Chapitre 17

On réapparut à bord de l'U.S.S Enterprise quelques secondes plus tard, et la distorsion ajoutée à mon mal de crâne me donna la nausée. Un hoquet me secoua, et je me penchais violemment en avant, manquant de vomir. Scotty me força à m'asseoir sur le banc avant de se précipiter vers la fenêtre.

Laissez-nous sortir ! ordonna-t-il au moment où une explosion secouait tout le vaisseau.

L'explosion le précipita contre moi et je le retins de justesse pour que sa tête ne heurte pas le mur. Ignorant la douleur, je me relevais immédiatement, aidant Jim à seconder Carol dont Khan avait cassé la jambe.

Khan tire sur l'Enterprise, sifflais-je, furieuse. Nous n'avons plus de boucliers, plus rien pour y résister. On va tous y rester.

Scotty me remplaça auprès de Carol et on se dépêcha de la conduire à l'infirmerie, nous retenant aux murs afin de parvenir à marcher.

A chaque nouvel impact qui se succédait, je me disais que le vaisseau allait exploser, mais nous étions toujours en vie.

A tout l'équipage ! lança Spock dans l'interphone. Explosion de proximité imminente.

Quelle explosion ? demanda Scotty.

Il a armé les torpilles, répondit Jim et j'appuyais sur le bouton ouvrant l'infirmerie.

Au même moment, l'Enterprise lutta contre la pression et je compris que l'U.S.S Vengeance avait explosé.

Carol poussa un cri quand son pied heurta le sol et on entra à l'intérieur de l'infirmerie.

Bones ! appela Scotty.

Infirmière, lança Bones et l'une de mes collègues se précipita, suivie de Nyota qui était présente dans l'infirmerie. Content de vous revoir.

Tu as aidé Spock pour les torpilles ? questionna Jim.

Et comment ! s'exclama Bones.

Ces gens sont morts, souffla Jim mais je n'éprouvais aucune émotion en ce qui me concernait.

Spock n'est pas froid à ce point, rectifia Bones. L'équipage de Khan est ici. 72 bâtons de glace humains, bien rangés dans leur cryo-tube.

L'enfoiré, lâcha Jim et je laissais échapper un sourire.

A ce moment-là, les lumières de l'Enterprise s'éteignirent et un grand silence s'abattit sur le vaisseau. On s'immobilisa tous, se jetant des coups d'œil. Juste avant que le vaisseau ne bascule sur le côté.

Accrochez-vous ! hurla Jim.

Agissant en même temps que mon frère et Scotty, je me rattrapais de justesse à un lit, mes pieds glissèrent sur le sol avant que je ne me retrouve totalement pendue dans le vide. Des cris retentirent autour de moi, et je tentais en vain de rattraper quelqu'un qui passa juste à côté de moi.

L'alimentation du vaisseau lâche, criais-je alors que l'Enterprise se remettait droit.

Sanglez les patients ! ordonna Bones et je me jetais en avant pour atteindre un lit, appuyant sur le mécanisme de ceinture.

A tous les ponts, retentit la voix de Spock. En tant que capitaine suppléant, j'ordonne l'évacuation. Je resterai à bord pour gérer les systèmes de secours.

Evacuation générale en cours ! lança la voix enregistrée du vaisseau.

Je ne laisserais pas Spock ici, sifflais-je en rejoignant Jim et Scotty.

On doit gagner l'ingénierie, lança Scotty. Remettre le générateur en marche pour que l'Enterprise puisse se relever.

Les suivant dans le couloir, on se mit à courir en direction de l'ingénierie tant bien que mal.

A tous les ponts, évacuation en cours.

Je me suis absenté une seule journée ! s'exclama Scotty derrière nous alors que le vaisseau se mettait de nouveau à chavirer.

Glissant sur le sol, je ne parvins pas à trouver de prise autour de moi et un cri m'échappa. Jim referma ses doigts autour de mon poignet juste à temps avant que je ne prenne de la vitesse. Pendue à nouveau dans le vide, je tentais de me rattraper à quelque chose.

Scotty me tendit les doigts, et je les attrapais, ce qui me permit de me hisser de son côté et d'éviter de trop peser sur mon frère qui se tenait également de façon précaire à la barre.

Malgré la précarité et la dangerosité de la situation, j'avais parfaitement conscience de la présence du corps de Scotty contre le mien. De ses doigts autour des miens. Et de son souffle sur mes cheveux.

A tous les ponts, évacuation en cours. Allez au hangar de départ et gagnez les navettes.

Pour pouvoir évacuer, lança Scotty. On doit rétablir l'alim et stabiliser ce fichu vaisseau !

C'est faisable ? demanda Jim.

Seulement en ingénierie, répondit Scotty. On doit accéder au réacteur.

Le vaisseau se remit droit et je me relevai, un peu chancelante entre mon mal de tête et les changements gravitationnels du vaisseau.

Jim, Anna, souffla Scotty et je lui jetais un coup d'œil avant de lever les yeux vers le haut du vaisseau où d'autres membres de l'équipage étaient suspendus dans le vide.

On doit rétablir l'alim ! clama Jim. On y va !

On se remit à courir dans les couloirs, tentant de gagner l'ingénierie avant que le vaisseau ne chavire de nouveau. Peine perdue, il se mit à nouveau à tourner et on se retrouva à marcher sur l'un des murs.

On doit sauter ! cria Jim devant moi.

Quoi ? demanda Scotty derrière.

Sautez !

J'obéis sans même réfléchir et je ne regardais pas en bas.

On finit par parvenir à l'ingénierie, mais alors qu'on courait sur les escaliers, le vaisseau chavira de nouveau.

Passant par-dessus les barres de sécurité, je m'agrippais à ce que je trouvais. Jusqu'à ce qu'une énorme bombonne ne tombe sur notre escalier.

Attention ! cria Jim au moment où elle nous heurta.

Volant dans les airs, je parvins à me rattraper à l'une des barres, tout comme mon frère et Scotty. Pendue dans le vide, j'ouvris des yeux horrifiés en constatant que je ne voyais que du vide en-dessous de nous.

Tenez bon ! cria Jim.

Je ne peux pas ! répondit Scotty et je tournais les yeux vers lui qui se trouvait entre mon frère et moi.

Impuissante, je vis ses doigts glisser le long de la barre, et avec effroi, je le vis lâcher.

Non, clamais-je mais mon frère parvint à le rattraper de justesse.

Je vis Jim grimacer, et Scotty tenta de se remonter seul, mais il n'avait aucune prise pour le faire. Voyant les doigts de Jim glisser de la barre qui les retenait tous les deux, je me hissais à la force de mes bras pour regagner la sécurité.

Tu n'y arriveras pas Anna, souffla Jim qui tentait de ne pas lâcher. Nous sommes bien trop lourds pour toi seule. Ne te mets pas en danger…

Ferme-là, sifflais-je en voulant attraper son poignet, mais quelqu'un passa rapidement devant moi avant de rattraper Jim qui lâchait.

Je vous tiens Capitaine, lança la voix aux accents russe de Tchekov.

Le soulagement m'étreignit, à deux, on y parviendrait sans doute.

Le vaisseau décida à cet instant de nous filer un coup de main, car il se remit droit, permettant à Jim d'attraper de nouveau une barre, ainsi qu'à Scotty.

Je tendis les doigts à Scotty qui m'adressa un regard septique.

Je suis bien plus lourd que toi, me fit-il remarquer.

Cela ne m'empêche pas de t'aider, répondis-je et il abdiqua en attrapant ma main.

J'avais déjà dû seconder Jim quand ce dernier avait bu un peu trop des années auparavant, et Scotty était moins lourd. Il n'en restait pas moins qu'il l'était trop pour que je puisse le remonter seule.

Fort heureusement, Tchekov et Jim, qui était parvenu à remonter sur la passerelle, prirent ma place, et Scotty fut hissé à nos côtés.

Merci, souffla-t-il.

Il faut continuer, clama Jim en attrapant mon bras pour me forcer à le suivre.

On atteignit l'ingénierie où régnait un beau bordel. Les portes sur ma droite étaient verrouillées, et je devinais que derrière elle, il n'y avait rien. Sauf l'espace.

Si le réacteur démarre, lança Scotty alors qu'on se frayait un chemin entre les appareils. Il faudra dériver l'alim.

Il a raison, répondit Tchekov.

Comment ça ? demanda Jim.

Ça doit se faire manuellement, expliqua rapidement Scotty. Il y a une manette…

Derrière le déflecteur, coupa Tchekov. J'y vais !

En avant ! ordonna Jim.

On se remit à courir en direction du réacteur.

En passant dans le hangar des navettes, je m'immobilisais quelques secondes et regardais avec effroi ces dernières s'exploser sur le sol. Scotty me heurta, mais même le bras qu'il passa autour de ma taille pour m'empêcher de tomber sous le choc ne me fit pas réagir… Personne dans l'Enterprise ne pourrait quitter le vaisseau. Si on ne rétablissait pas l'alimentation, tout le monde y resterait.

On accélère ! ordonna Jim et je pivotais sur mes talons pour le suivre, tentant de me frayer un chemin entre tout l'équipage qui courrait dans tous les sens.

On finit par parvenir au niveau du réacteur, mais tout clignotait rouge et l'ordinateur confirma mon pressentiment.

Réacteur désaligné, clama-t-il. Danger !

Oh non, s'exclama Scotty. Les pôles sont désalignés, on ne peut pas rétablir l'alim.

Il se redressa et se tourna vers nous, le visage livide.

Le vaisseau est mort, termina-t-il. Fichu.

Jetant un coup d'œil derrière moi, l'évidence se fraya un chemin dans mon esprit. Une évidence fatale.

Non, refusa Jim. Pas encore.

Il se précipita vers le réacteur, se heurtant à une porte vitrée. Evitant de justesse Scotty qui essaya de me retenir, je rejoignis mon frère, mais je ne tentais pas d'ouvrir la porte. Je savais ce que cela impliquerait pour toute personne pénétrant à l'intérieur. Je savais aussi qu'elle restait notre seule issue. La seule issue pour tout l'équipage. Scotty inclus.

Attendez ! clama Scotty en nous rejoignant. Si on entre là-dedans, on mourra ! Les radiations nous tueront. Ecoutez-moi ! Vous faites quoi ?

J'ouvre la porte ! répondit Jim.

Elle est là pour nous protéger, clama Scotty. On grillera dès qu'on entrera.

Jim me jeta un bref regard et nos yeux se croisèrent.

On savait tous les deux ce qui allait suivre. Il ne me laisserait pas y aller, et je ne le laisserais pas faire non plus. Il ne pourrait pas assommer deux personnes en même temps.

En revanche, Scotty n'avait rien à faire ici.

Je vis ce dernier tourner les yeux vers moi au moment où je hochais la tête. Une lueur de compréhension s'alluma dans son regard, mais Jim ne lui laissa pas le temps de réagir.

Vous n'entrerez pas, souffla Jim avant de pivoter sur ses talons et d'envoyer son poing dans la figure de Scotty qui s'effondra sur le sol, inerte. Aide-moi à le porter jusqu'à un siège.

J'attrapais les jambes de Scotty et on l'installa devant l'ordinateur qu'on venait de quitter. Grimaçant devant l'hématome qui se dessinait sous son arcade sourcilière, je ne pu m'empêcher de passer mes doigts sur sa joue.

Avec ironie, je constatais que c'était la première fois que je le touchais ainsi. Ce serait aussi la dernière.

Je t'aime, murmurais-je.

Jetant un dernier regard à son visage, j'ignorais la peur qui me broyait les entrailles et je suivis mon frère.

Tu es sûre de toi ? demanda-t-il avant de déverrouiller la porte. Tu as Scotty… tu pourrais…

Je suis officier-en-tiers, répondis-je. C'est mon rôle à moi aussi. Je savais les risques en m'engageant. Et je ne te laisserais pas seul là-dedans.

Il me serra brièvement dans ses bras avant de déverrouiller la porte.

On se dépêcha de s'engouffrer à l'intérieur.

Si au départ j'eu simplement un vague sentiment de claustrophobie, je sentis peu à peu ma respiration se ralentir. Les radiations étaient tellement violentes qu'elles nous attaquaient déjà. Nous n'étions même pas encore parvenu au réacteur.

Avec difficulté, on se fraya un chemin, et j'ignorais combien de temps on mit pour le faire. Deux minutes, deux heures, deux jours, je commençais déjà ne plus savoir mon nom.

On finit par atteindre le centre, mais je n'eu pas le temps de m'arrêter sur cet exploit. On se dépêcha de grimper pour gagner le noyau.

Mes forces diminuaient de plus en plus, et me hisser le long des câbles pour atteindre le cœur du réacteur me demandait un effort considérable.

On avançait en silence, et en parvenant tout en hauteur, on se concerta à peine pour donner des coups afin d'essayer de remettre les deux connexions ensemble. Agrippée à la barre au-dessus de moi, je mettais mes dernières forces à contribution. Raison pour laquelle je volais dans les airs quand les deux pôles se remirent en connexion.

Heurtant le mur, j'entendis vaguement un truc craqué, mais je ne ressentis aucune douleur. Seuls mes poumons qui me brûlaient comptaient. Ma tête me donnait l'impression d'être sur le point d'exploser, ma respiration se faisait de plus en plus difficile et peu utile vu l'air que je respirais, ma peau me brûlait.

Anna, souffla Jim en se hissant jusqu'à moi. On doit sortir d'ici.

Je devais certainement avoir la même tête que lui, et je ne nous enviais pas.

Il était plus que livide, d'une pâleur mortuaire. Ses lèvres étaient colorées d'un bleu intense.

On est morts Jim, répondis-je quand il me poussa en avant. Ici ou ailleurs…

Viens, murmura-t-il. S'il-te-plaît…

J'obéis douloureusement, me hissant dans le conduit menant à la sortie lentement. Chaque geste, chaque effort était douloureux. Inhumain.

Je ne su pas comment je parvins à sortir derrière Jim dans la salle de décontamination, et je remarquais à peine Spock et Scotty de l'autre côté de la porte.

Suffoquant pour tenter de reprendre une respiration qui n'allait pas tarder à ne plus être utile, je grimaçais en m'effondrant contre le mur, la main contre ma tête.

Il était étonnant qu'elle n'est pas encore explosée d'ailleurs.

Anna, entendis-je Scotty souffler avant qu'il ne pose sa main sur la vitre.

J'étais trop faible pour en faire de même, et je me contentais de relever les yeux pour croiser son regard.

Je suis désolée, murmurais-je à bout de force. Désolée de ne pas t'avoir… écouté.

Notre vaisseau ? demanda Jim quand ma tête tapa contre le mur derrière moi, trop faible que j'étais pour la retenir.

Il est hors de danger, confirma Spock et le soulagement m'étreignit pendant quelques secondes.

On ne mourrait pas pour rien.

Vous avez sauvé l'équipage, reprit Spock.

Vous lui avez donné ce qu'il voulait pour le piéger, répondit Jim en souriant douloureusement. C'était malin.

C'est ce que vous auriez fait, répondit Spock que je voyais pour la première fois au bord des larmes.

Et ça…, murmura Jim. C'est ce que vous auriez fait. C'était logique.

Le silence s'installa deux secondes, et je me forçais à reposer les yeux sur Scotty. Tout comme Spock, il était au bord des larmes, mais il ne pleurait pas. Son regard était déchiré de douleur, et je m'en voulu de lui imposer cela. Si seulement je l'avais écouté.

J'ai peur, lança Jim et je fermais les yeux, fatiguée. Aidez-moi… Comment ne rien ressentir ?

Je ne sais pas, murmura Spock. En cet instant, j'en suis incapable.

Je rouvris les yeux, douloureusement. Je n'avais plus la force de bouger, je voulais juste dormir.

Vous savez pourquoi je vous ai sauvé ? demanda Jim. Pourquoi je suis revenu ?

Parce que vous êtes mon ami, murmura Spock, les larmes coulant finalement sur ses joues.

Jim hocha la tête difficilement et posa sa main sur la vitre qui nous séparaient de Spock et Scotty. Spock en fit de même avec le salut Vulcain, ses yeux passant de mon frère à moi. Je n'avais plus la force de faire quoi que ce soit. Je me contentais seulement de sourire faiblement.

Je t'aime, murmura Scotty et je posais les yeux sur lui. Je t'ai toujours aimé.

Je t'aime… aussi, répondis-je, la gorge sèche. J'aurais dû t'écouter. Je suis désolée…

Je me sentis m'endormir, sauf qu'il s'agissait d'un sommeil sans retour. La dernière chose que je perçus fut le regard horrifié de Scotty, avant que je ne sente mon corps heurter le sol. Je fixais le plafond, juste avant que tout autour de moi ne s'efface. Je sentis la douleur s'éloigner. Je sentis vaguement une pression sur ma main. Puis ce fut le noir.