Chapitre 10
« Contrôle ton propre destin, ou quelqu'un d'autre le fera »
Les jours suivants furent plus faciles à vivre. Les gens arrêtèrent progressivement de me regarder avec pitié et la vie reprit son cours normal.
Enfin normal restait un bien grand mot puisque la destruction de la planète Vulcain avait créé un gros souci d'éthique. Starfleet avait été incapable de protéger tout un peuple, et cette idée était difficile à avaler pour tous ces hauts dirigeants.
Finalement, après de longs debriefings et autres réunions auxquelles je n'avais pas eu la chance d'échapper malgré ma troisième position dans la chaîne de commandement de l'Enterprise, je n'avais finalement pas fait pire que Jim qui avait réussis l'exploit de s'endormir pendant une réunion sur les échanges à faire avec tous les autres peuples ne faisant pas encore partit de la Fédération sans que personne d'autre que Spock et moi-même ne le remarquâmes. Quelque chose que j'avais encore mauvaise étant donné que je n'avais même pas pu ne serait-ce que bâiller, me trouvant dans le champ de vision immédiat de l'amiral Marcus.
Dites-moi à quoi toutes ces réunions servent ? demanda mon frère alors qu'on sortait encore d'une réunion où ma présence me semblait totalement absurde. Je suis Capitaine ! Pas dirigeant de Starfleet.
Notre implication au sein de la…, débuta Spock mais Jim leva immédiatement la main sous mon regard lassé.
Merci Spock, coupa Jim. Mais quatre heures de réunion m'ont largement suffi.
On descendit les escaliers pour gagner la cour où se détendaient les agents de l'U.S.S Enterprise. Tout comme nous, ils savaient que nous repartirions prochainement en mission, et chacun profitait de ces instants sur Terre.
Je repérais au loin Nyota, Bones, Tchekov, Scotty et Sulu et m'orientais vers eux. Depuis l'épisode avec les Romuliens, nous étions tous devenus très proches, et je m'amusais à voir Nyota galérer avec Spock.
De ce qu'elle m'avait expliqué, ils étaient ensemble sans l'être vraiment. Spock avait visiblement de grosses difficultés à comprendre ce qui définissait une relation amoureuse. Et ce d'autant plus que professionnellement parlant, il était le supérieur de Nyota. Pas évident pour son cerveau de Vulcain. Ou de demi-Vulcain.
Vu ta tête blasée, je dirais que la réunion était rasante à souhait, commenta Nyota en me jetant un coup d'œil tandis que je frottais mes yeux, fatiguée.
Et je rajouterais qu'une bonne nuit de sommeil ne te ferait visiblement pas de mal, ajouta Bones, et je lui jetais un regard mauvais. Je ne dis pas que tu as une sale tête, mais je le pense très sincèrement.
Merci Bones, le remerciais-je tandis que les autres s'esclaffaient autour de nous. J'apprécie.
Mon collègue haussa les épaules d'un air désinvolte et je levais les yeux au ciel devant tant de détachement. Aucun tact.
Mais effectivement, j'étais véritablement fatiguée. Je peinais à dormir. Je mettais longtemps avant de trouver le sommeil, et quand j'y parvenais, c'était pour enchaîner cauchemar sur cauchemar. Autrement dit, jamais je ne trouvais de repos.
Epuisée, je m'assis sur le banc, entre Tchekov et Sulu, et laissais ma tête partir en arrière pour se reposer sur le dossier. Fixant pendant quelques minutes le ciel bleu, je me sentis à peine m'endormir. La dernière chose que j'entendis fus les vannes entre Jim et Bones.
oOoOo
Lorsque j'ouvris les yeux, la première chose que je compris, c'est que je n'étais plus sur mon banc. Je sentais le confort d'un matelas sous mon corps, la douceur des couvertures sur ma peau.
Clignant doucement des paupières, je constatais rapidement que j'étais dans mon lit, bien au chaud. Laissant mes yeux s'adapter à la luminosité, je finis par distinguer Nyota assise sur son lit, un livre à la main.
M'entendant bouger, elle tourna les yeux vers moi, et sourit en rencontrant mon regard. Refermant son livre, elle pivota vers moi.
Comment te sens-tu ? demanda-t-elle tandis que je me redressais dans mon propre lit.
Reposée, ce qui change des derniers jours, avouais-je et elle hocha la tête. J'ai dormi combien de temps ?
Près de sept heures, répondit-elle et j'ouvris de grands yeux effarés. Il est presque 19 heures.
Tu rigole ?! fis-je en jetant un coup d'œil à ma montre qui me confirma qu'elle ne blaguait pas. Mince !
Tu en avais besoin, rappela-t-elle et je hochais la tête, ne pouvant pas lui donner tort.
M'asseyant au pied de mon lit, je m'étirais avant de m'arrêter brutalement.
C'est Jim qui m'a ramenée ici ? demandais-je en ayant peur de la réponse.
Non, répondit Nyota, un sourire aux lèvres.
Bones ? tentais-je, refusant de penser à Scotty.
Non plus, contra-t-elle, son sourire s'agrandissant.
Spock ? fis-je en dernier recours mais elle secoua la tête en riant.
Tu peux tous les nommer, tu sais pertinemment qui t'a portée jusqu'ici, ria-t-elle.
Détournant les yeux, je me levais de mon lit et enfilais mes bottes qu'on m'avait évidemment retirée.
Je vois bien qu'il t'attire, souffla Nyota et je pivotais vers elle.
Pas du tout, répondis-je.
Anna, je te vois réagir quand il est là, précisa-t-elle. Pourquoi est-ce que tu lutte autant ?
Je n'ai pas envie de m'attacher, fis-je en haussant les épaules en tentant de paraître désinvolte.
Depuis Gabriel, tu ne veux plus laisser personne entrer dans ta vie… commença Nyota.
Je n'ai pas envie de parler de ça, la prévins-je en lui adressant un regard d'avertissement. Je ne veux parler ni de Gabriel Lorca, ni de Scott Montgomery, c'est compris Nyota ?
Soupirant de lassitude, ma meilleure amie leva les yeux au ciel et haussa les épaules avant d'attraper sa veste, me suivant dans le couloir. Ensemble, on s'orienta vers la cantine, où régnait un magnifique brouhaha.
Bien dormi ? demanda ironiquement Bones quand on les rejoignit.
Plutôt pas mal, répondis-je en répondant avec le même sourire.
Demain a lieu ma cérémonie d'intronisation en tant que capitaine, m'apprit Jim et je hochais la tête en piochant une frite dans mon assiette. Et demain soir on repart en mission.
Ah ? demandais-je, déjà plus concernée. On va où ?
Mission d'exploration dans l'espace ! clama Tchekov et je souris devant son air réjouit tandis que Bones ronchonnait dans sa barbe.
Levant un pouce en l'air pour signifier que j'avais bien compris, j'entrepris de finir mon assiette. Je réussissais avec brio à éviter le regard de Scotty qui se trouvait en face de moi, légèrement sur ma droite.
Ce serait compliqué d'ignorer ce que je ressentais, je le savais, mais je devais essayer. Je savais ce que cela donnerait une relation où se mêlerait le côté professionnel et privé.
oOoOo
Il y avait foule dans la salle où se tenait la cérémonie en l'honneur de l'inauguration de Jim en tant que Capitaine. Debout entre Spock et Sulu, je regardais mon frère qui se tenait debout face à celui qui allait lui remettre le titre. Ils discutaient, j'ignorais de quoi, mais mon frère hochait régulièrement la tête.
Soudain, au moment où les deux hommes se redressèrent, le silence s'abattit sur la foule.
Cette assemblée appelle le Capitaine James Tiberius Kirk, lança une voix sur la droite et je vis s'avancer le Colonel Ronan.
Le même qui avait présidé l'assemblée quelques semaines auparavant, quand Jim avait triché au test du Kobayashi Maru.
Mon frère s'avança vers lui, bien plus solennel que la fois où il s'était retrouvé face à lui pour son jugement.
Votre inspiration exemplaire et votre extrême dévouement envers vos camarades s'inscrivent dans la lignée de nos plus nobles traditions, et font rejaillir les plus grands honneurs sur vous, votre équipage et la Fédération. C'est avec fierté que je vous décerne cette distinction…
Un membre de la Commission s'avança et ouvrit un coffret devant Jim et le colonel Ronan. Une médaille du mérite.
Un sourire dessina mes lèvres. J'étais fière de mon frère, fière de ce qu'il était devenu en si peu de temps. L'homme irresponsable et immature avait changé. Et bien qu'il demeure encore quelques lacunes, il était désormais tout à fait capable de diriger son propre vaisseau. Quelque chose que tout Starfleet avait compris.
Capitaine, reprit le colonel Ronan. Je vous invite, conformément à l'ordre .5 à vous présenter à l'amiral Pike de l'U.S.S Enterprise pour lui succéder dans ses fonctions.
Mon regard tomba sur celui qui avait fait office de père pour nous. Christopher Pike était encore en fauteuil roulant, trop faible encore pour remarcher.
Quand Jim se présenta devant lui, je lu dans le regard de Pike toute la fierté, mais également l'émotion, qu'il avait à voir Jim ainsi devant lui.
Je prends votre charge Monsieur, clama Jim et je souris une nouvelle fois, cette fois-ci un peu plus émue.
Et je vous la transmets, répondit Christopher Pike, et Jim esquissa un sourire.
Merci Monsieur.
Félicitation Capitaine, acheva Pike en lui tendant la main que Jim serra. Votre père serait fier.
Je me sentis frémir tandis que tout le monde, moi y comprit, applaudissait mon frère fraîchement nommé Capitaine de l'U.S.S Enterprise.
Comme s'il avait senti mes émotions flancher, Jim posa les yeux sur moi, m'adressant un sourire et un regard encourageant. Lui comme moi pensions à la même personne en ce moment précis. Une personne qui aurait dû être là aujourd'hui, qui aurait dû voir ce que Jim avait réussis à faire.
Votre frère serait fier, murmura Nyota à mon oreille tandis que je hochais la tête. Et je suis sûre que de là où il se trouve, il l'ai déjà.
Je ne me retournais pas pour la remercier, elle savait que je l'avais entendu.
oOoOo
A bord de l'Enterprise, c'était l'effervescence. Ça courait de partout, chacun se dépêchant de rendre opérationnel le vaisseau pour la mission d'exploration pour laquelle nous partions. C'était l'excitation qui régnait en priorité, bien que certains membres de l'équipage eussent un peu de mal à se séparer de leurs proches.
C'était le revers de la médaille de vivre à bord d'un vaisseau. La séparation avec son conjoint, ses enfants. C'était quelque chose à prendre en compte quand on signait dans Starfleet. Et quelque chose à prendre en compte quand on acceptait d'aimer un membre de Starfleet.
Descendant de la navette qui m'avait menée à bord de l'Enterprise, j'achevais de fixer l'écusson infirmier sur la manche de ma robe. Cette fois encore, j'avais hérité des triples bandes jaunes sur l'autre manche, indiquant mon rang dans la chaîne de commandement. Visiblement, ils ne savaient toujours pas comment faire pour indiquer à la fois mon statut d'officier infirmier en chef, et celui de troisième sur la liste de commandement.
Passerelle opérationnelle, clama une voix féminine dans l'interphone général. Infirmerie en cours de préparation. Salle des machines en cours de préparation. Salle des opérations opérationnelle. Salle des communications en cours de préparation…
J'accélérais le pas pour gagner l'ascenseur, évitant de justesse un véhicule de chargement qui se dirigeait vers le fond du hangar.
Appuyant sur le bouton du 4ème étage de l'U.S.S Enterprise, je vis Jim me rejoindre de justesse. Lui aussi achevait de s'habiller.
Parée pour le voyage ? me demande mon frère et je lui offris un magnifique sourire.
Plus que prête même, répondis-je alors que l'ascenseur se mettait en mouvement. Je n'attendais que cela.
Et moi donc ! clama Jim avant que l'ascenseur ne s'arrête devant le 4ème étage. On se retrouve sur la passerelle dans 10 minutes !
Hochant la tête, je sortis de l'ascenseur et entrais dans l'infirmerie. Bones s'y trouvait déjà, de même que les autres infirmiers présents à bord. Jetant un coup d'œil aux différentes réserves de la salle, je vérifiais en compagnie de Bones le bloc opératoire situé à côté de l'infirmerie.
Tout est opérationnel, grogna Bones comme s'il espérait un problème de dernière minute pour ne pas faire décoller l'Enterprise.
Désolée de te décevoir, souris-je en m'asseyant devant l'ordinateur pour rentrer toutes les données.
Personnel médical et paramédical au complet ! clama Christine depuis le fond de la salle.
La remerciant rapidement, je cochais toutes les cases qui permettraient à l'U.S.S Enterprise d'être opérationnel du côté médical.
Infirmerie opérationnelle, clama la voix automatiquement dans l'interphone général, me confirmant que nous étions prêts.
Allez ! fis-je pour encourager Bones. Direction, la passerelle !
Bones grogna dans sa barbe à nouveau, mais me suivis dans l'ascenseur. Un sourire dessina mes lèvres devant son air faussement bougon.
Allez, courage, lui lançais-je en lui tapotant l'épaule une fois les portes fermées et l'ascenseur en mouvement vers le 18ème étage. Tu vas survivre !
Mais qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ! se plaignit-il et j'éclatais de rire.
Tu as signé, répondis-je avant de sortir de l'ascenseur pour gagner la passerelle.
Salle des machines opérationnelle !
Ici aussi c'était l'effervescence. Tout le monde était à son poste et je rejoignis Nyota qui achevait de paramétrer les données de traduction et de communication. J'eus à peine le temps de la saluer avant que Jim ne rentre à son tour dans la pièce.
Propulseurs auxiliaires et moteurs d'impulsion à disposition, lança Sulu.
Système d'armement et boucliers en attente Monsieur, rajouta Tchekov.
Le contrôle du Doc est prêt Capitaine, acheva Nyota et Jim nous adressa à tous un grand sourire.
Bones ! clama Jim en tapant l'épaule de ce dernier avant d'aller s'asseoir dans son fauteuil de Capitaine. Bouclez votre ceinture !
Il soupira de lassitude et j'échangeais un regard moqueur avec Nyota.
Scotty ? appela Jim dans l'interphone. Où on en est ?
Chambre du dilitium au maximum Capitaine, répondit-il et Nyota m'adressa un regard ironique en me voyant plisser le nez, ne pouvant m'empêcher de frissonner en entendant sa voix.
Fronçant les sourcils, je lui indiquais Spock qui venait d'apparaître derrière les portes de l'ascenseur et elle se concentra faussement sur son ordinateur.
Mr Sulu ? demanda Jim. Préparez les propulseurs.
Permission de monter à bord Capitaine ? demanda Spock.
Permission accordée, confirma Jim et je me redressais, rejoignant Bones devant la vitre.
Comme il vous reste à désigner votre second, reprit Spock en s'avançant. J'aimerais en toute humilité vous soumettre ma candidature. Si vous le souhaitez, je peux fournir des lettres de recommandation.
Vous m'honoreriez Commandeur, répondit Jim et je souris alors que Spock se tournait vers moi.
Vous ne voyez aucune opposition à cela ? me demanda-t-il et je secouais la tête.
Je ne souhaite en aucun cas devenir officier en second, répondis-je. Et je n'espère pas reposer mes fesses dans ce fauteuil de si tôt !
Alors c'est réglé, clama Jim en se rasseyant tandis que Spock regagnait sa place. Propulseurs de manœuvre, Monsieur Sulu !
Propulseurs en attente, confirma ce dernier.
En avant toute ! ordonna Jim et je quittais la salle alors que l'Enterprise se mettait en mouvement.
On était parti.
