Bonsoir à toutes ! =)
Voici le chapitre deux comme convenu ;)
Un grand merci à vous pour les nombreuses mises en favoris/follow et pour celles qui ont pris le temps de laisser un commentaire, c'est super gentil =)
J'espère que la suite vous plaira tout autant !
Bonne lecture à vous !
RAR :
Guest : Hey ! Ravie de te revoir sur cette nouvelle fiction J'espère que la suite te plaira également ;) Et merci également pour ta review sur Résolution Courage qui m'a fait très plaisir ! =) A bientôt !
Severus avait eu beau protester, il n'avait pas pu éviter l'entrevue avec Minerva, qui avait été la première à lui rendre visite, dès le lendemain de cette conversation avec Allan. Le Serpentard avait passé la matinée entière à se préparer à cette confrontation, à retravailler son self-control et à réajuster ce masque d'impassibilité qui, avec les années, était presque devenu une extension de lui-même.
Sans doute y était-il parvenu suffisamment pour donner le change, car la nouvelle directrice de Poudlard avait pincé les lèvres en croisant son regard impénétrable lorsqu'elle était entrée dans sa chambre.
Malgré sa répugnance à cette visite, le Serpentard avait été toutefois soulagé de voir sa collègue en un seul morceau. Il avait beau avoir toujours eu des divergences d'opinion et de pédagogie avec la vieille animagus, il appréciait néanmoins sa discipline de vie et son attachement aux valeurs traditionnelles telles que le travail et l'excellence.
Par ailleurs, il avait de nombreuses questions qui restaient sans réponse, autant parce qu'Allan n'avait pas pu répondre à toutes ses interrogations, que parce qu'il en était certaines que Severus n'avait définitivement pas pu lui poser. Comme, par exemple, celle concernant sa présence à St Mangouste plutôt qu'au fond d'une cellule à Azkaban.
Minerva avait gardé le silence un moment à cette question, et affiché cette expression pincée qu'elle avait toujours lorsqu'elle était confrontée à une situation déplaisante. Elle l'avait considéré un instant sans rien dire, soutenant sans broncher son regard noir et incisif, comme si elle tâchait de lire en lui la réponse même à cette question, à croire qu'elle aussi se la posait.
- Harry s'est porté garant de vous.
- Pardon ? Avait vivement demandé le Serpentard, stupéfait.
Elle avait marqué une courte pause, comme si le fait de prononcer ces mots à voix haute en faisait ressortir toute l'incongruité.
- Il a dit… qu'il ne doutait pas de votre loyauté et que… vous aviez tout sacrifié pour le protéger, durant toutes ces années.
De toute évidence, elle était plus que sceptique concernant ces faits, ce dont il n'aurait pu lui tenir rigueur, puisqu'il avait pris un malin plaisir à persécuter le jeune homme en même temps qu'il veillait sur lui.
- Évidemment, avait-elle ajouté comme pour confirmer qu'elle n'était pas convaincue par son altruisme soudain, le fait que ce soit Nagini qui ait tenté de vous tuer a appuyé sa plaidoirie.
Fort bien! Peut être devait-il envoyer un mot de remerciement au serpent, finalement? Ou remercier à titre posthume le Seigneur des Ténèbres d'avoir tenté de l'assassiner lui-même, lui fournissant ainsi un alibi de premier choix pour défendre le fait qu'il n'était pas réellement du côté obscur.
- Vous ne le croyez pas, avait-il lâché, pragmatique, en avisant le regard circonspect que l'animagus posait sur lui.
Elle avait détourné les yeux, comme prise en flagrant délit de le jauger sans discrétion.
- Peu importe ce que je crois. J'ai confiance dans le jugement de Harry.
- Mais vous pensez que Potter se trompe.
Severus ne voulait pas de jolies phrases pour enrober une vérité qu'il n'était pas sans connaître. Minerva s'était toujours rangée à l'avis d'Albus, se remettant entièrement au jugement de celui qui avait été son mentor et son modèle pendant des décennies. Albus qui avait fait confiance à son professeur de potions, et que ce dernier avait assassiné. Comment aurait-elle pu avoir confiance en lui après cela?
- Disons que j'ai été surprise, au vu des relations houleuses que vous avez toujours entretenues. Mais j'imagine qu'il avait une bonne raison de demander votre amnistie à Kingsley. Peu importe ce que vous ayez pu faire par le passé.
Elle avait serré les lèvres en détournant la tête, visiblement en proie à une vive émotion à l'évocation de la mort de l'ancien directeur de Poudlard. Severus avait considéré un instant le profil sec et sévère de l'animagus, sentant son propre cœur se charger du poids lourd et familier de l'amertume. Il aurait aimé lui dire, vraiment. Qu'il était désolé. Qu'il regrettait d'avoir pris la vie du seul homme qui lui avait tendu la main quand il n'avait plus nul part où aller.
Mais au fond, il ne l'était pas.
Il avait fait une promesse à Albus. Celle de veiller sur Drago, de sauver la vie du jeune homme en prenant la sienne, que le sorcier savait en péril du fait du maléfice qui le rongeait de l'intérieur. Celle de s'assurer ainsi la confiance absolue du Seigneur des Ténèbres, pour pouvoir servir au plus près de l'ennemi la cause de l'Ordre. Regretter aurait signifié trahir sa parole, condamner Drago, et regretter dans le même temps le dénouement de cette putain de guerre.
Il avait tourné la tête vers la fenêtre qui laissait voir un large pan du soleil bleu estival qui brillait au dehors. C'était aussi pour cela qu'il ne voulait pas de visite. Les seules interactions sociales dans lesquelles il avait jamais excellé étaient le sarcasme, la moquerie et la colère. Rien de tout ceci ne se prêtait à ce genre d'entrevues bouleversantes. Lui ne savait pas rassurer, s'excuser ou même consoler. Il n'avait jamais su.
- Dites à Potter… Que je ne veux pas le recevoir, avait-il soufflé, espérant que cela suffirait à mettre un terme à cette entrevue désagréable.
Minerva avait manqué tomber de la chaise où elle était assise.
- Je vous demande pardon? Severus! S'était indignée la vieille sorcière, choquée. C'est grâce à lui que vous n'êtes pas à Azkaban!
- Je ne lui ai rien demandé, avait sifflé le Serpentard entre ses dents serrées.
Non mais, de quoi se mêlait-il, ce gamin? Sans compter qu'à cause de lui, Severus allait encore avoir une dette envers l'un des membres de cette fichue famille!
- Je ne vous laisserai pas vous montrer si grossier avec…
- Minerva s'il vous plaît, avait-il assené avec rudesse en se retournant vers elle.
Elle avait quitté son air affecté pour une expression courroucée, qui l'avait fait se sentir comme lorsqu'elle le surprenait à jeter un maléfice aux quatre idiots de Gryffondor qu'elle avait adulés, quelques vingt ans plus tôt.
Il allait devoir user de plus d'arguments s'il voulait l'emporter, cette fois.
- Je lui parlerai… plus tard, avait-il ajouté dans une grimace. Quand je serais… remis, avait-il précisé avec un regard sombre sur ses jambes toujours inertes.
Sans doute avait-il perdu le contrôle sur son masque d'impassibilité, car alors que la directrice suivait son regard, il avait senti sa colère se dissiper soudain, et lorsque ses yeux avaient de nouveau croisé les siens, ils étaient plein de mansuétude et, comme Severus le craignait, de pitié.
Il avait bien dit qu'il ne voulait pas de visite, bon sang!
- Très bien, avait-elle cédé finalement. Je le lui dirais, ainsi qu'à Rémus, car j'imagine que vous ne souhaitez guère plus le voir.
La grimace dégoûtée qu'il n'avait su masquer avait été plus qu'éloquente, mais Minerva n'avait pas fait de remarque. Au contraire, elle s'était même laissée aller à esquisser l'ombre d'un sourire amusé, comme si cette rivalité persistante entre les deux anciens camarades de classe était touchante.
- Qu'en est-il de Miss Granger, toutefois ? Son infirmière m'a dit qu'elle venait souvent vous rendre visite.
Severus, qui pensait la conversation close, ainsi que l'entrevue, de fait, avait déjà laissé son esprit fatigué par ce court échange divaguer vers les prémices du sommeil qui l'appelait. Il avait froncé les sourcils à ces derniers mots, perplexe, ne comprenant pas de quoi il était question.
- Qui ça ?
- Miss Granger, avait répété Minerva sur le ton de l'évidence. Hermione Granger, avait-elle précisé en avisant son expression interloquée. Vous ne l'avez pas vue? Avait-elle finalement demandé, confuse.
- Non, pourquoi voulez-vous que…?
Le reste de la question était mort sur ses lèvres tandis que l'image d'une jeune femme brune penchée sur un cahier lui revenait soudain à l'esprit. La sensation de déjà vue qui l'avait effleurée au moment où son regard avait rencontré le sien, juste avant qu'elle ne disparaisse.
Par tous les Saints!
- La fille au carnet… c'était elle ? Avait-il demandé, sidéré.
Minerva avait eu l'air aussi stupéfaite que lui, mais pour une autre raison.
- Vous ne l'avez pas reconnue ?
- Comment aurais-je pu deviner qu'elle était ici? Avait répliqué le Serpentard, un brin agacé par son air éberlué.
- Enfin, il n'y avait pas besoin de le savoir pour la reconnaître, avait balbutié l'animagus, prise de court par cette réponse inopinée.
Severus avait fouillé dans sa mémoire, s'efforçant de faire remonter à la surface les souvenirs de la Gryffondor telle qu'il se l'était figurée durant toutes ces années. Une jeune fille agaçante, qui s'obstinait à prendre la parole même quand il ne la lui donnait pas, dont le passe temps favoris était d'étaler sa science et de collectionner les «Optimal» en cours. Quand elle ne soutenait pas son meilleur ami dans toutes les mauvaises idées qu'il avait pu avoir, et Merlin sait qu'il en avait eues!
Bref, rien à voir avec la jeune femme chétive et farouche, qui avait pris la fuite chaque fois que leurs regards s'étaient croisés, et dont le visage marqué par les cernes et le manque de sommeil lui revenait tout à fait, à présent. Quand bien même, comment aurait-il pu la reconnaître alors qu'il avait déjà un mal fou à faire le tri entre ses périodes de conscience et d'inconscience ?
- Cela vaut pour elle aussi, avait-il finalement grondé en fermant les yeux, désireux de pouvoir replonger dans les affres du sommeil qui l'appelait. Dîtes-lui de ne plus venir. Je ne veux voir personne.
- Severus… vous ne savez pas, pour Miss Granger ? Avait demandé Minerva d'un ton affecté.
Le Serpentard n'avait même pas pris la peine de rouvrir un œil, tant le sujet ne l'intéressait pas, et que la fatigue le submergeait tout à fait, à l'issue de cet entretien.
- Non, et je ne veux pas savoir. Sortez, maintenant, je vous prie.
Il avait perçu le léger soupir que n'avait su retenir Minerva, ainsi que le raclement de sa chaise sur le sol et le bruit léger du froncement de ses capes tandis qu'elle se levait. Enfin, il allait être tranquille de nouveau.
- J'aimerais discuter de son cas avec vous, quand vous irez mieux…
Les mots de la directrice lui étaient déjà parvenus déformés, comme si elle s'était tenue loin de lui pour les prononcer, ou qu'il les avait entendus à travers un épais voile de coton. Ils avaient mis un temps fou pour être traité par son cerveau, qui replongeait déjà dans l'obscurité.
- Sans façon, avait-il murmuré en retour d'une voix presque endormie. J'ai remboursé ma dette, Potter est sauf. Ne me fichez pas une nouveau cas désespéré dans les pattes…
Il ne s'était même pas rendu compte que Minerva était sortie depuis longtemps.
OoOoO
Il était en paix, enfin.
Même l'idée de ne jamais récupérer totalement l'usage de ses jambes lui paraissait moins accablante, comme il l'avait expliqué au Docteur Midelli, le médicomage responsable du service où il se trouvait.
Depuis ce lit d'hôpital où il oscillait entre conscience et inconscience, Severus avait la paix. Et c'était une sensation délicieuse. Pour une fois dans sa vie, personne n'attendait rien de lui. Il n'y avait pas de mission d'espionnage à mener, aucun Mage Noir à faire tomber, personne à sauver. Même plus de cours à dispenser, de cornichons à surveiller, de copies à corriger.
C'était reposant.
Au fil des jours, il s'était fait au rythme régulier de l'hospitalisation, aux sessions de soins et aux séances de kinésithérapie qui se succédaient, tandis qu'Allan ou Peter l'abreuvaient de conversations futiles auxquelles il ne prêtait guère attention.
Dans cette chambre immaculée, son esprit et son corps commençaient à reprendre des forces. Au surlendemain de la visite de Minerva, le médecin avait autorisé la réintroduction de nourriture et de boisson, le débarrassant de la perfusion qui alimentaient son organisme depuis plus de deux mois. Même si ce retour à une alimentation classique ne s'était pas fait sans difficulté, tant il lui avait semblé compliquer de mâcher et d'avaler de nouveau, il avait apprécié sentir de nouveau le goût des aliments sur ses papilles, et la sensation de satiété qui en avait découlé.
L'une des aides-soignantes lui avait proposé de lui ramener de la lecture. S'il avait accepté quelques grimoires d'alchimie, et notamment ceux portant sur le traitement des poisons les plus dangereux, il avait refusé qu'on lui apporte la Gazette du Sorcier.
Il ne savait de l'après-guerre que ce qu'Allan et Minerva lui en avaient dit, et c'était bien suffisant. Severus était en paix, et il ne voulait pas que les mauvaises nouvelles qu'il ne manquerait pas de lire dans les journaux ne viennent entacher cette tranquillité toute neuve qu'il venait de trouver. Il se fichait bien de qui avait été arrêté ou non, des morts ou des vivants, des blessés et des disparus. Potter et Drago avaient survécu, Kinglsey était ministre, Minerva directrice de Poudlard. Il n'avait pas besoin d'en savoir plus.
Et puis, par un beau matin de la mi-juillet, quelques jours à peine après la visite de Minerva, Allan avait débarqué dans sa chambre, tout sourire, avec un enthousiaste si palpable que Severus l'avait d'office trouvé suspect.
- Bonjour Severus ! J'espère que vous allez bien, car vous allez sortir, aujourd'hui! Avait claironné l'infirmier avec excitation.
Il avait ouvert en grand la porte de sa chambre, ignorant l'air interdit du Serpentard, qui s'était bien vite transformé en expression horrifiée lorsqu'il avait aperçu le fauteuil roulant qu'un aide-soignant avait poussé à l'intérieur de la pièce derrière Allan.
Sa tranquillité s'achevait ici.
- Hors de question, avait-il assené aussitôt en se crispant tout à fait alors que l'infirmier poussait vers lui la chaise roulante.
Allan avait levé les yeux au ciel, nullement surpris par cette réticence évidente. Peter, le kinésithérapeute, était apparu sur la porte de sa chambre, et Severus s'était raidi davantage en avisant toutes ces personnes dans sa chambre, dont le seul objectif était de le clouer sur un fauteuil roulant afin d'aller exhiber son corps diminué à la vue de tout l'hôpital.
- Alors, impatient ? Avait demandé Peter, inconscient de sa réaction première.
- Certainement pas!
- Il n'a pas l'air enchanté, avait glissé l'aide soignant au kiné.
- Comment ça pas enchanté ? Il n'y a pourtant rien de bien compliqué, avait rétorqué Peter en s'approchant. C'est un fauteuil alimenté par la magie. Rassurez-vous, Severus, c'est très simple et vous n'aurez aucun effort à fournir.
- Je ne m'assirais pas là-dedans ! Avait répété le Serpentard avec opiniâtreté.
Malheureusement, il avait eu beau tempêter, pester, et promettre les pires châtiments aux trois hommes lorsqu'il serait sorti de cet hôpital, rien n'y avait fait. C'était là l'inconvénient d'être dépendants des autres, et trop diminué pour user de sa magie. Il n'avait rien pu faire pour les empêcher d'insister, et avait fini, quinze minutes plus tard, assis malgré lui dans ce foutu fauteuil. Le regard meurtrier qu'il avait adressé aux trois professionnels de santé en aurait tétanisé plus d'un, mais c'était sans compter l'optimisme inébranlable d'Allan et Peter, qui n'y avaient pas prêté attention. L'aide-soignant, moins expérimenté, était resté à distance respectable, comme s'il craignait de se faire mordre s'il s'approchait de trop près.
- Eh bien voilà, c'est quand même plus sympa que de rester clouer dans un lit ! Avait claironné Allan, ravi.
- La direction est ici, avait expliqué Peter en lui indiquant une petite sphère lumineuse incorporée dans l'un des accoudoirs. Faites la tourner dans la direction où vous voulez aller, et lâchez pour vous arrêter, c'est aussi simple que cela. Allez-y, essayez !
Severus n'avait pas bougé, se contentant de le fixer de son regard le plus venimeux.
- Je ne veux pas sortir, avait-il insisté, glacial. Je n'ai personne à voir et rien à faire en dehors de ces murs.
- Par Merlin, quelle tête de mule ! Avait soupiré Allan
- Qu'en est-il de ma demande d'entrevue avec le responsable du pôle recherche et ...?
- Oh mais qui voilà ? S'était exclamé l'infirmier alors que le seuil de la porte s'obscurcissait de la silhouette d'un nouvel arrivant.
Severus en aurait hurlé de rage, agacé que sa chambre se soit subitement transformée en un véritable moulin alors qu'il aspirait à y passer le reste de sa vie au calme, et que personne ne prenne au sérieux sa demande concernant les analyses des échantillons de sang contaminé qu'on avait prélevés sur lui lors de son admission à l'hôpital.
Exaspéré, il avait voulu tourner le fauteuil vers la porte d'entrée pour congédier sans ménagement le nouvel arrivant, mais l'appareil n'avait pas bougé d'un pouce. Face à lui, Peter avait blêmi.
- Mince alors! On l'a testé hier et il semblait fonctionner. Il va falloir que je le ramène au service appareillage. Vous allez gagner un jour de sursis, Severus, avait-il marmonné en frottant le collier de barbe de trois jours qui ornait son menton.
Le Serpentard avait roulé des yeux, excédé de tout ce cinéma et de l'énergie dépensée pour si peu de…
- Mais non attend ! Cette demoiselle tombe à point nommé! Était intervenu Allan avec ravissement.
Peter avait relevé les yeux vers l'entrée de la chambre, tandis que Severus s'efforçait de pivoter suffisamment la tête pour apercevoir la demoiselle en question.
Son teint déjà blafard, depuis des semaines qu'il était enfermé dans cette chambre, avait pâli davantage lorsque tout le sang s'était soudain retiré de son visage à la vue de la jeune femme qui se tenait près d'Allan, l'air curieux.
Elle n'avait pas amené son carnet de notes, cette fois, mais Severus n'en avait pas eu besoin pour la reconnaître.
Il s'agissait bien d'Hermione Granger.
Par Merlin, comment avait-il pu ne pas la reconnaître plus tôt ?
Quoique… à la réflexion, elle ne ressemblait plus tant que cela à la Gryffondor agaçante qu'il avait eu en cours jusqu'à la fin de sa sixième année d'étude, presque quinze mois plus tôt. Quinze mois… Par Salazar, cela ne lui semblait pas bien long, à l'échelle d'une vie, et pourtant! Cela avait été assez pour métamorphoser l'adolescente caractérielle qu'il avait connue en cette jeune femme amaigrie et farouche, que le sommeil avait visiblement déserté depuis longtemps. Quinze mois… et cette putain de guerre qui ne les laisserait pas s'en sortir indemnes.
A la lumière du jour, elle lui avait semblé encore plus menue que lors de la nuit où il l'avait surprise dans sa chambre. Ses cheveux acajou étaient remontés en une queue de cheval haute, cette fois, qui faisait paraître son visage plus fin et plus émacié, ou alors était-ce seulement parce que les cernes sous ses yeux avaient encore gagné du terrain, il n'aurait su dire. Ses grands yeux marrons avaient détaillé Severus et le fauteuil dans lequel il se trouvait avec curiosité. Malgré sa frêle carrure et son apparence fragile, elle avait soutenu son regard sans broncher, sans même paraître intimidée par sa colère palpable. Cette arrogance qu'il ne lui connaissait pas, ou du moins pas à ce niveau d'impertinence, avait suffi à agacer profondément le Serpentard.
- Hermione, tu veux bien…
- Certainement pas ! S'était presque étouffé le Serpentard en réalisant soudain ce qu'Allan avait en tête.
- ...Accompagner Severus pour sa premier sortie s'il te plaît ? Il va avoir besoin d'un peu d'aide en attenant que son fauteuil soit opérationnel.
- Hors de question ! Avait vivement protesté le concerné, horrifié de cette éventualité.
Le regard de la Gryffondor avait oscillé entre lui et Allan, doutant visiblement elle-aussi du bien fondé de cette idée, et Severus s'était étonné de ne pas l'entendre refuser aussitôt.
- Ne t'inquiète pas, avait souri Alan en posant une main rassurante sur l'épaule de la jeune femme. Il aboie beaucoup mais il ne mord pas.
Ce disant, et alors que Severus tournait vers lui un visage à l'expression mordante, il avait gentiment poussé Granger vers lui. Le Serpentard avait eu beau lui adresser son regard le plus venimeux, elle l'avait ignoré, se contentant de lui jeter un bref regard avant de se glisser derrière lui et de poser ses mains sur les poignées du fauteuil. Severus en aurait hurlé de rage et d'humiliation, si cela n'avait pas encore été plus dégradant.
Par Merlin, et lui qui ne voulait pas recevoir de visite pour que personne ne le voit diminué! Non seulement il allait devoir se farcir l'image humiliante de sortir en fauteuil roulant, mais en plus il fallait que cela soit l'une de ses élèves qui l'accompagne. Pire encore, qui le pousse! Car c'était bien de cela dont il était question, à présent qu'il était incontestable que le fauteuil n'était pas fonctionnel.
Par tous les Saints, il aurait encore préféré replonger dans le coma pour une durée indéterminée. Tout, plutôt que cette humiliation cuisante, devant une Gryffondor qui plus est, et pas n'importe laquelle! Miss-Je-Sais-Tout en personne, la meilleure amie de Saint Potter et l'élève favorite de Minerva! Non, vraiment, il avait pensé touché le fond, mais à l'évidence il creusait encore.
- Bonne balade ! Leur avaient, très ironiquement sans doute, souhaité Peter et Allan tandis que Granger s'appliquait à manœuvrer le fauteuil hors de la chambre pour le pousser dans le couloir de Saint Mangouste.
Par Salazar, là où Nagini avait échoué à le tuer, l'humiliation y parviendrait, c'était certain!
OoOoO
Il y avait trop de monde.
Trop de sons, trop d'odeurs, trop de stimuli visuels.
Severus avait la tête qui bourdonnait déjà, et un mal de tête en embuscade, alors que cela ne faisait que cinq minutes à peine qu'il avait quitté sa chambre, après presque trois mois à y séjourner dans un calme quasi-absolu.
Il n'avait jamais été un grand fan des espaces ouverts et de la foule, mais de toute évidence, il avait carrément basculé agoraphobe et démophobe, car il s'était trouvé saisi d'une angoisse presque insoutenable en se retrouvant ainsi dans les larges couloirs de Saint Mangouste, au milieu du personnel médical, des patients et de leurs proches qui y déambulaient dans une agitation semblable à celle d'une ruche. Chaque regard qui se tournait dans sa direction ne faisait qu'attiser la panique qui grandissait en lui. Il lui semblait même que tous les regards, sans exception, se braquaient sur lui, attirés irrémédiablement par le fauteuil roulant devant lequel tout le monde s'écartait, facilitant sa progression.
Il aurait voulu disparaître.
Ne supportant plus tous ces yeux curieux sur lui, il avait fermé les siens, serrant les dents pour tenter de reprendre le contrôle de ses émotions, tâchant de retrouver la discipline et la rigueur qu'il avait toujours réussi à imposer à son esprit durant toutes ces années.
Malheureusement, l'occlumancie nécessitait une concentration et une énergie qu'il n'était plus capable de fournir, le venin et les deux mois de coma ayant amoindri ses capacités cognitives au moins autant que son corps meurtri, même si les séquelles n'étaient pas visibles.
Le brouhaha autour de lui avait augmenté soudainement, accentuant la sensation d'oppression tandis que les palpitations de son cœur s'accéléraient.
- Ramenez-moi dans ma chambre, avait-il grondé, les dents serrées, à l'attention de la jeune femme qui manœuvrait la chaise infernale sur laquelle il était assise.
La Gryffondor n'avait pas répondu, et Severus avait senti tout son corps se tendre tandis que sa panique s'accentuait encore, menaçant le submerger tout entier, en comprenant qu'elle n'en ferait rien. Sans doute cette petite garce trouvait-elle cela très jouissif, de s'amuser ainsi à ses dépends, après toutes les années durant lesquelles il les avait houspillés, elle et ses deux idiots de…
Les bruits de la foule s'étaient subitement dissipés, remplacés par le gazouillement des oiseaux, alors que Severus se retrouvait soudain plongé dans une chaleur aussi inopinée qu'agréable. Sidéré, il avait vivement ouvert les yeux, avant de papillonner lorsque la lumière éblouissante du soleil estival l'avait ébloui. Son cœur avait presque loupé un battement devant le spectacle saisissant qui s'était soudain offert à lui.
Il se trouvait dans de spacieux jardins, cernés par les hauts murs de l'hôpital, qu'un savant aménagement de claustras, couverts de glycines et autres plantes grimpantes, dissimulait habilement aux yeux des quelques promeneurs qui déambulaient là, bien loin de la foule qui allait et venait dans le hall de l'hôpital, qu'ils venaient sans doute de traverser. L'odeur acidulée et estivale des fleurs d'été lui était parvenu, entêtant et enivrant, après des semaines à ne respirer que l'odeur chimique qui emplissait constamment le fond de l'air à l'intérieur de l'hospice, même s'il n'en prenait conscience que maintenant.
Le Serpentard avait pris une profonde inspiration, emplissant ses poumons de cet air pur et vivifiant, tandis que ses yeux s'emplissaient des images colorées des insectes butinant les fleurs des hortensias, des délicates nuances de rose et de violet qui paraient les fleurs d'une haie de fuchsias tout près de là, et du glougloutement discret et reposant d'une fontaine dissimulée par une arche en bois.
Alors qu'un quart d'heure plus tôt il était décidé à ne plus jamais sortir de sa chambre, il avait soudain réalisé à quel point l'extérieur lui avait manqué, après tout ce temps. La chaleur du soleil sur sa peau, la lumière estivale qui illuminait cet après-midi du mois de Juillet, la vie qui poursuivait son cours comme si rien ne s'était arrêté, trois mois plus tôt.
Trois mois avant lesquels ce spectacle l'aurait laissé de marbre. Il n'y aurait même pas prêté attention, à dire vrai, tant il avait pris tout ceci pour acquis. A présent qu'il en avait été privé pendant si longtemps, il prenait pleinement conscience de la chance qu'il avait d'être encore en vie pour profiter de cela.
Alors que son organisme trop longtemps endormi se réveillait doucement à ces sensations presque oubliées, il s'était soudain rappelé de la présence indésirable de Granger derrière lui, et il s'était efforcé de réajuster le masque d'impassibilité sur son visage, avant de risquer un coup d'œil par dessus son épaule. Pour réaliser que la Gryffondor n'était plus là.
Saisi, il avait balayé du regard le jardin où il se trouvait, et avait finalement repéré la demoiselle non loin de là, assise sur un banc près d'une femme un peu plus âgée que lui, qui lui avait tendu une poignée de pâquerettes qu'elle venait de cueillir dans la pelouse voisine. Granger s'était fendue d'un sourire poli avant de jeter un un coup d'œil vers le Serpentard. Severus, qui avait d'abord pensé qu'elle l'avait laissé se débrouiller sans plus se préoccuper de lui, avait alors réalisé qu'elle s'était seulement éloignée pour lui laisser suffisamment d'intimité, et qu'elle gardait en réalité un œil sur lui.
Un vif sentiment de révolte l'avait envahi, se confrontant avec celui, plus ténu, de reconnaissance, qui s'était manifesté lorsqu'il avait pris conscience de l'endroit où il se trouvait. De l'endroit où elle l'avait amené, lui épargnant une flânerie aussi longue qu'inconfortable dans les couloirs bondés et agités de l'hôpital.
Néanmoins, il détestait l'idée d'être ainsi dépendant de son ancienne élève, et cette façon qu'elle avait de le surveiller du coin de l'œil, qui était tout à fait infantilisante. C'était lui le professeur, dans l'histoire! Tout du moins l'avait-il été, car il était évident qu'il ne l'était plus.
Toutefois, la jeune femme ne lui avait guère prêté plus que d'attention que nécessaire, reportant son attention sur l'homme qui venait de rejoindre la sorcière qui lui avait tendu les fleurs précédemment. Le couple aussi disait vaguement quelque chose à Severus, et en y regardant bien, il avait reconnu avec stupeur Alice et Franck Londubat, qu'il avait côtoyés durant sa propre scolarité à Poudlard, puisque les deux sorciers étaient âgés de seulement deux et quatre ans de plus que lui.
Ils étaient méconnaissables, encore plus que Granger. Alice n'avait jamais été d'une nature très robuste, mais elle semblait à présent aussi fragile qu'une brindille. Sa silhouette mince semblait flotter dans ses habits un peu larges, et ses cheveux qui avaient blanchi avant l'âge lui conféraient des airs fantomatiques qui renforçaient cette impression. Franck, quant à lui, qui avait été plutôt bien bâti dans sa jeunesse, avait fondu comme neige au soleil, sa musculature s'étant dissipée avec les années d'inactivité. Son fils lui ressemblait beaucoup, même si Severus ne doutait pas que la guerre avait dû également transformer ce bougre de Neville Londubat.
Alors qu'il commençait à étouffer sous le soleil estival, lui qui n'était pas sorti depuis tout un trimestre, et avait amorcé un geste pour faire pivoter son fauteuil, Granger s'était comme par magie matérialisée à ses côtés sans même qu'il n'ait eu besoin de l'appeler. Quelle plaie, cette gamine et son éternel besoin de se rendre serviable!
- Je peux me débrouiller tout seul ! Avait-il grondé, exaspéré, tandis qu'elle approchait.
Il s'était attendu à une pluie de protestations, à ce qu'elle lui rappelle avoir été chargée par Allan de veiller sur lui, ou même à une réponse sarcastique, à présent qu'elle n'était officiellement plus son élève, mais rien n'était venu. Elle s'était contentée de l'observer tenter de faire pivoter le fauteuil par ses propres moyens, mais son manque criant d'expérience dans le domaine avait été flagrant. Il n'avait réussi qu'à s'agiter pour rien, pestant contre le mécanisme bien trop lourd à manœuvrer pour ses bras démusclés, et ses vains efforts l'avaient laissé aussi essoufflé et pantelant que s'il avait couru cinq miles dans sa vie antérieure. Avec agacement, et un orgueil bien entamé, il avait fini par jeter un regard mauvais mais résigné à la Gryffondor, qui avait semblé ravaler un sourire avant de le pousser jusqu'à l'intérieur de l'hôpital. Rhaa, satanée lionne!
Ils étaient repassés par le hall grouillant et bruyant, ce qui n'avait pas manqué arracher une nouvelle grimace à Severus. A présent que son angoisse s'était quelque peu dissipée, il avait réalisé que finalement, personne ne faisait attention au fauteuil roulant, qui n'était somme toute pas plus étonnant que d'autres bizarreries qu'il était visiblement coutume de croiser dans les couloirs de la clinique. Rien qu'entre le patio et les ascenseurs, Severus avait aperçu une sorcière couverte de fourrure, un enfant coiffé de deux cornes de minotaure, et un vieux sorcier, également en fauteuil, dont les membres gauches et droits étaient inversés, sans doute suite à un accident de transplanage.
A la réflexion, son cas était presque banal, d'autant que ses cheveux sombres dissimulaient presque entièrement la cicatrice qui marquait la peau blafarde de son cou.
Quelques personnes avaient pris le temps de les saluer, même s'il avait vite compris que c'était surtout à Granger qu'étaient adressés toutes ces politesses. Assis sur sa chaise roulante, il n'aurait su dire si la jeune femme avait pris le temps de rendre les sourires. Toujours était-il qu'elle n'avait répondu à personne, et ils étaient parvenus aux ascenseurs dans un silence absolu. Severus avait commencé à s'agacer de ce mutisme interminable.
- Vous n'avez pas mis longtemps à devenir aussi bouffie d'orgueil que votre meilleur ami, à ce que je vois, avait-il cinglé alors que les portes se refermaient sur eux. Je ne vous pensais pas de nature si arrogante, même si cela était à prévoir, j'imagine.
Elle était restée derrière le fauteuil, mais il avait croisé son regard interdit dans le miroir qui ornait la cabine de l'ascenseur. Contre toute attente, elle n'avait eu l'air ni furieux ni outré, mais seulement surprise, comme si elle ne s'attendait pas à ce qu'il lui adresse la parole. Ce manque de réaction avait accentué l'agacement de Severus.
- Pourquoi êtes-vous ici, d'ailleurs ? Avait-il demandé avec dédain. Vous ne semblez guère amochée. Avez-vous reçu un maléfice de mutisme? Ou peut-être quelqu'un a-t-il eu la bonne idée de couper votre langue trop bien pendue!
C'était mesquin. Petit et un peu minable, sans doute. Mais c'était plus fort que lui. Il ne supportait pas de se sentir si vulnérable au regard de son élève, surtout cette petite Miss-Je-Sais-Tout qui l'avait toujours horripilé. Comme à chaque fois qu'il se sentait ainsi en position de faiblesse, sa stratégie avait été l'attaque.
La Gryffondor n'avait pas répondu, dans une attitude décidément bien sage qui était à des lieues des regards féroces qu'elle lui adressait à l'époque de ses études, lorsqu'il se montrait particulièrement injuste ou désobligeant à son égard. Par Merlin, voilà que cette gamine était devenue plus mâture que lui!
Il avait soutenu le regard brun avec une expression mauvaise, n'appréciant que peu la façon dont elle l'observait avec curiosité et perplexité, comme s'il constituait une énigme particulièrement intéressante à résoudre. Les mains se Severus s'étaient crispées sur les accoudoirs du fauteuil, et si les portes de l'ascenseur ne s'étaient pas ouvertes au même instant dans un tintement caractéristique, nul doute qu'on l'aurait entendu grincer des dents.
Sans un mot, Granger l'avait poussé jusque dans le couloir tandis qu'il maugréait en silence, pestant silencieusement contre cette situation humiliante, l'entêtement d'Allan à vouloir le faire sortir, et cette idiote de Gryffondor qui se payait sa tête en plein.
Durant quelques secondes, seul le grincement léger des roues sur le sol avait comblé le silence qui s'était étiré entre eux, jusqu'à ce que Severus ne prenne conscience du calme étonnant qui régnait dans cette partie de l'hôpital.
- Mais… ma chambre n'est pas à cet étage ! Avait-il vivement protesté en se redressant soudainement. Granger, où est-ce que vous m'emmenez ?
La jeune femme avait fait pivoter le fauteuil dans l'angle d'un couloir, et Severus, qui avait voulu se tourner vers elle pour la fusiller du regard en même temps qu'il posait sa question, avait manqué être déséquilibré par l'arrêt brutal de la chaise médicale. Le temps qu'il se stabilise et relève les yeux vers la brunette, elle avait déjà tourné les talons. Sidéré, il l'avait observée alors qu'elle s'éloignait prestement, silencieuse comme une ombre, l'abandonnant à son sort dans ce couloir désert et inconnu.
- Granger! Avait-il scandé, autant abasourdi que furieux. Je vous interdis de me laisser ici ! Revenez-ici tout de suite ou je retire dix points à…
Il s'était interrompu, réalisant seulement l'absurdité de ce qu'il s'apprêtait à dire. Il n'était plus professeur, et Hermione Granger n'était plus son élève. Il n'y avait plus de points à retirer, ni de retenues à distribuer, quand bien même cette petite insolente avait décidé de le planter là.
Nom d'un chien, elle allait le rendre dingue!
Ses visites saugrenues dans sa chambre lorsqu'il avait été inconscient, puis son silence entêté, et à présent cela! C'était quoi son problème, à cette sombre idiote, au juste?
La question lui était bien vite sortie de la tête lorsqu'il s'était retourné vers l'autre côté du couloir pour tenter de trouver une solution afin de regagner sa chambre. Son regard était alors tombé sur la petite plaque métallique qui jouxtait la porte près de laquelle il se trouvait, et qu'il n'avait même pas remarquée, trop occupé à pester contre la jeune femme.
Là, en lettres noires sur le petit panneau doré, s'étalait très distinctement une poignée de mots.
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