En cette fin de journée d'Août 1996, dans un riche quartier résidentiel d'Angleterre, au fond du Surrey, la chaleur avait laissé place à un temps lourd et couvert.
C'était assez peu surprenant pour la région quoiqu'en pleine saison estivale.
Enfermé dans sa chambre, allongé sur son lit grinçant, Harry Potter observait les mouvements des sombres nuages par sa fenêtre. Ce temps n'était pas pour arranger ses pensées.
Quelques semaines auparavant, lui et ses amis pénétraient dans le sacro-saint Département des Mystères, à la recherche de son Parrain Sirius Black.
Piégés par les Mangemorts et le terrible Voldemort à leur tête, ils n'en avaient réchappé que de justesse. Mais ils y laissèrent Sirius.
Ce fut un terrible choc pour Harry. Et les révélations qui suivirent ce drame ne furent pas rassurantes.
« Celui qui a le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres approche... il naîtra de ceux qui l'ont par trois fois défié, il sera né lorsque mourra le septième mois... et le Seigneur des Ténèbres le marquera comme son égal mais il aura un pouvoir que le Seigneur des Ténèbres ignore... et l'un devra mourir de la main de l'autre car aucun d'eux ne peut vivre tant que l'autre survit... Celui qui détient le pouvoir de vaincre le Seigneur des Ténèbres sera né lorsque mourra le septième mois.. »
- C'est-à-dire que Voldemort et moi sommes condamnés à nous entretuer ?
- Oui, Harry. En te marquant comme il l'a fait, il a fait de toi son égal, son ennemi futur. Celui, parmi tous, qui aura la tâche de l'affronter.
Harry avait voulu refuser, nier l'évidence. Il ne disposait d'aucun pouvoir particulier, mis à part le Fourchelangue, et ce serait risible de l'utiliser contre Voldemort. A chacun de leurs affrontements, seule la chance lui avait permis de s'en sortir.
Et, si diriger l'Armée de Dumbledore, ce groupe de défense illégal, l'avait maintenu en forme physiquement et magiquement, ce ne serait jamais suffisant. Au même âge, Tom Jedusor était déjà probablement plus puissant qu'eux tous, et des décennies d'apprentissage de la Magie sous ses formes les plus monstrueuses et redoutables n'avaient pas changé cet état de fait.
Et Sirius, Sirius….
Son parrain, le premier adulte à lui avoir donné l'impression d'avoir une famille. Mort, définitivement mort, sans avoir pu tenir sa promesse : ne jamais l'abandonner.
Et tout ça c'était sa faute. S'il n'avait pas été aussi imprudent, aussi stupide, aussi….faible, rien ne serait passé aussi mal.
Ces pensées le hantaient chaque nuit, rejoignant celles concernant Cédric Diggory. Il n'en dormait plus la nuit.
On tambourina soudain à la porte de sa chambre. Et vu la violence portée à l'huis, ce ne fut pas difficile de deviner qui.
- « Bouge-toi, Potter, ton abomination de directeur a dit qu'il serait là pour 19h. » Aboya la voix facilement reconnaissable de l'oncle Vernon. « Je ne tiens pas à le supporter plus longtemps que nécessaire. »
Et sans attendre de réponse, il redescendit les marches, les faisant trembler littéralement sous sa masse.
Harry soupira et se leva. Pour une raison inconnue, les Dursley le laissaient en paix depuis son retour de l'école. Non pas qu'ils soient plus amicaux, même Merlin ne réussirait pas un tel miracle, mais ils l'ignoraient totalement. Ce qui convenait parfaitement au jeune homme.
D'un regard las, il fit le tour de sa chambre, pour voir s'il n'avait rien oublié lorsqu'il avait fait sa valise.
La lettre de Dumbledore était arrivée deux jours plus tôt par un des Hiboux de l'école. Le vieil homme lui proposait de venir le chercher pour l'amener au Terrier. N'ayant aucune raison de refuser une si bonne nouvelle, il avait immédiatement renvoyé sa réponse affirmative.
Alors, ouvrant la porte, il descendit. C'est à cet instant précis que la sonnette de la porte retentit, faisant sursauter les trois moldus.
- « Au moins il est ponctuel » grogna Vernon dans sa barbe.
Pétunia alla ouvrir avec appréhension. Malgré le temps couvert, on voyait encore suffisamment aux alentours. Il ne manquerait plus que les voisins voient entrer un de ces gens chez eux.
D'une certaine façon, elle avait raison de se méfier. Car, comme souvent, Albus Dumbledore était habillé d'une de ses tenues complètement excentriques, orange verte et violette.
Il jurait littéralement avec l'aspect bourgeois propret de l'habitation.
- « Pétunia, cela fait un moment. » La salua t-il courtoisement en inclinant la tête. « Mais nous avons bien sûr correspondu par hiboux. »
La tante d'Harry verdit à ce souvenir. Elle ne répondit pas et s'écarta pour laisser passer le directeur.
Ce dernier, après avoir salué le reste des Dursley, avisa Harry, très amusé devant la peur de sa famille. Il lui fit signe de le rejoindre.
- « Harry, mon garçon, je suis heureux de te voir d'aussi bonne humeur. » Fit-il avec son regard pétillant derrière ses lunettes en demi-lune. « Et je vois que tu as déjà préparé tes affaires, parfait, absolument parfait. »
Vernon se racla la gorge pour attirer l'attention du vieux sorcier, rappelant furieusement Dolores Ombrage à Harry.
- « Si je puis me permettre… » Commença t-il sur un ton désagréable.
Il fut coupé net par son interlocuteur.
- « Je crois que vous pouvez vous permettre en effet. Vous vous permettez d'ailleurs beaucoup de choses dans cette maison. Ce n'est pas toujours une bonne initiative.»
L'extrême courtoisie de son ton ne cachait en rien la froideur, pas plus que son regard sévère.
Vernon eut l'intelligence de ne pas répliquer. Même lui ne se risquerait pas à ce petit jeu.
Avec un certain dédain, Dumbledore se détourna de lui et reprit sa conversation comme s'il ne l'avait jamais interrompue.
- « Nous allons partir, Harry. La situation actuelle, que tu connais maintenant, ne nous laisse pas beaucoup de temps. Molly et Arthur nous attendent, et je ne vais pas te priver de leur excellente hospitalité. Je m'occupe de tes bagages»
D'un geste de baguette, il fit disparaître la lourde malle. D'un autre, il ouvrit la porte d'entrée.
- « Sur ce, madame, messieurs, nous vous laissons. Bonne soirée. »
Et il sortit, Harry à sa suite. Derrière lui, il entendit la porte claquer violemment. Il ne s'en soucia pas. Sa charmante famille était déjà sortie de son esprit.
- « Monsieur, est-ce que je peux vous poser une question ? » Demanda le jeune Potter dès qu'ils eurent fait quelques pas.
Ils seraient très vite à destination, et il perdrait de fait la possibilité de poser ses questions avant un long moment. Alors, autant profiter de cet instant.
- « C'est ce que tu viens de faire, Harry, mais tu peux très bien recommencer. » Lui répondit le vieil homme d'un air affable.
Harry allait l'interroger sur la lourde tâche qui l'attendait, lorsqu'il se dit qu'il fallait commencer par une question tournée vers son interlocuteur, par politesse.
- « Votre main, que lui est-il arrivée ? Lorsque vous avez sorti votre baguette…. »
Dumbledore lui sourit avant de dissimuler la dite main.
- « Oh, ceci est une histoire absolument incroyable, et que j'ai vraiment hâte de te raconter, mais, cela sera pour un autre jour. Le cadre ne s'y prête pas du tout. »
Harry grommela légèrement. Cette manie de l'homme de lui dissimuler des secrets était particulièrement agaçante. Enfin, cette fois cela ne le concernait pas directement. Donc, il n'insisterait pas.
- « J'imagine que tu n'as jamais transplané, Harry, dans la mesure où tu as tout juste 16 ans. » Déclara alors le directeur en changeant de sujet.
Le dernier des Potter acquiesça. Ce mode de transport lui était encore complètement inconnu. Il avait déjà volé sur balais, hypogriffe ou sombral, pris la poudre de cheminette ou encore le Magicobus, mais il n'avait encore jamais transplané.
Sur la demande de son ainé, il lui attrapa le bras. Un instant plus tard, il avait l'impression que son corps allait être écrasé tant la pression fut importante.
Il reprenait à peine ses esprits, sur la route menant au Terrier, que Dumbledore lui attrapa brusquement la main.
- « Harry reste derrière moi. » Commanda t-il d'une voix impérative.
Surpris, Harry leva la tête vers lui.
Alors il la vit.
Cette abomination, son pire cauchemar, une tête de mort dotée d'une langue de serpent.
La Marque des Ténèbres.
Et cela ne signifiait qu'une chose, aujourd'hui comme hier. Quelqu'un était mort. La voir au-dessus d'une maison qui lui était si chère glaça littéralement son sang.
- « C'est impossible ! »
Dumbledore remuait silencieusement sa baguette, lançant différent sorts pour tester les barrières.
Elles étaient détruites. Il n'en restait plus rien. Comme si elles n'avaient jamais existé.
Au mépris de toute sécurité, alors même que l'endroit pouvait grouiller de Mangemorts, alors même que Voldemort lui-même pouvait l'attendre, Harry se jeta en avant. Il voulait savoir. Il devait savoir.
- « Harry, non ! » Cria Dumbledore vainement.
Il ne l'entendit pas. Il n'entendait plus rien. Tout son esprit était focalisé sur une chose unique.
La porte était défoncée, il entra, ne ralentissant même pas.
Aucune lumière n'était allumée, aucun bruit dans la maison. On aurait presque pu croire qu'elle était inhabitée.
Mais ce silence n'était pas naturel. Pas du tout….
- « Incendio » incanta t-il, se moquant de l'interdiction de Magie.
Les chandelles et lustres se rallumèrent. Dévoilant un spectacle absolument atroce.
L'odeur lourde aurait du lui donner une indication. Il n'en avait pas tiré de conséquences…
Il aurait du.
Allongés sur le sol, dans des positions tordues remplies de souffrance, des corps. Leurs corps.
- « NOOOON ! »
Le hurlement fut absolument horrible à entendre tant il reflétait la douleur, tant il représentait la monstruosité absolue.
Dumbledore arriva, la baguette levée. Lorsqu'il vit ce qui avait causé ce cri, il ouvrit des yeux remplis d'horreur. Comment était-ce possible ? Une heure auparavant encore….
Il y avait Molly et Arthur Weasley, leurs enfants Fred et George, Ginny, Kingsley Shacklebolt, Remus Lupin. Tous dans un état catastrophique.
Non, c'était encore pire que catastrophique. Ceux qu'il avait sous les yeux n'avaient plus le moindre rapport avec les personnes pleines de vie qu'ils avaient été.
Tout n'était plus que sang et supplices. Le nombre de sévices sur chaque corps était inimaginable.
A cet instant, Harry comprit qu'il venait de perdre toute idée d'enfance. Si tant est qu'il en ai eu une un jour.
Son innocence venait d'être piétinée, son cœur déchiré et son esprit détruit.
La mort de Cédric Diggory n'avait été rien à côté de ça. Sirius et lui étaient morts presque paisiblement.
Eux…..non.
- « Ils ont été torturés » Murmura Dumbledore complètement dévasté. « Torturés avec une violence tellement monstrueuse et ignoble que ça dépasse l'entendement. C'est du pur sadisme.»
Harry ne lui répondit pas. Il ne pouvait pas. Ses yeux ne parvenaient pas à se détacher de ce spectacle macabre.
Mais lorsqu'il vit que le cadavre de Molly Weasley ne possédait plus d'yeux ni d'oreilles, ce fut trop. Il eut un haut le cœur et vomit.
Ce fut alors qu'il l'entendit.
- « Harry… »
Une fois tellement faible qu'on ne l'aurait pas entendue dans un tombeau. Mais le silence était encore plus lourd ici.
Les deux hommes se retournèrent brusquement. Quelques mètres plus loin, dans une mare de sang, il y avait….
- « Ron ! » S'écria Harry en s'agenouillant près de lui.
Le pauvre garçon était lui aussi complètement méconnaissable tant ses bourreaux s'étaient acharnés sur lui. Mais il était vivant.
Ils l'ont épargné pour qu'il nous dise ce qu'il s'est passé ici.
- « Harry….je…. il nous a…par surprise. » Murmura le rouquin, à moitié conscient. « Ils….trop nombreux…. »
- « Ne parle pas, Ron, repose toi. » Supplia Harry en surélevant sa tête délicatement.
Dumbledore, pendant ce temps, alluma un feu dans la cheminée et lança une poignée de poudre de cheminette. Si Ron était encore en vie, il fallait prévenir un Médicomage de toute urgence.
Même le crépitement des flammes ne l'empêcha pas d'entendre ce qui suivit ensuite.
Le peu de contrôle qu'Harry était parvenu à reprendre fut littéralement broyé par cette phrase, par ces quelques mots.
Ce fut comme si le poignard avait tourné dans la plaie.
- « Harry,…il….a Hermione…. »
Et ce fut une peur immonde qui s'insinua dans chaque cellule de son corps. Une peur primaire.
- « Her…Hermione ? »
L'horreur allait-elle s'arrêter ? Où pouvait être Hermione ? Pourquoi l'avoir épargnée à l'inverse des autres ?
Une Née-Moldu aux mains de Voldemort,….ce serait probablement encore pire que ce…charnier.
- « Je…..désolé. » Les mots de Ron n'étaient plus qu'un souffle.
Mais que faisait Dumbledore ? Pourquoi personne ne venait les aider.
Ironiquement, c'est à cet instant que les choses s'accélérèrent. Que la situation…empira.
Il y eut soudainement un grand bruissement et une odeur acre vint flotter à ses narines. Une odeur de feu.
Un ricanement retentit à l'étage au-dessus. Un ricanement qu'Harry aurait reconnu entre mille, tant il hantait ses cauchemars depuis plusieurs semaines.
C'était le rire d'une folle sanguinaire. C'était le hurlement de joie malsaine de Bellatrix Lestrange.
C'était elle la responsable de ce crime ignoble.
Il avait épargné Pettigrow, à tort. Mais cette fois, il ne serait certainement pas aussi chevaleresque.
Il allait la tuer.
Alors qu'il se précipitait vers l'escalier, Dumbledore le retint par le bras, l'empêchant d'aller plus loin. Il tenta de se débattre, mais le vieil homme resserra sa main, faisant preuve d'une étonnante vigueur pour un âge si avancé.
- « Harry, elle a lancé un Feudeymon, un sort de Feu inextinguible. La maison va s'embraser entièrement si nous restons là ! Nous devons partir ! »
Il se heurta à un refus farouche.
- « JE NE LAISSERAIS PAS MON MEILLEUR AMI ICI ! » Hurla le jeune homme fou de rage. « JE REFUSE DE PARTIR SANS LUI ! »
- « Et moi, je refuse de te perdre toi aussi. » Répliqua Dumbledore sur un ton ferme quoique teinté de tristesse. « Tu ne peux plus les aider. »
Sans ajouter un mot de plus, il commença à transplaner, malgré les supplications d'Harry.
Avant de disparaître, il entendit des hurlements de joie ainsi que quelques mots qui resteraient gravés dans son esprit à jamais.
« A bientôt, bébé Potter… » Fit la voix enfantine de la femme qu'il haïssait le plus au monde.
Un instant plus tard, tous deux étaient dans le bureau de Dumbledore.
Et, exactement comme lors de leur dernière entrevue dans ce même bureau, le ton monta rapidement.
- « POURQUOI VOUS AVEZ FAIT CA ? »
Encore ébranlé, Albus s'assit dans son vaste fauteuil avant de répondre d'une voix faible.
- « La maison était en train de s'enflammer, Bellatrix Lestrange était toujours en possibilité de t'attaquer. J'ai choisi de privilégier ta vie. »
- « Vous auriez pu les…. » Tenta le jeune homme dépité. « Ron était encore vivant ! Et il y avait Bellatrix. Si on l'avait capt… »
« Harry, un feudeymon est un sort de magie noire, conçu pour détruire absolument tout, il se développe de façon exponentielle, se nourrissant de ce qu'il consume. A l'instant précis où il a été lancé, une maison entièrement en bois comme le Terrier n'avait pas la moindre chance de demeurer. Nous aurions péris avec eux. »
Harry le regarda avec dégoût. Le plus grand sorcier des temps modernes faisait aveu d'impuissance. Quelle déchéance de posséder tant de pouvoir et de ne pas les utiliser.
- « Et donc ça vous suffit ? Vous effacez tous vos regrets en vous disant que le feu allait détruire les corps ! ET VOUS CROYEZ QUE JE VAIS ME CONTENTER DE CA ? C'ÉTAIENT MES AMIS ! J'AURAIS DU LES SAUVER ! »
Dumbledore prit un ton plus ferme, plus rude.
- « Je comprend parfaitement ton sentiment Harry, et je n'hésite pas à dire que cette vision d'horreur restera parmi les plus atroces de toute ma longue existence.
J'ajoute, si tu en doutais, que j'aurais donné jusqu'à ma vie si j'avais eu le sentiment de pouvoir les sauver sans que tu y perdes la tienne et qu'enfin je ne me pardonnerai jamais, même en vivant encore un siècle, ce qui vient d'arriver.
En revanche, aussi glacial que ça puisse te paraître, tu as encore un rôle à jouer. Molly Weasley, Remus Lupin et les autres, crois-tu qu'ils auraient accepté que je sacrifie ta vie pour sauver la leur ? Ne me reproche pas d'avoir sauvé ta vie, Harry !»
Jamais Dumbledore ne lui avait parlé avec autant de sévérité et de force. Ses yeux étincelaient de colère.
Il est furieux contre lui-même. Bien sûr qu'il se reproche ce qu'il vient de faire…
- « Je suis désolé, monsieur. »
Le vieil homme soupira. « C'est un sentiment humain, Harry. Il est parfaitement normal que tu sois en colère contre moi, que ce soit pour cette terrible nuit ou pour une multitudes de raisons, comme tu le sais. »
Il caressa machinalement le phénix à ses côtés.
- « Cette attaque est, au-delà de l'ignominie de ce spectacle, un revers majeur. Tom et ses hommes sont parvenus à détruire les puissantes barrières autours du Terrier en un laps de temps particulièrement réduit. C'est incompréhensible. »
Pendant qu'il réfléchissait à voix haute, Harry s'était aussi installé sur un fauteuil. L'adrénaline et la fureur lui avait permis de tenir jusque là, mais tout s'estompait tandis que le désespoir l'envahissait petit à petit.
Tous ses amis, sa famille de cœur, morts, comme ça, sans aucune pitié. Et en plus, cette pauvre….
- « Hermione ! Ron a dit qu'elle avait été amenée par leurs attaquants. »
Dumbledore l'observa un moment avant de tourner son regard vers la cheminée.
- « Nous devons attendre des nouvelles par Severus. » Fit-il enfin. « Lui seul pourra nous apporter des réponses à cette attaque éclair ».
- « Qu'est-ce que Rogue a à voir avec ça ? » s'enquit Harry, surprit de la référence au Maitre des Potions. »
- « Le professeur Rogue, Harry, est quelqu'un de très prudent qui sait écouter ce qu'il faut écouter. Il est mon espion auprès de Voldemort. Le fait qu'il ne m'ait pas prévenu prouve, à mon sens, à quel point cette attaque a été déclenchée sur un coup de tête. Mais malgré ça, ils sont parvenus à une efficacité effrayante. »
- « S'il faut c'est lui qui… »
- « Harry, je te conseille de réfléchir soigneusement aux mots que tu vas utiliser. » L'avertit Albus avec un regard extrêmement sévère.
Harry ne répondit pas. Rogue n'avait rien fait pour gagner sa confiance après tout.
- « Est-ce que je pourrais aller me reposer quelque part, professeur ? » S'enquit-il finalement.
Albus l'observa longuement. Il était clair que le choc avait été très rude pour quelqu'un de si jeune. Un peu de calme, aussi relatif, soit-il, ne pourrait qu'aider.
Pour autant, laisser Harry seul serait une erreur. Les événements de l'année précédente lui avaient enseigné qu'Harry pouvait faire preuve de beaucoup d'impulsivité et d'imprudence sous le coup de sentiments forts.
Il prit sa décision.
- « Les dortoirs sont fermés jusqu'en septembre, et je doute d'ailleurs que tu veuilles y loger après le drame de ce soir. »
Harry opina du chef. Le dortoir vide de Gryffondor, alors que les cadavres de Ginny, Ron, Fred et George, étaient aussi violents dans son esprit, ce serait terrible.
- « C'est pourquoi, je te propose l'infirmerie. Pompom Pomfresh vit ici pendant les vacances. Elle pourra ainsi t'accueillir. »
Ce fut entendu. Il passa directement par la cheminée directoriale pour arriver à l'infirmerie.
- « Évidemment, c'est toujours sur vous que ça tombe… » Marmonna la guérisseuse en lui lançant un regard inquiet.
Harry ne répondit pas. Il s'écroula sur le lit qui venait de lui être désigné.
Mme Pomfresh décida de lui laisser un peu d'intimité après lui avoir fait promettre de l'appeler en cas de soucis.
La nuit fut atroce. Comme si elles n'attendaient que ça, les images macabres vinrent flotter sous ses yeux.
Bureau directorial
Albus Dumbledore faisait les cent pas. Son esprit aiguisé tournait à plein régime pour essayer de comprendre par quel miracle ses barrières avaient pu être brisées si vite.
Et il ne comprenait pas. Parce qu'il n'y avait qui puisse expliquer cela. Il était le gardien du secret du Terrier. Il avait lancé, lui-même, un Fidelitas et plusieurs barrières supplémentaires.
Voldemort avait-il trouvé une faille au surpuissant Fidelitas ?
Et que faisait Severus ? Pourquoi n'y avait-il aucune nouvelle de lui ?
Les choses n'auraient pas pu être pires. Et cette terrible malédiction qui dévorait petit à petit son corps ?
C'est alors qu'il apparut. Celui à qui il pensait un instant auparavant. Son professeur de potion, et ami, Severus Rogue.
- « Severus, enfin vous voilà. »
L'homme était dans un état de fatigue effrayant.
- « Albus, je ne vais pas m'attarder longtemps. Je dois y retourner sur l'heure. »
Le vieil homme ouvrit de grands yeux. « Déjà ? »
Le potionniste s'assit sur un fauteuil vide avec découragement.
- « Les nouvelles sont très mauvaises. Ils tiennent miss Granger au manoir Malefoy. »
- « Oui, nous nous en doutions. Lorsque j'ai voulu amener Harry au Terrier, nous les avons trouvés tous morts. Savez-vous comment…. »
Rogue l'interrompit sans se soucier apparemment de courtoisie. La situation se passait de ronds de jambes.
- « Ils ont capturé Dedalus Diggle ce matin. Il avait sur lui le mot indiquant l'adresse du Terrier de votre main. Le secret est tombé. Le Seigneur des Ténèbres n'a pas attendu, il a réuni les Mangemorts et a lancé son attaque. »
Albus lui lança un regard perçant. « Vous y avez participé, Severus. »
Ce n'était pas une question. Ils le savaient tous les deux.
- « Je n'ai rien pu faire, Albus. » Répondit-il néanmoins d'une voix pleine de dégoût. « Les barrières sont tombées de Sa main. Elles n'ont tenu qu'un instant. Tous ont été pris par surprise, sans même la possibilité de se battre convenablement….stupides Gryffondors trop confiants. »
Le vieil homme ne dit rien. C'était inutile.
- « Pourquoi ont-ils capturé Hermione Granger ? » S'enquit-il néanmoins.
- « Ils veulent en faire un exemple. L'exposer à la vue de tous pour inspirer la terreur. Pour…briser toute la volonté des opposants. »
Dumbledore semblait avoir pris trente ans en quelques minutes.
- « Nous sommes en position de faiblesse. Ce sont de lourdes pertes pour l'Ordre. De plus, Harry n'est plus en sécurité du fait de ma faiblesse progressive…. »
- « Qu'allez-vous faire de Potter, alors ? » Demanda brusquement Rogue. « Allez-vous hâter ce sacrifice que vous prévoyez depuis si longtemps. »
Le directeur ne releva l'ironie mordante de son professeur. « Il ne reste plus qu'une seule solution. »
Ses yeux brillaient d'une étrange lueur.
Infirmerie de Poudlard.
A peine Harry était parvenu à sombrer dans un demi-sommeil que le cauchemar avait commencé.
Le rêve, qui n'en était pas un, il le savait maintenant, avait commencé par une grande salle peu éclairée.
Devant une assemblée de mangemorts, le Seigneur des Ténèbres ricanait avec une maléfique joie.
A quelques mètres de lui….
- « Et voici la Sang-de-Bourbe Granger, grande admiratrice du Survivant. Je suis très honoré de te rencontrer enfin. »
Des rires moqueurs retentirent dans l'auditoire.
Voldemort avait alors esquissé un étrange sourire.
« Je sais que tu vois ça, Potter. Alors, admire avec quelle force ton amie va hurler lorsque je vais m'occuper d'elle. Endoloris ! »
Et les hurlements de la jeune fille raisonnèrent dans la nuit sous le regard de son meilleur ami qui ne pouvait rien y faire.
Et cela dura longtemps, très longtemps. Pourtant, ce n'est que quelques temps plus tard qu'Harry fut tiré de ce spectacle macabre.
Il tomba sur deux yeux très reconnaissables.
- « Harry, je suis désolé de t'avoir laissé si peu de temps pour digérer cette terrible journée. Mais hélas, les minutes nous sont comptées. Severus vient de m'apprendre une terrible information. Miss Granger a été tuée. »
Pendant quelques minutes, Harry avait pensé que la situation ne pouvait pas empirer. Et le Destin se chargeait de le détromper, une nouvelle fois.
- « VOUS PLAISANTEZ ? JE VIENS DE REVER D'ELLE ! Elle était avec Voldemort ! Il la torturait il y a encore quelques minutes. Je…l'ai vue. »
- « C'était une fausse vision, Harry. » Fit tristement le directeur. « Voldemort voulait que tu la croies vivante pour que tu te précipites à son secours. Il a misé sur ta volonté de sauver ta dernière amie. Raison pour laquelle il n'avait jusque là épargné qu'elle. »
Alors Harry pleura. Pleura toutes les larmes de son corps. Pleura ses amis et sa famille de cœur disparus dans la haine et la souffrance.
- « Harry, je crois que nous n'avons plus le choix. Voldemort se rapproche de plus en plus. Bientôt, il attaquera Poudlard. Alors, le monde tel que nous le connaissons sera la proie des flammes. »
- « Qu'allons-nous faire ? Allez-vous m'apprendre à me battre ? »
Le vieil homme soupira. « J'avais prévu un emploi du temps particulier, sous forme de séances régulières, te concernant. M ais les événements tragiques m'ont pris de court. Il ne reste qu'une seule possibilité pour éventuellement changer la tendance actuelle et te permettre d'accomplir ce qui t'attend. »
Harry acquiesça.
- « Je suis décidé à ne pas rester les bras croisés. Quelque soit votre idée, je suis prêt à faire de mon mieux. »
- « J'en suis convaincu, Harry. » Répondit-il tristement. « Prend mon bras. »
Le jeune homme s'exécuta. C'était la troisième fois de sa vie qu'il allait transplaner. La première datait de quelques heures, mais semblait provenir d'une autre vie, tant les choses avaient changé.
La douleur psychologique était si importante que même la pression du transplanage lui parut inexistante. Son cœur était brisé après tout.
Ils se trouvaient dans une sombre forêt complètement inconnue.
- « Où sommes-nous, professeur ? »
Dumbledore regardait de tous côtés d'un air à la fois méditatif et inquiet.
- « Dans un lieu oublié des hommes, à l'écart de toute chose. Un endroit où je ne suis pas venu depuis environ…un siècle. » Répondit-il d'un ton curieusement ému.
- « Pardon ? » Manqua de s'étrangler son élève. « Et pourquoi sommes-nous ici ? »
Dumbledore l'observa longuement. Il lui tendit un objet circulaire avec un curieux symbole dessus.
- « Il s'agit d'un….portoloin modifié par mes soins. Il t'enverra dans un lieu où l'on saura t'apprendre ce que tu dois savoir. »
- « Pourquoi n'est-ce pas vous qui m'apprenez ce que je dois savoir ? Vous êtes le sorcier le plus puissant que je connaisse, non ? »
Le vieil homme eut un sourire las.
- « Tu es très gentil Harry. Mais les derniers événements ont montré à quel point mes pouvoirs avaient leur limite. Je ne saurais pas t'aider comme je le devrais. »
Sur ses paroles mystérieuses, il se rapprocha un peu plus.
- « Maintenant, écoute-moi attentivement Harry. Tu dois te rendre à la Guilde, quelqu'un t'accueillera et te guidera. Sois très prudent cependant. L'endroit où tu vas apparaître ne ressemble à rien de ce que tu as pu rencontrer jusqu'aujourd'hui. Les hommes et la Magie elle-même évoluent continuellement. Et cela peut transformer ceux qui n'y prennent pas garde Je ne peux t'en dire davantage. Tu comprendras sur place. »
- « Vous ne venez pas avec moi ? » S'effara Harry qui n'y croyait pas.
Il n'allait quand même pas s'embarquer comme ça, au hasard, sans savoir ce qui l'attendait.
- « Ma propre mission se déroule ici. » Il fit un signe de la main et l'étrange objet s'illumina d'une lueur bleue étonnamment puissante pour un si petit objet.
Il pressa l'épaule du garçon à ses côtés dans un signe de soutien tacite.
- « Je te souhaite une bonne chance, Harry. » Conclut-il.
La lueur bleue se mua en un tourbillon de lumière aveuglante. Un instant plus tard, le Survivant avait disparu sans laisser de trace.
- « Je regrette de t'avoir menti, Harry. » Murmura Albus. « J'espère que tu sauras me pardonner d'avoir utilisé ton amie miss-Granger pour achever de te convaincre, et que tu pourras aller la sauver à ton retour. »
