Bonjour à tous. On se retrouve pour un nouveau chapitre aujourd'hui afin de commencer la nouvelle année. Avant d'attaquer ce chapitre ou même mon blabla coutumier, je dédis ce chapitre à une lectrice assidue et la frousse qu'elle nous a tous fait récemment, pour déclarer au final la fausse alerte… mais qui a été un bon rappel à l'ordre avant que notre cher "président" ne prenne la décision de lancer un troisième confinement : oui, dehors, c'est toujours la pandémie, même un an après. J'ai conscience qu'une introduction de fanfiction n'est pas le lieu adapté pour ça, c'est pour ça que je ne m'étendrais pas sur le sujet, outre dire "faîtes attention" "le masque doit couvrir la bouche et le nez" et "respectez les gestes barrière". Mais surtout : soyez prudent, c'est le meilleur conseil que je peux vous donner pour que vous et vos proches puissiez rester en bonne santé. Cet incident avec cette lectrice m'a fait un choc et m'a montré que je suis attachée à vous. Je ne veux certainement pas apprendre que vous avez fait les cons et que vous êtes mort, donc faites attention. S'il vous plaît.
Pour revenir au chapitre, sachez que deux gros points clefs de cette histoire se jouent ici. Et je les ai décidés avec les dés. LITTÉRALEMENT. Deux dés de cent (d'où le titre du chapitre). Je ne dirais pas lesquels pour ne pas spoiler, mais si ça n'a pas été deviné, je les éclaircirais dans la publication du mois prochain. Autre point pour changer un peu de la "tradition" : MARCO IS ALIVE ! Maintenant, qu'est-ce qui est vrai, qu'est-ce qui est faux... allez savoir (j'aurais dû sortir ça le premier avril)
Ensuite, les commentaires :
TheSepticPuppet : il m'arrive d'avoir de bonnes idées… parfois. Pas souvent, mais parfois.
liona29 : eh bien le voici ! Année 4 en route !/ Sirius ? L'innocenter ? Tu n'as pas l'impression de demander un élément qui pourrait être du SPOIL ? La réponse est : you shall see !
Rowendyss : Au plaisir !
NeferGwen : C'est très gentil ce que tu me dis, mais, et heureusement, tu n'as pas vu les profondeurs inexplorées de ma cervelle où même-moi, je n'ai pas envie de mettre un pied. / Oui, celui-ci va être un peu court comme chapitre./ Ouais, c'est bien les papillons… sauf quand t'as ta colloc qui te réclame de temps à autres la suite de telle ou telle fic *regard entendu à Misstykata* /Là, je me répète plus, mais est-ce que c'est vrai pour autant, dis-moi ?/Le nouveau chez moi fait le double de l'ancien (je passe d'un T1bis à un T3 duplex) et se meuble lentement. Mais on y est bien. ET J'AI UNE CHAMBRE POUR MOI *pleure de joie*.
Morgane93 : pas de combat, cette fois. J'ai fait rouler les dés mais ils ont dit "Nop".
sebfrega : On y est !
On a fait le tour ? Parfait ! Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture et au mois prochain.
Je vous aime tous ! Smack ! :3.
.
.
Harry était assis sur une chaise dans un coin de la cave sous le bar de sa mère, les bras appuyés sur le dossier de son siège, regardant sans la moindre émotion la correction qu'Ace infligeait à la tête d'un réseau de dealers qu'elle avait pris la main dans le sac à essayer de refourguer sa marchandise dans sa salle de shoot. Si elle l'avait ouverte, c'était pour offrir aux drogués un endroit où se réunir, se resocialiser, et faire plus attention à leur santé. Les aider à se soigner de leur addiction par une méthode douce pour ceux qui en avaient le courage. Consommer en sécurité pour les autres. Elle ne fournissait pas les produits, seulement le matos qu'elle achetait directement à l'hôpital. Les utilisateurs connaissaient la règle, et même Lestrade le savait. Aucun deal chez elle.
Mais ses concurrents n'avaient pas pu résister. Voilà pourquoi l'un d'eux était en sang, attaché à une chaise, après avoir supporté une correction musclée. Ils savaient très bien que l'homme ne ressortirait jamais d'ici vivant.
Ace se détourna du malfrat et alla jusqu'à une table dans un coin de la salle de béton nue, seulement éclairée par une ampoule jaunâtre. Elle prit un flingue et un chargeur avant de revenir vers le dealeur.
- Chaton. Viens me voir.
Harry se leva, perplexe. Déjà que c'était récent qu'il ne doive pas se cacher pour assister à ce genre de scène, que sa mère l'interpelle, c'était encore plus étrange. Il s'arrêta à côté d'elle et resta sans voix quand elle lui tendit le pistolet et les balles.
- C'est l'heure du choix. Tu prends ce flingue, tu acceptes de mourir un jour par les armes, sans te détourner des corps que tu étaleras sur ton chemin. Tu prends cette arme, je t'apprendrais tout ce que je sais pour que tu puisses devenir à ton tour la tête de l'Underground. Tu refuses l'arme et tu devras changer radicalement ton comportement à partir de ce soir. Tu n'auras aucun retour en arrière possible, peu importe l'option que tu choisis.
Harry observa le visage impassible de sa mère, puis l'arme qu'elle lui tendait, et enfin, la porte de sortie.
Le temps où il n'était qu'un simple spectateur était révolu. Il était temps qu'il apprenne vraiment ce qu' était l'Underground.
Sans fléchir, ni trembler, il prit l'arme et la chargea comme il avait déjà vu mainte fois faire sa mère ou son oncle. C'était plus lourd que ce qu'il pensait, mais à bientôt quatorze ans, il avait bien assez de force dans ses bras pour pouvoir tenir un flingue à une main. Il garda l'objet meurtrier entre ses mains un instant, avant d'en ôter le cran de sécurité.
Lentement, il leva son bras pour viser la tête de l'homme qui le supplia de l'épargner, essayant de l'attendrir, de provoquer de la pitié chez lui parce qu'il n'était qu'un adolescent, alors que sa mère l'observait en silence, les bras croisés
- Rest in peace, répondit Harry.
Il pressa la gâchette. Instantanément, le sang gicla, éclaboussant les deux Portgas et répandant os et cervelle sur le mur derrière le cadavre.
Tout aussi lentement, le jeune sorcier laissa retomber son bras le long de son corps, s'efforçant de respirer calmement. Il garda les yeux ouverts sur son œuvre, même quand sa mère passa derrière lui pour l'enlacer, collant son visage contre le sien.
- Bienvenu dans le milieu du crime, chaton, chuchota-t-elle.
- Désolé, maman, je sais que tu aurais préféré que je prenne la porte.
- Je m'en doutais. Ne t'excuse pas.
La pirate soupira et regarda le corps devant eux. Les poissons allaient finir par devenir gros et gras.
.
.
Ace regarda l'avis de disparition dans le journal.
Frank Bryce avait disparu. Elle releva les yeux pour regarder la Tamise qui étincelait sous le lever du soleil. Quelque chose la dérangeait dans la disparition de cet homme. Bon, d'accord, le jardinier n'était plus tout jeune, mais tout de même, quelque chose la turlupinait.
- Qu'est-ce qui ne va pas ? demanda Izou dans le cadre qui occupait désormais une bonne partie du mur du salon du même côté que le couloir menant à l'entrée et à l'étage. Je te connais, quand tu fais cette tête, c'est qu'il y a une raison.
- Disons que je viens de lire qu'une rencontre que j'ai faîte au cours d'une enquête vient de disparaître. L'homme n'était pas au meilleur de sa forme, ni de la première jeunesse, et il vivait seul… comment aurait-il pu se volatiliser ? Je sais pas… j'ai cette ampoule, là, dans le crâne… tu vois laquelle ?
- Parfaitement, celle qui dit que ça va mal finir, comprit son frère.
Ce fut à cet instant que Harry entra dans la pièce, baillant aux corneilles, enjambant au passage Mangetsu qui jouait avec une balle dans le salon.
- Konnichiwa kaachan, Izou-ji-san.
- Konnichiwa chibi, salua le travesti en allumant son kiseru.
- Tu as encore veillé tard, chaton, nota Ace en voyant l'allure de son fils.
L'adolescent frotta son crâne, ce qui n'arrangea pas sa tignasse noire toujours en désordre, puis haussa des épaules.
- Je plaide coupable. J'arrive pas à croire que ce soit une sorcière qui me fasse découvrir une série aussi géniale d'origine moldue. Je sais ce que je veux pour mon anniversaire, déjà.
- Eh bien, tu pourras le dire à Black, il t'a envoyé une lettre. Je crois vraiment qu'il se dore la pilule sous les tropiques rien qu'en voyant les oiseaux, sourit Izou.
- Au moins, personne n'ira le chercher là-bas et vu sa tête, prendre le soleil ne lui fera certainement pas de mal, approuva le jeune.
Il alla rejoindre sa mère au balcon pour l'embrasser et avoir son câlin du matin, manquant de se rendormir sur elle. Il arrangea sa tête dans son cou, profitant qu'elle soit assise sur la rambarde pour cela. Il se sentait toujours bien comme ça, contre elle, profitant de sa chaleur et de son aura.
- T'as passé l'âge de dormir ainsi, chaton. Allez, Dobby t'a laissé ton petit-déjeuner avant d'aller faire des courses. Je vais finir par croire que je le paye pas assez pour le boulot d'enfer qu'il fait pour nous, sourit Ace en frottant le dos de son fils avec un petit rire.
- Y'a des injustices dans ce monde, c'est pas croyable, grommela l'adolescent en s'en allant à contre-cœur chercher son petit-déjeuner.
- Tout le monde sait que grandir est l'une d'elle, ne t'en fait pas, Harry, rassura Izou avec le rire de la mère en fond.
L'adolescent alla mettre son nez dans le frigo pour voir un jus d'orange fraîchement pressé qui l'attendait dans un verre. Il s'en saisit et referma la porte pour attraper l'assiette de muffins faits avec amour par son oncle Thatch. En parlant de lui…
- Où est tonton ? demanda-t-il en revenant vers le salon pour s'installer à la table basse.
- Serviette, rappela à l'ordre sa mère.
Il se releva sans discuter pour aller chercher une serviette de table afin de ne pas en mettre partout, avant de revenir à son petit-déjeuner.
- Ton oncle n'est pas rentré de la nuit, il a donc dû la passer avec Tonks, lui répondit sa mère en pliant le journal non-magique pour faire planer jusqu'à son fils la lettre de son parrain.
Le sorcier l'attrapa et la décacheta pendant que sa mère se plongeait dans le nouveau numéro du Chicaneur en allant cette fois se mettre sur le canapé.
- Sirius te salue. Je pense qu'il a vraiment un faible pour toi, m'man, commenta l'adolescent en lisant son courrier. Dommage que tu lui foutes la frousse et que tu sois pas un cœur à prendre.
- Peine perdue. Garp apprendra la danse du ventre le jour où ta mère laissera tomber Marco, commenta Izou d'une voix indifférente.
Ace manqua de s'étouffer à l'image mentale. Son frère esquissa un sourire et quitta la cadre en prétextant qu'il allait voir ce que faisait Haruta à Poudlard, laissant le salon retrouver son calme habituel, malgré la femme haletante qui essayait de laver de son cerveau l'image que lui avait incrustée son frère. Elle secoua la tête, réprima un frisson puis tira la langue.
Eurg ! Izou et ses images mentales.
Elle poussa un soupir et fit un geste pour reprendre son magazine.
- Kaachan ?
Elle leva le nez devant le ton hésitant de son fils qui était en tailleur sur son bout de fauteuil, sa lettre abandonnée à côté de lui et son petit-déjeuner tout juste entamé.
- Oui, chaton ?
- Je sais qu'il reste encore quinze jours avant mon anniversaire, mais… ça me tourne dans le crâne depuis si longtemps, et j'ai pas envie de me disputer avec toi comme l'été dernier. C'était horrible. On… on peut…
- …aborder les circonstances de ton adoption, c'est ça ?
- Sans zone d'ombre. Rien dans le placard, la vérité.
Ace soupira en se laissant aller vers l'avant, les mains jointes entre ses genoux, regardant droit devant elle.
- Autant le faire maintenant, puisque tu lances le sujet. Tu veux commencer par quoi ?
- Le tout début de ton histoire.
La D. eut un reniflement narquois en se laissant aller en arrière dans son coin de canapé, un pied nu appuyé sur la table basse, le regard obstinément fixé sur ses orteils.
- Tu la connais déjà. Portgas D. Ace, né Gol, bâtard et seul fils connu du Roi des pirates, Gol D. Roger. Élevé par une bandit des montagnes avec le petit-fils de l'homme qui a envoyé mon géniteur sur l'échafaud. Luffy est encore à ce jour mon petit-frère en tout, sauf le sang. J'ai pris le large à dix-sept ans, dans le but de devenir le nouveau Roi des pirates. De faire résonner le nom des Portgas. Quatre mois avant mes dix-huit ans, j'ai croisé le chemin de l'homme que je visais dans le but de me faire connaître. Shirohige, alias, Newgate Edward. L'homme le plus proche du One Piece, qu'on disait. L'homme le plus fort du monde. J'ai échoué à avoir sa tête, et au lieu de me tuer, il m'a proposé de prendre son nom et sa marque pour rejoindre sa famille. Je sais pas si à l'époque, il se doutait que j'étais le gosse de son rival, vu que j'ai toujours utilisé le nom de ma mère. Mais ça ne lui a fait ni chaud, ni froid quand je lui ai dit la vérité après une énième tentative d'assassinat ratée.
Elle caressa d'un geste absent un bout de son tatouage dorsal, son fils attentif à ce qu'elle disait.
- Je réalise aujourd'hui que je n'ai plus tout ça, que j'étais heureux de la vie que j'avais. De ce que c'était d'être un Shirohige. De vivre avec eux. Sans parler de Marco.
Elle ferma les yeux pour refouler ses larmes.
- Tout est parti en éclat quand, après une escarmouche avec d'autres pirates, on a trouvé un akuma no mi dans le butin. Tu te souviens de ce qu'on t'a dit à ce sujet ?
- Un pouvoir au hasard et on devient une enclume, résuma Harry.
- Chaque fruit est unique. Le seul moyen d'obtenir un pouvoir qui est déjà prit, c'est soit d'obtenir un don qui s'en approche, soit attendre ou provoquer la mort de celui qui l'a. Ce jour-là, c'est Thatch qui a trouvé le fruit. La règle est simple, tu le trouves, tu le bouffes ou tu le vends. Ton oncle l'avait identifié comme un logia, un type élémentaire, donc, rare et destiné à bien se vendre. Yami yami no mi, le fruit de l'obscurité. Et on a été aveugle, tous autant que nous sommes. Si on avait été plus attentif, on aurait pu intervenir pour empêcher cela. Je t'ai dit que je pensais qu'il était mort à cause d'un de mes hommes, tu te souviens ?
- Marshall D. Teach, oui. Il est vraiment mort ?
- Marco était toujours le premier debout. Il avait pour habitude de prendre un café avec Thatch pendant que ton oncle commençait à préparer le petit-déjeuner avec sa flotte. C'est son hurlement qui a réveillé tout le monde. Thatch était là, allongé sur le sol de sa cabine, dans une flaque de sang depuis longtemps sèche. Il avait encore un couteau planté dans le dos. Le poumon avait été touché. La cabine avait été fouillée et on avait certainement volé des affaires de ton oncle. J'ai pas attendu qu'on lui accorde les derniers rites. Je voulais la tête du traître qui m'avait pris mon meilleur ami. Tout le monde m'a dit de ne pas y aller, mais tu sais comment je suis quand je vois rouge.
Harry hocha la tête, bien au courant du défaut de sa mère de foncer tête baissée dans ce genre de situation. La mort de Sally en avait été un bel exemple.
- J'ai retrouvé Marshall qui m'a parlé d'un plan soi-disant pour devenir un pirate approuvé par le Gouvernement. Shichibukai comme on les appelle.
- Comme les Corsaires de ce monde ? C'était dans mon programme d'Histoire avec le commerce triangulaire et l'esclavage.
- Plus ou moins.
- Tu as refusé sa proposition.
Ace haussa les épaules à la constatation de son fils.
- Non seulement c'était de notoriété publique qu'on m'avait déjà proposé d'en faire partie et que j'avais dit non, mais en plus, son plan consistait à capturer mon petit-frère qui avait pris le large cette année-là. Il était hors de question que je le laisse faire. Dans un sens, sur ce coup-là, je vaux pas mieux que Black. Mais je pouvais juste pas reculer, parce que ça voulait dire que non seulement, mon petit-frère serait en danger, mais qu'en plus de ça, j'aurais échoué à venger Thatch. J'ai été vaincu. J'ai fini en prison et lui au Shichibukai. Au moins, Luffy était en sécurité.
Elle croisa ses jambes en tailleur sur le canapé alors que Harry se rapprochait.
- On a organisé mon exécution, et même si je réalisais à cet instant tout ce que j'allais perdre, tout ce que j'avais vécu avec plaisir, alors que j'avais passé ma vie à me demander si ça valait la peine de vivre… J'étais prêt à accepter mon sort. Mais Oyaji est arrivé avec tout le monde. Que ce soit notre équipage, ou nos alliés. C'était une guerre qui devait déterminer si je pourrais continuer de vivre ou non. J'en voulais pas de cette guerre. Si j'étais là, c'est parce qu'à vingt et un an, j'étais un gosse stupide qui avait désobéi à la seule personne que j'ai considéré comme un père, je voulais pas les voir impliqués, se battre pour moi, je vaux pas cette peine. Sans parler que mon stupide petit-frère a eu l'idée de vouloir me sauver aussi. Il a d'ailleurs réussi à me libérer de l'échafaud.
- C'est là qu'il est tombé ? demanda Harry en se rappelant de ce que sa mère lui avait raconté quelques années en arrière.
- J'ai pris pour lui un pilier de magma en travers de la poitrine.
Le regard de son fils tomba sur la poitrine juste couverte d'un bikini de sa mère, comprenant enfin l'origine de ces cicatrices qui l'avaient intrigué depuis toujours.
- J'ai tout juste eu le temps de lui faire mes adieux que je suis mort, continua la femme. J'ai même pas eu le temps de dire au revoir à Marco. Je suis mort dans les bras du garçon que je voulais à tout prix protéger parce qu'il m'avait plus d'une fois sauvé de moi-même.
Ace laissa échapper un long soupir tremblant, gardant ses yeux résolument hors de Harry.
- Si toi et tonton vous êtes morts, comment ça se fait que vous êtes ici en vie ? demanda doucement l'adolescent en se rapprochant un peu plus de sa mère.
- Pour Thatch, je n'en ai aucune foutue idée, et lui non plus. Pour moi, c'est différent. J'ai des souvenirs très vagues de ce qu'on peut appeler le monde des morts, mais je me souviens d'une voix qui dit que je dois me réincarner et accomplir une mission. Rien de plus, rien de moins. Que c'était le prix de ma seconde chance. Aujourd'hui encore, je ne sais toujours pas quelle est cette mission. Tout ce que je sais, c'est que j'étais prêt à dire non parce qu'on me demandait de prendre le corps de quelqu'un qui venait de mourir. Le corps d'une femme.
Le jeune sorcier se redressa, commençant à voir où voulait en venir sa mère.
- J'étais bien parti pour lui dire « fuck off » quand une femme est apparue devant moi, pleurant la mort de son époux et du sort qui attendait son fils en bas âge, désormais orphelin, maintenant qu'elle n'était plus là. Une rousse avec des yeux verts éclatants. J'ai compris que c'était sa place que j'allais prendre, et j'ai accepté pour ne pas abandonner un orphelin. Je lui ai dit que je prendrai soin de son enfant en lui souriant. L'instant suivant, j'étais devant Mister Voldemort qui devait certainement me demander qui j'étais ou d'où je sortais. J'ai pas compris la question à l'époque. J'ai juste senti la menace qu'il représentait et j'ai agi comme je le faisais depuis un petit moment déjà. Il a fini en grillade alors que tu étais dans mon dos, étrangement calme malgré la situation. Je pense que l'odeur a dû t'incommoder parce que tu as commencé à pleurer à cet instant, ou alors, tu as eu peur devant la propagation des flammes. Je t'ai pris avec moi et j'ai fui la maison, en tirant le corps de ton père dehors pour que sa dépouille ne disparaisse pas dans l'incendie. Tu connais la suite. Squattes, vols pour la survie, apprentissage sur le tas de l'anglais… J'ai appris ton nom et le nom des membres de ta famille dans un exemplaire de la Gazette que j'ai trouvé par hasard. Et nous voici ici aujourd'hui, bientôt treize ans après.
- Donc, si Lily Potter a disparu sans la moindre trace ce soir-là…
- Techniquement parlant, elle est toujours vivante. Seulement, c'est quelqu'un d'autre qui vit à sa place. Entre mon esprit et son corps, y'a eu fusion, d'où le fait que je ressemble pas à la femme qui t'a mis au monde, mais plus tout à fait au fils de Roger que j'étais. Mais je garde quelques caractéristiques. Je sais que j'ai des cheveux roux, si on fouille bien dans tout ce noir, mes yeux ont la même forme que les tiens et j'ai perdu quelques tâches de rousseurs, sans parler du changement de sexe plus qu'évident.
Elle frappa dans ses mains avec un « voilà » nerveux.
Harry regarda sa mère en silence, puis fronça les sourcils. Elle ne le regardait toujours pas.
Clac !
- D'où tu me frappes ?! s'indigna Ace en fixant l'adolescent avec des yeux ronds, sa main massant l'arrière de son crâne où elle avait reçu sa taloche.
- Fallait bien ça pour attirer ton attention. J'accepterai la punition que tu m'infligeras, lui dit le garçon en lui tirant la langue. Je me suis imaginé des scénarios improbables alors que ton histoire est simple… Je sais pas, je m'attendais à un truc pire que ça, vu comment tu dansais autour du sujet et au final…
Il soupira avant de sourire à sa mère.
- Tu as refusé le repos éternel, tu as accepté de changer de sexe, de vivre dans un corps qui n'est pas le tiens et tu as galéré pour moi. Tu crois que je me sens comment devant ça ? Honnêtement, quand j'ai dit que tu étais un cadeau d'une entité supérieure pour s'excuser de m'avoir offert une chance aussi pourrie, je pensais pas que c'était la Mort elle-même qui m'avait offert cette opportunité de te connaître ! Sans parler qu'apprendre qu'au final, tu vis dans le corps de ma mère biologique explique pourquoi je me suis toujours senti à l'aise avec toi. J'avais peut-être un an, mais j'aurais compris que quelque chose n'allait pas si mes deux parents disparaissaient comme ça, et qu'une inconnue se barrait avec moi, pourtant… C'était normal, pour moi. Ça a toujours été normal et j'ai la réponse à ce sentiment maintenant.
Un sourire malicieux étira les lèvres de l'adolescent.
- Et ça veut dire que le jour où j'aurai enfin un père digne de ce nom, les enfants qu'il te fera auront la moitié de leur sang en commun avec moi ! Tarde pas trop à me faire grand-frère, d'accord, m'man ?
- Espèce de sale gosse !
S'armant des coussins du canapé, elle attaqua son fils, qui se défendit en riant sous l'assaut, avant qu'il ne passe sous sa garde et se jette sur elle dans un plaquage de rugbyman qui les fit tomber du canapé. Ils restèrent étalés sur le sol, enlacés et souriants.
- Kaachan.
Ace leva la tête pour voir son fils qui avait la sienne appuyée sur son ventre.
- Aishiteru. Et je parle pas à Lily Potter mais bien à toi, Portgas D. Ace.
La pirate laissa retomber sa tête en arrière, les yeux fermés pour retenir ses larmes et une énorme boule dans la gorge. Ces quelques mots venaient de faire naître en elle une émotion forte, très forte. Si puissante qu'elle ne pût douter qu'elle-même aimait cet enfant de tout son être et que ce n'était pas simplement un résidu de la vie de Lily.
- Aishiteru mo, koneko-chan.
Et elle le tint plus fort dans ses bras.
La porte d'entrée s'ouvrit et bientôt, Thatch entra dans le salon pour les voir toujours au sol.
- Qu'est-ce que vous foutez à terre ?
- Un chaton m'a poussé du canapé et m'empêche de me relever.
- Miaou ! miaula Harry en riant.
Thatch leva un sourcil, remarquant les yeux étrangement humides de sa sœur, mais finalement, il se détourna en secouant la tête et marmonnant quelque chose sur les profondeurs inexplorées des D. en se dirigeant vers l'étage. La mère et le fils échangèrent un rire et se redressèrent pour se rasseoir sur le canapé. Harry reprit son petit-déjeuner et Ace son magazine avec un sourire persistant sur les lèvres.
- Pour le coup, c'est de la magie ou toujours cet akuma no mi qui te donne tes flammes ? demanda Harry avant de mordre dans un muffin.
Toujours une tuerie monumentale. Il devrait en garder un ou deux de côté pour faire goûter à Hermione. S'il arrivait à se retenir de tout manger.
- Je suis morte, donc, mon pouvoir a dû réapparaître dans mon monde d'origine, lui dit Ace en levant le nez de sa revue. Cependant, ta mère avait de la magie, donc, je pense que là encore, il y a eu une fusion. Comme toujours, tout ne vient pas gratuitement, parce que, ok, mes flammes sont là avec un contrôle encore plus poussé que ce que j'avais auparavant, grâce à la magie de ta mère, mais mes compétences s'arrêtent là. J'ai déjà essayé de faire marcher une baguette magique illégale et elle est juste entrée en combustion spontanée. Je pourrai jamais faire léviter un objet ou changer de couleur les cheveux d'une maîtresse d'école.
- J'étais un gosse ! se justifia Harry.
- Même si les circonstances n'étaient pas plaisantes, j'ai trouvé ça drôle quand tu me l'as raconté.
- Vas-y, fiche-toi de moi, j'te dirais rien, m'man.
- Jamais je me permettrais de me moquer de mon fils unique ! Après, rien ne m'empêche de rire doucement.
Harry attrapa un coussin à côté de lui et le lança sur sa mère qui le rattrapa au vol en riant.
- Le renvoie pas, j'ai un jus d'orange dans les mains, Dobby va se poser des questions si j'en renverse partout, pointa Harry en protégeant son verre de son mieux.
- Tricheur.
Thatch redescendit rapidement et remarqua le tableau vide.
- Les commères sont au château ? devina-t-il.
- Izou est parti y'a cinq minutes, lui répondit sa sœur.
- Ils vont en avoir des trucs à raconter. Je vais rester pour ton anniversaire, kabu, mais après, je vais devoir décoller. Grand évènement à Poudlard. Retour d'un vieux tournoi international entre écoles. Ne dresse pas une oreille intéressée, gamin, il faut avoir dix-sept ans à Halloween pour y participer.
- Ah. En attendant, tes muffins sont toujours aussi déments. Difficile d'en garder pour Hermione, commenta Harry avant de mordre dans la pâtisserie en question.
- Content que ça te plaise.
Ace leva un œil vers son frère qui agita les sourcils en souriant d'un air entendu. Sa sœur secoua la tête d'un air blasé et retourna à sa lecture.
.
.
Harry regarda Hermione goûter le muffin avec grande attention, profitant d'un creux durant le service pour se poser un peu. La sorcière ne mit pas longtemps à réagir, ayant l'air littéralement de fondre sur place avec le goût.
- Qu'est-ce que je disais, ça déchire ! sourit joyeusement le garçon.
Hermione avala sa bouchée et regarda la gourmandise comme si c'était le Saint Graal.
- Mais il fait quoi dans une école ?! Avec un talent pareil, il devrait ouvrir un restaurant, une pâtisserie ! C'est du gâchis !
- S'il avait fait ça, je suis pas certain que j'aurais rencontré mon oncle pour le coup.
- Exact, accorda la demoiselle.
Le D. se redressa en voyant un visage bien connu passer la porte du bar. Le jeune échangea un regard avec son oncle et les serveurs. Ce n'était pas toujours bon signe quand Lestrade venait les voir.
- Me regardez pas comme ça, je suis client aujourd'hui, grommela l'homme en s'asseyant dans une table tranquille.
- Qui est-ce ? Pourquoi tout le monde est nerveux ? souffla Hermione alors que son ami ramassait son plateau et son calepin pour la prise de commande.
- L'inspecteur Lestrade. Celui qui essaye d'envoyer ma mère en taule.
- Oh.
Harry jeta sur son épaule son torchon et alla voir l'homme qui retirait sa veste.
- Konnichiwa. Qu'est-ce que ça sera ?
- Ta mère est où ?
- Bureau. C'est l'oncle qui fait la surveillance des gosses.
Lestrade jeta un œil à Thatch qui croisa justement à cet instant les bras pour faire gonfler ses muscles nus avec son tee-shirt pendant qu'il discutait avec un client au comptoir.
- Vu comme ça…
- Boisson forte ou plus classique ?
- Un whisky m'irait bien.
Harry sembla réfléchir avant d'offrir un sourire digne du chat de Cheshire à l'homme.
- J'ai pas envie de débourser mon salaire en alcool, l'avertit le policier.
- Je songeais pas à ça. Je reviens.
Et il s'en alla vers le comptoir pour demander quelque chose à son oncle qui retint un éclat de rire. Pendant ce temps, Lestrade fit un tour du regard de la pièce et remarqua Hermione qui finissait le muffin en s'essuyant scrupuleusement la bouche avec une serviette en papier.
- Hey, miss.
La demoiselle le regarda avec perplexité et se leva pour le rejoindre.
- Comme tu t'appelles ?
- Je suis navrée, monsieur, mais la patronne m'a formellement interdite de donner mon nom à ses clients.
- Tu m'as l'air mineure. Tu sais au moins où tu es ?
- Oui pour les deux, et avant que vous ne posiez la question, mes parents savent que je travaille durant les vacances à mi-temps ici.
Enfin, ils savaient qu'elle bossait dans un bar, mais pas lequel. Elle n'était pas folle, elle tenait à son amitié et elle apprenait beaucoup depuis qu'elle avait commencé son service.
- Et ils laissent faire ?
- M'man leur a assuré que leur fille n'aurait aucun problème, pointa Harry en revenant avec un verre de whisky qu'il déposa devant Lestrade. Miss Parfaite est une camarade de classe. On est dans le même internat en Ecosse. Elle ne fait que le service jusqu'à neuf heures, rien de plus, rien de moins, merci de garder pour vous vos insinuations douteuses sur ma mère.
- Eh bien, si les parents de Miss Parfaite le savent, je présume que c'est de leur responsabilité. J'espère pour tout le monde que tu viendras pas pleurer au poste de police pour agression, demoiselle.
- C'est déjà arrivé ? s'enquit Hermione en regardant son ami.
- Pas à ma connaissance, lui répondit le garçon.
- T'es pas con, ni naïf, gamin, pour savoir que le risque zéro n'existe pas, lui pointa Lestrade en prenant son verre.
Il but une gorgée et manqua de la recracher sous la surprise.
- C'est quoi ce truc ?!
- Whisky pur feu. La recette est secrète ! sourit machiavéliquement Harry.
La vélane et la succube entendirent le commentaire et éclatèrent de rire.
- C'est fort, ce truc !
- C'est une spécialité du patelin où est notre école.
- T'as pas fait ça ! s'indigna Hermione à son ami en comprenant à quoi il faisait référence.
Servir à un moldu une boisson sorcière ? Mais il pensait à quoi ? Non, Ace pensait à quoi ?!
- On a tout ce qu'il faut pour nous le permettre. Sinon, trêve de plaisanterie, qu'est-ce qui nous vaut cette visite, inspecteur ?
- Je voulais remercier ta chère mère pour l'envoi massif qu'elle a fait.
Hermione regarda son ami avec interrogation.
- Elle a choppé un gars avec d'autres de ses copains, qui essayaient de dealer dans nos salles de shoots, et donc sur notre territoire. La consommation, elle est ok dans les salles, mais pas la vente. Elle a remonté le réseau et la cam a été expédiée chez les flics avec tous les documents et autres qu'elle a trouvés.
- On pourra retrouver le corps de la tête de l'affaire quand ? demanda Lestrade.
Harry haussa les épaules sans répondre. Cette fois, c'était lui qui avait achevé le type, alors, il n'était pas pressé qu'on retrouve le corps. Et tant que lui-même ne disait pas que le gars était mort, Lestrade ne pouvait ouvrir aucune enquête pour meurtre, seulement disparition. Après tout, l'homme avait très bien pu partir à l'étranger ou se ranger, donc…
- Je m'en doutais. Et tu acceptes ça, demoiselle ?
- Je ne cautionne pas, mais je suis là pour apprendre à voir sous la surface, et peu importe ce que fait la patronne, elle reste la mère de mon meilleur ami. Maintenant, si vous le permettez, je ne suis pas payée pour ne rien faire.
Et d'un air digne, elle s'éloigna sous les rires attendris des filles.
- Elle a du caractère ta petite-copine. Autant que ce whisky.
Et l'homme but une autre gorgée de son verre.
- C'est pas ma petite-copine, c'est une Miss Parfaite première de la classe à qui on apprend à ne pas croire tout ce qui est dit dans les livres. Voici le reçu, et bonne soirée, inspecteur Lestrade. Je dois reprendre le service, maman viendra te chercher quand elle en aura fini.
- Elle et son foutu sixième sens.
Harry abandonna l'homme avec le ticket de caisse.
- Vous avez vraiment le droit de vendre du whisky pur feu ? demanda Hermione en le rejoignant au comptoir avec des verres vides.
- On a cinq boissons sorcières, dont le whisky, qu'on peut vendre, car assez normales pour ne pas attirer l'attention, lui dit Thatch en récupérant les verres. Il a suffi que Samuel montre le shot B52 pour qu'on nous donne l'autorisation. Les sorciers sont stupides et sous-estiment l'inventivité non-magique. Ils ont juste deux siècles de retard, c'est presque triste. Nous, on marche sur la Lune et eux, ils en sont encore au train à charbon et à l'éclairage à la bougie.
Ace descendit à cet instant de son bureau, fit un signe de tête à Lestrade qui alla la rejoindre avec son verre. Et avec une étrange synchronisation, la porte d'entrée s'ouvrit à cet instant sur le professeur Lupin dans une tenue moldue tout aussi rapiécée que ses robes d'enseignants.
- Ah, on va voir qui de nous deux a gagné, kabu, nota Thatch.
- Pour l'instant, la chance est de mon côté, lui rétorqua son neveu en lui tirant la langue.
Remus les remarqua et eut un mouvement de surprise en notant l'immense sculpture capillaire sur le crâne de son ex-collègue. La pompadour faisait toujours cet effet la première fois qu'on la voyait.
- Comment il a trouvé le bar ? demanda Hermione avec perplexité.
Même Drago et Neville voire Luna seraient incapables de dire où il était sans elle pour les guider.
- Je lui ai donné l'adresse. S'il y a bien un homme qui a besoin d'aide, c'est lui, pointa Thatch alors que le maraudeur prématurément vieilli venait à leur rencontre.
- Ce jeune homme, je me doutais de le trouver ici, mais vous, c'est une surprise, jeune fille. Bien le bonjour, salua Lupin.
- Bonjour à vous ! salua Harry. Miss Parfaite est ici pour retirer son nez des livres et se faire de l'argent de poche.
- Et dire à ta mère toutes les conneries qui sont faites dans son dos, lui rétorqua Hermione avant de se tourner vers leur ancien professeur. Vous avez mauvaise mine.
- La pleine lune ne m'a pas fait de cadeau.
- Assis-toi au bar, Ace est occupée pour l'instant. Je vais te servir un remontant, cadeau de la maison, lui dit Thatch en se mettant au travail.
Les deux jeunes filèrent vers la salle pour nettoyer des tables.
- Il porte l'odeur du sang. Moins que sa mère ou vous, Alpha, mais il porte cette odeur, commenta Remus en regardant les deux adolescents à leur tâche se prenant gentiment le bec avec leur collègue vélane.
- Ace l'a mis devant le choix. Il n'a pas pris l'option qu'on aurait voulu.
Thatch déposa un verre de cognac devant Remus et regarda tristement son neveu qui imitait certainement une pimbêche de l'école pour la plus grande hilarité des filles du service.
- On sait que c'est certainement pas ce que les Potter auraient voulu pour lui. Ace voit ça comme un échec lamentable dans sa promesse à Lily de prendre soin de l'enfant. Tout ce qu'on peut faire à présent, c'est lui montrer comment agir dans ce monde crade pour faire un peu de bien.
- En tuant des gens ?
- Le gars était à la tête d'un réseau de stupéfiants. D'une façon, ou d'une autre, il n'en serait pas sorti vivant. C'est le fait que ce soit Harry qui ait appuyé sur la détente qui nous fait chier.
Avec un lourd soupir, le commandant nettoya son bar.
- On est pas naïf au point de croire que c'est bien, que c'est une mission divine, qu'on devrait nous encourager, que ça ne nous retombera pas sur la gueule. Mais on a grandi dans ce milieu. Ça nous a aidé à sortir de la misère, même si ça nous déplaisait. On se dit seulement, pour rendre la chose plus supportable, qu'on fait ça pour tirer vers le haut d'autres personnes. Les sortir du caniveau pour essayer autre chose. Pour parvenir à s'en sortir. Ne plus supporter la misère. Espérer juste vivre un peu. L'argent qu'on brasse sert à ça. C'est comme ça que j'ai été élevé et c'est le même genre de morale qui a fait qu'Ace a réussi à s'intégrer aussi bien parmi notre famille. Notre sens moral est peut-être distordu, mais on en a un, on est pas de vulgaire vendeur de mort à la recherche de fric. Ce qu'Ace voulait à la base, c'était apprendre à Harry que rien ne tombe tout cuit dans l'assiette, que la vie ne fait aucun cadeau et qu'il faut se battre dur pour s'en sortir.
- En ça, elle a réussi, j'ai jamais vu quelqu'un travailler aussi dur que lui ou Hermione.
- Quand il était gosse, il voulait la rendre fière. Puis il a grandi, et avec des yeux de futur adulte, il s'est mis à regarder autour de lui.
- Je vois.
- On te demande pas de cautionner, simplement un peu d'aide pour que le kabu ne se perde pas en chemin. Qu'il ne plonge pas totalement à la poursuite de ce qui brille ou d'un pouvoir éphémère.
Remus eut un sourire aigre en sirotant son verre.
- Cet argumentaire sent la préparation.
- J'ai pas la langue acéré de Marco ni sa vivacité d'esprit pour improviser ça sur le pouce, avoua Thatch en riant. Mais tout est vrai dans ce que j'ai dit. Essaye au moins de voir ce que l'on fait et cherche à faire, avant de rameuter tout le monde, ce qui serait, entre nous, une grossière erreur.
- En quoi ? Outre que ça signifierait la fin de l'adoption ?
Le cuistot s'accouda au bar et dit avec sérieux la réalité des choses :
- Ace a toujours eu besoin de garde-fou. Quand elle était gosse, c'est son petit-frère d'adoption qui a pris ce rôle, puis ses potes et enfin, nous, les Newgate, les Shirohige. Je l'ai déjà vu perdre son sang-froid et il fallait s'y mettre à plusieurs pour l'empêcher de faire une connerie. Aujourd'hui, si elle se contente de ça -il montra le bar- c'est parce que Harry lui sert de garde-fou à son tour et il en a parfaitement conscience. Si on les sépare, Ace n'aura plus aucune raison de rester raisonnable, elle voudra son fils, par tous les moyens nécessaires, quitte à mettre le pays à feu et à sang. La seule solution sera soit de lui rendre Harry, soit de l'abattre comme un chien enragé, ce qui sera difficile, soit de lui lâcher dessus les Détraqueurs. Outre notre famille et Harry, il n'y a qu'une personne qui puisse témoigner de ce qu'il se passe quand elle pète un plomb et c'est l'homme qui a infligé à Harry sa cicatrice. Sa simple survie reste un avertissement sonnant pour la police moldue et la Reine de ce qu'il se passerait si on touche à l'enfant. Vu que les sorciers sont arrogants, un avertissement de ce genre ne ferait que les inciter à faire la bêtise, justement.
- Elle a un potentiel si destructeur que ça ?
- Elle ne fait pas de la banale pyrokinésie, Remus. Elle est le feu. C'est un incendie qui est isolé du monde par une simple bulle de savon. Et une bulle, ça s'éclate facilement. Elle se perdrait elle-même dans ses flammes. En comparaison, un feu de forêt n'est qu'un simple pétard mouillé. Ça fait peur, c'est exact, mais il suffit juste de ne pas chercher à éclater la bulle et tout se passera bien.
- C'est quoi le but, me faire peur ou me convertir ?
- Un peu des deux, peut-être, que tu dises pas qu'on ne t'a pas averti avant de signer. On a besoin d'aide, et toi aussi, tu en as besoin. C'est quand la dernière fois que tu t'es regardé dans le miroir, que tu as ressenti un semblant d'amour propre, de fierté à ton égard ? Essaie, au moins pour l'été. Ace mord pas si tu la cherches pas et elle est même quelqu'un qui adore rire. Tu veux pas tenter ta chance ? Au minimum pour goûter mes cookies ? Sans me venter, je suis un putain de génie derrière les fourneaux.
- En voilà une étrange technique de recrutement !
- On n'est pas là pour faire peur. Enfin, si, mais c'est pas de la peur pour la peur. On est là pour offrir à ceux qui le veulent une chance de se relever, et servir de menace pour les autres petits cons des bas-fonds. Certes, c'est sale et moche, mais les résultats sont là. Les criminels ont peur de bouger une oreille par crainte de déplaire à Ace. S'ils violent les quelques règles qu'elle a instaurées, ils savent que c'est la dernière chose qu'ils pourraient avoir fait. Mais en échange, les rues sont plus calmes, moins dangereuses. Tous les débris qui foutaient la merde dehors viennent la voir pour oublier leurs malheurs. Et on commence à s'attaquer à la seconde partie de l'équation depuis l'an dernier.
La porte menant à l'étage s'ouvrit et Ace en sortit avec Lestrade qu'elle salua vaguement sous le regard du bar. L'homme vint payer son whisky à Thatch et s'en alla en jetant un regard méfiant à Remus.
- Tu peux nous aider à rendre ce monde à peine un peu meilleur pour ceux qui viennent après nous, tout comme tu peux rester à te morfondre sur toi-même. Harry a fait son choix, c'est à toi de faire le tiens, reprit le pirate quand le policier fut parti.
Ace vint rejoindre les deux hommes au comptoir et tendit une main à Remus, comme si elle avait suivi la conversation avec eux depuis le début.
- Alors, tu tentes ta chance ? demanda-t-elle en renforçant cette impression.
Le Maraudeur hésita et accepta la poignée de main.
- Je veux bien tenter de voir ça, mais au moindre pas de travers, je retourne vers Dumbledore.
- Tu n'en auras pas besoin, assura la femme avec un sourire rayonnant. On prend soin des nôtres. Et juste pour les cookies de mon stupide frangin, ça vaut le coup.
- Donc, même cette affaire de cookies est une idée prévue à l'avance ? s'enquit Remus avec humour.
Thatch éclata de rire en secouant la tête alors qu'Ace adressait un regard plein de lassitude au roux.
- Non, c'est une idée bien trop récurrente de monsieur de penser qu'on pourrait dire « amen » à toutes ses conneries pour ses cookies. Il a déjà essayé cette méthode sur moi. Même si j'admets que beaucoup seraient capable de tuer pour eux, son idée ne tient pas la route.
- C'est vrai qu'il faut avoir une tête d'ananas ou des yeux verts pour pouvoir t'acheter.
Harry revint au comptoir à cet instant et fit glisser la commande à son oncle qui se prenait une taloche de la part d'Ace.
- Pourquoi vous vous chamaillez cette fois ? demanda l'adolescent.
- Sur la meilleure façon d'obtenir quelque chose de ta mère ! ricana Thatch.
- Bosse, au lieu de dire des conneries, lui reprocha sa sœur avant de revenir à Remus. Eh bien, bienvenu dans le projet. On peut rester sur un accord à l'oral ou mettre tout ça sur papier. Comme Thatch l'a dit, je suis une bille pour l'administratif, encore plus pour ce qui est de celui…
Elle fit un geste de la main et Remus hocha la tête en comprenant qu'elle parlait du monde sorcier.
- De l'autre côté, même si Harry a de bons résultats, je serais pas contre quelqu'un qui a vraiment eu une éducation dans les environs pour répondre à ses questions quand il en a. Je n'attends pas de toi à ce que tu voles des gens, que tu en tues, etc, etc, je le fais très bien toute seule. J'ai juste trop de trucs à gérer qui impliquent des papiers, et j'ai tendance à oublier que je n'ai que vingt-quatre heures dans une journée et que la paperasse ne sert pas à faire des feux de joie. J'ai deux bureaux pour faire une distinction entre ce qui est clean et ce qui est sale. Si t'as besoin d'argent rapidement, aucun souci, je peux te faire une avance sur ton salaire. Si je fais ou dis quelque chose qui te déplaît, je t'écoute. Si c'est au sujet du boulot, y'a peu de chance que tu puisses me faire changer d'avis, mais j'accepterai sans broncher de me faire traiter d'imbécile, d'assassin, de voleuse, de criminelle…
- Abrège, m'man, conseilla Harry en récupérant la commande prête.
Et il alla servir les clients.
- Bref, j'embauche pas une machine sans émotion, donc, si t'as quelque chose à dire, ne le garde pas pour toi. Concernant ta sécurité…
- Je m'en charge. Et je te laisse pas le choix pour une remise à niveau en défense, qui comprend apprendre à se passer des abracadabra, imposa Thatch.
- Et si je refuse ? s'enquit Remus.
- Je pense t'avoir dit que je te laissais pas le choix. Si tu refuses, je débarque chez toi pour te prouver par une simple démonstration que tu en as besoin.
- Le met pas au défi, il en est capable, avertit Ace. De mon côté, si je vois que tu te mets en danger, ou si je sens un danger, chose à ne pas écarter, même pour un rôle de secrétaire, je te le dirais. Par contre, tout ça apporte bien assez de risque pour Harry. Si je vois que tu en rajoutes, tu auras un avertissement. Pas deux.
Et elle leva un premier, puis un second doigt pour appuyer son message.
- L'avertissement est à double sens. Si je vois Harry mit volontairement en danger, je ne resterai pas les bras croisés, annonça Remus.
Contre toute attente, les deux pirates eurent un sourire d'approbation.
- Dernière chose, évite de dire à Dumbledore et compagnie que tu travailles pour moi. Pour ta simple tranquillité et ta survie. Sauf si tu tiens absolument à couper les ponts avec eux, ou découvrir le désagréable rôle d'espion. Je te demanderai rien de ce que traficote Dumbledore, et j'attends de toi qu'il ne sache rien de ce que je fais, sauf si tu décides tout simplement de me balancer. Tu veux dire quelque chose à son sujet, c'est ta responsabilité, tu es un grand garçon. Si tu te retrouves dans un interrogatoire avec moi, c'est en tant que témoin, certainement pas en tant que victime, parce que s'il y a une fuite, je saurais si tu es impliqué et j'hésiterais pas à sévir.
Le geste de main sur sa gorge était explicite sur comment elle sévirait.
- C'est bien compris, assura Remus.
- On commence ?
- C'est vous la patronne.
- Dernière chose. Me vouvoie pas. Vraiment. On a le même âge, donc abstiens-toi. Et pareil pour Thatch et Harry, sauf si l'un d'eux te dit le contraire.
- Le vouvoiement, c'est quand je fais le gentil professeur intègre, grimaça Thatch. Ou quand je suis dans la merde avec Cassandra.
- Ce qui arrive souvent, rappela Ace. Donc, nous y allons ?
- Allons-y, répondit le sorcier.
- N'oublie pas de payer ton neveu, Thatch. T'as perdu ton pari.
Et sur ces mots, Ace s'en alla avec Remus pour rejoindre l'étage. Hermione vint au comptoir juste après leur départ pour déposer des verres à nettoyer et une commande.
- Il va travailler ici ?
- Il en a bien besoin. Et moi qui pensais qu'il refuserait. Kabu, viens chercher ton argent !
Le cri de victoire de Harry tira quelques rires dans la salle.
