Bonjour à tous !

Voici la suite et la rencontre tant attendue _ redoutée ? _ avec Ronald. Pour ceux qui, peut-être, avaient lu l'une de mes premières fictions Drago-Hermione, vous vous souviendrez peut-être que Ron n'est pas un personnage que j'affectionne particulièrement. De fait, il tient souvent le mauvais rôle dans mes récits x) Désolée pour les fans du rouquin, en même temps si vous êtes ici c'est que vous êtes vous aussi tombés sous le charme de notre ténébreux Severus, n'est-ce pas ? =p

Bonne lecture à vous !

Rar :

Guest (1) : Oh alors ça c'est super gentil de me dire que tu bosses en médical et que c'est crédible, ça me soulage énormément ! =) Ravie que le chapitre avec ce petit rapprochement t'ait plu, merci de me rassurer pour la suite aussi ;) Bonne lecture de celui-ci !

Guest (2) : merci à toi de me lire et de commenter, c'est très gentil =)


Perdu dans ses pensées, muré dans un silence digne de Granger quelques semaines plus tôt, Severus avait longé les couloirs sans dire un mot, ignorant la tension palpable qui régnait entre lui et la sorcière à ses côtés. Comme elle l'avait assuré à Granger, Estella l'avait raccompagné. Autant dire que l'ambiance n'était plus du tout la même en descendant du toit que lorsqu'il y était monté avec la Gryffondor. Quelle ironie !

- Vous devez être content pour elle.

- … Je vous demande pardon? Avait demandé Severus, réalisant avec un temps de retard que c'était à lui que l'infirmière s'adressait.

- Pour Hermione. Vous devez être content qu'elle reprenne une vie normale. Avec des gens de son âge, des camarades de classe… un petit ami, comme tout le monde.

Severus avait senti son humeur chuter d'un cran supplémentaire, sans réussir toutefois à en déterminer la cause. Il ne s'entendait pas avec Estella comme avec Allan ou Peter, mais cela n'avait rien d'étonnant en soit. Il ne s'était jamais entendu avec grand monde, en réalité. Toutefois, cette infirmière avait le don de l'agacer profondément à chaque fois qu'elle ouvrait la bouche.

- En tant que professeur, cela doit être un plaisir de la voir aller de l'avant, avait-elle poursuivi comme il ne répondait pas.

- Je me fiche bien de ce que devienne mes élèves, avait rétorqué Severus, impassible. Leur sort ne me concerne plus dès l'instant où ils franchissent les portes de l'école. Et je ne suis plus professeur, comme cela ne vous aura pas échappé.

L'infirmière s'était rembrunie à côté de lui, mais il l'avait ignorée. Il ne restait qu'un étage à descendre pour arriver au gymnase et retrouver Peter, et Severus commençait à fatiguer. Entre le trajet jusqu'au toit, la discussion avec Granger et le chemin du retour, une heure s'était bien écoulée, ce qui était déjà une durée considérable pour une première sortie en béquilles.

- En effet, avait concédé Estella d'un ton grinçant. Qu'avez-vous donc prévu de faire en sortant d'ici, si vous ne reprenez pas votre poste à Poudlard ?

Severus s'était arrêté net dans le couloir, pris de court par cette question. Entre son coma, sa rééducation, puis l'attention consacrée à Granger, il n'avait jamais pris le temps de songer à cette question. Il savait déjà qu'il n'enseignerait plus, lui qui n'avait jamais apprécié ni les élèves ni les copies à corriger. Pour le reste, il n'en avait pas la moindre idée.

- Il va falloir commencer à y songer, à présent que votre rééducation est bien entamée, avait poursuivi l'infirmière avec un sourire emprunté.

Severus n'avait pas répondu, en proie au doute et à l'incertitude soulevés par cette question. Alors qu'il n'avait espéré qu'une chose depuis son réveil, sortir au plus vite de l'hôpital, l'idée de quitter les murs familiers de la clinique pour se confronter de nouveau au monde et à la société lui semblait soudain bien peu attirante. Quelque peu dérangeante. Tout à fait oppressante, même.

- Oh, l'ascenseur semble faire des siennes, avait dit Estella en fronçant les sourcils après avoir appelé plusieurs fois la cabine. Il doit être bloqué plus haut. Je vais appeler un technicien…

- Ne vous donnez pas cette peine, était intervenu Severus en amorçant un demi-tour. Je vais prendre les escaliers.

Tout, plutôt que d'attendre en compagnie de cette femme et de ses remarques dérangeantes.

OoOoO

Qu'il était étonnant de constater à quel point il était facile de parler avec certaines personnes, et de se taire avec d'autres. A quel point en un instant, changeant de lieu et d'interlocuteur, toute envie de discuter pouvait disparaître.

- Et… ça va, toi, sinon?

De constater à quel point une question, répétée pour la troisième fois en l'espace de vingt minutes, pouvait perdre en consistance, et attester du peu de conversation de la personne qui la posait.

- Oui, oui.

Le silence était retombé au dessus de la table que partageait Hermione avec le cadet Weasley, au fond du salon de thé. Elle ne se rappelait plus du nombre exact d'enfants que comptait cette famille, dont on lui avait dit qu'elle avait été proche, avant que le deuil de l'un de leur fils, couplé à sa perte de mémoire qui l'avait empêchée de le pleurer avec eux, ne vienne rompre tout lien entre eux et elle. L'espace d'un instant, elle s'était demandé si les autres membres de la fratrie étaient aussi peu dotés d'esprit que leur cadet, ou si cela était propre à celui-ci.

Le jeune homme avait essayé, sans grand succès, de masquer la grimace embarrassée que cette brève réponse avait suscité. Pour se faire, il avait plongé vers son assiette, et avalé d'une bouchée un pancake nappé de sirop d'érable, faisant descendre le tout d'une gorgée de jus de citrouille sous le regard passablement dégoûté d'Hermione. Par Merlin, ce garçon était-il croisé avec un ogre ? Elle se rappelait de Hagrid, le garde chasse de Poudlard, qui était venu lui rendre visite au cours de l'été. Il lui avait dit être un demi-géant. Nul doute que Ron devait compter un ogre dans son arbre généalogique, avec un tel appétit !

- Et sinon… le temps ne te paraît pas trop long, ici ? Avait repris le jeune homme, mal à l'aise du silence qui s'étirait. Enfin, te connaissant, j'imagine que tu bouquines du matin au soir.

- Je dessine, l'avait détrompé Hermione.

Elle avait été tenté de rajouter qu'il ne la connaissait pas. Ou du moins plus, en partant du principe que cela avait été le cas à une époque, bien qu'elle commençait sérieusement à en douter. Après tout, le jeune homme avait eu tôt fait de ne plus venir la voir, passés les premiers jours où il avait été clair qu'elle ne se souvenait pas de lui, et qu'elle ne lui dirait rien de plus qu'aux autres. Toutefois, cela aurait nécessité qu'elle prononce un grand nombre de mots supplémentaires, et l'effort lui semblait bien trop important pour le peu d'intérêt que cela apporterait à cette conversation.

- Tu dessines ? Avait répété le Gryffondor, surpris.

Il avait attendu une confirmation, qui n'était pas venue.

- Mais euh… tu sais dessiner, toi ?

Hermione avait songé au jour où elle avait donné un croquis à Severus alors qu'il était venu s'excuser de lui avoir hurlé dessus, juste après être tombé de son fauteuil. Elle se rappelait qu'il avait fait une réflexion à ce sujet, arguant qu'elle n'avait jamais réussi un schéma correctement en cours. Et puis il s'était interrompu net en avisant son dessin. Il n'avait rien ajouté, mais elle avait vu à son expression qu'il semblait surpris, dans le bon sens du terme.

- Je me débrouille, avait-elle répondu, pragmatique.

- Ah oui ? Je n'aurais pas pensé que ça soit ton truc, toi qui es si… littéraire.

Hermione avait retenu un soupir, ennuyée au possible de cette discussion qui n'en finissait pas. Et dire qu'elle aurait pu rester sur le toit avec le Serpentard, si Estella n'était pas venue la chercher ! Elle avait tourné son regard vers l'une des fenêtres toutes proches, mais le salon de thé n'offrait pas la même vue époustouflante que le toit-terrasse. Quand bien-même, elle doutait de l'avoir appréciée si cela avait été le cas, puisque le contexte n'était clairement pas le même qu'une heure plus tôt.

Alors qu'elle jetait un coup d'œil aux autres personnes présentent dans la pièce, son regard avait été attiré par Gilderoy, qui jouait au memory avec Lucie. La gamine d'une dizaine d'année était arrivée quelques jours plus tôt suite à un accident dans l'élevage d'hippogriffes familial, lui avait-on dit. Inutile de dire qu'elle avait largement le dessus sur le pauvre professeur amnésique. Hermione avait étiré un sourire puis, cette scène lui en rappelant une autre, quelque peu similaire, elle avait ajouté, distraitement.

- Je joue aux échecs, aussi.

Le rouquin avait éclaté de rire en face d'elle, la faisant sursauter. Elle avait ramené son regard vers lui, interloquée.

- Aux échecs, toi ? Tu n'as jamais aimé ça, surtout pas les échecs sorciers !

- C'est le jeu moldu.

- Peu importe, tu as toujours été nulle à ce jeu ! Avec qui tu joues, alors ? Avec Harry ? Même lui doit te battre à plate…

- Avec Severus, l'avait coupé Hermione, vexée malgré elle de s'entendre rappeler qu'elle n'était pas douée pour ce jeu.

Ce qui était vrai, bien-sûr. Elle aurait été bien en peine de le nier, étant donné qu'elle n'avait pas gagné la moindre partie contre le Serpentard depuis des mois qu'elle jouait avec lui régulièrement.

En face d'elle, le Gryffondor avait manqué s'étouffer avec le morceau de pancake qu'il venait d'avaler. Il était parti dans une quinte de toux saisissante qui avait fait s'accentuer un peu plus le rictus dégoûté de la jeune femme.

- Avec qui ? S'était-il étranglé à moitié, les yeux larmoyants.

- Avec Severus. C'est l'ancien professeur de…

- Je sais qui c'est ! S'était récrié le rouquin, sidéré. Mais depuis quand est-ce que tu…? Ne me dis pas que…?

- Que quoi ? S'était impatientée la jeune femme.

- Que tu t'entends bien avec lui ?! S'était exclamé Ronald, ahuri. Bon sang mais tu ne te rappelles pas de lui non plus ?!

Hermione s'était raidie de nouveau, et avait serré les poings sur ses genoux malgré elle, sentant la colère la gagner peu à peu. Par Merlin, combien de fois allait-elle encore devoir se justifier ?

- Ni de lui, ni d'aucune autre personne dotée de pouvoirs magiques, lui avait-elle rappelé, assez sèchement. Je pensais que tu l'aurais compris, depuis le temps.

Ron avait tiqué, surpris par la longueur de sa réponse, ou par son ton tranchant, elle n'aurait su dire. Peut-être un peu des deux, en réalité. Peu lui importait, en réalité. Elle commençait à être lasse de devoir prendre sur elle pour ménager la sensibilité de tout un chacun, et surtout celle de quelqu'un qui n'avait plus donné signe de vie depuis des mois alors qu'il se disait son ami, et même plus.

- Et puis, qu'est-ce que ça peut faire, que je m'entende bien avec lui ? Avait-elle poursuivi, la parole lui revenant soudain à présent qu'il fallait prendre la défense du Serpentard. Il est tout à fait…

- Mais enfin Hermione, c'est Rogue ! Avait scandé le rouquin, comme si ce simple énoncé tenait lieu d'argument d'autorité. Il a toujours été infect avec nous ! Harry a bien dû te le dire, non ?

- Oui, et il m'a aussi dit qu'il avait joué un rôle capital dans votre victoire contre ce Voldemort, et que sans lui, il ne serait jamais parvenu à…

- Chut ! était vivement intervenue une vieille sorcière qui sirotait une tasse de thé à proximité. On ne vous a jamais appris qu'il ne fallait pas prononcer le nom de Vous-Savez-Qui, petite sotte ?! Avait-elle grondé à voix basse.

Hermione avait serré les dents, d'autant plus agacée de se faire ainsi reprendre pour une bête histoire de nom. Bon sang, ces sorciers étaient-ils donc superstitieux à ce point, pour prêter ainsi tant d'importance à un simple patronyme ?

- Excusez-la, mon amie a des troubles de la mémoire, était intervenu Ronald.

La jeune femme avait braqué son regard sur lui, sidérée. Le calme d'apparence qu'elle maintenait depuis une demi-heure maintenant s'était craquelé un peu plus à mesure que sa colère grandissait, sourde et insidieuse.

La grand-mère avait émis un reniflement dédaigneux, avant de se lever en emmenant sa tasse et sa soucoupe pour aller s'asseoir plus loin. Ron avait soupiré, soulagé, avant de ramener son attention vers la brunette, réalisant seulement alors son regard furieux.

- Quoi, qu'est-ce qu'il y a ? Tu ne vas pas t'énerver parce que je te dis ce qu'il en est de Rogue, quand même !

Cette fois, cela avait été la goutte d'eau qui avait fait déborder le vase. Hermione n'avait plus tenter de masquer son agacement, ni sa colère, d'ailleurs.

- S'il n'y avait que cela ! Enfin Ronald, tu n'es pas venu depuis une éternité et tu te permets d'exposer ainsi ma situation à tout va ?

- Quoi ? Mais enfin, c'était juste pour qu'elle nous fiche…

- Si tu avais fait l'effort de venir plus souvent, tu saurais que je n'ai aucun problème à me rappeler de tout ce qui concerne ces six derniers mois. Notamment l'issue de ta dernière venue, où il a semblé évident que tu ne voulais plus me voir, puisque je ne me souvenais pas de toi.

A ce stade, la mâchoire du rouquin avait manqué se décrocher, et il avait considéré la jeune femme avait ahurissement, ne s'attendant sans doute pas à ce qu'elle se montre si vindicative. Hermione ne s'était pas toutefois pas laissée attendrir par son expression ébahie, et avait poursuivi, implacable.

- Pourquoi es-tu venu, Ronald ?

- Bah je… euh… Harry m'a dit que tu parlais de nouveau, alors…

Hermione s'était crispée, blessée malgré elle par ces mots et ce qu'ils sous-entendaient. N'était-elle digne d'intérêt que lorsqu'elle était en mesure de vocaliser ?

- Alors quoi ? L'avait-elle interrompu, acide. Tu t'es dit que ma mémoire serait peut-être revenue en même temps que ma voix, c'est ça ?

Face à elle, le jeune homme ne semblait plus savoir où se mettre. Ses yeux ouverts grands comme des soucoupes la dévisageaient avec hébétude, et il avait refermé la bouche qu'il avait ouverte pour répondre, ne trouvant rien de pertinent à dire pour sa défense. Voyant que son amie ne décolérait pas, il avait tenté de bredouiller quelques mots apaisants.

- Enfin Hermione, ne te met pas dans un état pareil. Qu'est-ce qu'il t'arrive ?

- Il m'arrive que j'en ai assez qu'on me demande sans cesse si je me souviens d'un tel ou d'un autre ! Qu'est-ce que ça peut faire si je ne me souviens pas de toi, hein ? Cela n'aurait pas empêché qu'on soit quand même amis, que l'on créé de nouveaux souvenirs ensemble. J'ai perdu la mémoire des dernières années mais je me souviens parfaitement de tout ce que je vis depuis mon arrivée ici.

- Hermione, ne le prend pas comme ça, voyons. C'est Rogue qui te fait devenir si…

- Oh mais arrête avec ça, pour l'amour de Dieu ! S'était écrié la jeune femme, s'attirant sur eux les regards curieux des autres personnes présentes.

La Gryffondor les avait ignorés, trop énervée pour s'attarder sur ce genre de détails. En face d'elle, Ronald semblait avoir perdu l'appétit. Il avait repoussé son assiette non finie vers le centre de la table, et celle-ci s'était volatilisée comme par magie. Ou par magie, justement. Décidément, elle ne s'y ferait jamais !

- Comment veux tu que je réagisse autrement ? S'était agacé le rouquin à son tour, vexé. Je prends le temps de venir te rendre visite, et non seulement tu n'as pas l'air ravi de me voir mais en plus tu ne cesses de me parler de Rogue !

- Mais c'est toi qui ne veut rien entendre à ce sujet depuis tout à l'heure !

- Évidemment, enfin ! Tu es là à me dire que tu joues aux échecs avec Rogue, comme s'il s'agissait de la chose la plus naturelle du monde ! Tu l'appelles même par son prénom ! Avait-il ajouté avec une grimace dégoûtée qui ne cachait rien de la haine qu'il vouait au Serpentard.

Hermione avait senti quelque chose remuer en elle. Quelque chose de sourd et de grondant, comme si une entité nouvelle s'éveillait au plus profond de son être.

- Severus est la meilleure chose qui me soit arrivée ici. Le seul à comprendre ce que je peux ressentir, et à m'accepter telle que je…

- La meilleure chose qui te soit…! S'était étouffé Ronald, choqué. Non mais tu t'entends parler Hermione ?! Tu crois vraiment que ce type en a quelque chose à faire de toi ? Il a passé sept ans à t'humilier alors même que tu étais première de la classe, alors maintenant que tu n'as plus de pouvoirs, je n'ose même pas imaginer ! Et toi tu parles de lui comme si… comme s'il était devenu le mec le plus parfait du…

Le rouquin s'était interrompu subitement, et ses yeux s'étaient arrondis, comme s'il prenait soudainement conscience d'un détail primordial.

La colère d'Hermione, quant à elle, n'en finissait plus de gagner du terrain. Un courant électrique avait semblé remonter le long de sa colonne vertébrale, de façon soudaine et déstabilisante. Ses phalanges s'étaient mises à la démanger, parcourues d'un fourmillement qu'elle ne se rappelait pas avoir jamais ressenti auparavant.

- Oh bon sang…, avait-il soufflé, saisi. Ne me dis pas que tu as le béguin pour ce connard fini ?

La Gryffondor n'avait pas eu le temps de s'attarder sur les sensations étranges qui l'envahissaient. Son sang n'avait fait qu'un tour à ces mots, et avant qu'elle ne l'ait réellement décidé, elle avait lancé le contenu de son verre de jus de fruit à la tête du rouquin. Le jeune homme s'était prestement reculé en hurlant, manquant tomber à la renverse quand les pieds de sa chaise avaient dérapé sur le liquide répandu au sol.

- Non mais ça ne va pas la tête ?! Avait-il vociféré, scandalisé.

Il avait voulu fusiller la jeune femme du regard, mais s'était simplement heurté à l'expression glaciale de la Gryffondor qui s'était déjà levée, le toisant de toute sa hauteur. Pour le coup, n'importe quel ancien de Poudlard qui l'aurait vue à cet instant aurait été saisie par la ressemblance d'attitude avec un certain professeur de potions.

- Ma tête va très bien, je te remercie, avait-elle rétorqué d'un ton polaire. Bien que pour ta part tu n'aies pas à souffrir de troubles de la mémoire, je te serais grée de ne pas oublier de ne pas revenir, à l'avenir, avait-elle assené avant de tourner les talons.

OoOoO

Severus n'avait pas revu Granger de toute la journée, ni durant la matinée du lendemain, et c'était tant mieux. Parce que même s'il était redescendu dans sa chambre la veille avec Estella, son esprit, lui, semblait être resté sur le toit de l'hôpital. Et la jeune femme, qui était partie retrouver Ronald Weasley, ne quittait plus ses pensées depuis. Ce qui était tout à fait dérangeant. Irritant, même. Exaspérant, pour être précis.

Depuis quand Granger s'octroyait-elle le droit de hanter ainsi l'esprit du plus grand légilimens de Poudlard ?! Il était le seul à avoir le privilège d'entrer dans la tête des gens. L'inverse n'était pas admis. Surtout de la part d'une élève, ou ancienne élève. Dépourvue de magie, qui plus est.

Tout ceci était fâcheux. De même que le sentiment de quiétude qui l'envahissait chaque fois qu'il repensait à la demoiselle appuyée sur la rambarde du toit, le vent venant jouer dans ses boucles brunes tandis qu'elle lui souriait comme elle seule savait le faire.

Vraiment, vraiment ennuyeux.

Sans même parler de la pointe d'amertume qui finissait toujours par couper court à ses divagations, lorsqu'il se rappelait que son petit ami était venu lui rendre visite.

Par Merlin, il ne tournait vraiment plus très rond ! N'avait-il donc rien d'autre à s'inquiéter que de savoir Granger partie batifoler avec son imbécile de rouquin ? Bien-sûr que si. Neals lui avait donné des exercices de magie à travailler pour le lendemain. Il lui fallait reprendre ses lectures de divers traités d'alchimie, au cas où Potter reviendrait avec un crochet de Nagini. Et Peter lui avait fait promettre d'aller marcher en béquille au moins deux fois par jours. Midi approchait et il en était à… zéro mètre parcouru, pour le moment.

Une pensée en amenant une autre, les mots prononcés par la Gryffondor la veille lui étaient revenus. «Je compte bien venir vous chercher tous les jours pour vous obliger à marcher, s'il le faut». Sans doute avait-elle revu sa proposition, à présent qu'elle filait le parfait amour avec le cadet Weasley. Comme le lui avait dit Estella la veille, la demoiselle retrouvait peu à peu une vie normale. Or, dans la vie normale d'Hermione Granger, on ne passait pas son temps libre avec l'ancien directeur de Serpentard, mais avec la gente masculine de Gryffondor.

Severus avait grimacé en sentant son estomac se tordre de nouveau à cette pensée. Par Merlin, était-il tombé si bas qu'il allait finir par en jalouser Potter, Londubat, et même Lupin ? Que Salazar lui vienne en aide, vraiment ! Exaspéré, il avait lancé un regard accusateur aux béquilles posées contre sa table de chevet, comme si tout ceci était de leur faute. Et cela l'était sans doute un peu, d'ailleurs. Il n'aurait jamais eu ce cas de conscience s'il était resté avec son fauteuil roulant. Peut-être serait-il bon d'en vouloir également à Peter, d'ailleurs.

Après toute une matinée à ruminer, et avoir essayé sans succès de se plonger dans la lecture d'un traité sur les poisons, il s'était enfin décidé à sortir de sa chambre pour aller claudiquer quelques mètres sur ses béquilles. Alors qu'il posait la main sur la poignée de la porte, celle-ci s'était soudainement ouverte, et l'aurait heurté en plein visage s'il n'avait pas eu le réflexe de s'écarter.

- Faites attention, nom de Dieu ! S'était-il récrié, furieux.

- Oh pardon professeur ! S'était répandue en excuses une voix qu'il ne connaissait que trop bien.

Une voix qu'il avait toujours exécrée, mais qu'il était impatient d'entendre, depuis quelques jours.

- Vous êtes une vraie catastrophe ambulante ! Avait maugréé Severus, agacé.

Le jeune Potter avait grimacé, coupable d'impolitesse, il devait bien l'admettre, mais ne s'était pas inquiété trop longtemps du courroux du Serpentard. C'est qu'il venait avec un atout de choix dans sa manche, ce jour-là. De quoi venir à bout de la terrible mauvaise humeur persistante de son ancien professeur de potions, il en était certain.

- Ne vous a-t-on jamais appris à frapper, à vous autres…?

L'ancien espion s'était interrompu net en avisant le tube à essai que venait de sortir de sa poche le Gryffondor, celui-là même qu'il s'apprêtait à invectiver pour son non-respect des convenances. Un petit cylindre de verre, fermé par un bouchon en liège magiquement scellé, qui laissait apercevoir une dent. Un crochet, pour être exact. Fin et aiguisé comme une lame de rasoir. Du genre qui entrait dans la peau et la chair comme dans du beurre, Severus en savait quelque chose.

Un crochet de Nagini.

- Comment avez-vous fait ? Avait-il soufflé, n'en croyant pas ses yeux.

Pour une fois, il n'avait pas tenu rigueur à Potter du sourire victorieux et un brin suffisant qu'il avait esquissé.

- Je lui ai demandé, tout simplement. Avec un peu de tact et de politesse. Vous devriez essayer, à l'occasion, vous seriez surpris du résultat, avait-il ajouté, un brin ironique, se sachant en position de force.

Severus lui avait lancé un regard passablement agacé.

- Ne poussez pas le bouchon, Potter, ma patience a des limites, avait-il grincé, n'appréciant guère le sarcasme.

- Très peu, je le sais, avait renchéri le Gryffondor, manifestement amusé. Pourtant, vous faîtes montre d'une patience sans borne avec Hermione, m'a-t-on dit.

Le Serpentard avait été tellement stupéfait par cette remarque qu'il avait lâché du regard la dent aiguisée contenue dans le tube à essai pour fixer le jeune homme, éberlué, sentant déjà en lui les prémices de la colère gronder. Par Merlin, si ce maudit gamin n'avait pas tenu entre ses doigts cet échantillon si précieux, il l'aurait bien…

Une alarme assourdissante avait soudainement retenti dans la pièce, faisant sursauter les deux hommes. Le Gryffondor avait été tellement surpris qu'il avait manqué en lâcher le tube à essai sous le regard horrifié de Severus. Heureusement, et malgré tout ce que l'ancien espion avait pu en dire, le Survivant n'avait pas été le plus jeune attrapeur de Gryffondor pour rien. Il avait rattrapé la dent en un éclair, s'empressant de le remettre en sécurité dans la doublure ouatée de son manteau. Severus avait expiré un soupir de soulagement.

- Qu'est-ce que c'est ? Avait demandé le jeune homme, curieux, en tâchant de déterminer d'où venait l'alarme.

Il avait pivoté dans l'intention de sortir dans le couloir pour trouver des explications, mais la porte avait refusé de s'ouvrir, malgré son insistance.

- Qu'est-ce que…?!

Une volute de fumée blanche était passée sous le pas de la porte, se frayant un chemin entre les jambes du jeune homme, avant de se rassembler pour former la silhouette trapue d'un ours à lunettes entre les deux sorciers. Severus avait froncé les sourcils, ne reconnaissant pas ce patronus, jusqu'à ce que la voix d'Allan en émane.

- Votre attention s'il vous plaît, l'alarme de confinement de l'hôpital vient d'être déclenchée suite à une tentative de violation des barrières de protection de l'établissement. Veuillez s'il vous plaît garder votre calme et rester dans la pièce où vous vous trouvez jusqu'à ce qu'un membre du personnel soignant vienne vous ouvrir. Pour votre sécurité, ne tentez en aucun cas de forcer les sortilèges de verrouillage. Nous reviendrons vers vous dès que nous aurons plus d'informations.

Les deux hommes avaient échangé un regard, soudain envahis par une inquiétude similaire à l'entente de ses mots. Même si Severus n'était pas sorti de l'hôpital depuis presque six mois, il savait ce qu'il en était, au dehors. La presse évoquait encore bien trop souvent les agressions et les crimes commis par les anciens partisans du Lord Noir toujours en cavale. Potter, quant à lui, était sans doute mieux informé encore, puisqu'il avait intégré la formation pour devenir auror au ministère, début septembre.

Même si Severus avait eu peu d'espoir de parvenir à un résultat différent, cela avait été plus fort que lui, et il avait tenté d'ouvrir la porte à son tour, en vain.

- Par Salazar, quelle plaie ! Cela n'aurait-il pas pu attendre que nous soyons sortis ? Avait-il pesté, excédé.

Puis, alors que les derniers mots quittaient ses lèvres, l'ancien espion s'était soudain raidi, comme frappé par le double-sens de ce qu'il venait de dire. Il avait lentement tourné la tête vers le jeune Gryffondor qui se tenait non loin de là, et dont les yeux émeraude s'étaient écarquillés à leur tour. Severus avait senti son corps entier se hérisser de protestation à la pensée de ce qui les attendait, tandis qu'en face de lui le Survivant blêmissait à vu d'œil.

- Je savais que j'aurais dû passer voir Hermione avant vous, avait murmuré le rouge et or, chagrin.

Le Serpentard n'avait pas répondu, tant il avait été en accord avec le jeune homme, pour une fois dans sa vie. Par Salazar, pourquoi fallait-il toujours qu'il se retrouve dans pareilles situations ? N'avait-il pas déjà assez donné par le passé pour racheter ses erreurs de jeunesse ? N'avait-il pas suffisamment sacrifié de son temps et de sa vie, pour se retrouver ainsi contraint à devoir rester enfermé avec l'élève qu'il avait tant maudit durant sa carrière ?

Pour le coup, lui aussi aurait préféré que Potter soit passé voir son amie avant de descendre le voir. Il aurait même préféré, et c'était dire à quel point son désarroi était profond, que ce soit Granger qui soit venue lui rendre visite en cet instant, plutôt que son camarade à lunettes. Au moins aurait-il était certain qu'ils ne se seraient pas entre-tués.

Avec Potter, en revanche, rien n'était moins sûr.

OoOoO

Hermione avait mis un temps fou à se calmer, suite à sa dispute avec Ron. Incapable de rester enfermer alors que la colère coulait encore dans tout son organisme, elle était sortie dans les jardins, y faisant les cent pas sans parvenir à redescendre en émotions. Les mots méprisants et maladroits du rouquin avaient tourné en boucle dans son esprit, alimentant sa fureur et son ressentiment.

Elle s'était sentie blessée, humiliée et ridiculisée, et il était évident que ce triptyque n'était pas le plus approprié pour retrouver son calme. Malheureusement, elle avait eu toute la nuit pour cogiter, se refaire la scène, se repasser les remarques désobligeantes.

Le petit matin ne l'avait pas trouvée plus sereine, bien au contraire. Elle s'était levée si tôt qu'elle avait été la première à franchir les portes du gymnase. Peter n'était même pas encore arrivé, seul Jason était là, occupé à installer les exercices pour les premiers patients.

- Ma parole, tu es tombée du lit ? S'était-il exclamé après avoir vérifié l'heure à sa montre, sidéré.

- C'est ça, avait-elle grogné, agacée. Je peux prendre le vélo ?

- Tu peux bien prendre l'appareil que tu veux, personne n'est pas prévu en séance avant au moins une heure.

Elle avait pédalé comme une dératée pendant trente minutes, ses écouteurs enfoncés dans ses oreilles, le son du walkman offert par ses parents poussé à son maximum ou presque. Cela l'avait aidée à calmer sa hargne. Un peu. Jusqu'à ce qu'elle remonte prendre une douche, et qu'elle ne tombe sur Estella qui lui avait demandé dans un sourire entendu comment s'était passée sa rencontre avec son petit-ami. Hermione s'était hérissée aussitôt, et lui avait lancé un regard assassin.

- Quel petit ami ? Avait-elle sèchement répliqué. Je n'ai pas de petit-ami, et s'il est vrai que j'ai un jour fréquenté cet idiot, eh bien je ne suis pas mécontente de l'avoir oublié !

Estella avait été tellement surprise qu'elle n'avait plus fait de commentaire, et avait battu en retraite vers le couloir et son prochain patient. Malheureusement, le mal était fait, et la colère d'Hermione était repartie de plus belle. C'est dans cet état d'extrême tension qu'elle avait rejoint Neals en fin de matinée pour sa séance de magie quotidienne, ou plutôt sa séance de gesticulations, car elle n'avait aucun doute sur le peu d'intérêt que ces sessions d'entraînement revêtaient.

L'orthomagiiste avait immédiatement perçu la colère qui l'entourait telle une aura crépitante.

- Euh… tout va bien, Hermione ? Tu m'as l'air quelque peu… tendue…

- Ça va, merci, avait-elle répondu sèchement. Tu permets ? Avait-elle vivement demandé en s'avançant droit vers la table où reposait la baguette bridée destinée à l'entraînement.

Neals avait blêmi, déstabilisé par son humeur massacrante qui n'avait pas été sans lui rappeler un autre de ses patients.

- Euh oui mais… tu ne t'es même pas échauffée…

- Crois-moi, je suis bien échauffée là, avait-elle rétorqué d'une voix sourde en s'éloignant vers les mannequins qui la narguaient au fond de la pièce depuis des semaines.

Elle avait tellement de rage à extérioriser, là tout de suite, que plus rien ne lui semblait impossible. N'avait-elle aspergé son soi-disant grand amour d'un verre de jus d'orange ? Après qu'il l'ait blessée, en lui confirmant qu'il n'était revenu que dans l'espoir qu'elle se souvienne de lui ? Après qu'il l'ait humiliée, en lui rappelant qu'elle n'avait plus aucun pouvoir, et qu'elle n'était donc même pas digne de l'intérêt d'un sorcier ? Après qu'il l'ait ridiculisée, en tournant en dérision l'affection qu'elle portait à Severus ?

Sa colère avait décuplé à ce souvenir, sourde et grondante comme la galop fracassant d'une harde de chevaux furieux. Le même courant électrique qui l'avait déjà saisie la veille s'était fait de nouveau ressentir, comme si une énergie nouvelle, née de sa fureur et de son ressentiment, alimentait son corps tout entier. Elle avait tressailli, accueillant maladroitement cette sensation et l'impression de pouvoir absolu qu'elle lui procurait.

Ressentant le besoin impérieux d'évacuer ce trop plein d'énergie, elle avait levé la baguette vers l'un des mannequins, exécutant avec précisions les gestes que Neals lui avait appris.

- Windgardium Leviosa!

Rien ne s'était passé. Comme tous les jours depuis des mois qu'elle croupissait ici.

- Aquamenti ! Avait-elle scandé avec plus de force encore, sentant tout son corps vibrer de l'envie d'extérioriser sa colère.

- Hermione, doucement, avait temporisé Neals. Ne t'énerve pas.

Mais la Gryffondor n'avait pas besoin de s'énerver. Elle était déjà énervée. Et pas qu'un peu, d'ailleurs. En proie à une ire dévorante, alimentée par la fatigue, par les frustrations cumulées au cours des derniers mois, et par une angoisse sournoise qui houspillait son cœur depuis les mots moqueurs de Ron, la veille. C'était la un cocktail explosif qui menaçait de déborder à tout instant si elle ne faisait rien pour l'apaiser.

Avec une hargne renouvelée, elle avait lancé sortilège sur sortilège, s'efforçant de transformer cette énergie brûlante en une quelconque magie qui lui aurait permis de soulager sa colère.

- Hermione, s'il te plaît, était intervenu Neals derrière elle. Je ne suis pas certain que tu sois en état pour ce genre d'exercices aujourd'hui. Pose cette baguette et viens plutôt boire un verre d'eau, cela te fera…

- Incendio ! S'était écriée la jeune femme, à bout de nerfs, alors que l'image du mannequin carbonisé sous l'effet du sortilège de Severus, quelques mois plus tôt, lui revenait en mémoire.

Le son de sa propre voix ne lui était même pas parvenu, couvert par le hurlement tonitruant de l'alarme qui s'était déclenché au même instant. Hermione avait vivement sursauté tout en portant hâtivement ses mains jusqu'à ses oreilles, tentant vainement de soulager ses tympans. Un bruit de verre brisé ponctué d'un juron étouffé l'avait incitée à se retourner vers Neals, mais elle s'était figée en relevant la tête, avisant les deux poteaux encore fumants qui trônaient au fond de la pièce, là où se trouvaient les mannequins un instant plus tôt. Choquée, elle avait contemplé les pièces de bois carbonisées et les débris de matelassures éparpillés sur le sol, puis la baguette qui avait roulé sur le sol lorsqu'elle l'avait lâchée pour couvrir ses oreilles.

Etait-il possible que…?

- Neals ! S'était-elle exclamée en se précipitant vers l'orthomagiiste, paniquée.

Le jeune homme, qui ramassait le verre qu'il avait fait tomber au déclenchement de l'arme, ne l'avait pas entendue. Il avait sursauté quand elle avait tapoté son bras d'un air agité.

- Neals je suis désolée, je crois que… que j'ai abîmé tes mannequins ! Avait-elle dit précipitamment, angoissée à l'idée d'être à l'origine de ce phénomène destructeur.

- Je n'entends rien Hermione ! S'était écrié le professionnel de santé en retour, assourdi par le bruit.

La Gryffondor avait répété, plus fort, mais ses cordes vocales étaient encore fragiles après tous ces mois de silence, et elle n'avait pas réussi à se faire entendre. Elle avait de nouveau regardé les poteaux dépouillés de leur mannequin, bouleversée, et avait senti son souffle s'emballer à la pensée qu'elle avait peut-être réellement pulvérisé les deux cibles molletonnées. Ce n'était pas possible. Elle n'avait plus de pouvoirs magiques. Elle doutait même en avoir jamais eu, en réalité. Elle était incapable d'une telle chose, d'un tel déferlement de violence, incapable d'atomiser ainsi des mannequins. Des mannequins qui auraient aussi bien pu être de vraies personnes…

Elle avait chancelé à cette pensée, se rattrapant in extremis au bord de la petite table où Neals posait ses affaires, alors que son esprit était soudain assailli d'images floues et indistinctes. Des rayons lumineux, des sons au moins aussi horribles que le hurlement de l'alarme qui l'empêchait de se concentrer. Une affreuse odeur de brûlé l'avait prise à la gorge, sans qu'elle ne puisse déterminer si elle émanait des poteaux ou si c'était son imagination qui lui jouait des tours.

Au bord de la nausée, elle s'était soudainement sentie faible. Il y avait trop de stimuli, trop d'informations. Le son, les odeurs, et ces images. Ciel ! Ces images qui tournaient dans sa tête, les mannequins déchiquetés, leur visage anonyme déformés par la douleur et la terreur, leur bouche ouverte sur un dernier cri suppliant… mais était-ce seulement des mannequins, en réalité ?

Remarquant alors la pâleur soudaine de sa patiente, Neals s'était précipité. L'alarme s'était enfin tue, rendant les échanges de nouveau possibles, apaisant pour un instant la migraine qui germait dans la tête de la jeune femme.

- Hey, Hermione, ça va?

- … ai détruit tes mannequins, avait-elle murmuré à voix basse, craignant de vomir si elle haussait le ton.

Le jeune homme avait jeté un bref coup d'œil vers le fond de la salle, avait de la faire asseoir sur une chaise et de remplir de nouveau le verre d'eau qu'il venait de reconstituer.

- Non, ne t'inquiète pas, ce n'est rien. C'est l'alarme de confinement qui vient de se déclencher, quelqu'un a dû forcer les barrières de l'hôpital…

- Quoi ? Avait croassé la jeune femme, livide.

- Nous sommes juste à côté du point d'ancrage des sortilèges de protection, le champ de force a dû réagir à l'intrusion et les mannequins n'ont pas supporté.

Le soulagement de la jeune femme à ces mots n'avait que peu duré.

- L'hôpital est attaqué ? Avait-elle demandé, de plus en plus mal.

- Ne t'en fais pas, nous ne craignons rien ici, les portes se scellent magiquement en cas d'intrusion et…

- Votre guerre est censée être finie ! Avait faiblement protesté la Gryffondor, tout son corps se couvrant de chair de poule.

- Oui, elle l'est mais… C'est un peu plus compliqué que cela !

Hermione ne l'avait même pas entendu, tant la tête lui tournait, à présent. Sans l'aide de Neals, elle aurait été incapable de reposer le verre d'eau sur la table sans le faire tomber. Elle avait froid, elle avait chaud. Envie de vomir, aussi. Et peur, si peur qu'elle tremblait de tout son corps, alors que les flashs continuaient de traverser son esprit, trop abstraits pour qu'elle en saisisse la pleine nature, trop précis pour qu'elle puisse les ignorer. Elle n'avait peut-être pas détruit les mannequins de Neals, mais elle commençait à se demander si elle n'avait pas réellement détruit d'autres choses, au cours de sa vie… des choses bien plus importantes que de simples mannequins rembourrés…

Elle s'était affaissée un peu plus contre Neals, dont la voix paniquée l'avait un instant tirée du tumulte de pensées qui l'agitait.

- Hermione, reste avec moi, ok ? Ce n'est pas le moment de me faire un malaise là, on est coincé ici pendant quinze minutes au moins ! Dis quelque chose, n'importe quoi ! Avait insisté le sorcier.

Mes les idées de la jeune femme n'étaient déjà plus très claires. Son regard avait louché sur la baguette qui gisait toujours sur le sol, à quelques pas de là, et dont elle n'avait pas réussi à faire sortir la moindre étincelle, une fois de plus.

- Est-ce que tu trouves que je suis nulle ? Avait-elle murmuré en deux respirations difficiles, essoufflée alors qu'elle n'avait pourtant pas fait d'effort physique.

- Quoi ? Avait sourcillé l'orthomagiiste, perplexe.

- Est-ce que… est-ce qu'un sorcier pourrait vouloir de moi même si… même si je n'ai plus de pouvoirs ? Avait-elle haleté, les yeux rivés sur la baguette aussi inutile qu'inerte.

- Oh Hermione, avait soufflé Neals avec tristesse. On n'en est pas là, ta magie peut encore revenir. Et puis je suis sûr que Ronald Weasley n'est pas du genre à s'arrêter à cela, ne t'inquiète pas.

Hermione avait voulu lui dire que ce n'était pas de Ron dont elle parlait, mais elle n'avait pas trouvé la force d'articuler le moindre mot. Malgré tous les efforts de Neals pour la garder consciente, elle avait sombré dans l'obscurité.