Chapitre 14
J'avais beau carburer à l'intérieur de l'infirmerie, ne me laisser aucun moment de répit pour réfléchir, je ne parvenais pas à m'ôter l'air furieux et blessé de Scotty de la tête. Soupirant de lassitude, je m'assis, la tête entre les mains, au bureau médical.
L'Enterprise avait pris son rythme de croisière, et Jim m'avait prévenu personnellement que Scotty avait donné sa démission à bord du vaisseau. Tout comme il m'avait prévenu, il avait refusé jusqu'au bout l'accès aux torpilles. Autrement dit, j'avais vraiment bousillé ma seule chance de m'excuser auprès de lui.
Un jour ou l'autre, il faudra bien que tu reconnaisses tes sentiments envers lui, me lança Bones à cet instant précis en entrant dans la pièce.
Depuis quand es-tu devenu un fin connaisseur en la matière ? lui demandais-je en relevant la tête tandis qu'il s'installait face à moi.
Depuis jamais, répondit Bones. Et je serais un piètre conseiller en la matière, mais il t'aime, cela crève les yeux. Et c'est réciproque, même si c'est bien moins évident. Ta manière de réagir quand il est dans les parages est plutôt explicite.
Soupirant à nouveau, je croisais les bras sur la table et y posais ma tête, dépitée. En-dehors de Jim, Bones était le seul à me voir dans des moments comme celui-ci. Nous en avions tellement traversés des difficultés en tant que médecin et infirmière que nous nous comprenions presque sans parler.
A tout l'équipage de l'Enterprise, lança la voix de Jim dans l'interphone. Vous le savez, Christopher Pike, l'ancien capitaine de ce vaisseau et notre ami, est mort.
Les yeux fermés, je frissonnais à l'évocation du nom de l'homme que j'avais toujours considéré comme un membre à part entière de ma famille. Comme un père.
Son meurtrier se cache en territoire klingon, continua Jim. Où il se croit à l'abri de la Fédération. C'est là que nous allons. Sur l'ordre de l'amiral Marcus, notre présence doit rester secrète. Les tensions avec l'Empire klingon sont telles qu'il vaut mieux éviter toute provocation. Je mènerais moi-même une expédition dans une cité abandonnée de Kronos où nous capturerons le fugitif John Harrison pour le ramener sur Terre afin qu'il soit jugé. Allons attraper ce salopart. Terminé.
Je relevais la tête, furieuse. Depuis quand il était question de capturer John Harrison ?
Face a moi, Bones secoua la tête devant mon air.
Anna, souffla Bones en voyant ma tête. Tu sais aussi bien que moi que c'est ce qu'il faut faire. Le tuer ne mènera à rien. On ne vaudra pas mieux que lui.
Je me fiche pas mal de valoir mieux que lui, sifflais-je en me redressant. Ce connard a tué des dizaines de personnes, il en tuera d'autres si on ne l'arrête pas. Ce mec appartenait à la Section 31, quoi qu'il advienne, il sera toujours plus fort que n'importe lequel d'entre vous. Sans compter qu'il possède des compétences dont on ignorerait jusqu'à l'existence il y a encore peu de temps.
Je comprends ta colère, répondit Bones en posant sa main sur mon bras. Et je la partage. Mais tout comme Scotty, je ne peux pas concevoir qu'on puisse tuer un homme sans lui laisser la seule chance de s'expliquer.
Les hommes comme lui ne s'expliquent pas, murmurais je. Quand ils commencent à tuer, ils ne s'arrêtent plus.
Sachant que je ne parviendrais pas à argumenter contre Bones, je me contentais de quitter la pièce, la tête perdue dans mes pensées.
Gagnant les couloirs, je marchais sans destination. Je m'aperçus sans réelle surprise que mes pas m'avaient menée aux portes de l'ingénierie. Sauf que je n'y trouverais pas ce que je voulais.
Il t'aime encore quoi que tu dises, clama la voix de Jim dans mon dos. Je dois avouer qu'il est sacrement accro, car tu lui en donne du fil à retordre.
Fermant les yeux, je tournais lentement sur moi-même, rouvrant les yeux sur mon frère qui se tenait debout devant moi.
J'ai bien peur d'avoir dépassé les limites, répondis-je lentement. Même pour quelqu'un d'aussi tolérant que Scotty.
Il est en colère, confirma Jim. Mais je doute que cela suffise à gâcher les sentiments qu'il a pour toi.
On ne servira pas sur le même bâtiment, soufflais-je en m'adossant au mur, fatiguée. J'ai déjà donné dans les relations difficiles, cela ne nous a pas trop réussis à Gabriel et moi-même.
Mon frère s'adossa à mes côtés.
Pourquoi ne m'en as-tu jamais parlé ? demanda-t-il.
Je ne sais pas, répondis-je, les yeux dans le vague. Notre histoire a débuté sans avertissements, je ne cherchais personne à ce moment-là. Mais pour la première fois, j'étais bien dans les bras d'un homme. Pas de question, pas de gêne. Tout coulait de source. Le peu de temps ou nous étions ensemble, on ne le passait pas se disputer. On a décidé de cacher notre relation parce qu'on ne voulait pas que cela affecte plus ma réputation. Être la fille du Capitaine de l'U.S.S Kelvin suffisait déjà à mon inconfort. Si en plus de cela on ajoutait ma relation avec le Capitaine de l'U.S.S Discovery, je pense que j'aurais peiné à continuer ma formation. Il était Capitaine du vaisseau dans lequel je faisais ma formation, et il était hors de question que l'on puisse remettre en question mes compétences à cause de ma vie privée. Alors on a caché notre relation, et je crois que j'appréciais cela. Même Adrian n'était pas au courant.
Et la Section 31 ? demanda Jim.
Je l'ai découverte plusieurs mois après le début de ma relation avec Gabriel, expliquais-je. Une nuit, pendant que je dormais, il a reçu un coup de téléphone. Malgré le fait qu'il parle bas, sa voix m'a réveillée. Après cela, il a été tenu de m'expliquer de quoi il s'agissait. A la base, cela ressemblait à une organisation dont le but était louable. Défendre Starfleet en cachette, coûte que coûte. Alors je l'ai intégré, comme beaucoup de membres de l'U.S.S Discovery. J'ai appris à me battre, j'ai appris à mentir, à agir en silence. L'entraînement et la formation sont difficiles, les conditions sont parfois même inhumaines. Intégrer la Section 31 demande beaucoup de sacrifices personnels et de remise en question. Après cela, j'ai rapidement constaté que si les grandes lignes paraissaient claires et louables, le reste l'était beaucoup moins…
Qu'est-ce qu'ils t'ont fait ? questionna mon frère, la voix emplie de colère.
A moi, ils n'ont rien fait, fis-je en relevant les yeux. Mais la Section 31 impose de protéger Starfleet coûte que coûte. Peu importe les moyens mis en œuvre, qu'ils soient honorables ou non, peu importe le prix que cela coûte. Seul le résultat compte. Ce sont des soldats prêts à tout, et moi, ce n'était pas mon credo. J'ai quitté la Section 31 en même temps que ma relation avec Gabriel se soit achevée ainsi que ma formation au sein de l'U.S.S Discovery. Je savais que cela ressortirait un jour. J'ignorais juste où, quand et comment.
Jim serra doucement mes doigts et je souris distraitement.
Tes cauchemars incessants ? demanda-t-il et je hochais la tête.
J'ai fait des choses terribles au nom de la sécurité de Starfleet, répondis-je en le fixant dans les yeux. Et j'ai vu des choses encore pires. J'ai perdu quelque chose au milieu de tout cela.
C'est pour cela que tu repousse Scotty, comprit brutalement Jim et je clignais brièvement les yeux. Tu as peur de sa réaction si un jour il découvre tout cela. Tu as peur de le mêler à tout cela.
Quoi qu'il advienne, je ne pourrais pas effacer mon passé, répondis-je. Il fera toujours parti de moi. Que mes décisions aient été bonnes ou mauvaises, elles impacteront toujours mon avenir, quoi que je fasse. Ma réputation ne changera pas non plus, pas plus que la célébrité liée a mon nom et mon histoire. Scotty ignore tout ce que cela implique pour lui, pour son poste, pour sa réputation.
Un jour ou l'autre il faudra bien que tu acceptes d'avancer, expliqua Jim. Et je pense que Scotty est la personne qu'il te faut.
Parce que tu l'aime bien ? demandais-je ironiquement.
Parce que je vois ta manière d'agir quand il est là, réfuta Jim. Je te vois réagir au simple son de sa voix. Je vois ton inquiétude quand sa vie peut être en jeu. Il y une personne que tu cherches en priorité quand nous sommes en danger, et ce n'est plus moi. Je n'y connais rien en amour, mais je ne pense pas qu'on agisse ainsi si on n'aime pas profondément la personne en question.
Je ne répondis rien, me doutant qu'il avait sans nul doute raison.
On arrive bientôt sur Kronos, souffla Jim. J'aimerais que tu nous accompagne là-bas.
Je hochais la tête, me doutant que mon frère ne faisait pas cela pour me faire plaisir.
Soudain, alors que je me redressais pour regagner l'infirmerie, le vaisseau effectua une brutale secousse, me projetant en compagnie de mon frère contre le mur puis au sol. Sonnée, je me remis à genoux, la main contre ma tête qui avait heurté la barre du mur.
Qu'est-ce qui se passe ? soufflais-je alors que Jim m'aidait à me redresser avant de le suivre vers la passerelle.
L'ingénierie a coupé la distorsion, clama Sulu quand les doubles portes s'ouvrirent devant nous.
Tchekov, vous avez cassé mon vaisseau ? demanda Jim dans l'interphone.
Désolé, il y a eu une surchauffe du réacteur, répondit Tchekov, essoufflé. J'ai dû le couper. Sûrement une fuite quelque part.
Son ton laissait clairement comprendre qu'il n'était pas rassuré d'être à ce poste-là à cet instant précis. Il avait peut-être secondé Scotty une multitude de fois, ce n'en n'était pas moins un poste qu'il n'occupait pas habituellement.
Mince, siffla Jim en se redressant. Temps d'arrivée à destination ?
20 minutes, répondit Sulu et je gardais mon air impassible avec difficulté. C'est long en territoire ennemi.
Pas de temps à perdre, décida Jim en nous rejoignant Nyota et moi-même. Où est Spock ?
Ici, répondit ce dernier en entrant dans la pièce au même moment.
On descend sur Kronos, clama Jim.
Il pivota vers Nyota.
Comment est votre klingon ? lui demanda-t-il.
Rouillé mais bon, répondit ma meilleure amie.
On vous emmène, décida mon frère avant que son regard ne passe de Spock à Nyota. Ça ne vous gêne pas de travailler ensemble ?
Absolument pas, répondit froidement Nyota en adressant un regard glacial à Spock.
Me trouvant entre les deux, je me contentais de hausser les sourcils sans broncher quand elle tourna les talons. Adressant un regard amusé à Jim, je suivis ma meilleure amie en direction du hangar où se trouvaient nos équipements ainsi que notre navette.
Et après tu disais que ma relation avec Scotty était compliquée ? demandais-je ironiquement.
Cela n'a rien à voir, se défendit-elle mais devant mon nouveau levé de sourcils, elle soupira. Je lui en veux. Il a délibérément décidé de rester dans ce volcan, et si vous n'aviez pas enfreint les règles, il serait mort. Et ensuite, je lui en veux parce que c'est de sa faute si toi et lui vous êtes réaffectés.
Spock est un vulcain, lui rappelais-je alors que nous parvenions aux vestiaires pour nous changer. Tu savais à quoi t'en tenir. Demi-vulcain ou non, il a été élevé selon leurs coutumes.
Je sais…, répondit Nyota. Mais justement, je ne peux pas juste hocher la tête quand je ne suis pas d'accord.
Ne répondant rien, je me dépêchais d'enfiler un jean, un t-shirt, une veste en cuir et des bottines. Vérifiant que rien ne me reliait à Starfleet, je rejoignis Nyota à bord de la navette.
Pour une raison qui m'échappait encore, Spock s'y trouvait déjà également.
M'asseyant à ma place dans un silence presque gênant, je préparais mes commandes. C'était bien la seule chose que je savais piloter. Contrairement à mon frère Adrian, je n'avais jamais aimé piloter quoi que ce soit.
Jim monta à bord en compagnie de deux hommes chargés de la sécurité et la navette prit son envol dans l'espace, s'approchant de l'espace klingon.
Signe de vie détecté dans la province de Ketha, déclara Spock tandis que je voyais effectivement clignoter un point orange sur mon écran. D'après les relevés de Mr Scott, ce doit être Harrison.
Mr Sulu, appela Jim. On l'a trouvé. Sortez le grand jeu.
A vos ordres ! répondit Sulu avant que je n'entende l'intercom s'ouvrir à toute communication. J'appelle John Harrison. Ici le capitaine Hikaru Sulu de l'U.S.S Enterprise. Une navette d'officiers d'élite se dirige vers vous. Si vous ne vous livrez pas à eux, je tirerai une batterie entière de torpilles longue-portée braquées sur vos coordonnées. Vous avez deux minutes pour obtempérer. Un refus signifierait votre anéantissement. Si vous me cherchez, vous me trouverez.
La communication se coupa, et j'échangeais un regard surprit et impressionné avec Jim. Sulu avait assuré, je n'aurais pas fait mieux que lui.
Arrivée aux coordonnées de Harrison dans trois minutes, déclara Spock et je sentis la pression dans la navette monter. Je doute qu'il se rende. La probabilité qu'il tente de nous tuer est de 91.6%.
Fantastique, répondit Jim.
Par chance, ça vous est égal, riposta Nyota et je levais un sourcil au ciel, surprise qu'elle expose ses difficultés de couple alors qu'il y avait du monde.
Pardon, je n'ai pas saisi…, commença Spock.
Mettons que je n'ai rien dit, coupa Nyota avant de reprendre. Sauf si vous voulez m'écouter.
Nous en discuterons en privé, déclara Spock.
Tu veux surtout te défiler, coupa à nouveau Nyota et je discernais sa colère à travers ses mots.
Ça peut pas attendre ? demanda Jim sans que je n'intervienne.
Tu n'as jamais le temps, continua Nyota, faisant fi de l'intervention de Jim. En ce moment, c'est encore pire que Anastasia évitant Scotty.
Je ne…, commençais-je, mais tout comme pour Jim, elle ne prêta pas à attention à mon intervention.
Pardon Capitaine, j'en ai pour deux secondes, lança-t-elle à Jim. Dans le volcan, tu n'as pas pensé à nous, à ce que ça me ferait si tu mourais. Tu ne ressentais rien. Ça t'était égal. Et ça n'agace pas que moi, le capitaine aussi.
Ne me mêlez pas à ça, coupa Jim avant d'hésiter. Elle a raison.
Ta théorie sur mon rapport à la mort est erronée, intervint Spock. Tout être pensant doit s'appliquer à avoir une vie longue et prospère.
Génial, soupira Nyota.
Très romantique, lâcha Jim.
Vous savez vous y prendre, fis-je au même moment.
Vous ne comprenez pas, coupa Spock un peu énervé. Certes, j'ai choisi de ne rien ressentir en voyant ma fin arriver. J'ai fusionné avec la conscience de l'amiral Pike et expérimenté ce qu'il ressentait au moment de sa mort. Colère, confusion, solitude, peur. J'avais déjà expérimenté ces sentiments, à un degré exponentiel, le jour où ma planète a été détruite. C'est une expérience que je ne veux plus jamais revivre. Nyota, tu as tort de croire que ma volonté de ne rien ressentir est une marque d'indifférence. Je t'assure qu'en réalité, c'est tout le contraire.
Je pouvais comprendre son raisonnement, et le manque de réaction de Nyota me confirma qu'elle aussi réfléchissait à ce que Spock venait de lui dire.
Sauf qu'elle n'eut pas le temps de réfléchir bien longtemps.
A cet instant précis, quelque chose heurta violemment notre navette, nous propulsant hors de notre trajectoire. Crispant la mâchoire, je tentais de voir quelque chose à travers la vitre, mais la navette tournait trop rapidement sur elle-même.
C'était quoi ? demanda Jim alors que je serrais fermement les commandes de la navette pour tenter de retrouver notre équilibre et éviter de heurter quelque chose.
Les Klingons, sifflais-je en reconnaissant vaguement l'une de leurs navettes de combat. Ils nous ont repérés !
Nous sommes poursuivis par un D-4 klingon, confirma Spock.
Dans une zone abandonnée ? demanda Jim et je hochais la tête.
Un patrouilleur, lança Nyota.
Accrochez-vous, siffla Jim en accélérant la navette.
Notre vaisseau n'a pas d'armes, lança Spock.
Mais il nous a, coupa Jim. Moteur maxi.
Appuyant sur le bouton moteur, je me sentis plaquée à mon siège quand la navette décolla. Mais je doutais que cela suffise à semer les klingons.
Jim avait pris les commandes, et je regardais défiler le décor à une vitesse bien trop rapide pour moi. Je n'avais pas l'estomac fragile mais là, je devais avouer que je n'en menais pas très large.
Ils nous tirent dessus ! hurlais-je au moment même où un missile nous toucha, déclenchant les alarmes de la navette.
Ils se rapprochent, lança Nyota. Azimut 2-8-5.
Là ! cria Jim. On va les semer !
Si vous parlez de ce couloir, intervint Spock. On ne passera pas
On passera, déclara Jim.
On ne passera pas ! répéta Spock.
On passera, répéta Jim et je serrais les dents en voyant le couloir se rapprocher.
Jim ! criais-je au moment où la navette rentra à l'intérieur.
La pression à l'intérieur de la navette était monstrueuse, et j'entendis Nyota hurler. Je fis sans nul doute la même chose, mais à cet instant, la navette ressortit de l'autre côté.
Secouée, je clignais plusieurs fois des paupières, peinant à croire que nous étions encore en vie.
On est passés, souffla Jim, peinant à y croire lui-même.
Le terme est abusif, lança Spock tout aussi secoué.
Vous les voyez ? demanda Jim.
Non, répondis-je en alerte.
Non, ça m'inquiète, répondit Nyota.
On les a semés ! clama Jim.
Ou ils feintent, contra Nyota.
Ou on les a semés, répéta Jim mais je n'y croyais pas non plus.
Et les lumières qui se braquèrent violemment sur nous me confirmèrent mon ressenti. On ne les avait pas semés.
Quelqu'un parla en klingon et je me sentis me tendre. Depuis mon implication à bord de l'U.S.S Discovery, je vouais une haine sans pareille à l'égard des klingons.
On a ordre d'atterrir, traduit Nyota. Ils vont nous demander des comptes. Ils vont nous torturer, nous interroger, et nous tuer.
Je ne me laisserais pas capturer, prévins-je en serrant mon arme à feu accrochée à ma cuisse. Je ne me laisserais plus torturer…
Je n'avais pas fait attention à ce que j'avais dit, mais je su immédiatement que les trois autres avaient entendu mes propos. Si personne ne fit de remarque, je sus que je devrais leur rendre des comptes une fois rentrés à bord de l'Enterprise.
Si on rentrait.
On va tirer dans le tas, souffla Jim.
On ne gagneras pas contre eux, prévins-je.
A cet instant, Nyota se détacha et se plaça face à Jim.
Ils sont plus nombreux, énonça-t-elle. Mieux armés. On n'a aucune chance si on donne l'assaut. Vous m'avez amenée parce que je parle klingon. Laissez-moi parler klingon.
Nyota, murmurais-je. Tu sais très bien ce qu'ils te feront s'ils te capture…
Je dois le faire, répondit-elle. Je dois essayer de sauver nos vies.
On doit essayer, fit Jim et je ne trouvais rien à redire à cela.
Coupant le moteur, j'obligeais notre navette à se poser. Crispée comme jamais, je me détachais et m'avançais vers Nyota.
Je ne les laisserais pas capturer qui que ce soit à bord de ce vaisseau, murmurais-je. Tu ignores ce qu'ils peuvent faire, mais moi je le sais très bien…
Laisse-moi essayer, répondit-elle. Et si cela ne fonctionne pas, on utilisera la manière forte Mais je doute que l'on gagne.
Je ne répondis rien, mais je n'en pensais pas moins. Je la laissais descendre de la navette, et rejoignis Spock et Jim devant la fenêtre.
Ça ne marchera pas, murmura Jim et je hochais la tête, du même avis.
C'est la seule option logique, répondit Spock d'un ton neutre, mais tout dans sa posture indiquait qu'il n'appréciait pas que Nyota soit aussi exposée. En intervenant, vous déchaînerez la colère des Klingons et celle du Lieutenant Uhura.
En voyant Nyota atteindre les Klingons, Jim se précipita sur la male des armes et me tendit une autre arme à feu.
Lieutenant, lança-t-il aux deux hommes avec nous.
Merci Capitaine, répondirent-ils.
Je regardais le klingon à qui Nyota s'adressait, leur chef, retirer son masque. Une nouvelle vague de haine me secoua, et je serais furieusement mon arme dans ma main, veillant à ne pas poser le doigt sur la gâchette.
Soudain, il attrapa violemment Nyota par la gorge et je me redressais violemment. Mais je n'eu pas le temps d'aller bien loin.
Une série de tirs heurta les klingons, permettant à Nyota de se libérer. Me précipitant dehors, je tirais avec précision sur les klingons qui se précipitèrent vers nous. Jetant un coup d'œil sur ma droite, je distinguais une silhouette de grande taille, le visage couvert, une arme de guerre à la main.
Cette dernière était d'ailleurs redoutable puisqu'il arrivait à heurter et mettre hors d'état de nuire les vaisseaux klingons autour de nous. Plissant les yeux, je devinais qu'il s'agissait de John Harrison.
Un klingon se jeta sur moi, nous faisant rouler sur le sol. Oubliant temporairement Harrison, je me relevais rapidement, attrapant mon couteau placé à ma cheville. Roulant sur le sol, je le frappais sans réfléchir, rattrapant les réflexes appris durant ma formation. Le klingon s'effondra à mes pieds.
Il faut capturer Harrison, siffla Jim qui se trouvait non loin de moi. Avant qu'il ne s'échappe.
Passant sous le bras d'un autre klingon, je plantais mon poignard dans sa cuisse avant de l'égorger sans la moindre pitié. Jim m'adressa un regard presque effrayé et je me contentais de hausser les épaules.
Mais on fut à nouveau séparés par une horde de klingons se précipitant sur nous. Me jetant sur le côté, je me redressais juste à temps pour éviter d'être tuée. Balançant mes jambes dans celles de mon adversaire en face de moi, j'attrapais une arme à feu et tirais sur les suivants.
M'approchant difficilement mais sûrement vers John Harrison, je parvins à me hisser sur la passerelle où il se trouvait.
John Harrison me sentit arriver, et alors qu'il assassinait à nouveau quelques klingons avec son arme, il para de justesse mon coup de couteau. Nos yeux se toisèrent, et je lui balançais un coup de pied dans les jambes qui le fit reculer précipitamment. Un duel dangereux s'engagea alors.
John Harrison avait fait partit d'un ancêtre de la Section 31, et en conséquent, il savait parfaitement se battre. A mon instar.
On combattit pendant plusieurs longues minutes, recevant les coups de l'autre et en en assenant d'autres. Par moment, des klingons essayaient de se glisser entre nous, sans grande réussite.
Soudain, il se jeta en avant, et je le vis se précipiter vers Nyota, Jim et Spock qui se tenaient quelques mètres plus loin. Refusant de perdre encore qui que ce soit par sa faute, je lui balançais mon couteau dans le dos. Ce dernier s'y planta, mais je le vis à peine frémir.
Ça, ce n'était pas dans la formation de la Section 31.
Votre arme ! ordonna Spock.
Combien de torpilles ? demanda Harrison alors que je sautais au sol, mais il braqua son arme sur moi, me forçant à m'immobiliser.
Votre arme ! répéta Spock.
Harrison détourna son arme à une vitesse fulgurante et tira sur l'arme de Spock, faisant lâcher prise à ce dernier. Avant de la braquer à nouveau sur moi quand je m'avançais.
Les torpilles dont vous m'avez menacé, reprit Harrison. Combien y en a-t-il ?
Jim le défia du regard, à mon instar. Ce fut finalement Spock qui lui répondit.
Soixante-douze.
Harrison marqua un temps d'arrêt, son regard passant sur Jim puis sur moi. Il avisa nos visages haineux, mais nous étions de toute manière désarmés face à lui.
Je me rends, déclara-t-il à ma grande surprise en lâchant son arme.
Spock ramassa son arme et la braqua à nouveau sur Harrison, mais ce dernier ne broncha pas. Jim me jeta un coup d'œil tandis que je m'avançais sur Harrison et lui balançais un coup de pied dans les genoux, le forçant à s'agenouiller. Jim me rejoignis au même moment.
Au nom de Christopher Pike, siffla-t-il. Mon ami. J'accepte votre reddition.
Il lui balança son poing dans la figure, le faisant heurter mes propres jambes.
Avec dégoût, je le renvoyais en avant avec mon pied, mais Harrison bougea à peine. Je vis Jim s'acharner sur lui, et les regards de Spock et Nyota passer de lui à moi à plusieurs reprises. Mais à aucun moment je n'intervins.
Capitaine ! cria Nyota au bout d'un moment.
Jim, qui était tombé à genoux, je redressais, le visage toujours haineux.
Capitaine…, commença Harrison.
Jim ne lui répondit rien, et je m'avançais. Le regard de Harrison tomba alors sur moi et sur le long poignard que je tenais à la main.
Section 31, murmura Harrison.
Vous savez donc à quel point je n'aurais aucune pitié pour vous, sifflais-je. Je pourrais vous tuer. J'en meurs d'envie. Si vous restez en vie, c'est seulement parce qu'on m'empêchera de vous tuer. C'est la seule raison.
Je le dépassais avec dégoût, rejoignant Jim.
Menottez-le, ordonna ce dernier.
Le suivant à bord de la navette, je ne plaçais aucun mot, aucune parole tout du long du retour jusqu'à l'Enterprise. Gagnant ma cabine, j'attendis que la porte se referme derrière moi pour m'adosser au mur et soupirer.
C'était terminé. Et maintenant, que me restait-il ?
