Chapitre 14 : Carrie
Sur l'île de Ponza, le soleil se couchait doucement, baignant les falaises d'une lumière dorée. Les vagues venaient s'écraser contre les rochers en contrebas, leur bruit régulier se mêlant au chant des cigales. Dans cette atmosphère paisible, Circé se tenait sur une terrasse, en plein milieu d'un ancien rituel. Entourée de bougies et de symboles gravés dans la pierre, elle ferma les yeux, laissant son esprit plonger dans les flux d'énergie magique qui traversaient le monde.
Pour Circé, ces moments de communion avec la magie étaient des instants précieux. C'était ainsi qu'elle sentait les perturbations du monde, les changements, les menaces émergentes. Mais aujourd'hui, quelque chose de sombre et de troublant brisa la tranquillité de son rituel. Une vague d'émotions puissantes et chaotiques s'abattit sur elle, comme une tempête de douleur et de colère. Circé se raidit, ses paupières frémissant sous l'intensité de ce qu'elle percevait.
Elle concentra son esprit, cherchant l'origine de cette perturbation. Une vision s'imposa alors à elle : une jeune fille, seule, terrifiée, en proie à une douleur profonde. Cette enfant possédait des pouvoirs télékinétiques immenses, mais elle n'avait aucun contrôle sur eux. Ils étaient alimentés par une colère accumulée au fil des années, une rage due aux mauvais traitements qu'elle subissait. Circé sentit la souffrance de cette fille comme une vague qui menaçait de déborder et de provoquer un carnage.
"C'est une enfant perdue," murmura Circé, encore sous le choc de la vision. "Et si rien n'est fait, elle causera la destruction autour d'elle."
Elle rouvrit les yeux, son regard grave se posant sur l'horizon. Elle savait qu'elle devait agir, mais cette situation nécessitait l'intervention de Gabriel. Circé prit une profonde inspiration, puis se leva pour rejoindre son compagnon. Dans la vaste maison qu'ils partageaient, Gabriel Dracula était assis dans le salon, plongé dans la lecture d'un vieux grimoire. Il leva les yeux lorsqu'il la vit entrer, immédiatement alerté par l'expression préoccupée de Circé.
"Quelque chose ne va pas," dit-il calmement, fermant le livre. "Je le sens."
Circé hocha la tête, s'approchant de lui avec une démarche lente mais déterminée. "Oui," répondit-elle. "Je viens de ressentir une perturbation dans les énergies magiques. Une jeune fille, quelque part dans une petite ville reculée, possède des pouvoirs qu'elle ne peut pas contrôler. Elle est sur le point de tout perdre."
Gabriel fronça les sourcils, écoutant attentivement. "De quels pouvoirs parles-tu ?"
"Des pouvoirs télékinétiques," répondit-elle. "Immensément puissants, mais incontrôlés. Elle est en colère, tourmentée par des abus constants. Elle vit dans la peur, et je crains qu'elle ne fasse exploser cette douleur d'une manière qui causera un véritable carnage."
Le vampire se leva, son regard sombre se posant sur Circé avec intensité. "Je comprends. Cette fille est au bord du précipice, et il faut l'en éloigner."
Circé hocha la tête. "Oui. Si nous n'intervenons pas, elle pourrait devenir une menace non seulement pour elle-même, mais pour tous ceux qui l'entourent. Ce n'est pas de la malice qui la pousse, mais du désespoir. Elle n'a jamais eu quelqu'un pour l'aider à comprendre ce qu'elle est vraiment."
Gabriel marcha jusqu'à la fenêtre, contemplant la mer agitée en contrebas. "Je dois la retrouver," dit-il après un moment. "Si je peux lui parler, lui montrer qu'elle n'est pas seule, peut-être pourra-t-elle éviter cette tragédie."
Circé le rejoignit près de la fenêtre, son regard s'adoucissant légèrement. "Je sais que tu pourras l'aider, Gabriel. Mais sois prudent. Cette fille est vulnérable, et tout ce qu'elle a connu jusqu'à présent n'a été que douleur et rejet. Approche-la avec la même patience que tu as eue avec moi."
Gabriel esquissa un sourire en coin, un sourire plein de fierté et de tendresse. "Je n'oublierai jamais ce que nous avons traversé, Circé. Et je ferai tout pour éviter que cette enfant subisse le même sort."
Ils restèrent un instant silencieux, partageant cette même détermination silencieuse. Puis, Gabriel se détourna de la fenêtre, ses traits se durcissant alors qu'il se préparait à partir. Circé l'observa, sachant que malgré la distance qui les séparerait, elle serait toujours à ses côtés.
"Je te guiderai si tu as besoin de moi," dit-elle doucement, posant une main sur son bras. "Je serai avec toi, en pensée, comme toujours."
Gabriel posa sa main sur celle de Circé, la serrant brièvement en signe de gratitude. "Merci. Je ne doute jamais de ta présence."
Puis, sans plus de paroles, il quitta la pièce, se dirigeant vers la sortie de la maison. À l'extérieur, la nuit tombait, et les ombres s'allongeaient sur le sol. Gabriel, avec sa maîtrise des ténèbres, se fondit naturellement dans la nuit. Alors qu'il quittait Ponza pour se diriger vers cette ville lointaine où résidait Carrie White, une nouvelle mission de rédemption s'amorçait pour lui.
Circé, de son côté, resta seule dans la maison, mais son esprit était déjà tourné vers Gabriel. Elle ferma les yeux, se concentrant pour maintenir un lien télépathique avec lui, prête à l'aider si le besoin s'en faisait sentir. La nuit était paisible sur Ponza, mais Circé savait que, loin de là, une autre nuit beaucoup plus tourmentée se préparait pour une jeune fille perdue dans le chaos de ses propres pouvoirs.
Leur mission n'était pas seulement de sauver cette fille des autres, mais aussi de la sauver d'elle-même.
Gabriel arriva discrètement dans la petite ville de Chamberlain, dans le Maine, où vivait Carrie White.
La lumière du jour s'était adoucie, baignant les rues d'une teinte dorée qui contrastait avec l'atmosphère oppressante que Gabriel percevait. En apparence, la ville semblait paisible, mais derrière cette tranquillité, Gabriel pouvait sentir les tourments, la souffrance silencieuse qui pesait sur une âme fragile.
Il resta en retrait, observant la vie quotidienne des habitants, scrutant chaque détail de cette ville morne. Gabriel s'était volontairement abstenu d'utiliser ses pouvoirs vampiriques pour se fondre dans la masse. Il voulait d'abord comprendre le contexte avant d'agir. Il ne lui fallut pas longtemps pour repérer Carrie White.
Elle sortait de l'école, la tête basse, traînant son sac à dos usé derrière elle. Ses épaules affaissées et son regard fuyant révélaient une douleur intérieure immense. Ses camarades passaient à côté d'elle, certains gloussant, d'autres murmurant des insultes à son encontre. Carrie les ignorait du mieux qu'elle pouvait, mais Gabriel pouvait sentir la tempête qui grondait en elle, prête à éclater.
Il suivit discrètement la jeune fille, la voyant rentrer chez elle, dans une maison terne, presque aussi abîmée que l'âme de sa résidente. De là, il observa les interactions avec sa mère, une femme austère et fanatique. Cette femme exerçait une emprise terrifiante sur Carrie, usant de menaces religieuses et de punitions physiques pour la maintenir sous contrôle. Gabriel assista, impuissant pour l'instant, à une scène où la mère de Carrie l'humiliait, lui hurlant dessus pour des raisons futiles, traitant sa propre fille de "pécheresse", l'enfermant dans un placard pour la forcer à prier.
Gabriel serra les poings, ressentant l'injustice de la situation. Il savait que ce genre de maltraitance, combinée aux brimades qu'elle subissait à l'école, alimentait la colère de Carrie. C'était cette rage, ce désespoir qui nourrissait ses pouvoirs. Ses pouvoirs télékinétiques étaient liés à ses émotions, et Gabriel sentait que, tôt ou tard, cette colère se libérerait d'une manière destructrice.
Il attendit le bon moment pour l'approcher. Il savait qu'il devait choisir un instant où Carrie serait seule, sans la présence oppressante de sa mère ou le regard moqueur de ses camarades. Ce moment arriva en fin de journée, alors que Carrie s'était réfugiée dans un petit parc isolé après l'école. Elle était assise sur un banc, les yeux perdus dans le vide, comme si elle était accablée par le poids de sa propre existence.
Gabriel s'avança doucement, sans bruit, jusqu'à se retrouver à quelques pas d'elle. Il ne voulait pas l'effrayer, mais il savait que la méfiance habitait cette jeune fille. Il s'arrêta à une distance respectable, adoptant une posture non menaçante.
"Carrie," dit-il d'une voix calme mais grave.
Elle sursauta, levant brusquement la tête pour le regarder, ses yeux écarquillés. "Qui êtes-vous ?" demanda-t-elle, méfiante. "Comment connaissez-vous mon nom ?"
Gabriel la regarda un instant avant de s'asseoir lentement sur le banc, à une distance qui lui permettait de ne pas envahir son espace personnel. "Je m'appelle Gabriel," répondit-il. "Je suis ici pour t'aider."
Carrie fronça les sourcils, visiblement troublée. Elle recula légèrement sur le banc, serrant son sac contre elle. "Pourquoi voudriez-vous m'aider ? Vous ne me connaissez même pas…"
Gabriel inspira profondément, son regard fixant celui de Carrie avec intensité. "Je te connais plus que tu ne le crois. Je sais ce que c'est d'avoir un pouvoir qui te dépasse, d'avoir l'impression que le monde entier est contre toi." Il fit une pause, observant sa réaction. "J'ai vu ce que tu traverses. Ta colère, ta douleur... Je les ressens aussi."
Les lèvres de Carrie tremblèrent, mais elle garda le silence, hésitant entre l'incrédulité et la curiosité. Gabriel continua, choisissant ses mots avec soin.
"Je ne suis pas ici pour te juger. Je suis ici pour t'aider à comprendre ce que tu es, et à maîtriser ce pouvoir avant qu'il ne te détruise, toi et les autres."
Carrie baissa les yeux, ses mains tremblant légèrement. "Vous ne pouvez pas comprendre… Vous ne savez rien de ce que c'est que d'être… moi," murmura-t-elle.
Gabriel sentit la tension dans sa voix, cette frustration accumulée depuis des années. Il savait qu'elle était sur le point de céder, mais il devait la convaincre qu'il était digne de sa confiance. D'un geste délicat, il ramassa un petit caillou du sol et, sans dire un mot, il le fit léviter entre ses doigts. Le caillou flottait doucement dans l'air, tournant sur lui-même, comme s'il défiait les lois de la gravité.
Les yeux de Carrie s'écarquillèrent encore plus, cette fois sous l'effet de la surprise. Elle observa le caillou en silence, fascinée par ce qu'elle voyait. "Comment... ?" murmura-t-elle.
Gabriel sentit la tension dans sa voix, cette frustration accumulée depuis des années. Il savait qu'elle était sur le point de céder, mais il devait la convaincre qu'il était digne de sa confiance. D'un geste délicat, il ramassa un petit caillou du sol et, sans dire un mot, il le fit léviter entre ses doigts. Le caillou flottait doucement dans l'air, tournant sur lui-même, comme s'il défiait les lois de la gravité.
Les yeux de Carrie s'écarquillèrent encore plus, cette fois sous l'effet de la surprise. Elle observa le caillou en silence, fascinée par ce qu'elle voyait. "Comment... ?" murmura-t-elle.
Gabriel laissa le caillou retomber doucement sur le sol, puis fixa de nouveau son regard dans celui de Carrie. "Je te l'ai dit, Carrie. Je sais ce que c'est de posséder un pouvoir immense. Je sais aussi à quel point il peut être dangereux si on ne le contrôle pas."
Elle resta silencieuse, ses pensées tourbillonnant dans sa tête. Gabriel savait qu'elle avait encore des doutes, mais il sentait aussi qu'elle commençait à baisser sa garde.
"Je ne suis pas ici pour te faire du mal, Carrie," reprit-il doucement. "Je suis ici pour t'apprendre. Pour te montrer qu'il existe une autre voie. Tu n'es pas obligée de laisser ta colère te dominer."
Carrie serra les poings, ses yeux s'emplissant de larmes. "Et si je ne peux pas ? Si je ne suis pas assez forte pour… pour les arrêter ?"
Gabriel se leva doucement et s'approcha d'elle avec précaution, tendant une main vers elle sans forcer le contact. "Tu es plus forte que tu ne le penses, Carrie. Mais tu n'es pas seule. Je peux t'aider à contrôler cette colère, à canaliser ce pouvoir pour que tu puisses vivre en paix avec toi-même."
Carrie regarda Gabriel avec une vulnérabilité désarmante. Pour la première fois de sa vie, elle voyait quelqu'un qui ne la jugeait pas, quelqu'un qui ne la méprisait pas. Une lueur d'espoir naquit dans son regard.
"Je ne veux pas faire de mal aux gens," murmura-t-elle. "Mais je ne sais pas comment m'arrêter…"
Gabriel hocha la tête. "C'est pour cela que je suis là. Tu n'es pas seule, Carrie. Je vais t'aider à apprendre, je te le promets."
Carrie, pour la première fois, esquissa un faible sourire, un sourire tremblant, mais sincère.
Gabriel avait choisi un endroit isolé pour commencer l'enseignement de Carrie. Ils se retrouvaient chaque après-midi dans un parc abandonné à l'extérieur de la ville, loin des regards curieux et des moqueries. Ici, le vent soufflait doucement à travers les arbres nus, et le calme des lieux permettait à Carrie de se concentrer sur son apprentissage. Gabriel savait que pour elle, l'environnement devait être apaisant, un contraste net avec les tumultes de sa vie quotidienne.
Les premières leçons portaient sur la méditation. Gabriel s'assit en face de Carrie, les jambes croisées, et lui montra comment respirer lentement et profondément, pour calmer son esprit. "Tout commence ici, dans ton cœur," lui expliqua-t-il. "Si tu contrôles ta respiration, tu contrôles ton esprit. Et si tu contrôles ton esprit, tu contrôles tes pouvoirs."
Carrie, bien que réticente au début, essayait de suivre ses instructions. Ses épaules étaient encore tendues, son regard agité, mais au fil des jours, Gabriel voyait des signes de progrès. "Concentre-toi sur ton souffle, Carrie. Laisse ta colère s'évaporer avec chaque expiration," murmurait-il, d'une voix apaisante. Par moments, elle réussissait à apaiser le chaos qui régnait en elle, mais ce n'était jamais pour longtemps. La moindre pensée des brimades subies ou de sa mère suffisaient à faire déraper son équilibre fragile.
Un après-midi, alors qu'ils pratiquaient dans le parc, Circé intervint par télépathie, sa voix résonnant doucement dans l'esprit de Gabriel. "Elle fait des progrès, mais il faut aller plus loin. Montre-lui que ce pouvoir n'est pas seulement une malédiction, mais qu'il peut être un outil de transformation. Utilise ses émotions, mais apprends-lui à les canaliser avec précision."
Gabriel écouta attentivement. Circé, bien qu'à distance, restait vigilante et intuitive quant aux besoins de Carrie. Elle comprenait la nature du pouvoir mieux que quiconque, et son soutien était crucial dans cette entreprise. "Je vais lui montrer," répondit-il mentalement.
Gabriel se tourna vers Carrie, qui le regardait avec des yeux interrogateurs, comme si elle avait senti qu'il se passait quelque chose. "Nous allons essayer autre chose aujourd'hui," dit-il avec un sourire bienveillant. "Tu as appris à calmer ton esprit. Maintenant, il est temps de passer à l'étape suivante : contrôler tes émotions tout en utilisant tes pouvoirs."
Carrie hésita, mordant nerveusement sa lèvre. "Je... je ne suis pas sûre d'en être capable," avoua-t-elle d'une voix tremblante.
Gabriel se leva doucement, tendant une main vers elle. "Tu en es capable, Carrie. Tu l'as déjà fait, mais tu ne le réalises pas encore. Viens."
Il la conduisit vers un arbre à quelques mètres de là, un vieux chêne dont les branches s'étendaient au-dessus d'eux comme des bras protecteurs. Gabriel ramassa une petite pierre au sol et la plaça devant Carrie. "Concentre-toi sur cette pierre," dit-il. "Je veux que tu la fasses léviter. Mais cette fois, ne laisse pas ta colère te guider. Utilise ta concentration, ta volonté."
Carrie fronça les sourcils, fixant la pierre avec une intensité presque palpable. Elle tendit la main vers elle, sa paume tremblante, et la pierre commença à vibrer légèrement. Mais aussitôt que ses pensées dérivèrent vers les brimades subies à l'école, la pierre retomba brutalement au sol.
"Ce n'est pas grave," murmura Gabriel. "Recommence. Tu peux le faire."
Carrie inspira profondément, essayant de suivre les conseils qu'il lui avait donnés. À la troisième tentative, la pierre se souleva lentement du sol, flottant doucement dans l'air. Un sourire timide apparut sur le visage de Carrie, mais il fut de courte durée. Soudain, un souvenir de sa mère hurlant sur elle envahit son esprit, et la pierre fut projetée avec violence contre l'arbre, se brisant en morceaux.
Carrie recula, horrifiée par ce qu'elle venait de faire. "Je... je ne peux pas... je ne contrôle rien," sanglota-t-elle, des larmes coulant sur ses joues.
Gabriel s'approcha, posant une main réconfortante sur son épaule. "Tu n'es pas encore prête, mais tu es sur la bonne voie. Chaque fois que tu échoues, tu apprends quelque chose de nouveau. Il te faut du temps, Carrie. Ne sois pas trop dure avec toi-même."
Carrie hocha la tête, mais la frustration était visible dans ses yeux. Elle voulait tellement réussir, mais son passé pesait lourdement sur elle, comme une ombre qu'elle n'arrivait pas à dissiper. Gabriel le savait, et il était prêt à lui donner tout le temps nécessaire. "Laisse cette colère venir, mais ne lui permets pas de te contrôler," dit-il doucement.
Les jours passaient, et avec chaque leçon, Carrie gagnait un peu plus en maîtrise. Gabriel continuait de lui enseigner des techniques de concentration et de contrôle de soi. Ils progressaient lentement, mais sûrement. Carrie apprenait à déplacer des objets avec une précision grandissante, à contrôler leur trajectoire, leur vitesse. Chaque victoire, même minime, renforçait sa confiance en elle.
Cependant, la jeune fille restait fragile. À chaque fois qu'elle retournait à l'école, les moqueries et les humiliations la ramenaient à son état d'insécurité. Un jour, après une séance particulièrement difficile, Carrie se laissa tomber sur l'herbe, épuisée physiquement et émotionnellement.
"Je ne sais pas si j'y arriverai," avoua-t-elle, sa voix à peine audible. "C'est trop dur."
Gabriel s'assit à côté d'elle, son regard se perdant dans les arbres qui dansaient doucement au rythme du vent. "Personne n'a dit que ce serait facile," répondit-il. "Mais regarde tout le chemin que tu as déjà parcouru. Il y a quelque temps, tu n'aurais jamais pu faire ce que tu viens de faire aujourd'hui."
Carrie tourna la tête vers lui, ses yeux remplis d'espoir mêlé de peur. "Et si je fais du mal aux gens ? Et si je perds le contrôle à nouveau ?"
Gabriel soupira doucement, fixant l'horizon. "Cela peut arriver," admit-il. "Mais ce qui compte, ce n'est pas ce que tu pourrais faire, mais ce que tu choisis de faire. Chaque jour, nous avons tous des choix à faire. Le pouvoir que tu possèdes est immense, mais ta volonté l'est tout autant. Tu dois apprendre à faire confiance à ta propre force intérieure."
Ces mots semblèrent toucher Carrie, qui hocha lentement la tête. Elle n'était pas encore prête à affronter le monde, mais elle savait qu'avec Gabriel à ses côtés, elle ne serait plus seule dans cette lutte intérieure.
Circé, toujours présente en retrait, observait avec une bienveillance silencieuse. Elle voyait la transformation progressive de Carrie, cette lueur de confiance qui commençait à briller dans les yeux de la jeune fille. "Elle progresse, Gabriel," murmura Circé à travers leur lien télépathique. "Elle aura encore des moments de faiblesse, mais je sens qu'elle est prête à affronter ses démons."
Gabriel sourit intérieurement, sachant que le véritable test pour Carrie était encore à venir.
La soirée du bal de fin d'année avait enfin sonné. Dans la petite ville, cet événement marquait l'apogée de l'année scolaire, un moment de fête où les élèves se retrouvaient pour danser et célébrer ensemble avant de se tourner vers de nouveaux horizons. Pour Carrie, ce bal représentait une chance. Une chance de montrer au monde qu'elle n'était plus la paria qu'ils croyaient connaître, qu'elle avait changé, qu'elle avait trouvé la force de surmonter ses douleurs. Gabriel avait passé des jours à l'encourager, à lui rappeler ses progrès, à lui dire qu'elle était prête.
Carrie, nerveuse mais déterminée, avait accepté de se rendre à cette soirée. Elle se regarda dans le miroir de sa chambre, dans une robe simple mais élégante, ses cheveux soigneusement coiffés. Elle n'avait jamais assisté à un événement de ce genre, et une partie d'elle-même était remplie de doutes. Mais la voix rassurante de Gabriel résonnait dans son esprit.
« Tu es prête, Carrie. Ce soir, tu vas leur montrer qui tu es vraiment. »
Gabriel, bien que resté dans l'ombre, surveillait attentivement la soirée. Il savait que Carrie avait encore des faiblesses, que ses émotions pouvaient la submerger à tout moment, surtout si elle faisait face à une nouvelle humiliation. Mais il croyait en elle. Il croyait en la force qu'elle avait acquise ces dernières semaines.
Le bal était tout ce qu'elle avait imaginé, et plus encore. Les lumières scintillaient, la musique remplissait la salle, et pour la première fois, Carrie se sentit presque normale, presque comme les autres. Elle se déplaçait prudemment dans la salle, souriant timidement aux quelques élèves qui daignaient lui parler.
Mais, dans l'ombre, ses camarades les plus cruels préparaient leur ultime acte de mépris. Tout était minutieusement orchestré. Ils avaient prévu de l'humilier publiquement devant tous, pour en faire la risée de la soirée.
Le moment fatidique arriva lorsque Carrie monta sur scène, après avoir été élue "Reine du bal" – une élection manipulée, bien sûr, pour servir leur plan. Alors qu'elle se tenait, sous les projecteurs, les bras levés en signe de victoire, souriant timidement, tout bascula.
Une pluie glacée de sang l'aspergea soudainement. Le liquide poisseux coula le long de ses bras, de son visage, trempant sa robe. La salle fut d'abord figée par la surprise, avant qu'un éclat de rire cruel ne s'élève de la foule. Les rires, les moqueries, les chuchotements... tout lui revint en pleine figure, comme une vague d'humiliation insoutenable.
Le souffle de Carrie devint erratique. Son cœur battait à tout rompre. La colère bouillonnait en elle, plus intense que jamais. Tout ce qu'elle avait appris semblait s'effondrer sous le poids de cette trahison. Ses pouvoirs, liés à ses émotions, réagirent violemment. Autour d'elle, les lumières commencèrent à vaciller, les objets tremblèrent. La salle devint oppressante, comme si l'air lui-même se chargeait de tension.
Gabriel, qui observait depuis l'extérieur, ressentit immédiatement le changement. Il savait que Carrie était sur le point de perdre le contrôle. Sans perdre un instant, il se précipita à l'intérieur, bousculant les portes de la salle de bal. Le chaos régnait déjà, les élèves, sentant le danger, reculaient, effrayés par les phénomènes surnaturels qui commençaient à se manifester autour de Carrie.
Il la trouva, debout au centre de la scène, ses yeux grands ouverts, une aura invisible mais puissante tourbillonnant autour d'elle. Le sol tremblait sous ses pieds, les tables s'entrechoquaient violemment, les fenêtres se fissuraient. La colère de Carrie se matérialisait en une vague d'énergie dévastatrice, prête à exploser.
« Carrie ! » cria Gabriel, s'avançant prudemment vers elle.
Elle ne l'entendait pas. Perdue dans sa rage, elle ne voyait que la trahison, les rires cruels, les visages moqueurs de ceux qui l'avaient toujours maltraitée.
Gabriel n'hésita pas. Utilisant son pouvoir pour se déplacer plus rapidement, il se plaça directement devant elle, interposant son corps entre elle et la foule terrifiée. Il leva une main, doucement, en signe de paix.
« Carrie, écoute-moi... Ce n'est pas toi. Tu n'es pas cette personne. »
Elle cligna des yeux, ses mains toujours tremblantes, mais une partie de sa colère semblait vaciller face à la présence de Gabriel. Il avançait encore, prudemment.
« Ce que tu ressens... je le comprends, » dit-il d'une voix calme et apaisante. « Mais tu as appris à maîtriser tout ça. Rappelle-toi de nos leçons. Rappelle-toi de ce que tu as accompli. »
Les objets cessaient de trembler autour d'eux. Carrie, toujours trempée de sang, semblait hésitante, déchirée entre la tentation de tout détruire et l'envie de suivre ce que Gabriel lui avait enseigné.
« Ils ne te méritent pas, » murmura Gabriel en approchant encore. « Mais tu vaux mieux qu'eux. »
Des larmes coulèrent sur le visage de Carrie, se mêlant au sang qui maculait sa peau. Elle regarda Gabriel, cherchant un signe, une confirmation qu'elle n'était pas perdue, qu'elle avait encore un choix.
« Tu es forte, Carrie, » lui dit-il doucement. « Tu peux contrôler ce pouvoir. Tu as déjà prouvé que tu pouvais le faire. Ne laisse pas la colère te détruire. »
Pendant un moment, le silence régna. Puis, lentement, la tension dans l'air s'évapora. Les lumières cessèrent de clignoter, les tremblements du sol s'arrêtèrent. Carrie ferma les yeux, prenant une grande inspiration, comme Gabriel le lui avait enseigné. Elle laissa la colère se dissiper, peu à peu, et ses pouvoirs revinrent à l'état dormant.
Elle s'effondra dans les bras de Gabriel, épuisée, tremblante. « Je... je ne pouvais pas... » balbutia-t-elle.
Gabriel la serra doucement contre lui. « Tu l'as fait, Carrie. Tu as choisi de ne pas céder. C'est tout ce qui compte. »
La foule, toujours terrifiée, ne savait comment réagir. Mais pour Carrie, plus rien d'autre ne comptait. Elle avait affronté son plus grand démon : elle-même, et avait réussi à ne pas laisser la destruction l'envahir.
Alors que Gabriel l'emmenait loin de la scène du bal, une partie de Carrie savait qu'elle ne serait plus jamais la même.
La nuit était tombée depuis longtemps lorsque Gabriel et Carrie quittèrent la scène du bal. Le silence oppressant de la petite ville était seulement brisé par leurs pas précipités sur le pavé. Carrie, encore sous le choc, tremblait légèrement dans ses vêtements imbibés de sang. La soirée qu'elle avait tant espérée s'était transformée en cauchemar, mais grâce à Gabriel, elle avait échappé à la catastrophe. Le poids de sa colère s'était dissipé, mais elle restait terrifiée par la puissance qu'elle avait failli libérer.
Gabriel, toujours calme, la soutenait doucement, l'aidant à avancer loin du lycée et des regards curieux. Carrie n'osait pas parler, sa gorge nouée par l'émotion, mais elle sentait la présence apaisante de Gabriel à ses côtés. Elle se demandait comment il avait réussi à la comprendre si bien, à être là pour elle au moment où elle en avait le plus besoin.
Soudain, alors qu'ils s'engageaient dans une rue plus sombre, une lueur douce et mystérieuse apparut devant eux. Carrie s'arrêta net, stupéfaite. Devant eux se tenait une femme d'une beauté irréelle, entourée d'une aura magique. Ses longs cheveux noirs ondulaient doucement dans le vent, et ses yeux perçaient les ténèbres avec une intensité bienveillante. C'était comme si elle était apparue de nulle part.
« Ne t'inquiète pas, Carrie, » murmura Gabriel avec un sourire rassurant. « Je te présente Circé, ma compagne. »
Circé s'avança lentement vers eux, ses pas semblant glisser sur le sol. Elle tendit la main vers Carrie, ses doigts délicats effleurant la joue encore tremblante de l'adolescente.
« Je suis heureuse de te rencontrer enfin, Carrie, » dit Circé d'une voix douce et apaisante. « Gabriel m'a beaucoup parlé de toi. Je suis ici pour t'aider. »
Carrie cligna des yeux, incrédule. Elle ne comprenait pas tout ce qui se passait. Qui était cette femme ? Et comment avait-elle fait pour apparaître ainsi, sans prévenir ? Une part d'elle-même était effrayée, mais une autre, plus profonde, se sentait étrangement en sécurité. Gabriel et Circé semblaient la comprendre mieux que quiconque. Ils ne la jugeaient pas, ne la regardaient pas avec peur ou dédain.
« Comment... ? » commença-t-elle, hésitante.
Gabriel échangea un regard avec Circé avant de poser une main douce sur l'épaule de Carrie. « Il est temps que tu saches la vérité, » dit-il doucement. « Je ne suis pas simplement un homme ordinaire, et Circé non plus. »
Carrie recula légèrement, son cœur battant plus fort, mais elle écoutait attentivement. Gabriel, ses traits sérieux mais pleins de compassion, continua.
« Je suis Dracula, » dit-il simplement. « Le Seigneur des Ténèbres. Mais je ne suis plus ce que les légendes racontent. J'ai choisi de protéger ce monde plutôt que de le détruire. »
Les yeux de Carrie s'écarquillèrent de surprise. Elle avait entendu des histoires sur Dracula, des contes de terreur et de sang, des monstres tapis dans l'ombre. Et maintenant, cet homme, qui l'avait protégée, prétendait être cette créature légendaire.
« Et moi, » ajouta Circé avec un sourire apaisant, « je suis Circé, la sorcière des anciens mythes grecs. »
Carrie fit un pas en arrière, son souffle court. Elle regarda Gabriel, puis Circé, essayant de comprendre ce qui lui arrivait. Ces deux êtres qui semblaient si humains... étaient en réalité des entités légendaires, des personnages qu'elle n'aurait jamais imaginé rencontrer. Mais quelque chose dans leurs voix, dans leurs gestes, la calmait. Elle n'avait pas peur d'eux. Malgré leur puissance, ils ne cherchaient pas à la blesser. Au contraire, ils avaient utilisé leurs pouvoirs pour la sauver, pour l'empêcher de sombrer dans la destruction.
« Je... je ne comprends pas... » murmura Carrie, encore déstabilisée par cette révélation.
« Nous sommes ici pour t'aider, » répondit Gabriel. « Comme toi, nous avons des pouvoirs que beaucoup ne comprennent pas. Mais tu as le choix, Carrie. Un choix que nous avons fait il y a longtemps : utiliser ces dons pour le bien, pour protéger ceux qui en ont besoin. »
Circé, voyant l'hésitation dans les yeux de Carrie, sourit tendrement. « Laisse-moi t'aider. » Elle leva doucement la main, et en un instant, le sang qui recouvrait la robe de Carrie disparut. En lieu et place de ses vêtements souillés, elle se retrouva vêtue d'une magnifique robe blanche, douce et légère, comme une seconde peau. La robe flottait légèrement dans la brise nocturne, et Carrie se sentit soudain plus légère, presque comme si un poids venait de lui être enlevé.
« Comment as-tu fait ça ? » demanda Carrie, émerveillée.
Circé lui répondit avec un sourire chaleureux. « La magie, Carrie. Comme toi, je possède des pouvoirs, mais j'ai appris à les utiliser avec sagesse. Et je peux t'apprendre à faire de même. »
Carrie regarda sa nouvelle robe, encore stupéfaite par la transformation. Elle leva les yeux vers Circé et Gabriel, son cœur se remplissant peu à peu de gratitude. Ces deux êtres, malgré leurs origines légendaires et leur puissance, s'étaient souciés d'elle. Ils étaient là pour la protéger, pour l'aider à trouver un chemin qu'elle n'aurait jamais cru possible.
« Merci... » murmura Carrie, les larmes aux yeux. « Merci de m'avoir sauvée... de m'avoir fait confiance... »
Gabriel hocha doucement la tête. « Tu n'es pas seule, Carrie. Tu n'as jamais à l'être. Nous sommes ici pour toi, et nous resterons à tes côtés aussi longtemps que tu en auras besoin. »
Gabriel décida qu'il était temps de quitter Chamberlain et ouvrit un portail d'ombre. Il invita Carrie et Circé à y entrer et les suivirent aussitôt.
La silhouette imposante de Castlevania se dessina à l'horizon alors que Gabriel, Circé et Carrie s'approchaient du domaine. L'immense forteresse semblait se fondre dans les montagnes sombres qui l'entouraient, ses tours gothiques s'élevant vers le ciel gris comme des griffes de pierre. Le château, baigné dans une aura mystique et inquiétante, imposait par sa seule présence un sentiment de puissance et de mystère.
Carrie marchait silencieusement entre Gabriel et Circé, ses yeux écarquillés, fascinés par la grandeur du lieu. Une légère brise soulevait sa nouvelle robe blanche, offerte par Circé, et ses cheveux flottaient autour de son visage. Chaque pas qu'elle faisait vers Castlevania renforçait un sentiment mêlé de curiosité et d'appréhension. C'était un lieu que peu de gens auraient osé approcher, et pourtant, elle se sentait en sécurité avec Gabriel et Circé à ses côtés.
« Voici mon domaine, Castlevania, » dit Gabriel d'une voix calme mais solennelle. « Il a été le théâtre de nombreuses batailles, et il abrite des secrets que peu de mortels ont pu voir. »
Carrie leva les yeux vers la forteresse, incapable de détourner son regard de l'architecture colossale et des lourdes portes en fer qui semblaient la défier. Elle savait que cet endroit regorgeait d'histoires, de souvenirs et de créatures qu'elle n'avait jamais imaginés. Et pourtant, à chaque pas, elle ressentait un étrange sentiment de familiarité. C'était comme si ce lieu, aussi terrifiant soit-il, l'acceptait.
Gabriel se tourna vers elle et lui sourit doucement. « N'aie pas peur, Carrie. Ici, tu es en sécurité. »
La jeune fille acquiesça lentement, inspirant profondément pour apaiser les battements rapides de son cœur. Elle fit un pas en avant, et bientôt, ils franchirent l'énorme portail de Castlevania. L'intérieur du château était aussi grandiose que son extérieur. Des chandeliers en or massif illuminaient les vastes couloirs de pierre sombre, tandis que des tapisseries anciennes et des statues inquiétantes ornaient les murs.
À mesure qu'ils avançaient dans les couloirs sombres, Carrie se mit à sentir une étrange présence autour d'elle. Des ombres semblaient bouger aux coins de sa vision, des créatures sortant lentement des recoins obscurs du château. Mais, contre toute attente, ces créatures ne cherchaient pas à lui faire peur. Au contraire, elles la saluaient avec une courtoisie qui la laissa sans voix.
Des gargouilles aux ailes déployées inclinaient respectueusement leurs têtes en passant. Des esprits translucides flottaient près du plafond, murmurant des salutations dans des langues anciennes que Carrie ne comprenait pas. Même des chauves-souris, suspendues aux arches du plafond, semblaient la fixer avec une bienveillance inattendue. Jamais elle n'aurait cru possible que des créatures aussi effrayantes puissent la traiter avec autant de respect.
« Elles te respectent parce que tu es avec nous, » expliqua Circé d'une voix douce, observant la réaction de Carrie. « Ce château, et tout ce qu'il abrite, est sous la protection de Gabriel. Ici, les créatures de l'ombre ne sont pas nos ennemies. Elles font partie de ce monde, tout comme toi. »
Carrie, toujours intimidée mais de plus en plus confiante, regarda les créatures passer devant elle sans ressentir la peur qui l'aurait paralysée auparavant. C'était un étrange mélange de fascination et d'émerveillement. Ces êtres, qui ressemblaient à des cauchemars éveillés, ne lui faisaient aucun mal. Ils la saluaient comme si elle était l'une des leurs, comme si elle faisait désormais partie de ce monde surnaturel.
Elle se rapprocha instinctivement de Circé, lui prenant la main avec une douceur timide. Le geste surprit Circé, qui baissa les yeux vers la jeune fille, touchée par cette preuve de confiance. Carrie, qui avait été si seule et tourmentée, semblait trouver un réconfort inattendu dans ce lieu étrange. Le courage qu'elle montrait en serrant la main de la puissante sorcière grecque ne passa pas inaperçu pour cette dernière.
« Tu fais preuve de beaucoup de courage, » murmura Circé en serrant doucement la main de Carrie en retour. « Peu de personnes auraient osé pénétrer dans Castlevania avec autant de calme. »
Carrie releva les yeux vers Circé, un léger sourire se dessinant sur ses lèvres. Elle n'avait jamais eu de figure maternelle à qui se confier, mais Circé lui inspirait une profonde affection, quelque chose qu'elle n'avait jamais ressenti auparavant. C'était un mélange de respect et de tendresse, une sensation que Carrie n'aurait jamais cru possible. Pour la première fois, elle se sentait acceptée, non pas malgré ses pouvoirs, mais à cause d'eux. Et cette réalisation la bouleversa.
Gabriel, marchant devant elles, observait la scène avec un regard apaisé. Il savait que Carrie avait encore un long chemin à parcourir, mais cette confiance qu'elle commençait à développer envers Circé et lui-même était la première étape. Elle avait surmonté tant d'épreuves, et malgré la peur qui l'habitait, elle continuait d'avancer.
« Tu n'es plus seule, Carrie, » dit-il doucement, se retournant pour la regarder. « Ici, tu trouveras toujours un foyer. Castlevania peut être intimidant, mais il est aussi un lieu de refuge pour ceux qui cherchent à comprendre leurs pouvoirs. »
Carrie serra un peu plus fort la main de Circé, les larmes aux yeux. « Merci, » murmura-t-elle d'une voix tremblante. « Merci de m'avoir donné une chance... de ne pas m'avoir abandonnée. »
Circé échangea un regard avec Gabriel, sentant toute la force émotionnelle de ce moment. Carrie avait vécu tant de choses, mais maintenant, elle était sur le bon chemin. Celui de l'acceptation, de la rédemption, et peut-être même du bonheur.
Alors qu'ils continuaient à explorer les couloirs de Castlevania, Circé ne put s'empêcher de ressentir une profonde émotion en voyant la transformation de Carrie. La jeune fille, qui avait été brisée par la cruauté du monde, trouvait enfin un équilibre grâce à l'amour et au soutien qu'ils lui offraient. Circé se promit de veiller sur elle, tout comme Gabriel, pour l'aider à traverser les épreuves à venir.
Et tandis qu'ils pénétraient plus profondément dans les entrailles du château, Carrie, pour la première fois depuis des années, sentait qu'elle avait trouvé sa place.
Une fois le tour de Castlevania terminé, Gabriel, Circé, et Carrie se retrouvèrent dans l'une des vastes salles du château. Le calme régnait après la découverte des lieux, et Carrie, bien qu'émerveillée, semblait commencer à ressentir la fatigue des événements récents. Circé, observant la jeune fille avec un sourire bienveillant, sentit qu'il était temps de partir.
« Il est peut-être temps de rentrer, » dit-elle doucement, avant de jeter un coup d'œil complice à Gabriel. « Et puis, après tout, ce sont les femmes qui commandent ici, n'est-ce pas, Carrie ? »
Gabriel, qui se tenait à côté, leva un sourcil incrédule, une expression mi-amusée, mi-surprise sur le visage. Lui, Dracula, Seigneur des Ténèbres, commandé par deux femmes ? Il se croisa les bras en secouant légèrement la tête, un sourire en coin.
« Oh, vraiment ? » répondit-il, sa voix empreinte d'une ironie amusée. « Je ne me souviens pas que nous ayons établi cette règle, Circé. »
Circé rit doucement, sa magie déjà se manifestant autour d'eux sous la forme d'une légère brume scintillante. « Eh bien, tu sais ce qu'on dit, Gabriel. Derrière chaque grand vampire, il y a une grande sorcière. »
Carrie, encore hésitante mais de plus en plus à l'aise avec l'humour de Circé, esquissa un sourire timide en observant leurs échanges. Elle n'avait jamais connu ce genre de légèreté ou de complicité, surtout entre des êtres aussi puissants. Cela la réconfortait de voir que, malgré toute leur force, Gabriel et Circé pouvaient plaisanter ensemble. Pour la première fois, elle se sentait incluse dans une forme de famille, unie par un but commun.
Circé, d'un simple geste, enveloppa les trois dans une douce lueur magique, et en une fraction de seconde, ils furent téléportés hors de Castlevania, atterrissant au bord de la mer sur l'île de Ponza. Le bruit des vagues et l'odeur saline remplirent l'air, offrant un contraste apaisant avec l'atmosphère oppressante de Castlevania.
Carrie, encore légèrement étourdie par la téléportation, ouvrit les yeux et se figea en découvrant l'île pour la première fois. Le paysage était à couper le souffle. La mer scintillait sous les rayons du soleil couchant, et les falaises de Ponza semblaient s'étendre à perte de vue, baignées par une lumière dorée. Elle n'avait jamais rien vu de tel. C'était si paisible, si beau, qu'elle en resta bouche bée, incapable de trouver les mots pour décrire ce qu'elle ressentait.
« C'est… magnifique, » murmura-t-elle finalement, ses yeux brillants de gratitude et d'émerveillement.
Circé lui sourit avec tendresse. « C'est chez nous maintenant. Et si tu le souhaites, Carrie, tu peux te reposer ici, autant de temps qu'il te faudra. »
Gabriel, observant la jeune fille, hocha la tête en silence. Il pouvait voir à quel point cette tranquillité était nécessaire pour elle après tout ce qu'elle avait vécu. Carrie acquiesça, le visage empreint d'une émotion qu'elle n'avait jamais osé laisser paraître. Elle était chez elle, pour la première fois de sa vie, en sécurité.
« Je pense que tu devrais te reposer, » ajouta Circé en s'approchant de Carrie. « J'ai préparé une chambre pour toi. Viens, je vais te montrer. »
Circé guida doucement Carrie à l'intérieur de la maison, laissant Gabriel sur la terrasse, contemplant la mer et les derniers éclats du jour. Lorsqu'elles disparurent à l'intérieur, Gabriel resta un moment silencieux, savourant le calme de l'île et la sérénité qui l'entourait. Il se sentait reconnaissant d'avoir trouvé cet équilibre avec Circé et d'avoir pu offrir un refuge à Carrie.
Un instant plus tard, Circé réapparut, marchant lentement vers lui avec un sourire léger sur le visage. Gabriel leva les yeux vers elle, intrigué par la tranquillité qu'elle dégageait.
« Alors, les femmes commandent vraiment, hein ? » demanda-t-il avec une lueur amusée dans le regard.
Circé rit doucement, se rapprochant de lui. « Eh bien, tu n'as jamais contesté mes initiatives, n'est-ce pas ? », puis l'embrassa.
Gabriel se tourna complètement vers elle, ses traits se détendant alors que l'humour faisait place à quelque chose de plus profond. « J'ai toujours su que tu avais une influence particulière, mais ce que tu fais pour Carrie… cela me touche vraiment, Circé. »
La sorcière resta silencieuse un instant, ses yeux se perdant dans l'horizon avant de se tourner vers lui. « Je me suis attachée à elle. Cette jeune fille a traversé tant de souffrances. La voir faire des progrès… cela me donne de l'espoir. »
Gabriel hocha la tête, s'approchant de Circé pour lui prendre la main. « Elle a une force incroyable, mais c'est grâce à toi qu'elle trouve le courage de l'utiliser correctement. »
Circé baissa les yeux, émue par les paroles de Gabriel. « Nous avons fait cela ensemble, Gabriel. Elle te fait confiance, peut-être même plus qu'à moi. Tu as été un mentor pour elle, et cela a fait toute la différence. »
Gabriel se tourna vers elle, ses yeux se plongeant dans les siens. « Tu as toujours eu cet effet sur les autres, Circé. Même sur moi. »
Il y avait une sincérité dans sa voix, une émotion qui montait doucement alors qu'ils se rapprochaient l'un de l'autre. Les paroles qu'ils échangeaient allaient au-delà de Carrie. C'était un moment de connexion entre eux, renforcé par les épreuves qu'ils avaient traversées ensemble.
Sans un mot de plus, Circé posa sa main sur la joue de Gabriel, ses yeux brillants d'affection. « Nous faisons une bonne équipe, toi et moi, » murmura-t-elle.
Gabriel, avec tendresse, inclina la tête vers elle. « Oui, nous en faisons une, en effet. »
Leurs lèvres se rencontrèrent doucement, un baiser empreint de douceur et de gratitude. Ce moment de tendresse scellait non seulement leur complicité, mais aussi la force de leur lien, renforcé par tout ce qu'ils avaient accompli ensemble. Ils se félicitaient silencieusement, savourant la sérénité de Ponza, la paix qui régnait autour d'eux.
Les vagues continuaient de caresser doucement le rivage, et le monde semblait s'être arrêté pour leur offrir cet instant de bonheur. Circé posa sa tête sur l'épaule de Gabriel, le regard tourné vers la mer, sachant que, pour un instant, ils pouvaient simplement savourer cette tranquillité.
Ils savaient que de nouvelles épreuves viendraient, mais ce soir-là, à Ponza, tout semblait parfait.
Sous le ciel lumineux de Ponza, Carrie s'éveillait à une nouvelle réalité, une réalité qu'elle n'avait jamais imaginée possible. Pour la première fois de sa vie, elle se sentait libre. Libre du poids de son passé, libre de la peur et de la douleur qui avaient marqué chaque instant de son existence. Loin des abus constants et des humiliations, elle commençait enfin à savourer une vie où elle pouvait s'épanouir, où ses pouvoirs n'étaient plus une malédiction, mais un don qu'elle apprenait à maîtriser.
Les jours s'écoulaient paisiblement sur l'île italienne. Le matin, elle se promenait le long des plages de galets, laissant la brise marine caresser son visage. L'après-midi, elle plongeait dans les eaux cristallines, s'émerveillant de la beauté simple mais puissante de la nature environnante. Gabriel et Circé la laissaient explorer et découvrir à son rythme, la guidant doucement quand elle en ressentait le besoin.
Carrie avait également trouvé un refuge particulier, une crique dissimulée aux yeux du monde par les pouvoirs de Circé. Là, elle pouvait s'entraîner en toute quiétude, loin de l'agitation du monde et des souvenirs douloureux. La crique était son sanctuaire, un endroit où elle pouvait se concentrer pleinement sur la maîtrise de ses capacités. Circé avait enveloppé le lieu d'une barrière magique, permettant à Carrie d'expérimenter sans crainte d'être découverte ou interrompue.
Chaque jour, Gabriel ou Circé la rejoignait pour l'aider à explorer les limites de ses pouvoirs. Ils étaient patients, offrant des conseils et un soutien constant. La jeune fille était fascinée par la magie de Circé, qui semblait n'avoir aucune limite. Circé lui enseignait non seulement à contrôler ses pouvoirs télékinétiques, mais aussi à trouver la paix intérieure nécessaire pour éviter que ses émotions ne prennent le dessus. Les progrès de Carrie étaient stupéfiants, et la confiance qu'elle gagnait en elle-même se reflétait dans son attitude.
Un après-midi, alors qu'elle revenait de son entraînement dans la crique, Carrie découvrit une scène qui la fit éclater de rire pour la première fois depuis des années. Gabriel, d'ordinaire si imposant et ténébreux, était allongé sur une chaise longue au bord de la plage, vêtu d'un maillot de bain noir, des lunettes de soleil posées sur le nez. Il bronzait, l'air complètement détendu, une image totalement opposée à celle du puissant Seigneur des Ténèbres qu'elle avait appris à connaître.
Avec un sourire espiègle, Carrie s'approcha de lui en essayant de contenir son rire. « Gabriel... ou devrais-je dire... Dracula, Seigneur des Ténèbres... tu casses complètement le mythe là ! »
Gabriel souleva légèrement ses lunettes de soleil et tourna la tête vers elle, un sourire amusé aux lèvres. « On doit bien casser les mythes de temps en temps, non ? Même les Seigneurs des Ténèbres ont besoin de vacances. »
Carrie éclata de rire, un son léger et joyeux qui fit écho dans l'air marin. C'était la première fois qu'elle se permettait une telle complicité avec lui. Elle se sentait suffisamment à l'aise pour plaisanter, pour rire, quelque chose qu'elle n'avait jamais osé faire auparavant. Gabriel la regardait avec une tendresse mêlée de fierté. Voir cette transformation en elle, ce relâchement, lui rappelait à quel point elle avait parcouru du chemin depuis le jour où ils s'étaient rencontrés.
« Si quelqu'un te voyait comme ça, ils n'y croiraient jamais, » continua Carrie, ses yeux pétillant de malice.
Gabriel laissa échapper un léger rire. « Eh bien, c'est peut-être une bonne chose que personne d'autre ne soit là pour témoigner de cela. »
Ils restèrent là, à partager ce moment de légèreté, assis sur le sable chaud. Circé, qui les observait à distance, sourit en voyant la scène. Elle était émue de voir Carrie enfin à l'aise, enfin capable de se moquer et de rire, des gestes simples qui lui avaient été refusés pendant si longtemps.
Au fil des jours, Carrie s'ouvrait de plus en plus. Elle parlait avec Gabriel et Circé de ses espoirs pour l'avenir, des choses qu'elle voulait accomplir. Pour la première fois, elle envisageait un futur où elle pourrait utiliser ses pouvoirs non pour se défendre, mais pour aider les autres. Elle voyait en Gabriel et Circé des modèles, des mentors qui l'avaient sauvée non seulement de la destruction, mais aussi d'elle-même.
Lorsqu'elle se retournait vers la mer, observant les vagues se briser doucement contre les rochers, Carrie réalisait à quel point sa vie avait changé. Elle n'était plus cette jeune fille effrayée, submergée par des pouvoirs incontrôlables. Désormais, elle avait un contrôle, une maîtrise qu'elle n'aurait jamais cru possible.
Alors qu'elle continuait à contempler l'horizon, elle sentit une présence familière à ses côtés. C'était Circé, qui s'approchait doucement, son regard bienveillant posé sur elle.
« Comment te sens-tu ? » demanda Circé avec douceur.
Carrie tourna la tête vers elle et sourit. « Pour la première fois, je me sens... libre. Et en paix. »
Circé hocha la tête, satisfaite de la réponse. « C'est tout ce que nous avons toujours voulu pour toi, Carrie. Que tu trouves ta propre paix. »
Carrie regarda Circé avec une profonde gratitude. « Merci, à vous deux, pour tout. Vous m'avez donné bien plus que je ne pourrais jamais exprimer. »
« Tu n'as pas besoin de le dire. Le simple fait de te voir heureuse est suffisant. » Circé posa une main réconfortante sur l'épaule de la jeune fille avant de se retourner pour observer Gabriel, qui semblait à nouveau perdu dans ses pensées, allongé sur sa chaise longue. « Mais je te laisse un dernier conseil, Carrie. Parfois, pour faire tomber les plus grandes légendes, il suffit d'un peu d'humour. »
Carrie sourit à cette remarque, regardant Gabriel avec un éclat malicieux dans les yeux. « Oh, ne t'inquiète pas. Je pense que je peux m'en charger. »
Les jours à venir promettaient d'être pleins de découvertes et de nouvelles aventures pour Carrie. Entourée de ses nouveaux mentors, elle était prête à embrasser son avenir avec confiance, consciente qu'elle n'était plus seule et que, désormais, elle avait une famille qui veillerait sur elle, quoi qu'il arrive.
