26- cauchemars (table du petit déjeuner / regret des mots de départ / je suis hanté par les mensonges que j'ai aimés, les actions que j'ai détestées)

Le corps de TK reposait en haut de la pile de cadavres devant le stade, arqué en arrière, la tête vers le bas, la bouche ouverte et ses beaux yeux verts le fixant. Carlos tomba à genoux en hurlant, il aurait pu le sauver s'il avait prêté attention aux prisonniers autour de lui quand il allait chercher les listes, il aurait pu. Il se mit à pleurer, oubliant tout ce qui l'entourait jusqu'à ce qu'il sente le canon d'un fusil contre sa nuque. Il ne réagit pas, ne chercha pas à sauver sa vie, sans TK, elle ne valait plus la peine d'être vécue. Le coup de feu partit.

Carlos bondit, réveillé en sursaut par son cauchemar. Il n'avait pas réalisé s'être endormi alors qu'il parcourait les listes des yeux. Encore tremblant des images créées par son esprit, il regarda autour de lui, mais il était seul. Tant mieux, ça aurait été bête de mourir ainsi, pour avoir succombé à la fatigue.

Il regarda les listes et repéra un détail qu'il n'avait pas vu avant, les enfants étaient répartis par âges. En plus de chercher ses trois noms, il se mit à regarder les âges des enfants à la recherche d'un qui ait le même que Jonah.

Carlos dut s'y reprendre à plusieurs fois, il n'arrivait pas à rester concentré, ses pensées dérivaient sans cesse sur TK et le cauchemar qu'il avait fait. Il fut incapable de dire combien de temps il lui avait fallu avant de repérer un des enfant du bon âge.

Ne voyant pas quoi faire d'autre, il remit les documents dans son dos et quitta l'appartement qui l'avait abrité à la recherche d'un plan. Le jour s'était levé sur une vision apocalyptique, le bitume était jonché de corps, les caniveaux débordaient de sang et de nombreux immeubles étaient en feu. Il se mit à longer les murs, il regardait partout autour de lui à la recherche du moindre mouvement ou du moindre bruit. A présent qu'il faisait jour, il se sentait beaucoup plus exposé que sous le couvert de la nuit.

Heureusement, les combats s'étaient éloignés de cette zone et il trouva un trio de plans avec différentes échelles sans être mis en danger. Il eut du mal à trouver l'école qu'il cherchait, mais finit par la repérer. Elle était loin, mais il n'avait pas de meilleur plan alors il se mit en route.

La journée était bien avancée quand il arriva à proximité de l'école. Il avait dû éviter quelques zones de combats, et s'en sortait bien jusqu'à présent, mais il ne pouvait pas échapper à celle qui était devant l'école. Des soldats américains affrontaient les terroristes qui utilisaient pour certains les enfants comme boucliers. Il se cacha derrière un mur et attendit que la situation évolue.

Il repéra un groupe de cinq militaires entrer dans les égouts et hésita à les suivre. L'idée que ces hommes devaient être à cran et allaient lui tirer dessus avant qu'il ne puisse décliner son identité lui traversa l'esprit. Il refusa, espérant ne pas avoir à rester inactif trop longtemps.

Ses espoirs furent récompensés, ce fut comme s'il pouvait suivre l'avancée des hommes, il voyait les terroristes aux fenêtres tomber les uns après les autres et en une quinzaine de minutes le reste des soldats put entrer. Ils ressortirent dans les minutes qui suivirent au compte goutte avec des enfants de deux à cinq ans dans les bras.

Carlos décida de se présenter, les mains bien en évidence, pour montrer qu'il ne représentait aucun danger, ce qui n'empêcha pas plusieurs soldats de le mettre en joue. Leur réaction attira l'attention d'autres soldats autour d'eux dont celle de ceux qui étaient passés par les égouts, reconnaissables à la saleté sur leurs vêtements. L'un d'eux, chauve, petit et mince, le dévisagea et se rapprocha, suivi d'un autre homme, grand et brun.

"Carlos ?" l'interpella-t-il en continuant de s'approcher.

Le concerné eut beau essayer de se souvenir, cet homme ne lui disait rien.

"Tu t'appelles bien Carlos ?" insista l'homme.

Le policier se demanda ce qui allait encore lui arriver alors qu'il acquiesçait.