Chapitre 13: Quel abruti! (et cette fois-ci, je parle de moi)

McGonagall qui ne semblait pas moins pressée que moi d'interroger Albus sur ce qui s'était passé, nous emboîta le pas.

Notre Directrice commença à questionner Albus, alors que Madame Pomefresh était encore en train d'appliquer un onguent sur la brûlure de son bras.

«Ces gens, ils étaient venus s'en prendre à Delphini.» expliqua-t-il d'une voix un peu éraillée. «Si je ne me trompe pas, il y a deux sorciers qui étaient restés faire le guet dans la salle commune. La sorcière, celle qui est … enfin morte, elle était restée dans le couloir, pendant que le troisième sorcier est rentré dans le dortoir des filles de cinquième année pour l'enlever.»

«Mais comment Miss Black a-t-elle pu échapperà cet enlèvement ?» s'étonna notre Directrice.

«Eh bien, j'avais conjuré pour Delphini un serpent de glace pour qu'elle le garde avec elle la nuit dans son baldaquin.» expliqua Albus. «Quand l'agresseur s'est présenté, le serpent de glace a dû le mordre. J'imagine que c'est pour ça qu'il saignait. Il s'est mis à hurler, les filles aussi. Ça a réveillé tout le monde. Le type s'est enfui, je l'ai vu redescendre vers la salle commune, mais la sorcière était toujours dans le couloir et elle m'a attaqué quand je suis venu à la rescousse. J'ai réussi à la repousser jusqu'à l'escalier … et c'est là que la bataille entre elle et moi s'est finie.»

McGonagall était sous le choc :

«Un serpent de glace ! Un produit de votre magie en Fourchelang. Vous croyez que c'est bien prudent ?»

Albus se méprit sur le sens de la remarque.

«Non, j'aurais dû lui en fabriquer au moins deux.» regretta-t-il. «Mais je n'ai pas imaginé que plus d'une personne puisse venir s'en prendre à elle. C'est stupide de ma part.»

Je vis McGonagall hésiter puis renoncer à lui dire le fond de sa pensée.

«Je vous promets Monsieur Potter que je pourrais imaginer beaucoup de termes pour qualifier votre initiative, mais «stupide» n'en fait pas partie.» assura-t-elle en soupirant. «Quoi qu'il en soit, je serais malvenue de vous reprocher une intervention qui a probablement permis de sauver la vie de Miss Black et, si j'en crois ce qu'on a raconté, beaucoup d'autres.»

Je me permis d'interrompre cette discussion, peut-être intéressante, mais sûrement pas urgente sur l'utilité des serpents de glace la nuit dans les dortoirs.

«Tu voulais nous raconter quelque chose, Albus.» rappelai-je.

«Oui, c'est à propos de la sorcière avec laquelle je me suis battue.» murmura-t-il.

Sa voix s'éteignit un instant. Il l'avait vu mourir sous ses yeux. Une fois de plus, je me sentais impuissant à le protéger de la violence.

«Elle n'arrêtait pas de penser qu'elle ne devait pas se faire prendre à cause des secrets qu'elle ne devait pas risquer de trahir. Elle était tellement obsédée par cette idée, elle y pensait tellement fort, que je l'ai perçue sans le vouloir.» reprit-il. «Alors, quand j'ai réussi à la désarmer …»

«Tu as lancé un Legilimens pour essayer de savoir quels secrets elle voulait cacher!» l'interrompis-je, je venais enfin de comprendre pourquoi il avait pointé sa baguette sur elle.

«C'est ça. A force d'y penser et de peur de les trahir, les secrets étaient juste à la surface de son esprit. Alors, j'ai commencé à regarder. Et du coup, je n'ai pas compris ce qu'elle allait faire. J'aurais plutôt dû lancer un Locomotor Mortis pour essayer de l'empêcher d'avaler ce poison …» dit-il avant de s'interrompre à nouveau.

Il continuait à se reprocher sa mort, et je devrai à nouveau revenir sur cette question pour lui faire comprendre qu'il n'y était pour rien, mais j'avais un enjeu beaucoup plus immédiat:

«Qu'est-ce que tu as vu?» demandai-je en contrôlant ma voix pour ne pas trahir mon excitation.

Il pointa sa baguette vers sa tempe et fit naître un filament argenté qui s'étira une bonne minute durant. McGonagall et Harry tournèrent vers lui puis vers moi des regards surpris, mais de mon côté je n'avais d'yeux que pour le souvenir qui se formait. Je conjurai un flacon pour le recueillir. Cela fait Albus retomba sur les oreillers et Madame Pomefresh nous fixa notre Directrice, Harry et moi d'un air sévère.

«Maintenant, il faut laisser mon patient se reposer.» gronda-t-elle en nous désignant la porte d'un geste impératif.

«Voulez-vous visualiser le souvenir d'Albus maintenant, Severus.» me proposa McGonagall après que la porte de l'infirmerie se soit refermée derrière nous.

«Oui, si ça ne vous dérange pas malgré l'heure tardive, Minerva.» acceptai-je.

«Tellement tardive, qu'il est plutôt tôt le matin que tard le soir.» soupira notre Directrice. «De toutes façons, nous aurons quelques heures supplémentaires pour nous reposer, car je vais suspendre le cours pour la journée. Le temps que vous vous occupiez des élèves de votre Maison, et que les autres directeurs s'occupent de la leur, car je ne doute que l'information se répande comme une traînée de poudre et que toute l'école ne soit en émoi dès le petit matin.»

Nous continuions à nous diriger vers le bureau directorial quand elle ajouta:

«Sans compter que je ne suis pas sûre d'avoir encore quelqu'un pour enseigner les cours de Métamorphose.»

«Ne me dites pas que vous regretteriez cet imbécile d'Eole au cas où il prendrait de lui-même la décision de nous quitter.» protestai-je.

«Bien sûr que si ! s'écria-t-elle. Quoi que vous pensiez de lui, il enseigne fort bien la Mé est pédagogue, les élèves l'apprécient …»

«Il est surtout stupide au point d'en être dangereux!» m'écriai-je.

L'arrivée devant le sphinx de pierre qui défendait l'accès au bureau directorial depuis que c'était McGonagall qui l'occupait, mit un terme à notre discussion. Constatant qu'elle avait laissé la Pensine dans ses appartements. McGonagall nous pria Harry et moi de l'attendre dans son bureau, pendant qu'elle remontait chez elle par un escalier dérobé.

Tout en regardant avec une nostalgie évidente les fragiles objets de Dumbeldore que McGonagall avait conservés sur son bureau, Harry m'interpela à voix basse:

«Ainsi, Albus l'a désarmée lui-même. Une sorcière adulte. Je croyais que c'était toi ou Remus.»

«Je te garantis que Lupin et moi avions assez à faire avec les deux autres. Ils étaient surentraînés ces types.» répondis-je sur le même ton avant de remarquer. «Ce qui m'étonne, c'est que ça t'étonne. Que ça t'étonne encore.»

«Je ne devrais plus m'étonner que mon fils de quatorze ans, soit capable de vaincre en duel une sorcière adulte, de faire de la Legilimencie et d'extraire ses propres souvenirs. Eh bien, pardon de te dire que si. » s'écria-t-il avant d'ajouter en soupirant. «Désolé de le dire abruptement, mais, de toi à moi, je me serais bien contenté qu'Albus soit qu'un sorcier «normal».»

«Au risque de te surprendre, moi aussi.» répliquai-je.

J'étais parfaitement honnête en disant cela. Bien sûr, une partie de moi était flattée par les pouvoirs hors normes qui s'affirmaient de plus en plus chez Albus. Mais, pour avoir côtoyé Dumbeldore et Voldemort, je savais aussi quelles difficultés de tels pouvoirs pouvaient engendrer pour les sorciers qui les possédaient, et pour tous les autres …

McGonagall redescendit en conduisant devant elle le bassin en pierre de la Pensine d'une baguette précautionneuse. Dès qu'elle l'eut déposée sur une petite table, j'y versais le contenu du flacon contenant le souvenir d'Albus et j'y plongeai le visage sans hésiter. Comme toujours, je me sentis happé par la Pensine.

J'atterris dans une pièce anonyme avec une fenêtre à barreaux par laquelle on apercevait le soleil couchant. L'unique porte s'ouvrit sur la sorcière à laquelle Albus avait arraché cette pensée. Je réalisai qu'il ne s'agissait pas d'un souvenir, mais d'un scénario qu'elle avait dû répéter tant de fois qu'il s'était ancré en elle comme un véritable souvenir. Je la vis se diriger vers une table sur laquelle s'alignaient douze flacons numérotés. Elle s'empara du flacon numéro 1 et se dirigea vers un coin sombre de la pièce où un corps probablement retenu par des liens magiques reposait sur une couchette étroite. Même si, l'image ne lui ressemblait pas vraiment, les cheveux bleus ne laissaient pas de doute sur le fait qu'il s'agissait de Delphini Black. La sorcière se dirigea vers elle, l'obligea à avaler le contenu de la fiole et ressortit. Le souvenir s'accéléra. Un instant après, c'était déjà le matin, le lever du soleil et elle revenait pour l'obliger à boire la deuxième fiole. J'avais compris, mais j'attendis jusqu'à la fiole numéro 6 pour vérifier le rythme soir et matin de l'absorption avant de ressortir de la Pensine.

Comment est-ce que je n'avais pas pu y penser moi-même? Voilà pourquoi je butais depuis si longtemps. Je cherchais depuis des semaines à imaginer une unique potion capable de transformer Delphini Black en Voldemort, mais la puissance de toutes les potions que j'envisageais la tuait bien avant qu'une quelconque transformation ait eu lieu, et c'est pour ça qu'il n'y en avait non pas une potion mais plusieurs …

Je me retournai vers Harry qui, ainsi que McGonagall, m'observait en silence:

«Au cas où tu aurais nourri quelques illusions, Harry, je suis navré de devoir te dire que ton père est un crétin.»