez venir avec moi Monsieur Potter. Je dois vous conduire tout de suite à l'infirmerie pour vous soigner.» dit Madame Pomefresh d'une voix apaisante en lui posant une main sur l'épaule.
Albus sembla sortir de sa torpeur.
«Non, pas tout de suite.» répondit celui-ci en échappant à Madame Pomefresh pour remonter l'escalier en courant.
Une porte s'ouvrit un peu plus haut. Des exclamations se firent entendre. D'autres portes s'ouvrirent.
«Je vais vérifier que personne d'autre n'est blessé et je vous ramène Albus.» assurai-je en m'engageant à mon tour dans l'escalier.
Comme attendu, je trouvai Albus dans le dortoir des filles de cinquième année. Il n'était pas tout seul. La plupart des élèves de quatrième année et plus s'y trouvaient aussi. Et nos préfète et préfet avaient bien du mal à empêcher les plus jeunes des élèves de sortir de leur dortoir pour se joindre à eux. Tout le monde parlait en même temps dans un brouhaha invraisemblable, mais mon entrée suffit à ce que le silence s'installe instantanément. Vérification faite, l'agresseur n'était rentré que dans le dortoir des filles de cinquième année. Le dortoir de Delphini Black, évidemment.
Sur mon ordre, tous les autres regagnèrent leurs dortoirs respectifs, pendant qu'Albus allait m'attendre dans le couloir. Les filles de cinquième année étaient aussi blanches que les draps de leurs lits. Pour elles, tout s'était passé très vite. Quand les cris de l'agresseur les avaient réveillées, il luttait avec quelque chose ou quelqu'un qu'elles n'avaient pas vu dans le noir. Les filles s'étaient mises à hurler et l'agresseur s'était enfui. Ensuite, elles avaient entendu des bruits de bagarre. Elles étaient choquées mais indemnes. Je les encourageais donc à se recoucher, en leur garantissant que la Maison était désormais en sécurité, avant de rejoindre Albus dans le couloir. Je redescendis avec lui dans la salle commune.
«Maintenant Albus Potter, vous me suivez immédiatement à l'infirmerie pour que je vous soigne.» ordonna Madame Pomefresh.
«Mais, j'ai des choses importantes à leur raconter.» se défendit-il en nous désignant d'un geste vague son père et moi.
«Eh bien, ce sont eux qui devront vous suivre.» répliqua notre infirmière d'un ton ferme.
Je jetai un regard circulaire à la salle commune dévastée par le combat.
«C'est que je dois rester pour protéger les élèves de ma Maison au cas où tout danger ne serait pas écarté.» m'inquiétai-je en considérant la porte qui pendouillait sur ses gonds.
«Vas-y, je reste.» m'enjoignit le loup-garou d'un ton bref.
Tout exaspérant qu'il soit, Lupin était digne de confiance. Je laissai donc ma Maison sous sa surveillance. McGonagall qui ne semblait pas moins pressée que moi d'interroger Albus sur ce qui s'était passé, nous emboîta le pas.
