Chapitre 34: La Confession
«Makoto, tu dois manger tes légumes!
-Je sais, j'y arrive», dit-il, tout en esquivant une autre tentative de Tsumiki de lui enfoncer la cuillère dans la bouche. Il avait sincèrement passé la moitié du déjeuner à essayer de l'empêcher de lui donner la béquée (une seule fois! Il l'avait laissée faire une seule fois!) Malheureusement, Tsumiki semblait penser qu'il jouait les difficiles et ne cessait de glousser. Komaeda, assis en face d'eux à la table de la cafétéria, les observait attentivement.
«Les brocolis sont très bons pour ta santé, dit-elle. Même si tu n'aimes pas le goût, tu dois quand même en manger.
-Je sais.» Afin d'appuyer ses dires, il prit sa fourchette, la planta dans une tige et l'enfourna dans sa bouche. La bouche pleine, il répliqua: «Tu vois, je le fais...
-Ne parle pas la bouche pleine. C'est très malpoli!»
Il ne pouvait tout simplement pas gagner avec elle parfois.
«Regarde, Komaeda-kun a mangé tous les siens.» Elle pointa du doigt son assiette vide. «Et je mange les miens, moi aussi!»
Sur ces mots, Tsumiki avala à son tour une bouchée. Elle prit soin de laisser sortir un «miam!» sonore quand elle avala.
Naegi regarda Komaeda. «Sauve-moi, s'il te plaît.»
Komaeda inclina légèrement la tête en considérant sa requête...
«Naegi-kun, tu devrais vraiment manger tes légumes.»
Et zut!
Il finit par s'incliner, mais il s'assura de prendre un air exagérément renfrogné alors qu'elle le nourrissait cuillerée après cuillerée. Mais ni Tsumiki ni Komaeda ne semblèrent remarquer son mécontentement – ou alors ils trouvaient ça mignon. En ce qui concernait Tsumiki, il penchait sérieusement pour la seconde option. A un moment, Kuzuryu et Pekoyama entrèrent et s'arrêtèrent net à leur vue. Ils les observèrent pendant quelques bonnes secondes avant que Kuzuryu ne lève les yeux au ciel et ne marmonne quelque chose à propos d'idiots locaux.
«Voilà, fini», dit-il. Il se tourna vers Komaeda. «Je peux y aller maintenant?
-Qu'en penses-tu, Tsumiki-san?» demanda Komaeda.
Tsumiki émit un son songeur tout en tamponnant les lèvres de Naegi avec une serviette de table. «Disons, il a tout mangé... Ok! Tu peux aller jouer maintenant.»
Il était debout et hors de la pièce avant qu'elle ne puisse changer d'avis.
Mais il ne fut pas assez rapide. Naegi se tenait au milieu du couloir, se demandant dans quelle direction déguerpir, quand il entendit une toux sifflante derrière lui. Une sensation bizarre se coula le long de son dos et Naegi se tourna lentement pour voir que Komaeda se tenait derrière lui.
«Où est-ce que tu allais? l'interrogea le Chanceux d'un ton curieux.
-Je... Nulle part, en fait. Je n'avais pas d'endroit particulier en tête.
-Tu files jouer, hein?» Komaeda soupira et secoua la tête. «J'admets, je suis un peu surpris.»
Il était impossible que ce soit autre chose qu'un piège. «Pourquoi?
-J'aurais cru que tu serais en train de penser à ta sœur.»
Il en resta bouche bée. Komaru. Que voulait-il dire? Elle ne quittait jamais l'arrière de ses pensées, mais pourquoi Komaeda croyait-il qu'il devait penser à elle maintenant? Quelque chose était-il arrivé? Allait-elle bien?
«Naegi-kun, est-ce que tu veux parler à ta sœur?»
Il hocha la tête sans un mot (que pouvait-il faire d'autre?).
«D'accord. Je vais te laisser lui parler, mais tu dois d'abord prouver qu'elle n'est pas une distraction.»
Bien sûr. Il ferait n'importe quoi. Comment pourrait-il la laisser tomber à nouveau?
Komaeda lui prit la main et l'emmena à la chapelle. Il n'allait pas lui faire réciter cette oraison devant son cercueil, n'est-ce pas? Ça ne passerait probablement pas auprès des autres... et Komaeda devait le savoir, lui aussi. Ils entrèrent dans la chapelle (où Owari et Nidai étaient tous deux occupés à sangloter bruyamment), puis Komaeda bifurqua vers une porte latérale qui menait à une salle rectangulaire. Au fond de la salle, se trouvait un vieux confessionnal en bois qui, pour une raison inconnue, était gardé par un soldat Monokuma.
«Tu sais ce qu'on fait avec ça?» s'enquit Komaeda en lui ouvrant la porte d'une des cabines. A l'intérieur, un des murs se prolongeait en un petit banc qui faisait face à une cloison séparant les deux cabines, où se découpait une fenêtre couverte d'un rideau.
«J'ai vu des films, dit Naegi.
-Ça fera l'affaire!»
Naegi entra dans le confessionnal... et Komaeda le suivit immédiatement. Il fixa le Chanceux, pris de court.
«Ils devraient les construire plus grands, fit remarquer Komaeda.
-... Ouais.»
Tous deux s'assirent sur le banc, Naegi positionné de façon à ce que la fenêtre soit pile en face de lui. Il prit une profonde inspiration, enfonça les talons dans le sol. Mon dieu, que cet endroit était exigu. Komaeda était serré contre lui et si Naegi n'y prenait pas garde, son coude lui rentrait dans les côtes. Pour couronner le tout, il y régnait une odeur fétide qu'il ne reconnaissait pas.
Komaeda lui passa l'oraison et murmura: «N'oublie pas où nous sommes. Assure-toi de commencer de manière appropriée!»
Naegi s'éclaircit la gorge. Il n'avait jamais pénétré dans un confessionnal, mais il bénéficiait d'une vaste expérience cinématographique.
«Pardonnez-moi, mon Père, parce que j'ai péché...»
Il s'interrompit, les yeux exorbités. Car dès qu'il avait ouvert la bouche, Komaeda avait tendu la main et écarté le rideau, le laissant voir qui occupait l'autre cabine...
Il ne pouvait pas voir les yeux de l'homme. L'homme n'avait pas de cheveux. Il ne portait pas de chapeau, n'avait ni piercing ni barbe, ni aucune autre particularité physique. Naegi n'était même pas certain de la forme de sa tête, ou de son nez. Et c'était simplement parce que l'homme n'avait pas de peau. De la chair rouge sombre la remplaçait, décolorée par endroits par un séjour dans le congélateur. Et l'odeur – oh mon dieu, l'odeur – était omniprésente.
L'homme n'avait pas de peau et ce fut ainsi que Naegi sut exactement de qui il s'agissait.
«P... pourquoi? Komaeda-kun, pourquoi...?
-Pourquoi?» demanda Komaeda en souriant. Non seulement il n'était nullement affecté par ce qui se trouvait sous ses yeux, mais il ne semblait même pas avoir encore remarqué l'odeur. «N'est-ce pas évident? Il le mérite plus que tout autre.»
Il n'y avait pas d'yeux, réalisa-t-il. Il ne parvenait pas se souvenir que Kuzuryu ait ordonné à l'homme de s'arracher les yeux, mais il devait l'avoir fait. Peut-être que c'était la source de ce bruit de succion qu'il avait entendu... non, ça c'était le chat à neuf queues. Tout s'embrouillait dans sa tête en une orgie de sang et de terreur...
«Naegi-kun, tu n'as pas oublié, non? reprit Komaeda. Tu avais l'intention de prétendre que rien de tout ça n'était arrivé? Tu ne te souviens pas de ce que tu lui as fait?
-Je n'ai pas...
-Regarde-le.» Komaeda l'attrapa par le dos de son sweat et lui enfonça presque la tête par la fenêtre. «Tu vois ce qu'il a sacrifié pour toi?
-Je n'ai pas... ce n'était pas moi... Je suis désolé...!
-Regarde ce que tu lui as fait, siffla Komaeda dans son oreille. Il était venu te sauver, non? Tu te souviens de ce qui s'est passé ensuite?»
L'odeur était omniprésente et ne voulait pas partir.
«Je ne... Je ne voulais pas ça...
-Regarde-le.» Komaeda lui enfonça davantage la tête en avant et Naegi ferma les yeux parce que s'il s'approchait encore, ils se toucheraient et il ne pourrait pas le supporter et il ne pouvait pas faire ça et il ne peut pas il ne peut pas il ne peut pas...
«Arrête, coassa-t-il. S'il te plait, arrête...
-Tu ne l'as pas laissé arrêter», fut tout ce que dit Komaeda. Et Komaeda avait raison et c'était vrai et il était inutile et tout était de sa faute...
Ses larmes le brûlèrent en glissant le long de son visage. Il tremblait dans la prise de Komaeda, ses dents s'entrechoquaient. Quelque force invisible le força à ouvrir les yeux pour qu'il croise les orbites vides du supplicié. Il remarqua que quelque chose ou quelqu'un avait étiré ses lèvres inexistantes en un sourire, laissant apparaître des dents jaunies.
Il ne pouvait détourner le regard. Alors même que sa vision était brouillée de larmes, il ne pouvait détourner le regard...
Et Naegi hurla et finit par s'effondrer.
Ou du moins aurait-ce été le cas, sans Komaeda qui le retenait par son sweat. Il releva Naegi comme un chasseur ramasse le corps de sa proie vaincue. Le corps retourna naturellement au premier plan de son champ de vision. Jusqu'à ce que Komaeda fasse preuve de miséricorde et lui fasse faire volte-face pour qu'il puisse regarder le Chanceux à la place.
«Pourquoi l'as-tu laissé mourir, Naegi-kun?
-Je ne sais pas!» brailla-t-il, et il enfouit son visage dans la poitrine de Komaeda.
Qui pouvait dire combien de temps Komaeda le réconforta en lui frottant le dos? Les sanglots déchirants de Naegi s'essoufflèrent en des reniflements. La chemise de Komaeda avait absorbé les larmes de Naegi et leur odeur salée qui se mêlait à l'odeur naturelle de l'autre adolescent masquait la pestilence provenant du cadavre. Naegi enfonça ses doigts dans le tissu, tirant si fort qu'ils pouvaient l'entendre se tordre.
«Le monde est terrible, parfois, dit Komada. Parfois, il faut faire des choses terribles. C'est ce que tu devais faire. Naegi-kun, tu comprends que tu devais le laisser mourir, n'est-ce pas?»
Naegi releva les yeux. «Je... devais?
-Oui.» Komaeda lui caressa la tête une fois, son pouce suivant le bord de son oreille comme s'il y replaçait une mèche de cheveux. «Je sais que c'était horrible, mais tu devais le laisser périr. Si tu étais intervenu, Kuzuryu-kun l'aurait juste tué plus tard en privé, et ça aurait été encore pire. Le laisser mourir là-bas, à ce moment, était la meilleure chose que tu pouvais faire. Tu comprends pourquoi?»
Naegi secoua la tête.
«Si Kuzuryu-kun l'avait tué en privé, personne ne l'aurait su. Pekoyama-san et lui ne se seraient pas souciés de s'en souvenir. Il serait mort, oublié de tous. Sa mort aurait été vaine.
«Mais toi, tu n'oublieras pas, n'est-ce pas? C'est pour ça que tu devais le laisser. Maintenant, il n'est pas oublié. Son souvenir restera avec toi pour toujours. Il t'accompagnera quand tu apporteras l'espoir. Il est l'espoir, désormais. Toute cette souffrance qu'il a endurée, toutes ces choses horribles, horribles, qui lui sont arrivées, tout cela du sens. C'est pour l'espoir.
-L'espoir...» murmura Naegi. Il avait les yeux rivés sur Komaeda, mais ne pouvait le voir.
«Oui, l'espoir. C'est pour ça que tu ne devais pas t'en mêler et que tu devais le laisser mourir. C'était une question d'espoir. C'était la meilleure issue possible.»
Je devais le faire?
«Je... Je ne...» Il tanguait d'avant en arrière, les yeux parcourus de spasmes comme s'ils menaçaient de se révulser.
Il devait mourir?
«Tu comprends?» demanda Komaeda.
Alors... alors ce n'est pas de ma faute?
«...Je ne suis pas sûr.»
Komaeda sourit. «Je suppose que c'est le mieux que je puisse espérer pour le moment. Maintenant, Naegi-kun...»
L'oraison était de nouveau enfoncée dans sa main.
«...Il y a quelque chose que tu dois faire.»
Il récita l'oraison dans la poitrine de Komaeda. Le Chanceux ne parut pas s'en offusquer et continuait de le tenir avec douceur dans ses bras. Mais quand Naegi eut terminé et leva les yeux vers lui en quête d'approbation, le jeune homme aux cheveux blancs désigna de nouveau la fenêtre (l'odeur le frappa tel un tsunami, noyant même les sons). Le souffle de Naegi se bloqua dans sa gorge, et il ne pouvait pas faire ça, il ne pouvait pas...
Komaeda l'attira contre sa poitrine et l'enlaça par derrière. Le menton du jeune homme se nicha dans la courbe de son épaule et Naegi se retrouva lentement bercé d'avant en arrière. Le souffle régulier de Komaeda, juste dans son oreille, le réconfortait. Naegi se surprit à s'y raccrocher aussi désespérément qu'il serrait la main de l'autre.
«Tu peux le faire, dit Komaeda. Tu es assez fort. Je le sais.»
Naegi regardait droit devant lui, la vision floue et distante. (Tout va bien. Ce n'est pas... ma faute?) Le cadavre attendait.
Lentement, sa bouche s'ouvrit.
Une fois encore, il commença à parler.
«Pardonnez-moi, mon Père, parce que j'ai péché...»
Dans l'espace exigu, ses paroles étaient tonitruantes. Mais le mort ne parut pas s'en émouvoir. L'homme continuait de le fixer de son sourire stupide. Tout cela aurait été sûrement insupportable sans le battement puissant du cœur de Komaeda contre son dos, sans la chaleur émanant de l'autre adolescent, ou sans la main qui agrippait fermement la sienne. Et Komaeda débitait un flot intarissable de louanges et de paroles de réconfort qui l'aidaient à l'anesthésier à ce qu'il voyait...
«Tout va bien, Naegi-kun. Je sais que c'est difficile.»
«Chh, ça va. Tu es si fort.»
«Je sais que tu peux le faire. J'ai foi en toi.»
«Rectifie les choses. Fais en sorte que tout s'arrange.»
«C'est pour l'espoir.»
(Qu'est-ce que tu fais? Pourquoi tu l'écoutes STOP...)
Les derniers mots engourdis glissèrent de sa langue. Le papier resta serré dans sa main moite alors qu'il regardait droit devant lui, incapable de comprendre que c'était fini. La joue de Komaeda qui effleurait la sienne était pareille à la caresse de braises rougeoyantes. Mais il ne s'écarta pas. A la place, ses paupières se refermaient lentement. Il pouvait encore sentir le battement du cœur de Komaeda, qui paraissait résonner à travers son corps jusqu'à submerger le sien.
«Naegi-kun...» Naegi tourna la tête vers la voix. «C'est bon. On en a terminé ici.»
Komaeda le guida hors du confessionnal, patient et compréhensif même quand Naegi batailla avec ses jambes qui ne voulaient pas bouger correctement. Une fois à l'extérieur, il adressa un hochement de menton au soldat Monokuma qui montait la garde, puis se déplaça de manière à se positionner entre lui et Naegi alors que le soldat ouvrait l'autre côté du confessionnal et tendait les bras à l'intérieur...
«Tu as fait du bon travail, le félicita Komaeda, prenant entre ses mains la tête de Naegi pour l'empêcher de voir par-dessus son épaule le corps en train d'être retiré. Tu as fait du très bon travail. C'était très courageux de ta part.
-Courageux... non, ce n'était pas courageux.
-Bien sûr que si. Je ne veux pas leur manquer de respect, mais penses-tu que tes amis auraient pu faire ce que tu viens de faire?»
Il cligna lentement des yeux, le mouvement suffisant à le faire tressaillir. «Kirigiri-san...
-Elle aurait pu le réciter, mais elle n'en aurait rien pensé, dit Komaeda. C'est le prix à payer pour être la Détective Ultime. Elle ne peut pas aimer comme toi. Personne ne le peut. C'est pour ça que tu es spécial.
-Spécial...» marmonna-t-il. Le mot parut s'accrocher à son esprit (comme un couteau). «Je ne suis pas...
-Bien sûr que si. Tu ne me fais pas confiance?»
Confiance... Ce simple et unique mot lui obstrua la gorge. Un mot si banal... et si puissant. C'était plus que ce que Naegi pouvait comprendre. Faisait-il... confiance à Komaeda? Qu'est-ce que ça voulait seulement dire, faire confiance?
«J'ai confiance en mes amis, dit-il. En ma famille. Je leur fais confiance. Oui. Je leur fais confiance. Je...»
(Parlait-il ou était-ce uniquement dans son esprit?)
«Tu as dit une fois que j'étais ton ami, tu te souviens?» dit Komaeda avec une frivole extase, l'air d'être sur le point de se jeter au cou de Naegi.
Vraiment? Il peinait à réfléchir. Ses souvenirs semblaient pris dans un brouillard dense. Mais Komaeda... Komaeda affirmait qu'il l'avait dit. Komaeda ne mentait pas.
«J'imagine que oui.
-Alors ça doit vouloir dire que tu me fais confiance, à moi aussi!»
Le sourire éclatant de Komaeda illuminait son visage entier. Naegi le regarda, s'efforçant toujours de donner du sens à tout cela. Mais le bonheur qu'il avait sous les yeux était contagieux. Si Komaeda n'était pas en colère, alors ça voulait dire que rien de mauvais n'arriverait.
«Tu comprends, n'est-ce pas. Tu n'es pas comme les autres, Naegi-kun. Tu es spécial.»
(Il y avait une pression dans sa tête, qui poussait et poussait et poussait...)
Naegi le fixa.
Lentement, très lentement, il sourit à son tour.
«Ouais. J'imagine que oui.»
Komaeda rit, radieux et ravi. Naegi l'imita sans trop savoir pourquoi.
«Tu es incroyable, souffla Komaeda. Je suis si honoré de pouvoir participer à ça. Je ne peux pas... Je ne peux pas exprimer à quel point je t'aime. Quand je suis près de toi, je me sens...»
Komaeda s'approcha soudain de lui. A peine la largeur d'une main les séparait à présent. Naegi leva les yeux, s'exposant à la lumière intense des yeux gris-vert de Komaeda.
La voix de Komaeda était à peine un murmure. «Je... Je veux...»
Naegi le fixait, continuant d'arborer son sourire absent. Une sonnerie stridente (hurlait) retentissait en arrière-plan. Son cœur battait la chamade. Il se demanda pourquoi.
L'haleine de Komaeda était dense et chaude sur sa peau. Naegi inclina la tête, perplexe...
«Komaeda-kun?
Entendre son propre nom parut arracher Komaeda de la transe dans laquelle il était tombé. Le Chanceux commença à rire, mais c'était un rire douloureux. Il s'écarta de Naegi, s'agrippant à lui-même, et fixa ses propres bras enroulés autour de son corps.
«Être seulement dans la même pièce que l'Espoir Ultime, je devrais m'en satisfaire.» Komaeda oscilla avec un sourire si large qu'il montra les dents, et expira bruyamment avec révérence. Il rit, comme à une plaisanterie connue de lui seul. Naegi ne comprenait toujours pas ce qui se passait, mais son cœur ne cessait de battre follement et commençait à lui faire mal.
«Naegi-kun... tu veux parler à ta sœur?
-Oui!» Il s'élança en avant. Son cœur palpitait plus que jamais, mais c'était agréable. «Tu vas me laisser lui parler?
-Je t'en avais fait la promesse, non? dit Komaeda. Tu as fait du très bon travail. Tu te souviens où tu lui as parlé la dernière fois?»
Naegi hocha la tête avec impatience.
«Tu peux m'y attendre? J'ai besoin de quelques minutes seul d'abord.»
Naegi disparut hors de la pièce. La porte claqua derrière lui, et il ne resta plus que Komaeda. Dès qu'il fut seul, le Chanceux laissa retomber ses bras agités de spasmes et baissa les yeux vers sa paume.
«Pourquoi j'ai...? Ah, je n'aurais pas dû faire ça.» Komaeda ferma les yeux et rit, mais quelque chose de sombre perçait dans ce rire cette fois. «Je n'aurais pas dû m'arrêter... ça aurait été si facile...»
Ses yeux s'ouvrirent.
Les tourbillons s'embrasèrent.
«J'aurais pu le...»
Komaeda se frappa la tête contre le mur.
Il réitéra l'action encore deux fois. Puis il se laissa glisser à genoux sur le sol. Ses bras s'enroulèrent de nouveau autour de lui tandis qu'il fixait le sol sans le voir.
Naegi-kun . . .
Il n'y avait pas un bruit. Le soldat avait depuis longtemps quitté les lieux avec le corps. Ne restaient plus que Komaeda, le confessionnal et l'odeur qu'il ne remarquait plus.
Pourquoi?
«Il m'attend.» Komaeda leva les yeux vers le plafond, perdu dans son propre esprit. «Naegi-kun m'attend.»
Pourquoi je ne peux pas m'arrêter ?
«Quel malpoli je fais de le faire attendre.»
Je ne suis pas comme eux, alors pourquoi je...?
«Ahahahahaha... J'arrive, Naegi-kun!»
Pourquoi . . .?
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Pourquoi je ne cesse de rêver de te faire du mal?
