Neuvième, The Dueling Club
Résumé : Nous connaissons tous cette histoire : celle où Gellert Grindelwald est vaincu par Albus Dumbledore en 1945. Mais que se serait-il passé dans un univers parallèle où Harry Potter serait né à cette époque ? Grindelwald est défait en 1943 par Harry Potter, et Tom Jedusor, cet étudiant brillant, promis à un sombre avenir, se retrouve intrigué, fasciné… amoureux. UA HP/TJ.
Rating : M pour plus de sûreté
Couple principal : Tom Jedusor/Harry Potter
Couple secondaire : Albus Dumbledore/Gellert Grindelwald
Nombre et longueur des chapitres : Environ 20 chapitres, 9 sont déjà publiés. Les chapitres font environ 6 000 mots chacun.
Publication : hebdomadaire !
Quelques explications : Deuxième partie de l'histoire The Dueling Club. Harry Potter et Tom Jedusor sont nés à la même époque. Gellert Grindelwald a tué les parents de Harry lorsqu'il était bébé. Harry grandit en France, où il mène une vie assez similaire à celle décrite dans le canon chez sa tante et son oncle, jusqu'à ce que le Seigneur des Ténèbres vienne le chercher. Son ennemi n'est alors pas Lord Voldemort mais Gellert Grindelwald.
Réponses aux reviews !
Saylen : J'étais trop contente d'écrire un chapitre du point de vue de Harry moi aussi ! Ça change de Tom ! Tom est déjà assez protecteur alors qu'il n'y a aucun danger à Poudlard, donc on peut imaginer à quel point il le serait face à un homme qui a blessé Harry toute sa vie. Oui, Harry lui-même n'a pas compris, mais il était jaloux ! Finalement, il n'est pas complètement insensible aux tentatives de notre cher Serpentard. Tom doit profiter des vacances, c'est sûr, car Harry compte vraiment partir après celles-ci ! Donc c'est un peu sa seule chance de le convaincre de rester avec lui. Et moi, j'adore l'écrire et j'attends avec autant d'impatience ta review sur le prochain chapitre !
L-u-f-f-y-2 : Bonjour ! Merci à toi ! Oui, c'était sympa de plonger dans l'esprit de Harry. Tom va-t-il se laisser faire par Gellert, comme le craint Harry, ou au contraire, s'y opposer fermement ? Tu as raison, Tom est déjà très dévoué à Harry. Je te laisse découvrir le nouveau chapitre, de retour sur le point de vue de Tom !
stormtrooper2 : Coucou ! Merci pour cette review ! Oui, on se rend compte à quel point Harry s'est renfermé sur lui-même dans ce chapitre consacré à ses pensées. Mais Tom va devoir le convaincre, et n'est-ce pas ce qu'on attend de lui ?
Lady Zalia : Trop contente d'avoir été ton divertissement pendant la pause déjeuner ! XD Et oui, Tom et Gellert vont se rencontrer (ce qui, si on me demande mon avis, n'est pas une bonne idée, car il s'agit quand même de deux des pires criminels que le monde sorcier ait connus. Donc peu importe qu'ils s'entendent ou non, c'est effrayant de les savoir dans la même pièce !) C'est amusant que tu te poses tant de questions sur Tom : sera-t-il effrayé, manipulé ? Mais tu ne te demandes rien sur le comportement de Gellert ! Que peut-il bien penser de Tom lorsqu'il le rencontrera ? Je te laisse découvrir leurs interactions (s'ils en ont ;) et me dire ce que tu en penses (trop hâte d'avoir ton avis !) Oui, Harry n'est pas totalement aveugle, mais je te rassure, il ne voit pas tous les signaux que Tom lui envoie et sous-estime grandement les sentiments de son protégé ! Il pense que ce n'est qu'un béguin adolescent, causé soit par l'adolescence, soit par leur lien. Harry a grandi dans un environnement d'une extrême violence, il n'a pas les codes pour comprendre ce que signifie "maîtriser un Feudeymon très tôt" tout simplement parce que Gellert le lui a sans doute appris très jeune. En gros, Harry idéalise un peu l'innocence de Tom, car lui-même aurait aimé grandir à Poudlard et se dit qu'il aurait été plus heureux ainsi. Reconnaître que Tom n'a rien d'innocent serait difficile pour lui, car cela signifierait que même sans Gellert, sa vie aurait peut-être été très difficile. Harry ne veut pas accepter cela, il préfère tout mettre sur le dos de Gellert, qu'il déteste profondément. Mais à un moment ou à un autre, Tom va forcément déraper, et ce sera un choc pour Harry. Grindelwald va certainement remarquer quelque chose, et je doute qu'il apprécie l'idée que Tom aime Harry XD. Bien sûr, Tom a déjà transplané seul, mais Harry l'ignore, et c'est tout ce qui compte x). En termes de physique ou d'interprétation ? Ils ont tous deux joué dans des contextes très différents ! Pour incarner le mage noir séduisant, politique et dangereux, je dirais Johnny Depp ! Par contre, pour l'alchimie avec Albus, c'est Mads Mikkelsen qui l'emporte ! Deux acteurs différents, deux interprétations et tout autant de facettes du personnage à explorer ! Merci à toi ! En espérant que ce chapitre te plaise.
makiang4 : Oui ! Tu as raison, je ne suis pas gentille avec Harry, mais chez les auteurs de fanfics, c'est loin d'être rare. XD Ne t'en fais pas, il aura aussi des moments heureux, et c'est justement pour le mener dans cette direction que l'histoire se déroule.
Elvysoisgentil : Tu as commencé le chapitre précédent juste avant d'aller en cours ? C'est trop cool ! J'espère que tu as pu le finir en rentrant :) et qu'il t'a plu ! Bonne lecture de celui-ci !
Pheonix77 : Coucou ! Je suis très heureuse que tu aies tant aimé ce chapitre sur Harry ! Tu as raison, découvrir Harry pour la première fois, c'est un peu comme clôturer la première partie, même si les vacances d'été commencent. Oui, Harry voit un peu trop Tom comme "innocent", mais pour sa défense, Tom est aussi un manipulateur et il ne montre pas à Harry qu'il a un côté sombre. Que se passerait-il si Harry découvrait que Tom utilise la magie noire, voire pire ? Ce nouveau chapitre revient à Tom comme narrateur, et tu vas pouvoir découvrir ses réactions en arrivant chez les Dumbledore ! Tes hypothèses sont intéressantes ; je te laisse voir laquelle est la plus probable en lisant le nouveau chapitre ! Bonne lecture !
l'ombre des larmes : Très heureuse de te revoir pour cette fin de partie et ravie que tu aies aimé ! Effectivement, le concept des âmes-sœurs refait surface, même si ni Tom ni Harry ne comprennent ce que cela signifie. Hâte d'avoir ton avis sur ce chapitre où les vacances commencent du point de vue de Tom !
Nebelsue : Bienvenue ! Et merci beaucoup ! J'espère que tu poursuivras ta lecture. N'hésite pas à laisser ton avis de temps en temps.
- Retour au point de vue de Tom, narrateur de cette histoire -
Les épis de blé montent jusqu'à mes genoux comme une mer dorée. C'est la première fois que je marche dans un champ de blé. Les tiges s'accrochent à mon pantalon, griffent ma peau. Je regrette de ne pas pouvoir utiliser la magie pendant les vacances ; chaque brin qui s'enroule autour de mes chevilles semble me narguer un peu plus.
Potter, lui, n'a pas ce problème. Peut-être inconsciemment, il use de ce pouvoir naturel qui émane de lui. Les épis se courbent et s'écartent devant son passage, s'ouvrant pour lui offrir un chemin presque dévot, avant de se refermer derrière lui comme une marée apaisée. Ils l'accueillent, et leur déférence silencieuse rend encore plus vif le contraste avec leur hostilité envers moi.
Je fixe son dos sans ciller, mes yeux accrochés à sa veste en tweed que je tenais encore il y a un instant. Mes doigts me brûlent encore du contact chaud, rassurant, de sa présence. Mon cœur bat trop vite, encore secoué par l'étreinte que nous venons de partager
J'avais déjà expérimenté le transplanage, seul et simplement pour m'entraîner au cas où il faille m'échapper de l'orphelinat en urgence, combien même la magie hors de Poudlard est interdite aux sorciers de premier cycle. Toutefois, c'est la première fois que je le fais en escortant un autre sorcier. C'est... différent. Ce n'est pas ma magie qui a déplacé mon corps mais la sienne.
Harry pensait que je trouverais cela désagréable, mais il se trompait. Jamais je n'ai été aussi heureux de dépendre de quelqu'un d'autre, de ressentir ce lien encore fragile qui nous unit, ne serait-ce que pour traverser l'espace.
Cependant, le transplanage reste quelque chose de déroutant, et je lève les yeux vers le ciel, d'un bleu aveuglant, strié de nuages blancs suspendus au-dessus de nous.
Je suis en vacances, un mot que je m'efforce d'apprivoiser. Le poids familier de ma valise pend dans ma main : je suis là pour deux mois. Deux mois loin du tumulte habituel, avec pour seule certitude la compagnie de Harry. Une excitation difficile à contenir monte en moi, et je pense que je suis joyeux. L'idée de passer tout un été à ses côtés a un goût de liberté que je ne sais pas comment appréhender.
Je veux savourer chaque instant, chaque geste, chaque regard. Cet été, nous n'aurons rien d'autre à faire que de passer du temps ensemble, sans la moindre distraction ou contrainte. J'ai bien quelques devoirs de vacances pour Poudlard, mais ils ne devraient pas me prendre plus d'une journée. Et peut-être pourrais-je les faire en sa compagnie… Il serait facile de lui demander son aide. Je n'en ai pas besoin, mais je sais qu'il ne pourrait pas me le refuser. L'idée même de l'imaginer, penché sur mes parchemins, patient et attentif, fait naître un sourire que je m'efforce de dissimuler.
Il se retourne vers moi, surveillant ma progression avec attention. Il a dû remarquer les épis de blé accrochés à mes vêtements, car, d'un simple regard, il les libère, et ceux qui suivent s'écartent d'eux-mêmes, m'offrant enfin un chemin dégagé. Nous finissons par rejoindre un sentier de terre qui serpente au milieu des champs, semblant ne mener nulle part. Mais en haut de la colline, alors que je me rapproche de lui, Harry se tourne et m'explique :
— Albus a sûrement eu le temps de t'ajouter parmi les personnes autorisées à entrer, maintenant. Tu n'as pas le droit d'utiliser la magie pendant les vacances, mais tu n'en auras pas besoin. Concentre-toi simplement sur cet espace vide là-bas, sur la colline… la maison devrait apparaître devant tes yeux.
Je détourne mon regard de lui, avec une certaine réticence, pour me concentrer sur le vide qu'il me désigne.
Un bref instant, rien ne bouge, mais soudain, les contours d'une maison émergent du néant. C'est une bâtisse imposante, en pierre, un peu moins vaste que l'orphelinat où j'ai grandi, mais bien plus chaleureuse. Les murs, patinés par le temps, oscillent entre le gris et l'ocre selon la lumière, et sont recouverts de lierre et de vignes grimpantes qui se faufilent jusque sous les fenêtres, dessinant des arabesques verdoyantes et irrégulières.
Le toit, légèrement pentu, est couvert d'ardoises. Il a un air usé, comme s'il avait affronté des années de pluies, de vents et de soleil sans jamais céder. Quelques cheminées s'élèvent en angles improbables, et de la mousse s'accumule dans les coins. Des fenêtres à petits carreaux aux reflets éclatants, encadrées de boiseries, ponctuent la façade. De larges marches en pierre, irrégulières et usées par des années de passages, mènent à une porte en bois massif, sculptée de motifs entrelacés.
Je ne sais pas pourquoi, mais je n'avais pas imaginé la maison des Dumbledore ainsi. Je la voyais plus austère, sans doute par crainte d'y retrouver une atmosphère rappelant celle de l'orphelinat. Pourtant, rien ici ne m'y fait penser et, connaissant Albus Dumbledore, j'aurais dû me douter qu'il ne vivait pas dans un lieu froid et lugubre. C'est une véritable maison de campagne, comme celles des livres pour enfants — ces histoires où des personnes de la ville partent passer l'été chez une amie de la famille, quelque part, loin du bruit et de l'agitation londonienne.
Potter avance vers la maison, et je ne peux m'empêcher de remarquer combien sa silhouette se détache du décor avec brutalité. Ce ne sont pas ses vêtements qui posent problème – ils semblent même parfaitement adaptés à ce cadre paisible. Mais sa démarche, son maintien rigide, presque militaire, et cette manière qu'il a de se tendre à mesure qu'il approche de la porte d'entrée. Il y a quelque chose d'incongru dans cette tension, une sensation désagréable qui semble trahir une part de lui qui ne se sent pas à sa place ici, et qui lui est douloureuse. Comme si ce lieu l'acceptait, mais que lui-même se refusait cette appartenance.
Il devient une sorte d'anomalie dans le paysage, un contraste inconfortable, et pourtant je ne peux détourner le regard. Il est cette tâche dans le décor qui retient toute mon attention et me fascine.
Le paysage n'en ressort que plus frappant.
J'imagine que ma présence, comme la sienne, n'a rien à faire dans ce décor, et le fait qu'il paraisse aussi étranger que moi à cet environnement me plaît.
Lui et moi sommes pareils.
Il se fige comme une statue de marbre devant la porte, et je le rejoins. Son profil évoque celui d'un homme qui s'apprête à affronter la mort, et je ne me rends compte que maintenant que l'amant de Dumbledore doit être un homme particulièrement effrayant pour que Potter, lui qui a si bon caractère, le craigne et le haïsse d'une manière aussi évidente.
Harry ne fait aucun geste pour ouvrir la porte devant nous, et il n'en a pas besoin, puisque celle-ci s'ouvre finalement sur un homme d'une carrure impressionnante, muni de béquilles. La première chose que je remarque, c'est qu'il lui manque une jambe. La deuxième, et la plus déconcertante, c'est qu'il s'agit de Gellert Grindelwald en personne.
Le Seigneur des Ténèbres se tient devant moi, en chair et en os, et je peux voir, à l'expression de son visage, qu'il ne s'agit cette fois-ci pas d'un épouvantard. Il est là, et malgré son handicap, il impose naturellement le respect. Ses cheveux blonds, presque argentés, tombent en désordre sur son front, et ses yeux vairons sont fixés sur Potter. Son visage, à la fois séduisant et sinistre, est marqué par les années, et un sourire joue sur ses lèvres alors qu'il dévore Harry du regard.
Il n'est pas censé être ici. Gellert Grindelwald est mort. Les journaux du monde entier l'ont confirmé. Harry est celui qui est censé l'avoir tué. Il ne peut pas être là.
Mon esprit refuse cette réalité. Pourtant, il ouvre la bouche avec un sourire carnassier, et presque immédiatement, la magie de Harry se relâche et rugit comme une bête furieuse autour de nous. Il n'y a rien de plus réel qu'elle.
— Albus n'était pas d'accord pour que je t'accueille à l'entrée, mais qui d'autre qu'un père pour accueillir son fils ? Même si celui-ci se vante d'avoir commis un parricide devant le monde entier.
Je peine à respirer, la magie de Harry intoxiquant mes poumons, mais je parviens à mettre bout à bout les morceaux du puzzle et à comprendre la situation.
Potter n'a jamais tué le Seigneur des Ténèbres ; il a fait croire à sa mort. Je ne sais pas pourquoi ni comment, mais il l'a fait : Gellert Grindelwald est toujours en vie, et je suis presque certain que l'amant de Dumbledore, celui avec lequel Harry ne s'entend pas, c'est lui.
Aussi dément et incohérent que cela puisse paraître, l'amant de Dumbledore est Gellert Grindelwald.
Je me retrouve face au Seigneur des Ténèbres, et l'amant de celui-ci se trouve être mon professeur de Métamorphose, tandis que son successeur, qui l'a trahi et enfermé ici sous un Fidelitas, est l'homme que j'aime.
Harry ne se laisse pas submerger par sa haine évidente. En moins d'une seconde, sa magie retourne à sa place, complètement maîtrisée et contrôlée. Il lâche une expiration qui me paraît douloureuse et parvient à faire un pas en avant. Son expression est d'une neutralité effrayante lorsqu'il rétorque.
— Je ne suis pas ton fils. Pousse-toi, j'aimerais entrer.
Grindelwald ne semble pas se vexer de la réaction de son prétendu fils ; au contraire, il sourit davantage et lève un sourcil en répliquant.
— Sinon quoi, gamin ?
Je sens Harry frémir de rage, mais il se contente de répondre froidement.
— Sinon je t'arrache la jambe que je t'ai laissée et je te laisse te vider de ton sang sur le pas de la porte.
La violence de sa réponse ne me surprend guère. Potter a peut-être prononcé ces mots d'un ton calme, mais je perçois qu'il est à deux doigts de perdre son sang-froid. Ses mains tremblent. Il suffirait d'une provocation de plus pour que, d'un simple geste de sa baguette, il passe à l'acte.
Cependant, Grindelwald semble parfaitement à l'aise. Au contraire, la réaction de Harry l'amuse visiblement ; il savoure sa réponse un instant avant de se détourner de la porte. Avec une révérence exagérée, il se penche et déclare d'une voix feutrée :
— Tant de violence pour nos retrouvailles ! Dire que j'attendais ce moment depuis des semaines. Je n'ai pas encore eu l'occasion de te féliciter pour le massacre de mes partisans après mon arrestation. Un travail remarquable. Éliminer tes propres frères et sœurs d'armes... tu as vraiment dépassé mes attentes.
Je vois le visage de Potter se tordre dans une expression de rage, mais il se contente de passer à côté de Grindelwald et d'entrer dans la maison sans un mot de plus.
Le Seigneur des Ténèbres le couve du regard un instant avant de se tourner vers moi. Il m'adresse un coup d'œil curieux alors que je reste désespérément figé devant la porte ouverte. Puis, il fronce les sourcils, ses yeux se posant sur mon uniforme.
Un éclat de compréhension traverse son expression, et il se met à sourire. Son accent russe me force à me concentrer pour comprendre ses paroles.
— Albus m'a informé hier soir que Harry viendrait avec un ami, mais je ne m'attendais pas à ce qu'il s'agisse d'un élève. J'aurais dû m'en douter : ce gamin n'a jamais réussi à se faire un seul ami. Il a toujours été très asocial, mais cela ne m'explique pas ce que tu fais là, petit ?
Je mentirais en disant qu'il n'est pas intimidant, mais cela fait plusieurs semaines que je côtoie Harry Potter, alors il n'y a rien chez lui que je n'aie déjà deviné dans l'attitude de celui qu'il prétend avoir pour fils. Il a raison, je ne suis pas un ami de Harry, je suis bien plus que cela.
C'est ce qui me permet de lui répondre, sans même frémir.
— Je suis Tom Jedusor.
Ma réponse semble le surprendre ; il plisse les yeux mais continue de sourire.
— Tu es, pas tu t'appelles. Intéressant. Peu de personnes sont. Enchanté de faire ta connaissance, Tom Jedusor, même si ton nom ne m'explique pas ce que tu fais là.
Potter ressurgit de la maison, comme s'il s'était rendu compte qu'il avait oublié quelque chose d'important derrière lui, et se place à côté de Grindelwald. Il prononce alors cette phrase qui me permet d'avancer sereinement vers lui.
— Il est avec moi.
Cette déclaration ne semble qu'éveiller davantage l'intérêt du Seigneur des Ténèbres pour moi. Harry place un bras protecteur autour de mes épaules et m'invite à me soustraire au regard de Grindelwald pour avancer dans l'entrée.
Il me guide jusqu'à un vaste salon baigné de lumière. Des meubles en bois clair sont disposés de manière à créer un espace accueillant, avec des fauteuils dépareillés aux couleurs criardes. Au centre, une table basse en verre repose sur un tapis épais, tandis qu'une cheminée imposante, éteinte, occupe tout un pan de mur adjacent au couloir d'entrée.
Le salon s'ouvre sur une salle à manger spacieuse, où une grande table en chêne est entourée de chaises tout aussi dépareillées et mal assorties que les fauteuils du salon. À l'arrière-plan, la cuisine laisse entrevoir le dos de Dumbledore, qui fait danser sa baguette au-dessus des fourneaux. L'arôme du thé en cours de préparation flotte dans l'air, contrastant avec la tension palpable de la pièce.
La scène est presque surréaliste, car Dumbledore semble totalement absorbé par sa tâche, indifférent au fait que le Seigneur des Ténèbres et Harry Potter paraissent à deux doigts de se jeter l'un sur l'autre.
Gellert Grindelwald nous suit, j'entends ses béquilles frapper le parquet en rythme.
Je ne sens pas sa présence ; en fait, je ne perçois aucune magie émaner de lui, comme s'il était cracmol. Je me demande si, en plus de lui avoir arraché une jambe, Harry ne lui a pas aussi retiré tous ses pouvoirs.
Potter s'approche d'un fauteuil et me dit, confirmant mes réflexions :
— Tu peux t'installer ici. Je vais prendre ta valise et la monter dans l'une des chambres. Excuse-moi pour le choc, j'aurais voulu te prévenir, mais je ne savais pas comment m'y prendre. Concernant Grindelwald, sens-toi libre de l'ignorer. Il ne peut rien te faire. Il est prétentieux et provocateur, mais surtout impuissant.
Puis, il disparaît. J'imagine qu'il aurait pu faire apparaître ma valise dans l'une des chambres sans même prononcer un mot, mais ses mains continuent de trahir son stress. Il a sans doute besoin de s'isoler un moment pour éviter de commettre un acte qu'il regretterait sûrement.
Le fauteuil où je m'assois est recouvert d'un coussin bordeaux, et ses accoudoirs en cuir bleu roi sont usés, éraflés par le temps. L'ensemble est hideux, mais il n'en est pas moins confortable. Bientôt, Albus Dumbledore entre, un plateau chargé de tasses de thé et de biscuits dans les mains. Grindelwald s'installe en face de moi, et malgré moi, mon regard glisse vers sa jambe manquante. Il a délaissé les robes de sorcier pour un costume, rendant cette absence d'autant plus... saisissante. C'est Dumbledore qui rompt le silence :
— Je m'occupe des présentations ? Gellert, je te présente Tom Jedusor, l'un des élèves les plus brillants que Poudlard ait connu. Tom, je te présente mon compagnon, Gellert Grindelwald, ex-Seigneur des Ténèbres.
L'aplomb avec lequel Albus fait les présentations me laisse muet de stupéfaction. Dumbledore a donc bien une relation amoureuse avec le Seigneur des Ténèbres. Quel hypocrite. Il me craignait à cause de mon don, il me craignait pour la puissance de ma magie et il couche avec le mage noir le plus meurtrier de ce siècle.
Je sens une rancœur se peindre sur mon visage et m'efforce de l'effacer soigneusement. Pourtant, un commentaire m'échappe alors que je récupère une tasse de thé.
— J'imagine que si cela venait à se savoir, votre carrière à Poudlard en serait compromise. À deux pas du poste de directeur… quel dommage ce serait.
Dumbledore se contente de froncer les sourcils, son regard empreint de désapprobation, tandis que Grindelwald me dévisage, un mélange de fureur et de curiosité dans les yeux. C'est lui qui finit par rétorquer, menaçant :
— Prends garde à tes paroles, petit. Elles pourraient être interprétées comme des menaces.
Je lui adresse un simple sourire par-dessus ma tasse de thé. Je n'ai aucune intention de mettre mes menaces à exécution. Harry en souffrirait, mais Albus Dumbledore est un homme injuste, capable de condamner un enfant encore innocent tout en protégeant un criminel. Il mérite mon mépris pour cela.
C'est alors qu'Harry réapparaît dans le salon, attirant tous les regards. Pris de court, il se fige un instant, jusqu'à ce que Grindelwald lui lance, avec une ironie mordante :
— Tu as l'air en forme. Je pensais que tu t'ennuierais dans ce rôle de professeur à Poudlard... me serais-je trompé ?
Potter ne daigne même pas lever les yeux, suivant son propre conseil : ignorer Grindelwald. Il est le seul à pouvoir ainsi dédaigner la présence d'un Seigneur des Ténèbres.
Le Seigneur des Ténèbres semble d'ailleurs habitué à cette indifférence ; loin d'en être offensé, il interprète l'attitude de Harry comme une réponse non verbale et en tire ses propres conclusions.
— Je vois. Alors j'avais raison, cela ne t'a pas plu. Pourtant, tu n'as pas l'air aussi déçu que je l'aurais pensé. Se serait-il passé quelque chose à l'école dont je n'ai pas été mis au courant ?
Il pose cette question à Albus, qui lui tend un sablé avant de s'asseoir pour répondre :
— Pas du tout. Pour être tout à fait franc, Harry a eu beaucoup de succès comme professeur de duels, mais il semble qu'il ne veuille pas poursuivre une carrière dans l'enseignement. Nous avons convenu qu'il prendrait l'été pour y réfléchir avant de s'engager dans une autre voie.
Grindelwald paraît méditer les paroles de Dumbledore un instant, puis reporte son attention sur Harry, qui s'est installé dans le fauteuil le plus éloigné de lui, donc le plus proche du mien. Il n'a ni pris de thé ni de biscuit, et je me sens obligé de lui proposer, dans une tentative pour le détendre :
— Vous ne voulez pas boire quelque chose ?
Il cligne des yeux et me regarde comme si j'étais une anomalie dans son propre salon — ce que je suis sûrement — avant de m'adresser un sourire hésitant.
— Tu peux me tutoyer maintenant. Nous ne sommes plus à Poudlard, et comme Albus vient de le souligner, je ne compte pas reprendre le poste de professeur. Alors, je suppose que le tutoiement serait plus approprié. Après tout, on a presque le même âge.
Je sens à nouveau le regard de Grindelwald peser sur moi, et j'ai la nette impression qu'il cherche à percer le mystère de qui je suis et de ce que je fais ici. Mais il semble ne pas parvenir à une conclusion, ce qui le frustre visiblement au plus haut point.
La proposition de Harry de le tutoyer me fait sourire malgré moi, et je ne peux réprimer ni ma joie ni mon expression.
— Je n'osais pas te le proposer. Il me faudra un peu de temps pour m'y habituer, mais je suis d'accord pour qu'on se tutoie.
Évidemment, j'avais prévu de le lui proposer dès que l'occasion se présenterait, mais le fait que cela vienne de lui me plaît davantage encore. En réalité, je n'aurai aucun mal à m'y habituer, puisque je l'appelle déjà par son prénom dans l'intimité de mes pensées.
Potter acquiesce, et Albus fait flotter le plateau sous ses yeux jusqu'à ce qu'il se décide à prendre un biscuit au chocolat. J'imagine qu'il a un faible pour ce goût, puisqu'il choisit encore le chocolat, comme cette fois où nous étions descendus manger dans les cuisines de Poudlard.
Il mord dans le biscuit, puis ses yeux reviennent vers moi. Il me dévisage un instant, termine son biscuit et demande soudain :
— J'espère que ton séjour ici sera agréable malgré… la situation. N'hésite pas à me dire si tu souhaites faire quelque chose en particulier. Je ne sais pas vraiment ce que font les étudiants durant les vacances pour s'amuser, mais peut-être as-tu des idées ?
Les idées qui me traversent l'esprit sont, au mieux, indécentes, et, pour les autres, plus innocentes mais d'une nature également romantique. Je n'ai cependant pas le temps de les évoquer, car Grindelwald intervient dans ma conversation avec Harry.
— Dois-je en déduire que non seulement Albus ne m'a pas menti en affirmant que tu t'es fait un ami, mais qu'en plus celui-ci va passer tout l'été parmi nous ?
Je reste figé, encore sous le choc de la présence de Grindelwald. Peut-être est-ce la raison pour laquelle je n'éprouve pas encore cette haine viscérale que je devrais ressentir envers cet homme qui a tant blessé Harry.
Pourtant, un simple coup d'œil vers mon âme-sœur suffit pour me rappeler à quel point il en est responsable. Si Harry Potter a souffert le martyre durant des années, c'est à cause de cet homme. Il est son ennemi et par conséquent, le mien.
Je vois Potter se crisper, son visage traversé par une grimace fugace de douleur et de colère lorsqu'il fixe Grindelwald. Sa voix calme mais tendue trahit l'impatience qui le consume lorsqu'il déclare :
— Tom est avec moi. Si je passe l'été ici, il passe l'été ici. Si notre présence dérange, je trouverai sans peine un autre endroit où résider cet été.
Les yeux vairons de Grindelwald se plissent, glissant de Harry à moi. Il grince des dents avant de lancer, dans un anglais rugueux :
— Cet endroit est le seul que tu puisses encore appeler chez toi. Ce garçon n'est pas ton ami. Alors ce que je veux savoir, avant de perdre patience ; c'est ce qu'il représente pour toi et ce qu'il fait ici.
Harry se redresse, les mains crispées sur les accoudoirs de son fauteuil, tandis que le reste de son corps et même sa magie restent étrangement calmes. Sa réplique tombe, cinglante :
— Cela ne te regarde pas. J'invite qui je veux ici, et tu n'as pas à en connaître la raison.
Grindelwald se redresse à son tour, une lueur d'irritation perçant dans ses yeux. Il entame une tirade où certains mots, accentués par son phrasé rude, se perdent pour moi :
— Bien, maintenant tu oses me répondre ! Toi, qui gardais la tête basse, attendant ton heure, jouant le fils docile… Et maintenant que tu as obtenu ce que tu voulais, que tu t'es vengé, tu ne crains plus rien ? Tu crois vraiment que je n'ai plus aucun droit sur toi ? Je t'ai élevé, je t'ai nourri, je t'ai tout enseigné, et pour quoi ? Pour que tu me prennes en pitié ? Ne te méprends pas, Harry. Ton nom n'est Potter que sur le papier ; tu es un Grindelwald. Ты принадлежишь мне, и нет ничего такого, что ты имеешь право скрывать от меня!
La dernière phrase, prononcée en russe, m'échappe totalement. Mais à la fin de son discours, Grindelwald, debout, irradie de cette aura terrifiante qui avait dû être la sienne lorsqu'il possédait tous ses pouvoirs. Avant même de voir Harry se lever à son tour, je sens que la situation va dégénérer, et je reste figé, incapable de trouver quoi que ce soit pour les empêcher d'en venir aux mains, ou pire, aux maléfices.
Je n'ai finalement rien à faire, car c'est Albus Dumbledore qui se lève en silence, pose une main ferme sur l'épaule de Grindelwald et, sans même élever la voix, le somme calmement :
— Nous étions en train de prendre le thé. Veux-tu bien te rasseoir et te tenir convenablement ? Harry a parfaitement le droit de garder ses secrets et de prendre ses propres décisions. C'est un adulte, et il est libre de ramener qui il souhaite à la maison.
Grindelwald, bien que toujours menaçant, finit par céder. Il se rassied sans même utiliser ses béquilles pour se soutenir, et grogne :
— Bien sûr… et pendant ce temps, je devrais rester impassible face à un inconnu qui pourrait révéler le plus grand mensonge de ce siècle. Si ce gamin parle, je serai exécuté en place publique, et Harry - tout autant que toi - sera accusé de complicité et subira le même sort. Je ne fais pas une scène sans raison ; je connais juste votre manie de voir le bien partout, d'oublier qu'il existe des hommes prêts à tout pour un peu de pouvoir. Un pouvoir dont vous ne manquez pas.
J'ignore si c'est parce qu'il est parvenu à me faire perdre mon calme ou si je brûle seulement de le faire taire, mais je déclare tout à coup, avec froideur :
— À cause de votre guerre, je n'ai nulle part où aller cet été, et Harry a proposé de m'héberger. Est-ce que cela vous convient comme explication, ou dois-je ajouter le fait que je l'ai embrassé devant toute la classe pour démontrer à un camarade que j'ai parfaitement le droit d'être homosexuel ?
Je ne précise pas que Harry est mon âme-sœur, que nos baguettes sont jumelles et que je crève d'envie de l'embrasser encore. Ce que j'ai dit équivaut déjà à une déclaration ; le reste ne le regarde pas.
Le silence tombe comme un couperet. Gellert Grindelwald reste muet, pâlit, et son expression se tord de diverses émotions avant qu'il ne répète, visiblement dégoûté par l'idée :
— Vous vous êtes embrassés ?
Puis, comme s'il prenait soudain pleinement conscience de ce que ce que je viens de lui dire, il me demande d'une voix plus forte :
— Tu as embrassé MON FILS ?
Il l'a prononcé comme si j'avais agressé sexuellement Harry. Ce qui n'est pas tout à fait faux. Un éclat dangereux traverse son regard, et je l'entends marmonner quelques mots dans une langue étrangère — du français, peut-être — qui sonnent comme des menaces de mort. Il se serait sans doute jeté sur moi si Dumbledore ne lui avait pas saisi le bras à l'instant même. Albus pousse un profond soupir, puis nous lance un regard que je comprends sans mal : "Je savais que ça finirait ainsi, mais je n'aurais jamais cru que cela dégénérerait aussi vite."
Potter semble complètement déstabilisé ; son corps est secoué de tics nerveux, et tout en lui hurle qu'il n'a qu'une envie, s'enfuir et ne jamais revenir. Pourtant, il reste immobile, et comme je l'ai appris à ses côtés, il suffit parfois de lui donner un peu de temps.
Un temps pendant lequel Dumbledore et Gellert Grindelwald entament une discussion pour le moins animée, changeant de langue au moins quatre fois, ce qui me fait songer qu'il serait peut-être judicieux d'apprendre autre chose que l'anglais et le fourchelang dans un futur proche.
Finalement, Harry finit par couper court à la dispute d'un ton tranchant :
— Non, Tom n'est pas mon petit ami. Comme il l'a précisé, il m'a embrassé pour une raison totalement différente, et il n'y a rien eu d'autre entre nous. Je lui ai promis que je trouverais un moyen de le garder en sécurité cet été, et c'est tout ce qu'il y a à savoir. Maintenant que tout est clair, j'aimerais que vous cessiez de vous disputer devant lui, immé-diate-ment.
La magie de Harry se déchaîne et cloue les deux adultes au fond de leur siège, les emprisonnant dans des chaînes de puissance brute. L'effet est impressionnant, presque effrayant, une manifestation involontaire mais parfaite d'un sortilège Incarcerem. Une exécution impeccable – sans formule, sans geste.
Potter incline la tête, inspire profondément, et quand il relève les yeux vers moi, sa voix est calme et polie. Il ne tremble même plus.
— Nous ne sommes pas obligés de les écouter. Tu veux que je te montre ta chambre ? La maison n'est pas grande, mais je peux te faire visiter.
J'acquiesce et me lève pour le suivre. Alors que je me mets en mouvement, la voix froide du Seigneur des Ténèbres résonne à travers la pièce.
— Mon fils est peut-être aveugle, mais moi, je vois clair. Ta magie est semblable à la mienne, petit. Les gens comme toi et moi n'apportent que le malheur. Tu finiras par lui attirer des ennuis. Si tu ressens ne serait-ce qu'un peu d'affection pour lui, alors tu dois partir, avant que celle-ci ne devienne réciproque.
Potter a déjà disparu dans les escaliers. Profitant de son absence, je me retourne lentement, plongeant mon regard dans celui du Seigneur des Ténèbres et de son amant, avant de répliquer, les dents serrées :
— Peut-être bien. Vous avez raison. Mais il est assez ironique de vous entendre dire que vous voulez le protéger de moi… alors que vous n'avez même pas su le protéger de vous-même. Épargnez-moi les avertissements que vous seriez incapables de suivre, et concentrez-vous plutôt sur la manière de vous racheter auprès de celui qui a continué de vous aimer, malgré le fait que vous soyez… quelqu'un comme moi.
Le Seigneur des Ténèbres me fixe, impassible, nullement ébranlé par mes paroles. Alors que je m'éloigne pour rejoindre Harry, il tonne simplement :
— Je ne laisserai pas mon héritier fréquenter un garçon comme toi.
Très bien. Nous sommes d'accord. Je ne laisserai pas non plus mon âme-sœur aux mains d'un homme comme lui. Nous verrons bien qui de nous deux remportera le droit de rester auprès de Harry. Je ne compte pas perdre et je pars avec un avantage certain, car, contrairement au Seigneur des Ténèbres, Potter ne me déteste pas et n'a rien à me reprocher.
Je le rejoins dans un couloir au parquet vieilli et grinçant et aux murs couverts de lambris. C'est un large et long couloir et je comprends tout de suite qu'il dessert tout le premier étage de la maison. Certaines portes sont entrouvertes, d'autres fermées.
Potter me jette un coup d'œil, puis désigne d'un geste chaque porte le long du couloir en expliquant :
— Il n'y a que deux étages et un grenier, en plus du rez-de-chaussée. Le premier étage est surtout composé de salles d'étude, de bureaux et de bibliothèques. Il y a aussi un laboratoire de potions et un débarras où Albus conserve énormément d'artefacts magiques et de potions qu'il a fabriqués lui-même. Le débarras et le laboratoire sont protégés par toute une série de sortilèges pour empêcher Gellert de s'en approcher.
J'imagine que le Seigneur des Ténèbres serait parfaitement capable, malgré l'absence de ses pouvoirs, de se servir d'une potion ou d'un artefact pour tenter de s'échapper d'ici, ou au moins causer quelques dégâts.
Harry m'invite à avancer dans le couloir et, avec des sourires hésitants, ajoute :
— J'imagine que ce n'est pas ce qu'on fait pendant les vacances, mais si tu veux étudier, tu peux t'installer dans une salle d'étude et prendre des livres dans les bibliothèques, il y en a pour tous les goûts et sur des sujets très variés. Évite seulement le bureau d'Albus : c'est un capharnaüm, et la plupart des objets s'y transforment ou attaquent sans raison. Quant au laboratoire et au débarras, si jamais tu veux y accéder, il faudra d'abord demander la permission à Albus. Pour les autres pièces, sens-toi libre d'aller où tu veux, comme à Poudlard.
Il n'a pas dit "comme chez toi" mais "comme à Poudlard" ; Harry Potter sait parfaitement que je n'ai pas de chez-moi à proprement parler, et que l'école est l'endroit qui s'en rapproche le plus. Sa délicatesse sur ce genre de sujets fait naître en moi un sentiment de sécurité que je n'ai jamais ressenti en présence de qui que ce soit d'autre. Sa seule présence apaise mon âme.
Arrivés au bout du couloir, il me montre un escalier en colimaçon et précise :
— Cet escalier mène au deuxième étage où se trouvent les chambres et les salles d'eau. Il mène aussi au grenier.
Il grimace en ajoutant :
— Albus m'a dit que Gellert y passe le plus clair de son temps. Je n'ai aucune envie d'y mettre les pieds, et je te conseille d'en faire autant. Il est possible que tu entendes de la musique provenant de là-bas. Gellert joue de plusieurs instruments, et Albus m'a informé lui avoir fourni un piano et un violon. J'imagine qu'il vaut mieux qu'il se défoule dessus plutôt que sur autre chose.
Le Seigneur des Ténèbres, musicien ? Cela signifie que conquérir et détruire ne sont pas ses seules passions. Je n'ai jamais posé les mains sur un instrument de musique. Je réalise qu'il existe bien des domaines auxquels je ne me suis jamais intéressé durant mes années à Poudlard. La musique et les langues vivantes en font partie.
Peut-être pourrais-je passer l'été à m'intéresser à autre chose qu'à ma survie et à mes résultats scolaires, déjà excellents.
En montant les marches étroites, je me rends compte qu'avec des béquilles et une jambe en moins, cela doit être une épreuve de simplement atteindre le deuxième étage. Gellert Grindelwald pousse même la prouesse jusqu'à se rendre fréquemment au grenier. Il faut plus qu'une jambe en moins pour empêcher un homme comme lui d'aller où il veut. Peu à peu, je commence à percevoir le genre de personnalité qu'il incarne.
Harry partage certains traits avec lui. Cela saute aux yeux ; j'imagine que c'est la preuve du temps qu'ils ont passé ensemble, et que Grindelwald a effectivement, comme il le prétend, élevé et formé Harry.
Leur façon de se mouvoir, leur maintien, ce charisme naturel qui pousse les autres à les percevoir comme des leaders... Ils ont bien des similitudes. Mais une différence majeure les distingue : Harry dégage une aura de douceur, tandis que Grindelwald est animé d'une violence à peine contenue. Tous deux semblent capables de transformer le monde à leur image, mais sans emprunter le même chemin, et avec des résultats sans doute très différents.
La haine qu'éprouve Harry pour Grindelwald me paraît plus complexe que je ne l'avais imaginée. Il ne déteste pas seulement le meurtrier de ses parents, il hait aussi l'homme qui l'a élevé. C'est différent de haïr l'assassin de sa famille quand il s'agit d'un inconnu. C'est une autre chose que de le détester en sachant qu'il est... comme son propre père. Un père violent, qui ne lui a appris que la guerre et la douleur, mais un père quand même.
Harry le nie, mais cela crève les yeux ; je ne les ai vus ensemble que quelques minutes, et cela suffirait à n'importe qui pour comprendre le passif qui les unit.
Potter a détruit la carrière de Seigneur des Ténèbres de l'homme qui l'a élevé. Il a tué les personnes avec lesquelles il a grandi. Harry Potter a peut-être sauvé le monde, mais à quel prix ? Il n'a pas pu mettre fin aux jours de Grindelwald. Peut-être parce qu'Albus Dumbledore ne le souhaitait pas, mais peut-être aussi parce qu'il ne pouvait s'y résoudre.
Un instant de faiblesse, à cause de son cœur. Peut-être que tuer Gellert Grindelwald aurait simplement détruit son dernier repère sur cette terre.
Harry est blessé, physiquement et psychologiquement, par tout ce qu'il a vécu, et sa situation est loin d'être enviable ou facile à vivre. Pas étonnant qu'il veuille fuir. Son monde doit ressembler à un chemin sans issue où il piétine dans la souffrance.
Je n'ai pas la moindre idée de comment l'aider dans tout cela. Ma propre existence est triste et solitaire, marquée uniquement par la douleur et des ambitions démesurées que je me crée pour me convaincre qu'un avenir où j'aurai de l'importance et où plus personne ne me traitera comme à l'orphelinat est possible.
La seule chose que je puisse faire pour lui, c'est de me promettre que désormais, je resterai à ses côtés et que rien ne pourra lui arriver. Je protégerai son âme en attendant qu'il guérisse de ces plaies béantes qu'il m'expose impudiquement.
Et quiconque osera se mettre entre lui et moi en paiera le prix. Contrairement à Harry, pas la moindre douceur n'habite mon cœur, et je n'aurai aucun mal à massacrer Gellert Grindelwald de sang froid.
Qu'il prétende être son père ou même un dieu n'y changerait rien.
Je suis forcé de sortir de mes pensées morbides au sujet du Seigneur des Ténèbres, car Potter ouvre la première porte du couloir et m'adresse quelques mots.
— La première porte du couloir, c'est ma chambre. Albus et Gellert dorment au fond, et… je préfère que ma chambre soit la plus éloignée possible de la leur. Elle est pratiquement vide, je n'ai pas beaucoup d'effets personnels, mais elle est confortable.
J'ai à peine le temps d'apercevoir un lit simple, non double, dans un coin de la pièce, une armoire, un secrétaire, et une de ces fenêtres aux petits carreaux éclatants avant que Harry referme la porte. Je note que sa chambre est petite, de la même taille que celle que j'avais à l'orphelinat, bien qu'elle semble plus confortable et chaleureuse.
Je grimace en imaginant Albus Dumbledore partager le même lit que l'homme que je viens de rencontrer. Pas que cela me surprenne – j'imaginais bien le compagnon de Dumbledore dans ce genre-là – mais cela reste déroutant. Parce que ce sont deux hommes, et deux sorciers extrêmement puissants et persuasifs. Je ne peux m'empêcher de songer à ce que le monde serait devenu si Albus Dumbledore avait partagé les aspirations de Grindelwald. Je suppose que l'Angleterre serait déjà entièrement sous leur influence, voire même l'Europe entière.
Ils auraient provoqué encore plus de ravages, et peut-être qu'à l'heure actuelle, les populations sorcières et moldues ne se côtoieraient plus du tout.
Une partie de moi trouve l'idée séduisante. L'autre se dit que dans un tel monde, je ne serais jamais venu au monde. Ce qui, en soi, n'aurait pas été plus mal, j'imagine. Mon père n'aurait jamais pu procréer, et ma mère serait toujours en vie.
Cependant, Albus Dumbledore n'a jamais adhéré aux idées de son amant et s'est sûrement opposé à lui, ce qui lui a probablement permis de rencontrer Harry – Harry qui, même dans un avenir illusoire où Dumbledore et Grindelwald se seraient alliés, se serait certainement dressé contre eux.
Il aurait gagné. J'en suis certain. Même dans ce monde où je ne serais peut-être pas né, Harry Potter aurait été là. Il se serait élevé contre l'injustice de traiter les Moldus comme des inférieurs (même s'ils le sont) parce qu'il est du genre à croire que chaque être possède une valeur inestimable.
Il aurait vaincu. Même Dumbledore. Même Grindelwald. Parce que c'est ce qu'il est.
Il m'est impossible d'imaginer un univers où il ne serait pas le vainqueur, que les idées qu'il défend soient ou non les mêmes que les miennes.
Si j'étais son ennemi, il serait le vainqueur. Pas parce que je le laisserais me vaincre. Jamais. Non, c'est bien plus simple que ça. C'est un héros. Il le porte sur lui comme un second prénom.
J'imagine que je pourrais toujours me servir de cela. Si jamais il m'échappe, s'il disparaît, si je n'ai plus aucun moyen de l'avoir rien qu'à moi, j'aurai encore ça. Pour le faire apparaître comme par magie. Peu importe le temps ou l'époque, le monde dans lequel nous évoluons. Il me suffira de me conduire mal, de détruire, d'être un méchant. Un Seigneur des Ténèbres. De vouloir conquérir et détruire, de faire régner la peur et la haine, et je suis certain qu'il apparaîtra.
Il ne me laissera pas réduire ce monde que je déteste en poussière. Peut-être qu'il ne gagnera pas à tous les coups, peut-être que je serai parfois le vainqueur. Peut-être perdrions-nous quelques univers dans ces guerres imaginaires, mais dans chacun d'eux, je serai finalement le gagnant. Parce que ce n'est pas le monde que je veux, mais lui. Lui qui s'intéresse à moi. À ce que je fais. Qui pose les yeux sur moi. Peu importe l'émotion que cela génère chez lui.
Si je ne pouvais avoir que sa haine, ce serait déjà mieux que rien. En attendant, je préfère nourrir l'espoir que je suis encore capable de gagner son amour.
Un amour que je désire ardemment, et que je vais tenter de gagner bribe par bribe cet été.
Il déambule dans le couloir, me montrant la salle de bain, la cabine de douche, les toilettes, les chambres d'amis, et finit par m'indiquer la mienne.
Elle fait au moins deux fois la taille de la sienne. Le lit est double, avec un baldaquin. Ma valise repose sur un coffre en bois, au pied du lit. La même fenêtre que dans sa chambre est placée juste en face de la porte. Il y a une armoire, une commode et un bureau. Les couleurs sont dans des tons vert clair, et je me demande s'il a modifié l'ameublement et la décoration de la chambre spécialement pour moi, durant son absence plus tôt.
Je sens son regard sur mon visage alors que je contemple la plus grande chambre que j'aie jamais eue, et j'entends un raclement de gorge avant qu'il ne précise ce que j'avais déjà compris.
— C'est la plus grande chambre d'ami que nous ayons. J'ai fait quelques ajustements pour qu'elle te paraisse accueillante. Si tu veux faire des changements, n'hésite pas à me le demander. Et bien sûr, tu peux y installer tes affaires comme tu le souhaites. On n'a pas d'elfe de maison, j'ai toujours été contre l'idée, et Albus est d'accord avec moi. Alors, si tu as besoin de quoi que ce soit, tu peux me le demander.
Difficile de ne pas lui sourire en répondant, avec reconnaissance :
— Merci, ça me touche. C'est une très belle chambre.
Ma réponse fait briller ses yeux trop verts, et l'envie de lui arracher ses lunettes avant de l'embrasser et de le plaquer contre le mur le plus proche me revient comme un coup de poing dans l'estomac. Je pourrais peut-être même le pousser directement dans mon lit.
J'imagine la tête de Gellert Grindelwald s'il pouvait percevoir mes pensées, et je retiens un rire. Le Seigneur des Ténèbres risque d'être un parent encore plus difficile à gérer que Dumbledore. Ce qui n'est pas peu dire.
Harry m'abandonne dans ma chambre, prétextant me laisser tranquille pour que je puisse déballer mes affaires, et précise qu'il va s'occuper de préparer le repas du midi. Il sourit en ajoutant que les compétences culinaires d'Albus ne sont pas très élevées, sauf en pâtisserie, et je suppose que le Seigneur des Ténèbres n'a jamais touché une poêle de toute sa vie.
Imaginer Potter aux fourneaux provoque en moi une faim qui n'a rien à voir avec le fait qu'il soit déjà midi. Le premier jour des vacances a à peine commencé, que je découvre déjà des choses sur lui, comme le fait qu'il sache cuisiner.
Coucou ! Comment allez-vous ? Ici, j'ai du retard sur la publication à cause de l'application, qui n'en faisait qu'à sa tête (elle se fermait sans raison et refusait d'enregistrer ma publication !). Heureusement, le problème n'a pas duré trop longtemps, et me voilà ! Ce chapitre vous a-t-il plu ? N'hésitez pas à me laisser vos avis, surtout sur le personnage de Gellert, qui entre en scène à partir de ce chapitre ! À très bientôt !
