Granger

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Une heure plus tard, Hermione était attablée à la table des Gryffondors, entourée de ses amis. Luna aidait Neville sur son devoir d'Histoire de la Magie qu'il avait oublié de terminer alors que la date butoir était aujourd'hui. Ginny racontait son rêve de la nuit à un Harry à moitié endormi sur sa tasse de thé. Et Hermione mangeait une part de tarte aux pommes en fixant la porte de la Grande Salle.

Elle était nerveuse. Elle avait eu l'idée, en retournant dans ses quartiers après avoir quitté Malefoy, de saluer ce dernier quand il viendrait prendre son petit-déjeuner. Depuis, elle n'avait cessé de se ronger les sangs en imaginant tous les scénarios possibles. Déjà, il pouvait ne pas venir, et elle devrait trouver une nouvelle approche pour montrer leur entente. Ensuite, il pourrait ne pas la regarder, l'ignorer. Là encore, elle devrait trouver une autre idée. Mais le pire serait qu'il ne joue pas le jeu, voire qu'il se moque d'elle. Elle serait alors humiliée.

Hermione avait fini sa tarte et se mordait maintenant la joue de nervosité. Et finalement, il entra. Elle le fixa du regard, prête à capter son attention. Il devait passer devant sa table pour aller à celle des Serpentard et, alors qu'il avançait dans cette direction, leurs yeux se croisèrent. Aussitôt, Hermione lui fit un sourire et le salua de la main. Ginny qui était dans la ligne de mire (et adorait les commérages), fit volte face pour voir à qui était destinée la salutation. Malefoy, quant à lui, fronça d'abord les sourcils, déconcerté. Il comprit néanmoins rapidement la raison. Il sortit une de ses mains qu'il avait dans ses poches et adressa un bref signe à la Gryffondor. Hermione souffla alors de soulagement. Bon sang! Elle ne s'était pas rendu compte que son cœur battait si vite.

— C'était quoi ça ? l'agressa presque son amie rousse.

Harry redressa le nez de sa tasse en remarquant l'agitation de sa petite-amie.

— Quoi ? demanda-t-il.

— Hermione ! Elle vient de dire bonjour à Malefoy !

— Quoi ? s'écria cette fois le brun à lunettes.

— Qu'est ce qu'il y a ? demanda Neville, sa plume gorgée d'encre gouttant sur son parchemin.

Luna se pencha par-dessus son épaule, l'air rêveur mais intéressé.

— Mione fraternise avec l'ennemi. Elle a dit bonjour à Malefoy, répéta la rousse.

— C'est bon Ginny, pas besoin d'en faire toute une histoire ! dit Hermione. Tout le monde nous regarde !

En vérité, c'était bien l'intention de la brune mais tous ces regards inquisiteurs la mettaient quand même mal à l'aise. Elle se sentit rougir face à l'insistance de ses amis qui exigeaient une explication.

— Ça n'a vraiment rien d'incroyable, commença-t-elle. C'est juste qu'après avoir aidé Daphnée la semaine dernière, on est devenu courtois l'un envers l'autre. Nous ne sommes pas devenus amis, mais au moins nous avons fait la paix.

Hermione se mordit la langue, elle n'aimait pas mentir à ses amis. Ils semblèrent assez convaincus par ses arguments. Sauf Harry qui la regardait avec un air suspicieux. Luna prit alors la parole:

— C'est merveilleux Hermione! Tu as une grande force en toi pour accorder ainsi ton pardon. Nous devrions tous prendre exemple.

La blonde lui sourit et Hermione eut envie de la serrer dans ses bras! C'était exactement ce pourquoi elle avait conclu ce marché avec Malefoy. Elle se mit à espérer que cette idée allait se répandre dans toute l'école. Cependant, elle croisa à nouveau le regard de son meilleur ami:

— À quoi tu penses ?

— Rien… Je trouve ça juste un peu bizarre. Très soudain. Et je ne pensais pas possible que la fouine (il désigna du menton le Serpentard derrière Hermione) puisse revoir son jugement.

Elle jetta un œil par-dessus son épaule et aperçut Malefoy, l'air effroyablement ennuyé, entouré par Zabini et Nott qui avaient l'air de le bombarder de questions. Il finit par lever sa baguette et lança un sort de mutisme laissant immédiatement sans voix ses deux comparses. Il sourit alors d'un air mutin, soulagé.

— Charmant, commenta Harry.

— Au risque de me répéter, je n'ai pas dit que nous étions amis, souffla la lionne, la tête rentrée entre ses épaules.

— Ah voilà le courrier ! s'exclama Ginny.

Le brune releva la tête pour observer la nuée de chouettes et de hiboux en tout genre s'engouffrer par les grandes fenêtres de la salle. Les pattes chargées, ils se posaient devant les destinataires au fur et à mesure de leur arrivée. Hermione reçut en premier son exemplaire de La Gazette des Sorciers, et laissa deux mornilles à la chouette livreuse. Puis, une première enveloppe jaune tomba devant elle, vite suivie par une deuxième, verte cette fois. Agréablement surprise, la jeune femme se saisit des lettres pour connaitre les expéditeurs. Harry en profita pour lui piquer son journal. La petite lettre jaune provenait de ses parents. Ils lui disaient être content que tout se passe bien pour elle à l'école, et avaient hâte de la voir pendant les prochaines vacances. Elle se saisit ensuite de l'enveloppe verte. Celle-ci provenait de:

— Ron ? laissa-t-elle échapper, un immense sourire aux lèvres.

Ça faisait presqu'un mois qu'elle n'avait rien reçu de sa part. Elle se hâta de parcourir le contenu de la lettre, il n'était pas très long.

" Hermione,

J'ai bien reçu tes gâteaux, merci beaucoup.

Le travail au ministère est vraiment passionnant. Pas plus tard qu'hier, nous avons dû gérer une cargaison d'œufs de Dragon que des gobelins Irlandais comptaient faire entrer illégalement dans leur pays! L'arrestation a été un peu musclée mais tout le monde s'en sort quasi indemne. Le problème a ensuite été de savoir ce que nous allions pouvoir faire des œufs. Alors, j'ai proposé à mon chef de le mettre en contact avec mon frère Charlie ! Il a été ravi et m'a félicité pour l'initiative.

Je tenais à te raconter cette petite anecdote.

Sinon, Papa et Maman t'invite au Terrier le dernier week-end des vacances. Harry et Ginny devraient être là aussi. Dis-moi vite si tu veux venir.

J'espère avoir de tes nouvelles bientôt,

Tu me manques,

Ron."

Hermione fronça légèrement les sourcils, pas d'allusion à ses précédents courriers, à peine un remerciement pour les gâteaux… Son travail devait vraiment lui prendre tout son temps.

— C'est n'importe quoi…

La jeune femme releva la tête, Harry semblait contrarié. Il laissa tomber le journal sur la table et Hermione put lire la première page.

SHACKLEBOLT : Le ministre de la magie mit sur le banc des accusés.

" Nous connaissons tous notre ministre de la magie, Kingsley Shacklebolt et sa politique de "seconde chance". Jusque-là salué par la critique, il est aujourd'hui accusé d'être trop laxiste. En effet, suite à de nouveaux procès de mangemorts, dont l'un fut relâché avec une peine minimale, Barbara Humphrey, du mouvement "la paix par la justice" a voulu faire entendre son mécontentement : " Il n'est pas étonnant que Monsieur Shacklebolt ne comprenne pas l'importance d'une punition digne de ce nom pour les partisans de Vous-Savez-Qui, proclama-t-elle lors d'une conférence. La guerre à surtout fait du tort aux né-moldus, aux sang-mêlés et à leur famille. Comment un sang-pur comme notre Ministre pourrait se mettre à la place de ces gens-là ? " En réponse à ces accusations, certains sorciers ont tenu à prendre sa défense : " C'est insensé, témoigne Arthur Weasley, un employé du ministère, ami du Ministre et sorcier de sang-pur. Nous faisions partie de l'Ordre du Phénix, une organisation secrète qui visait à s'opposer à Vous-Savez-Qui, nous avons combattu pendant la bataille de Poudlard. Kingsley a toujours défendu avec ardeur la cause des nés-moldus ! Le blâmer parce qu'il est de sang pur n'a pas de sens !" Nous avons également souhaité interroger des membres du ministère de la justice, pour plus d'impartialité. Un employé, qui souhaite rester anonyme, nous a répondu : " Lors d'un procès, le Ministre de la Magie n'est pas seul à voter pour la peine de l'accusé, en revanche c'est lui qui fixe la peine maximale et minimale que nous devons choisir."

Une information, qui n'est, certes, pas secrète, mais peu connue des sorciers lambdas tels que nous.

Pomela Riskin, journaliste. "

Cette Barbara Humphrey était un peu agressive mais Hermione comprenait malgré elle ses accusations. Même avec toute la volonté, la bienveillance et l'empathie du monde, comment pouvait-on se mettre à la place des victimes si on ne l'avait pas vécu soi-même. Mais, elle devait également reconnaître que c'est ce qui faisait l'impartialité d'un juge. Elle reposa le journal sans faire de commentaire. À la place, elle reprit la lettre que lui avait envoyé son petit-ami.

— Mione ? Tout va bien ? questionna Harry.

— Hein ? Oui ! C'est Ron, il m'invite au Terrier pour la fin des vacances !

— Oh mais c'est super ! J'y serais aussi, Ginny m'avait déjà invité.

— Oui, ça me fait plaisir.

— Pourquoi tu fronces les sourcils alors ? la taquina le brun.

Hermione détendit aussitôt son visage.

— Non, je… Enfin, ça fait un mois que je n'avais pas eu de ses nouvelles. Il a l'air de beaucoup travailler.

— Heureusement, tu vas bientôt pouvoir le revoir.

La phrase de son ami lui rendit le sourire. C'est vrai, elle allait bientôt être avec lui. Et elle lui manquait, il l'avait écrit. Elle serra le papier vert contre sa poitrine. Elle lui enverra sa réponse ce soir-même.

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Hermione se sentit sourire toute la journée, elle était d'une excellente humeur ! Actuellement, en cours de Sortilège, elle notait assidûment toutes les instructions du Professeur Flitwick pour réussir correctement le sort de Tête-en-bulle.

Soudain, un oiseau en papier se posa devant elle. Elle le déplia, intriguée.

" Tu m'as l'air bien heureuse aujourd'hui Granger, c'est le fait de repenser à mon corps nu qui te mets dans cet état ? DM "

Hermione se sentit rougir de la racine de ses cheveux à la pointe de ses orteils. Comment osait-il lui envoyer un message pareil ? Il aurait pu être très mal interprété si quelqu'un d'autre l'avait lu ! Elle se retourna vers Malefoy et le fusilla du regard. En réponse, il haussa les sourcils, charmeur. À quoi jouait-il ? Elle roula des yeux, exaspérée. Le Serpentard devait sûrement se moquer d'elle. Mais ça n'avait pas d'importance, elle décida de l'ignorer et se reconcentra sur le cours.

Plus tard, quand elle fut à la bibliothèque, Malefoy la rejoignit. Il balança ses affaires sur la table et se posa sur la chaise en face d'elle. Il se mit à l'observer, ses longs doigts pianotant sur le bois. Hermione lui lança un regard agacé. Elle était en train de rédiger sa réponse à la lettre de Ron. Mais le blond prit la parole:

— Alors ? Tu ne m'as pas répondu tout à l'heure ?

— De quoi tu parles ? demanda-t-elle sans lever le nez de son parchemin.

— Mon petit mot Granger. Qu'est-ce qui te rend si heureuse aujourd'hui ?

— Rien qui te concerne, grommela-t-elle.

— Allons, ne soit pas si aigrie, on nous observe, murmura le blond en se penchant vers elle.

La brune releva la tête et observa autour d'elle. Plusieurs élèves avaient interrompu leur révision pour les regarder à la dérobée. Hermione afficha immédiatement son plus beau sourire.

— Ça ne te concerne pas Malefoy, dit-elle sur un ton bien plus léger.

— Et moi qui pensais qu'on se confiait tout désormais, ironisa-t-il. Je vais deviner alors.

Il se repositionna contre le dossier de sa chaise et se remit à tapoter la table avec ses doigts. Hermione serra les dents. C' était très agaçant! Elle essaya de se concentrer sur ce qu'elle était en train d'écrire mais la tâche était devenue difficile tant elle avait conscience de la présence du blond. Ce dernier ne mit pas longtemps pour lui faire part de ses hypothèses:

— Je sais! Tu as eu un optimal à un de tes devoirs? Non trop basique… On t'a dit que tu avais obtenu tes ASPICs en avance? Tu ne réagis pas, ça ne doit pas être ça. Tu as l'autorisation de rédiger autant de centimètres que tu veux au devoir de la vieille Mcgo ? Non? Alors elle t'a donné des exercices supplémentaires?

Hermione se pinça l'arête du nez.

— Malefoy, ma vie ne tourne pas qu'autour de l'école !

— Ah bon ? fit-il semblant d'être choqué.

— Si tu veux tout savoir, j'ai reçu des courriers ce matin et ça m'a fait plaisir. Maintenant si tu voulais bien te taire…

Mais le blond n'en avait pas fini avec son interrogatoire. Il se pencha vers la lionne et demanda sur le ton de la confidence:

— Et qui t'a fait cet effet ? Ne répond pas ! Je sais… sourit-il moqueur. C'est Weasmoche.

— Ne l'appelle pas comme ça, grinça Hermione.

Il laissa échapper un ricanement. Puis il se leva. Soulagée de voir qu'il avait décidé de partir, elle se replongea dans la rédaction de sa lettre. Du coin de l'œil, elle le vit contourner la table et disparaître de son champ de vision. Elle sursauta quand Malefoy posa ses mains sur le dossier de sa chaise. Elle le sentit se pencher derrière elle. Son souffle balaya ses cheveux bouclés et la jeune sorcière frissonna. Il lui glissa alors :

— Ce rouquin ne t'arrive pas à la cheville.

Un nouveau frisson parcourut sa colonne vertébrale.

— Qu'est ce que tu racontes… ?

— Mais parlons de choses sérieuses, la coupa-t-il. As-tu réfléchi à la possibilité de me fournir des livres de la Réserve ?

Il s'assit de nouveau en face d'elle, une pomme verte à la main. Il croqua dedans en attendant sa réponse. Hermione, quant à elle, croisa les bras sur sa poitrine, faisant fi du trouble qui l'avait habité quelques secondes plus tôt.

— Il n'est pas question que je te donne des livres de magie noire. Qu'on soit bien clair : je n'ai aucune confiance en toi, Malefoy.

— Comme c'est étonnant…

Le sorcier croqua à nouveau dans sa pomme, ennuyé.

— J'ai des questions à te poser par contre…

— Ça aussi c'est étonnant… marmonna-t-il.

Hermione leva les yeux au ciel mais ne releva pas.

— Depuis quatre mois, je doute que tu sois resté les bras croisés à attendre que ça passe. Qu'as-tu découvert au sujet de cette malédiction ?

Malefoy souffla et plongea sa main libre dans la poche de son pantalon. Il en ressortit un parchemin chiffonné et calciné par endroit. Quand Hermione le déplia, elle put constater que tout le centre avait été brûlé. Elle put tout de même y lire l'extrait d'un poème :

« Maledictio Felimalis.

Incantation : Maudicus Animalis.

Par trois fois la sentence tombera,

Son corps, chaque minuit, se tordra

Le monstre alors se réveillera,

Et au jour levant s'évanouira.

Assoiffée et affamée,

La bête hideuse…

Qu'ils libéreront la créature

De toute forme de torture.»

— C'est quoi un félimalis ?

Son regard venait de s'attarder sur la légende d'une moitié de dessin.

— Je n'en sais rien du tout. Nos recherches n'ont abouti nulle part.

Hermione fronça les sourcils, perplexe. Le début du poème décrivait bien la situation dans laquelle se trouvait actuellement Malefoy. La fin, elle, annonçait qu'une solution existait. Le Félimalis, en revanche, ne disait rien à la Gryffondor. Etait-il possible qu'il puisse mettre fin à la malédiction ? Peut-être que si le dessin était entier, Hermione pourrait le reconnaître…

— C'est tout ce que tu as ?

Pendant qu'elle était absorbée dans sa lecture, le Serpentard avait terminé sa pomme. Il faisait maintenant léviter le trognon qui noircissait lentement. À nouveau, il souffla avant de regarder Hermione, les paupières basses.

— Oui, Granger, c'est tout ce que j'ai. Ma possibilité à faire des recherches adéquates est limitée. Comme tu l'as si bien dit en cours l'autre jour : "les malédictions sont une forme très noire de la magie" donc…

— Je t'ai déjà dit non ! Mais je suis sûre que…

— Laisse tomber ! Tu n'es d'aucune utilité finalement.

Le trognon de pomme tomba soudainement, mais avant qu'il ne touche la table, il disparut. Malefoy reprit le parchemin brûlé et partit sans un mot de plus, laissant Hermione planté là, la bouche entrouverte.

Ce qu'il pouvait être buté !


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Et frustré... Mais Hermione a raison, il ne faut pas accorder sa confiance trop facilement !

La suite dimanche !

Enjoy,

Likocham.