Chapitre 7

22 Octobre 1995, Poudlard

Cela faisait maintenant une semaine que Valentina était coincée à l'infirmerie. Ses amis lui manquaient, le Quidditch lui manquait, la salle commune de Poufsouffle lui manquait. Tout ce qui ne lui manquait pas vraiment étaient David Lloyd et les cours d'Ombrage.

Peu à peu, son corps se remettait en place. La plaie qu'elle avait au crâne était complètement guérie et elle était maintenant capable de se lever, mais marchait difficilement. Elle avait des séances de rééducation journalière et jusqu'à lors, elle avait réussi à se mettre debout et à faire quelques pas sans aide extérieure. Mme Pomfreh était assez optimiste quant à sa guérison complète, même si elle en garderait sûrement quelques cicatrices.

Il était environ 19h30 et ce soir, comme à son habitude depuis qu'elle était dans ce lit, Valentina mangeait seule. Mme Pomfresh lui apportait son plateau-repas sur roulettes tous les soirs avant d'aller prendre le sien dans la grande salle avec le reste de l'école. Aujourd'hui, elle avait droit à des pommes de terres sautées et une côte de porc grillée accompagnée de salade verte. Le dessert semblait être une sorte gelée rose bonbon qui n'avait pas l'air très savoureuse. Valentina ne put s'empêcher de maudire les Britanniques et leurs inventions culinaires étranges. Même si elle s'était habituée à manger anglais pendant ses années à Poudlard, la cuisine irlandaise de sa mère lui manquait terriblement. Au moins, elle avait eu droit à un jus de citrouille ce soir, ce qu'elle appréciait particulièrement.

Assise en tailleur sur son lit, Valentina sirotait tranquillement son jus quand un bruit la sorti de ses pensées. Elle essaya de déterminer la provenance du son, mais la pièce était parfaitement calme et tout semblait à sa place. Doucement, la jeune femme posa son verre sur son plateau roulant et écouta d'une oreille attentive, balayant la pièce du regard. Soudain, elle sentit son lit bouger, comme si quelqu'un venait de s'asseoir dessus. Elle regretta instantanément de ne pas avoir réclamé sa baguette à l'infirmière.

« Qui est là ? »

Un petit rire se fit entendre. Puis, un bruit de froissement de tissu. Dans la seconde qui suivit, elle vit apparaître un jeune homme roux, nonchalamment assit au bout de son lit, tout sourire.

« Je n'ai pas été assez discret visiblement ...

- Fred Weasley, encore vous ? Ça commence à devenir une habitude. Comment tu as fait pour ... pour sortir de nul-part comme ça ?! Et pourquoi sur mon lit ?

- J'ai piqué la cape d'invisibilité de Harry, répondit-il, un sourire espiègle barrant son visage. C'est pratique d'avoir un petit frère influençable dans le même dortoir que lui ... Je l'ai prise au cas où Pomfresh soit encore là à mon arrivée. »

Valentina soupira. Décidément, ces Weasley ...

« Très bien, et je peux savoir ce que tu fiches ici à cette heure ? En plus d'interrompre mon repas, tu vas louper le tien.

- Oh mais c'était le but. Pomfresh dîne avec les autres profs dans la grande salle donc c'est quasiment le seul moment de la journée où je peux venir ici sans me faire attraper. »

Il marqua une pause et regarda Valentina, l'air suspicieux.

« Attends, comment as-tu fait pour deviner lequel des deux j'étais ?

- Ta voix est légèrement plus grave que celle de ton frère. Je l'ai remarqué quand vous êtes venus me voir avec Angelina. »

Fred arqua un sourcil et regarda Valentina, amusé.

« Intéressant, même notre mère a du mal à nous différencier.

- Angelina a l'air de ne pas avoir trop de difficultés à le faire non plus, remarqua Valentina.

- On va dire que le cas d'Angelina est un peu différent du tien ... »

Valentina inclina la tête, ses grands yeux verts remplis de questions.

« Tu lui demanderas toi-même, fit-il, un sourire taquin sur les lèvres. Ça ne me concerne pas directement alors bon ...

- Tu n'as toujours pas répondu à ma question de tout à l'heure. Qu'est-ce que tu fais là ?

- C'est pas évident ? Je viens te voir.

- La réponse est toujours non.

- Je sais. Mais j'ai bon espoir. La dernière fois tu m'as dit que tu ne ferai pas confiance à quelqu'un que tu connaissais à peine alors je me suis dit que je pouvais remédier à cela me concernant. »

Valentina resta interdite pendant quelques secondes. Il avait volé la cape d'invisibilité de Harry, s'était introduit par effraction dans l'infirmerie et avait loupé son repas uniquement pour ... venir faire connaissance avec elle ?

« Donc ... tu es en train de me dire que tu es ici pour gagner ma confiance, dans l'unique but de me convaincre de jouer les cobayes pour vos inventions étranges à toi et ton frère ?

- C'est un peu rude dit comme ça, mais globalement c'est ça l'idée. »

La jeune femme ne put que demeurer admirative face à tant de conviction et de confiance en soi. Le jeune homme était bien sûr de lui et semblait persuadé que sa stratégie fonctionnerait.

« Et ça valait le coup de louper un repas pour ça? Ton absence va se remarquer tu sais.

- George me couvre. Ce soir, je suis malade, répondit-il avec un air amusé.

- Et tu n'as pas faim ?

- Un tête-à-tête avec une aussi jolie fille que toi vaut tous les dîners du monde, même si c'est dans un lit d'hôpital, fit-il avec un sourire charmeur.

- Même si tu es la raison de ma présence dans ce lit ?

- C'est assez tendancieux dit comme ça, on pourrait croire que je l'ai fait exprès. »

Valentina pouffa.

« Ça serait une technique de drague assez violente quand même, tu ne trouves pas ? Remarqua-t-elle.

- Le tout est de savoir si elle est efficace, cette technique de drague.

- Si ton but était de me clouer au lit pendant deux semaines pour me rendre visite secrètement, alors oui, elle l'est. J'espère seulement que celles qui y sont passées avant moi sont toujours en vie à l'heure qu'il est.

- Oh mais c'est un traitement de faveur réservé uniquement à celles qui en valent le coup, répondit-il, le regard plein de sous-entendus.

- Tu insinues donc que certaines filles ne valent pas le coup d'être séduites ? Je m'attendais à mieux de ta part Weasley. »

Fred souffla du nez. Il avait l'air assez amusé et intéressé par leur petit échange. Il étira ses jambes sur le lit, croisa les bras derrière sa tête en prenant appui sur la partie du sommier dépassant du bout du lit, tout en faisant attention à ne pas toucher le corps meurtri de la jeune fille.

« T'es assez difficile à cerner comme fille O'Shea. Ce n'est pas vraiment le genre de réaction qu'auraient la plupart de filles après ce genre de compliment.

- Tu t'attendais à ce que je rougisse en rigolant niaisement et en tripotant mes cheveux c'est ça ?

- C'est un peu caricatural dit comme ça, mais on va dire que oui, répondit-il en souriant. »

Valentina sourit à son tour. Le jeune homme n'était pas non plus facile à cerner de son côté, mais cela le rendait intéressant et assez sympathique.

« Au-faîte, je sais pas si c'est une manie chez toi, mais tu n'as toujours pas répondu à ma question. Tu n'as pas faim ?

- T'inquiète pas pour ça, je peux survivre une soirée sans aller manger dans la grande salle. Crois moi, les elfes de la cuisine se feront un plaisir de servir "leur maître Weasley" ce soir. Et puis on a quelques réserves de chocogrenouilles et de patacitrouilles dans la chambre avec George.

- Tu peux prendre ma gelée si tu veux. Je suis pas vraiment fan de ce genre de desserts sans goûts dont les Anglais raffolent. »

Fred rigola, l'air franchement intrigué.

« J'ai quand même cru comprendre que les Irlandais appréciaient la jelly quand j'ai visité Dublin, remarqua-t-il.

- Tous les Irlandais ne sont pas Dublinois, nuance. Et mes parents sont légèrement ... comment dire, pro-Irlande et anti-britaniques. Faut quand même avouer que niveau nourriture, vous êtes bien pires que nous. Et de toutes manières je n'ai plus faim alors je t'en prie, prend la.

- Bon, si tu insistes. »

Il prit la petite coupelle et commença à engloutir l'étrange gelée rose bonbon, tout en regardant autour de lui. Son regard se posa sur le livreMythes et Légendes Moldues Expliquéesqui était posé sur la table de chevet de Valentina.

« C'est intéressant ça, ton bouquin sur les légendes moldues ? Demanda-t-il en avalant un morceau de gelée.

- Assez oui, je connaissais la plupart de ces légendes avant de découvrir le monde des sorciers alors je trouve ça amusant de découvrir leurs origines magiques.

- C'est bien mon père que ça intéresserait ce genre de choses tiens.

- Ton père ?

- Il est fasciné par les moldus et il travaille au service des détournements de l'artisanat moldu au ministère. Il est tellement obsédé par eux que ça en devient malsain quelques fois. »

Fred leva ses grands yeux noisettes dans sa direction.

« Et toi tes parents, ils font quoi dans le monde moldu ?

- Ma mère est cardiologue et mon père tient un pub dans notre ville.»

Le jeune homme fronça les sourcils.

« Elle est quoi ?

- Cardiologue, elle est médecin et traite les maladies du cœur si tu veux.

- Vous avez des noms de métiers vraiment très bizarres dans le monde moldu, c'est impressionnant ! »

Un sourire amusé se dessina sur les lèvres de Valentina.

« Et au ministère de la magie on peut exercer le métier de Langue-de-plomb, tu ne trouves pas ça aussi étrange ?

- Tu marques un point. »

Valentina regarda l'horloge accrochée au mur de l'infirmerie. Cela faisait maintenant plus d'une heure que Mme Pomfresh était partie prendre son repas, et elle n'allait sûrement pas tarder à revenir.

« Tu sais, je t'aime bien Weasley, mais tu ferais peut-être bien d'y aller. Mme Pomfresh ne devrait pas tarder à revenir.

- Du coup, est-ce que j'ai une chance maintenant ?

- Pas la moindre.

- Au moins j'aurais essayé. »

Le jeune sorcier sauta du lit, attrapant la cape d'invisibilité qui était restée sur le lit. Il s'apprêtait à la revêtir mais s'arrêta, se tournant vers Valentina.

« Je pourrais quand même revenir te voir dans la semaine ? Je te promets que je ne te parlerai plus de jouer les cobayes pour nous.

- Si tu en as envie, je n'y vois pas vraiment d'inconvénient, sourit-elle.

- Parfait, répondit-il avec un grand sourire. Au-faîte, appelle-moi Fred, Weasley ça sonne beaucoup trop formel.

- Dans ce cas appelle moi Valentina.

- Valentina c'est trop long, Tina c'est mieux.

- Tina ?

- Tous tes amis t'appellent Val non ? Et bien moi je vais t'appeler Tina. »

La jeune femme resta interdite pendant quelques instants. Personne ne l'avais jamais surnommée comme ça, mais bizarrement ça lui convenait.

« Comme tu veux, murmura-t-elle. »

Pour toute réponse, Fred lui adressa un grand sourire suivi d'un « bonne nuit » et disparu sous la cape d'invisibilité, la laissant à nouveau seule dans cette infirmerie qui lui paraissait étonnamment vide sans la présence et l'aura bienveillante du jeune homme.