Bonjour bonsoir !

J'espère que vous allez tous bien en ces temps paisibles en France !

Un grand merci pour les reviews sur le chapitre 5, vous avez tous refait ma journée !

Sur ce, voici le chapitre 6 !

Réponses aux guests :

Elendil : Salut ! Ouii il est totalement détestable, moi aussi j'aimerais bien que Livai lui mette une belle raclée ! Malheureusement il peut pas exactement se balader et tabasser des gradés de l'armée sinayenne comme ça… Bien dommage. Surtout qu'en soit il a pas de raisons valables, genre techniquement il est pas censé défendre le leader d'Heidan. Et même s'il est pas con et il a une vague idée de ce qu'il s'est passé, il est pas censé empêcher un soldat sinayen de faire du mal à un civil maranien (plus Livai pense encore qu'Eren est un alpha ou à la limite un bêta à ce stade donc il est sûr de rien). Merci d'être toujours au rdv en tout cas ! A+

Elaia : Merci beaucoup, ça me fait très plaisir ! J'espère que la suite te plaira tout autant !


Chapitre 6 : Jour de marché

"Eren !"

Eren entendit avec soulagement Mikasa courir vers lui, et toutes les forces qui lui restaient s'envolèrent d'un coup. Il se serait étalé par terre si Mikasa ne l'avait pas rattrapé à temps.

"Il n'est pas loin ?" demanda-t-elle en cherchant derrière lui avec inquiétude, prête à attaquer si besoin.

"Il est… occupé," marmonna Eren et il ne sentait plus sa tête à travers la douleur, "barrons-nous vite d'ici."

Mikasa rangea rapidement son épée et l'attrapa sous les genoux avant de le soulever sans effort. Eren ne protesta pas, fermant les yeux lorsque sa vision se fit trouble.

Quand il les rouvrit, ils entraient par la porte à l'arrière du Fi Malja. Mikasa le déposa délicatement et Eren avait à peine les pieds par terre que la voix de Jean leur parvint :

"Eren ! Je vais te tuer !" gronda-t-il en marchant rapidement vers eux, "à cause de toi, Marco est b-"

Jean s'arrêta net quand il vit dans quel état il était et son expression fit un truc compliqué qu'Eren n'avait pas la force de déchiffrer.

"Ce n'est pas trop grave, si ?" demanda-t-il finalement alors que Mikasa aidait Eren à marcher jusqu'à la cuisine.

"Marco est quoi ?" demanda celui-ci dès qu'il fut assis pendant que Mikasa allait chercher une bassine et des bandages.

"Euh… il a été un peu blessé au bras alors qu'il essayait d'empêcher ce fou de te suivre… mais rien de grave. Enfin, rien que je ne puisse guérir."

"Ah oui, donc c'était vraiment pas grave alors," ne put s'empêcher de répondre Eren, même s'il savait que ce n'était pas le moment de chercher Jean.

Mikasa revint dans la pièce et posa la bassine sur la table avant de commencer à éponger le sang sur son visage.

"Les autres ?" s'enquit Eren et Mikasa leva les yeux.

"Ils sont tous en haut, ne t'inquiètes pas."

"On peut savoir ce qui s'est passé ?" demanda Jean en croisant les bras et Eren pinça les lèvres.

"Il se pourrait qu'on doive déménager," souffla-t-il et le visage de Jean s'affaissa un peu, "va dire à Annie de renforcer la protection autour du Fi Malja, que personne ne puisse entrer, je crois pas être en état de m'en occuper."

"C'est déjà fait, qu'est-ce que tu crois. On n'est pas totalement idiots non plus," rétorqua-t-il et Eren n'avait plus la force d'être civil avec Jean.

"J'avais oublié qu'il y avait des gens plus intelligents que toi ici."

Jean haussa un sourcil.

"C'est petit, même venant de toi. Ton coup à la tête t'as rendu parfaitement débile."

"Au moins, moi, c'était pas de naiss-"

"Vous pouvez pas vous taire cinq minutes ?" intervint Mikasa en serrant le bandage un peu plus fort autour de son front et Eren grimaça. Au moins, ça avait marché, aucun des deux n'ajouta un mot, jusqu'à ce qu'Eren ne rompe le silence.

"Il faisait partie de l'armée sinayenne."

"Et on peut savoir pourquoi tu t'es frité avec ce genre de mec ?"

Eren hésita et détourna le regard vers les traits sur la porte.

"Il euh… il m'a provoqué."

"Et toi tu as répondu ?!" explosa Jean mais Mikasa le dissuada de s'approcher davantage, "Mais putain Eren, tu peux pas nous mettre tous en danger pour ces conneries !" s'énerva-t-il et Eren ressentit le besoin de se défendre.

"Il ne parlait pas à la légère, il était vraiment prêt à nous tuer si besoin !"

"Raison de plus pour fermer ta gueule dans ce cas ! Ce n'est pas la première fois pourtant, on a l'habitude d'endurer l'humiliation si c'est pour se protéger, alors pourquoi pas cette fois là ?" gémit Jean et Eren se leva avec colère, ignorant sa tête qui commençait à tourner.

Il ne savait pas. Il ne savait pas ce que ça lui aurait coûté d' "endurer l'humiliation" comme il le disait si bien. Il ne savait pas que ça avait été son plan malgré tout, jusqu'à ce qu'il ne panique.

"Je n'ai… Je n'ai pas pu…!" fulmina-t-il et ils s'affrontèrent du regard quelques secondes avant qu'Eren n'abandonne et ne décide de sortir avant de faire quelque chose de débile. Comme casser la table ou se mettre à pleurer et tout leur raconter.

"Eren…" entendit-il avant de claquer la porte et de s'adosser au mur.

Jean avait raison. Il les avait condamnés, et il avait su dès le début qu'il devait laisser Farhad faire ce qui lui plaisait, mais il n'avait pas pu…

Maintenant, il n'avait plus le choix : il devait aller tuer Farhad et espérer qu'il ait plus de succès qu'avec Livai.

o O o

Une fauvette naine vint se poser sur le bord de la fenêtre de la salle de bain ouverte et se mit à piailler gaiement. Seul le gazouilli des oiseaux troublait le silence tranquille du matin, et l'air était encore frais.

Cela faisait trois jours que Farhad avait révélé sa vraie nature, trois jours pendant lesquels Eren avait essayé de le retrouver au sein de l'armée, mais quand il avait enfin retrouvé sa trace, c'était pour découvrir qu'il venait d'être muté loin de Shiganshina. Ça paraissait un peu trop beau pour être une coïncidence, mais l'ordre venait d'Erwin lui-même. Comment il l'avait su… Eren était presque certain que Livai était derrière tout ça et ça le mettait mal à l'aise. Il n'arrivait toujours pas à cerner ses motivations.

Eren finit de se rincer, faisant fuir la fauvette et attrapa une serviette. Ce serait la dernière fois qu'il se lavait à l'intérieur avant un petit moment : Soraya avait pour projet de refaire tout le carrelage de la salle de bain et elle s'y mettait cette après-midi. Il avait été surpris par son projet mais apparemment elle avait l'habitude de faire de la céramique avant, et c'était Mikasa qui lui avait suggéré de reprendre.

La fauvette revint pendant qu'il s'habillait et Eren sourit. C'était une belle journée.

o O o

Livai épongea son front avec la manche bien trop lourde et chaude de sa veste avant de décider de s'en débarrasser. Il faisait beaucoup trop chaud dans ce foutu pays. Ça faisait bien trois heures qu'il était posté sur ce toit, à surveiller les allées et venues de l'Atusa, et il était en train de crever. Tout ça pour rien en plus : il devait demander à Erwin d'organiser une intervention s'il voulait aller plus loin.

Du mouvement attira son attention et il se pencha un peu pour observer une silhouette se faufiler non loin de l'Atusa. Elle s'arrêta un instant pour regarder autour d'elle et il reconnut tout de suite le gamin d'Heidan. Décidément, il était partout celui-là. Sa tête était entourée de bandages au niveau du front mais à part ça, il ne paraissait pas avoir gardé de séquelles de la dernière fois. Livai le suivit des yeux avec curiosité. Il croyait Hanji, mais s'il voyait le gamin entrer, alors il serait obligé de reconsidérer sa décision. L'Atusa n'était en apparence qu'un simple restaurant ordinaire, mais Livai savait qu'il était un des sièges de Traoma, utilisé pour "recruter" des omégas.

Heureusement, il passa devant la porte sans s'arrêter et disparut juste à côté avec un coup d'œil furtif autour de lui. Livai hésita quelques instants avant de se déplacer pour ne pas le perdre de vue. Quand il revint dans son champ de vision, il avait déjà sorti un talisman et l'avait plaqué sur un mur du restaurant. Livai se baissa quand il regarda dans sa direction et attendit quelques secondes avant de se redresser.

Le talisman avait pris une lueur bleue alors que le gamin ne le touchait que du bout du doigt, et un doux souffle faisait voler ses cheveux. Livai n'avait aucune idée de ce qu'il était en train de faire mais visiblement ça servait à quelque chose parce que le gamin fit une tête satisfaite avant de décamper. Livai le regarda s'éloigner mais n'essaya pas de le suivre : tant qu'il ne lui mettait pas des bâtons dans les roues, il le laisserait tranquille.

o O o

"Soraya !"

"Je suis ici !"

Eren alla jusqu'à la salle de bain, d'où la voix de Soraya était parvenue.

"Wow, ça avance bien !"

Mikasa et Soraya étaient à genoux dans un coin de la pièce, en train de poser un carreau de faïence sur le mur avec concentration. Deux murs sur quatre étaient déjà recouverts de carrelage, et elles en étaient à la moitié du troisième. Ça faisait à peine trois jours qu'elles avaient commencé et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elles avaient été efficaces.

"On finira demain je pense. Par contre ce mur là était moins plat que ce que je pensais… on en a cassé quelques uns," s'excusa Soraya en désignant les deux pauvres carreaux fissurés dans un coin de la pièce.

Eren se retint de lever les yeux au ciel devant son air mortifié. La faïence avait beau ne pas être donnée, ils n'étaient pas exactement pauvres non plus, et si ça permettait à Soraya d'aller mieux, Eren dépenserait sans hésiter cet argent.

"Justement, je vais au souk demain avec Aslan. Vous avez besoin de quelque chose ?"

"Non, on a déjà quelques carreaux en plus c'est bon. Tu peux me passer le mortier ?"

Eren poussa du pied le seau à sa droite et elle le remercia d'un hochement de tête. Ils entendirent Aslan arriver de loin, mais il fallait dire qu'il n'était pas exactement discret.

"...souk souk souk SOUK," s'écria-t-il alors qu'Eren déviait sa course d'une main pour l'empêcher de foncer dans le seau de mortier.

"Demain," rappela-t-il pendant que Soraya et Mikasa le saluaient.

"C'est bientôt ?"

"Oui, c'est juste après un dodo."

"C'est pas bientôt ça ! Je veux y aller maintenant !" s'exclama-t-il en s'accrochant à sa jambe et Eren échangea un faux regard exaspéré avec Soraya.

"C'est fermé à cette heure-ci. Mais je peux te raconter une histoire à la place," proposa-t-il et le visage d'Aslan s'illumina immédiatement, le souk déjà oublié.

"La fée des djinns !"

Oh non pas encore.

o O o

Le souk n'était pas encore trop encombré à cette heure, mais ça ne voulait pas dire qu'il était calme pour autant. Les marchands mettaient en avant leurs produits, les acheteurs négociaient partout autour d'eux dans un joyeux bordel.

Juché sur les épaules d'Eren, Aslan regardait partout autour de lui avec de grands yeux pétillants de curiosité. Des étalages colorés s'étendaient à perte de vue dans la rue marchande, protégée du soleil par de grandes toiles tendues entre les bâtiments. Des épices aux foulards, en passant par les savates et l'argenterie, tout y était.

C'était la meilleure heure pour aller au souk : l'air était encore frais et il n'y avait pas trop de monde. Et surtout, les soldats sinayens dormaient encore.

Eren aimait beaucoup le souk, mais il était toujours réticent à emmener Aslan avec lui. Globalement, il était réticent à aller quelque part où il risquait de croiser des soldats sinayens, surtout avec un enfant. Il y avait peu de chances qu'ils se fassent accoster par des soldats mais il avait déjà assisté suffisamment de fois à des passages à tabac pour vouloir éviter cette scène à un gosse de quatre ans. Ça pouvait arriver n'importe quand, parfois juste parce que quelqu'un avait osé mal regarder un sinayen.

Aslan avait déjà été de nombreuses fois au marché, mais il demandait toujours s'il pourrait y retourner. Quand Eren lui avait promis de l'y emmener, il n'avait pas arrêté de courir partout pour aller le répéter à n'importe quel adulte voulant bien l'écouter.

"Hop là…" souffla Eren en soulevant Aslan et le posant sur le sol. "Reste près de moi d'accord ?"

"Hmm," acquiesça vigoureusement le petit garçon en s'agrippant à la toile de son pantalon.

Cet enfant était vraiment un ange. D'ailleurs tout le monde l'adorait.

Les différents marchands chez qui ils s'arrêtèrent lui firent tous un grand sourire, la boulangère lui offrit même une friandise qu'il accepta avec un timide merci.

Eren sourit et s'apprêtait à passer au marchand de thé lorsqu'il vit un uniforme. Sa main vint aussitôt se crisper sur l'épaule d'Aslan mais il se détendit aussitôt lorsqu'il reconnut les roses de l'emblème Maria. Les soldats maraniens n'étaient pas toujours mieux que les sinayens : ceux qui n'approuvaient pas l'occupation s'étaient gentiment fait expulser. Il connaissait bien celui-ci cependant ; il savait qu'il pouvait lui faire confiance.

Eren regarda Hannes s'approcher avec un sourire, qui s'affaissa légèrement lorsqu'il vit l'expression d'urgence sur son visage.

"Eren j'ai besoin de te parler cinq minutes. En privé."

Eren fronça les sourcils et baissa les yeux sur Aslan, hésitant.

"Je garderai un œil sur lui, si tu veux," proposa le marchand de thé, qui avait entendu Hannes. Eren hocha la tête avec reconnaissance. Il le connaissait bien, laisser Aslan avec lui une ou deux minutes ne devrait pas poser trop de problèmes.

"Merci Erfan, je ne serais pas long," promit-il avant de s'accroupir à la hauteur d'Aslan, gagnant au passage son attention.

"J'ai besoin d'aller parler avec Hannes cinq minutes. Tu peux aller les voir en attendant," dit-il en désignant les moulins à vent virevoltant de l'autre côté de la rue d'un signe de tête. Il n'avait pas manqué les regards appuyés que l'enfant lançait vers les jouets depuis quelques minutes déjà. "Mais tu m'attends là-bas, d'accord ?"

Aslan acquiesça avec enthousiasme et s'empressa de traverser la rue sous l'œil attentif d'Eren qui s'était relevé.

"Dépêchons nous, je n'aime pas le laisser tout seul trop longtemps," dit-il à Hannes avant de le suivre vers une ruelle moins fréquentée. Ils n'avaient pas besoin de beaucoup s'éloigner, les rues devenaient rapidement plus calmes dès qu'on s'éloignait un peu de l'axe marchand.

"J'ai entendu dire que l'équipe chargée d'enquêter sur Heidan venait de changer," confia Hannes dès qu'ils furent suffisamment seuls, "Fais gaffe à toi, il y a parmi eux un sale type. Il s'appelle Farhad et est connu pour avoir abusé pas mal d'omégas d'ici. Veille à ce qu'il ne s'approche pas des tiens. Il est plutôt baraqué, cheveux noirs et un tatouage sur le biceps droit."

"Merci pour tes infos Hannes, mais c'est un peu tard. Je me suis déjà occupé de lui."

Hannes le regarda comme s'il venait d'avaler une anguille vivante sous ses yeux.

"Est-ce qu'il…. il sait que tu fais partie d'Heidan ?" demanda-t-il en baissant la voix.

Eren secoua la tête.

"Non je ne crois pas qu'il sache. Mais à mon avis il a au moins eu des doutes. Et non je ne l'ai pas tué," répondit Eren devant la question muette du soldat.

Hannes se passa une main sur le visage d'un air las.

"Tu ne crains pas des répercussions ?"

Il le prenait pour un débile ?

"Bien sûr que si. C'est pour ça que j'ai enquêté de mon côté," répondit Eren, "mais apparemment il vient d'être muté à Karanese…"

"Tu ne l'as pas menacé ?"

"Non, mais j'ai une petite idée de la personne qui a pu faire pression…" marmonna-t-il en fronçant les sourcils. Il y avait encore réfléchi toute la nuit, mais il n'avait toujours pas trouvé de raison valable. Livai aurait rapidement pu faire renoncer Farhad et s'occuper de lui après. Il n'avait pas besoin de le laisser s'enfuir.

"Qui ?"

"Tu ne le connais pas…" répondit distraitement Eren en réfléchissant à tout ce que cela impliquait.

Si vraiment Livai avait intercédé en sa faveur, il devait forcément avoir une raison cachée. La dernière fois qu'ils s'étaient vus, Eren avait essayé de le tuer, et ensuite il lui sauvait la vie ? Et maintenant il était censé avoir éloigné Farhad par bonté de cœur ? Nope, aucune chance. Il y a avait définitivement quelque chose d'autre.

"Fais attention à toi Eren, c'est tendu aux quartiers sinayens en ce moment. Avec la faucheuse qui rôde…"

"T'inquiètes pas Hannes, je fais toujours attention," rétorqua-t-il alors qu'ils revenaient vers le marché.

Celui-ci leva les yeux au ciel.

"Ça ne t'empêche pas d'être toujours dans la merde dès que je te croise. Et c'est censé me rassurer ?"

"Je ne suis pas tant que ça dans la merde là maintenant," rétorqua-t-il en cherchant Aslan du regard, mais celui-ci n'était plus au niveau des moulins à vents.

"Mais oui c'est ça," rit Hannes avant de le saluer et de s'éloigner dans la foule, et Eren répondit à peine son salut, ses yeux parcourant rapidement la rue.

"Il est où Aslan ?" demanda-t-il à Erfan, essayant de ne pas se montrer trop inquiet, et le marchand de thé désigna un coin de la rue avant de retourner à un de ses clients.

Eren suivit son geste des yeux et sentit le sang se figer dans ses veines.

Peut-être que si, il était dans la merde là maintenant finalement. Aslan était bien là, et un homme qu'il connaissait beaucoup trop bien lui parlait, accroupi à sa hauteur.

En quelques secondes, il avait traversé la foule et attrapé Aslan, mais une main lui attrapa le poignet quand il essaya de fuir.

"Il est à toi ce gosse ?" demanda Livai d'un ton suspicieux et Eren essaya de se dégager mais il savait déjà qu'il ne pouvait pas utiliser son énergie spirituelle tant que Livai lui agrippait le poignet, et il avait toujours Aslan dans les bras.

"Lâche-moi," menaça-t-il à voix basse, mais son regard cherchait désespérément des moyens de s'enfuir dans la foule. Certaines personnes les regardaient déjà avec appréhension et Erfan aussi semblait les avoir remarqués. Plus jamais il lui confiait son gosse à celui-là.

"Pose l'enfant d'abord," exigea Livai et Eren obéit sans le quitter des yeux. Aslan se réfugia derrière lui, agrippant la toile de son pantalon et fixant Livai d'un air légèrement inquiet. Il avait à moitié espéré qu'Aslan serait parti retourner voir les moulins à vent, mais l'enfant avait définitivement perçu la peur d'Eren. Livai fronça les sourcils et finit par lui lâcher le bras.

S'il récupérait Aslan et se mettait à courir maintenant, il avait peut-être encore une chance de s'en sortir. Ses talismans étaient à l'intérieur de sa chemise, dans son sac et il en avait même quelques-uns dans sa manche.

"Je n'ai pas l'intention de lui faire du mal. Je lui demandais juste s'il était perdu alors range ce talisman et arrête de retenir ta respiration."

Eren expira de manière tremblante et resserra son poing sur son talisman. S'il se battait maintenant, il n'aurait pas l'avantage.

"Tu sais parler maranien ?"

Livai haussa les épaules.

"Quelques phrases. Suffisamment pour communiquer avec un gosse de trois ans."

"J'ai quatre ans !" intervint Aslan en sinayen de derrière les jambes d'Eren, et Livai le regarda d'un air bouche-bée.

"Tu parles sinayen ?" demanda-t-il directement à l'enfant et Eren se plaça un peu plus devant lui.

Aslan paraissait avoir oublié son inquiétude cependant, car il contourna ses jambes pour venir se poster devant lui et Livai s'accroupit à sa hauteur. Eren se crispa et observa attentivement Livai. Dans cette position, il se mettait clairement en désavantage par rapport à lui : même si Aslan était un peu trop proche, Eren pourrait facilement lui mettre un coup de genou en pleine gueule avant de s'enfuir avec l'enfant sous le bras. Ce genre de démonstration d'assurance le mettait mal-à-l'aise. Livai était-il si confiant en ses capacités qu'il n'hésitait pas avant de se mettre en position de faiblesse devant lui ? Peut-être pas, pensa-t-il en remarquant la tension cachée dans ses épaules.

"C'est Mouima qui m'a appris," expliqua fièrement Aslan et Livai hocha la tête, "Je sais parler plein de mots !"

"C'est bien," répondit-il et Eren se dut d'intervenir :

"Hé ho ! Ne commence pas à l'embrigader dans tes trucs !"

"Ce n'est pas moi qui lui ai appris le sinayen," rétorqua Livai en levant les yeux vers lui.

Eren souleva Aslan et le posa sur sa hanche, en sécurité.

"Reste loin de lui," dit-il à Livai qui s'était redressé.

"Je veux marcher !" s'exclama Aslan en lui mettant des coups de pieds dans les côtes, et pourquoi fallait-il qu'il choisisse ce moment pour être difficile ?!

"Aslan, c'est pas le moment," répondit-il furtivement alors que Livai fronçait les sourcils. "On rentre à la maison, maintenant," ajouta-t-il, étouffant toute protestation d'un regard.

"Je vous raccompagne," annonça Livai, et Eren savait que ce n'était pas une proposition. Même s'il refusait, Livai les suivrait.

Il lui lança un regard noir pour la forme et lui indiqua d'un signe de tête d'ouvrir la marche. Ils sortirent de la rue principale qui commençait à vraiment devenir bondée, mais ne s'éloignèrent pas non plus dans des rues désertes. Il devait absolument le semer, parce que clairement, il n'y avait pas moyen qu'il le mène jusqu'au Fi Malja. De longues minutes de silence tendu s'étirèrent et Eren essaya de ne pas montrer qu'il était sur le point de s'enfuir à tout moment. Il sentit les mains d'Aslan se resserrer un peu plus autour de sa chemise et il le recala un peu mieux sur sa hanche. Même si Livai ne faisait pas preuve d'agressivité, il ne lui faisait absolument pas confiance.

"C'est toi qui a éloigné Farhad ?" demanda-t-il finalement, peut-être un peu trop directement. Il fallait qu'il sache.

Livai ne se tourna même pas vers lui.

"Oui."

Eren s'arrêta et Livai continua de marcher sur quelques mètres avant de se rendre compte qu'Eren n'était plus à côté de lui et de se retourner.

"Pourquoi ?"

"Parce que sinon on aurait retrouvé son cadavre dans une ruelle," répondit Livai avant de jeter un coup d'œil à Aslan. Eren aussi aurait préféré éviter d'avoir cette conversation devant un enfant de quatre ans.

"Tu le protèges ?"

"Ça t'évite des ennuis."

Eren se mordit la lèvre. Il n'allait pas se mentir : même s'il avait prévu de tuer Farhad, ne pas avoir à le faire signifiait ne pas prendre de risques supplémentaires. D'un autre côté, éloigner Farhad l'empêchait de le faire taire définitivement.

"Pourquoi tu m'aides ?"

Livai le regarda quelques instants, et Eren pouvait le voir se demander à quel point il devait être honnête.

"On m'a fait comprendre que je n'avais pas intérêt à m'en prendre à toi."

"Par des gens qui ont besoin de leur ravitaillement en chair fraîche ?" grimaça Eren.

"Par des gens qui savent ce que fait vraiment Heidan."

"Quoi, parce que ce genre de personnes ne veut pas que je sois arrêté ?" s'étonna Eren.

Parce que ça voudrait dire que soit Livai était allé parler à des maraniens qui lui avaient suffisamment fait confiance pour critiquer le trafic d'oméga et l'armée, ce qui était euh… impossible, soit des soldats sinayens avaient ouvertement défendu Heidan, ce qui était assez surprenant, mais déjà un peu plus probable. Sans doute Hanji, peut-être même Erwin, s'ils étaient suffisamment proches.

"Apparemment," répondit-il avec un haussement de sourcil avant de se remettre à marcher.

Et toi alors, qu'est-ce que tu en penses ? voulut-il lui demander, ainsi que mille autres questions mais Livai lui offrait une trop bonne occasion de s'éclipser pour qu'il la laisse passer. Il se faufila dans une petite ruelle sombre et disparut dans les dédales de Shiganshina.

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Livai laissa Eren se sauver discrètement derrière lui, se doutant bien qu'il ne le laisserait pas le mener chez lui de toute manière, et prit la direction du quartier général Est. Hanji n'était pas encore là quand il entra dans son bureau, ni deux heures plus tard quand il posa le point final sur son rapport, soufflant légèrement pour faire sécher l'encre. Puisqu'il ne pouvait plus rien faire par lui-même pour Traoma, il devait soumettre un putain de rapport à Erwin justifiant la nécessité d'une intervention de l'armée. Comme si ce n'était pas assez évident.

Et peut-être qu'il pourrait enfin se concentrer à nouveau sur la Faucheuse, ou au moins jeter un coup d'œil sur le dossier d'Heidan. Il referma le dossier Traoma une fois l'encre sèche et se leva avant de s'étirer. Maintenant il ne restait plus qu'à déposer le dossier sur le bureau d'Erwin…

o

Affaire classée sans suite

Livai fixa les quatre petits mots soigneusement manuscrits pendant quelques secondes, avant de lever les yeux vers Erwin.

"Tu te fous de ma gueule ?"

Erwin poussa un long soupir et commença à se masser les tempes.

"Ordre d'en haut. On doit laisser tomber l'affaire."

"C'est toi qui m'a collé cette putain de mission !" rétorqua Livai avec un regard noir mais Erwin avait l'air résigné. "Est-ce que tu as pensé au moins une seconde que ça passerait ou tu m'as donné cette mission en sachant depuis le début que c'était mort ?"

Erwin ne répondit pas et Livai le fusilla du regard.

"Tu sais que certaines personnes ont des intérêts à ce que Traoma continue son activité," dit Erwin d'un air dur et Livai savait qu'il était autant en colère que lui, voire même plus.

"Je sers à quoi, moi dans tout ça ?"

"Livai… Être envoyé à Maria n'est jamais une récompense. Si tu as été affecté ici, c'est uniquement parce que tu dérangeais certaines personnes à Sina, pas parce qu'on avait besoin de toi… " répondit-il et c'était la manière la plus délicate de dire "ils se foutent tous de ta gueule et de la mienne" qu'il ait jamais entendu.

"Qu'ils aillent se faire foutre," cracha-t-il en récupérant d'un geste rageur le dossier sur le bureau d'Erwin. "J'en ai plus que marre de ces merdes qui se croient meilleures que les autres," marmonna-t-il en sortant sans y avoir été invité.

Il bouscula Hanji au passage, qui arrivait les bras chargés de paperasse, et s'éloigna sans un mot.

"Y a pas de soucis," marmonna-t-elle avant de rentrer dans le bureau, déposant tous ses papiers sur une petite table.

"C'est quoi son problème ?" demanda-t-elle à Erwin en désignant derrière elle et le Commandant sourit légèrement.

"Je pense qu'il va enfin faire équipe avec Eren."

À suivre…


Et voilà pour le chapitre 6 ! Merci à tous d'avoir lu ! C'était un chapitre assez tranquille mais on commence à voir la relation entre Livai et Eren se construire ! Si ça vous a plu, n'hésitez pas à laisser une review aussi courte ou longue que vous le souhaitez, un favori ou follow !

À la semaine prochaine !