Chapitre 4 : La décision

Isabella est assise sur le canapé du salon, enveloppée dans une couverture en cachemire. L'appartement est plongé dans une semi-pénombre, seulement éclairé par la lumière tamisée d'une lampe à pied. Le silence est lourd, à peine perturbé par le bourdonnement lointain de la ville.

Sur la table basse devant elle, son téléphone repose à côté d'une tasse de thé intacte, dont la vapeur s'est dissipée depuis longtemps. Elle n'a pas touché son téléphone depuis qu'elle a lu le message d'Emmett, reçu aux premières heures de la matinée :
« Chérie, la réception s'est terminée tard. J'ai décidé de rester dormir chez mes parents. Repose-toi bien. Je t'aime. »

Ces mots, d'une normalité apparente, la tourmentent. Ils sonnent faux, comme un écho lointain d'une époque où elle croyait encore en l'image parfaite de leur couple. Mais maintenant, l'image d'Emmett avec cette femme dans la pièce voisine vient parasiter chacun de ses souvenirs.

Ses yeux se posent sur le bracelet en diamant posé sur la table basse. Autrefois symbole d'amour et de promesses, il semble désormais un fardeau. Elle tend la main, le saisit et le retourne entre ses doigts comme pour y chercher des réponses. Mais il n'y en a pas.

Un soupir profond s'échappe de ses lèvres alors qu'elle repose le bijou avec plus de force que prévu. L'écrin en velours glisse sur la table, mais elle l'ignore. L'image d'Emmett et cette femme brune, leurs regards complices, refuse de quitter son esprit.

Le téléphone vibre soudain, brisant le silence oppressant. Elle sursaute légèrement avant de tendre la main. L'écran affiche un message d'Edward :
« Prenez votre temps, Isabella. Mais souvenez-vous, il ne mérite pas votre silence. »

Elle lit et relit ces mots, une vague d'émotions contradictoires montant en elle. Pourquoi Edward, un homme qu'elle connaît à peine, semble-t-il si investi ? Et pourquoi ses paroles résonnent-elles avec une telle justesse ?

Elle se lève brusquement, comme pour échapper à ses pensées. Ses pieds nus effleurent le parquet tandis qu'elle se dirige vers la grande baie vitrée du salon. Elle écarte légèrement les rideaux pour observer la vue : la ville illuminée, les immeubles scintillants s'étendant à perte de vue. Une vue majestueuse qui contraste avec le vide qu'elle ressent en elle.

Elle repense au message d'Emmett, à sa justification trop pratique. Pourquoi ne l'a-t-il pas appelée ? Pourquoi n'a-t-elle pas ressenti l'envie de le rappeler ? Elle réalise qu'une distance s'est installée entre eux, bien avant cette soirée.

Revenant au canapé, elle s'assied et prend une profonde inspiration. Elle attrape son téléphone, relit une dernière fois le message d'Edward, puis, presque impulsivement, tape une réponse :
« Dites-moi ce que vous avez en tête. »

Le message envoyé, elle repose le téléphone et se laisse tomber en arrière contre les coussins. Une vague d'appréhension mêlée d'un étrange soulagement l'envahit.

Elle ferme les yeux, le visage tourné vers le plafond. Les battements de son cœur ralentissent, mais son esprit reste en éveil. Elle sait qu'elle vient de prendre une décision qui pourrait changer le cours de sa vie. Et même si elle a peur, une petite voix intérieure lui dit qu'il est temps de reprendre le contrôle.

Isabella se traîne jusqu'à la salle de bain. Elle s'observe dans le miroir. Les cernes sous ses yeux sont impossibles à cacher, mais elle tente tout de même d'appliquer un peu de maquillage. Une fine couche de mascara et un rouge à lèvres léger suffisent pour lui donner une apparence professionnelle. Aujourd'hui, elle doit affronter une réunion importante avec son équipe éditoriale. Elle n'a pas le choix.

Au bureau, les couloirs animés contrastent avec son état d'esprit. Elle serre ses dossiers contre elle comme une armure, évitant le regard de ses collègues. Mais Angela, son assistante, n'est pas dupe. Petite et vive, Angela est dotée d'un sixième sens pour détecter les soucis des autres, surtout ceux d'Isabella.

La réunion se déroule sans incident, bien que l'esprit d'Isabella vagabonde. Elle acquiesce mécaniquement, prenant des notes sans vraiment entendre ce qui se dit. Lorsque la réunion se termine, Angela la suit jusqu'à la salle de pause, un café à la main.

"Isa, qu'est-ce qui se passe ?" demande Angela en s'asseyant à côté d'elle.

Isabella lève les yeux, surprise par le ton direct de son assistante. Elle hésite, cherchant une réponse qui ne trahirait pas son trouble.
— "Oh, rien… Juste beaucoup de choses à gérer avec le mariage et le travail," répond-elle en évitant son regard.

Angela plisse les yeux, sceptique.
"Ne me fais pas ça, Isa. Je te connais trop bien. Tu es préoccupée, et ça se voit. Qu'est-ce qui te tracasse vraiment ?"

Isabella serre sa tasse de thé entre ses mains, le liquide chaud contre ses paumes l'aidant à se concentrer. Elle hésite, ses mots coincés dans sa gorge.
— "Je… traverse une période difficile, c'est tout," finit-elle par murmurer.

Angela hausse un sourcil, croisant les bras avec son attitude habituelle de "je ne lâcherai pas l'affaire".
"C'est à cause d'Emmett, n'est-ce pas ?"

Isabella relève brusquement les yeux, son visage trahissant une once de panique.
"Pourquoi tu dis ça ?" demande-t-elle, presque sur la défensive.

Angela soupire et pose son café sur la table.
"Parce que tu es stressée depuis des semaines, Isa. Et honnêtement, si quelque chose cloche avec lui, tu dois le régler. Tu ne peux pas te marier avec un homme si tu n'es pas sûre de lui."

Ces mots frappent Isabella comme une claque. Elle détourne le regard, cherchant une réponse, mais rien ne vient.
"C'est juste beaucoup de choses en même temps," tente-t-elle, la voix faible.

Angela, sans perdre sa douceur, pose une main sur la sienne.
"Écoute, je suis là pour toi. Tu n'as pas besoin de tout affronter seule. Si quelque chose ne va pas, parle-moi. Ne garde pas tout pour toi."

Isabella esquisse un sourire forcé, mais son cœur n'est pas apaisé. Les mots de Angela résonnent en elle alors qu'elle retourne à son bureau. Chaque pas semble plus lourd que le précédent.

Assise à son poste, elle ouvre son agenda mais n'arrive pas à se concentrer. Le visage d'Emmett, celui de la femme brune, et les paroles d'Edward se superposent dans son esprit. Elle sait qu'elle devra bientôt prendre une décision : continuer à se voiler la face ou affronter la vérité. Mais pour l'instant, elle se contente de prétendre que tout va bien, même si elle sent que le sol commence à se dérober sous ses pieds.

La lumière douce de la fin d'après-midi traverse les grandes baies vitrées de l'appartement, réchauffant les murs d'un éclat doré. Isabella est seule, comme souvent ces derniers jours. Elle a laissé un message à Emmett plus tôt, mais il n'a pas encore répondu. Il avait mentionné un entraînement ce soir, une routine qu'elle connaît bien. Pourtant, cette absence semble différente, plus lourde.

Assise sur le canapé, un livre ouvert sur ses genoux, Isabella peine à se concentrer. Les mots dansent devant ses yeux sans qu'elle puisse leur donner de sens. Son téléphone posé sur la table basse vibre doucement. Elle le prend immédiatement, l'espoir naissant qu'il s'agisse d'Emmett.

« Désolé, entraînement prolongé. Je rentrerai tard. Repose-toi bien, ma belle. Je t'aime. »

Isabella lit le message plusieurs fois. Les mots sont tendres, comme toujours, mais ils sonnent creux. Elle repose le téléphone, son esprit envahi par les souvenirs de la veille. Cette femme, leur proximité, les éclats de rire… Et cette voix dans sa tête, celle d'Edward, qui lui avait dit de ne pas se tromper sur Emmett.

Un soupir lui échappe. Elle se lève et marche jusqu'à la cuisine pour se préparer un thé, espérant que cette routine familière l'apaisera. La bouilloire siffle doucement, et elle verse l'eau bouillante dans sa tasse, observant la vapeur qui s'élève comme un mirage.

Mais même ce simple rituel ne peut calmer la tempête intérieure. Elle repense à la photo d'elle et d'Emmett sur l'étagère du salon, et un mélange de colère et de tristesse monte en elle. Que représente-t-elle vraiment dans la vie d'Emmett ? Est-elle simplement là pour compléter son image parfaite ?

Isabella retourne dans le salon, sa tasse de thé à la main. Elle s'installe à nouveau sur le canapé, fixant l'écran noir de son téléphone. Une idée germe doucement dans son esprit : appeler Edward. Mais est-elle prête à franchir cette ligne, à prendre part à un jeu qui pourrait bouleverser tout ce qu'elle connaît ?

Elle ouvre la conversation avec Edward. Ses doigts glissent sur le clavier, hésitants. Les mots se forment, mais elle s'interrompt, effaçant le texte avant de l'envoyer.

Finalement, elle repose le téléphone sans rien écrire. La nuit commence à tomber, et l'appartement plonge dans une pénombre apaisante. Isabella sait qu'elle ne peut pas continuer ainsi, mais ce soir, elle choisit d'attendre.

Un jour de plus. Un moment de répit. Mais elle sent, au plus profond d'elle-même, que le moment de décider approche.

La nuit enveloppait la ville d'un calme trompeur, contrastant avec le tumulte intérieur d'Isabella. Après des heures à peser le pour et le contre, elle prit son téléphone, fit défiler ses contacts et s'arrêta sur le nom d'Edward Masen. Ses doigts tremblaient légèrement alors qu'elle appuyait sur l'icône pour appeler. Le téléphone ne sonna que deux fois avant qu'il ne décroche.

- « Isabella, » répondit-il immédiatement, sa voix grave teintée d'une sérénité presque déconcertante.

Elle inspira profondément avant de répondre.
- « Je suis prête à vous écouter. On peut se voir ? »

Edward accepta sans hésiter, proposant un restaurant discret au coin d'une rue calme, loin du bruit et des regards indiscrets.

Isabella posa son téléphone sur la table avec une lenteur calculée. Sa décision était prise, mais elle n'en ressentait pas moins un poids sur ses épaules. Elle se leva, traversant leur appartement silencieux, et opta pour une tenue simple mais élégante : un pull en cachemire beige, un jean foncé bien coupé, et des bottines en cuir marron. Elle ajouta un manteau long et un foulard léger pour se protéger du froid de la soirée new-yorkaise.

Elle quitta l'appartement sans jeter un regard en arrière, prenant un taxi jusqu'à l'adresse qu'Edward lui avait donnée. Pendant le trajet, son esprit était un mélange de nervosité et de curiosité. Pourquoi avait-elle finalement accepté ? Était-ce sa colère envers Emmett, ou la fascination qu'Edward exerçait déjà sur elle ?

Le taxi s'arrêta devant un petit restaurant niché dans une rue calme, loin des quartiers animés où elle et Emmett avaient l'habitude de sortir. La devanture était discrète, ornée d'une enseigne en fer forgé gravée du nom du lieu, "Le Verre Caché". De l'extérieur, les grandes fenêtres laissaient entrevoir une lumière tamisée, diffusée par des lustres en cristal délicatement suspendus.

En entrant, Isabella fut enveloppée par une ambiance chaleureuse et feutrée. Les murs, recouverts de boiseries sombres et de miroirs anciens, reflétaient les flammes dansantes des bougies disposées sur chaque table. Une douce musique de jazz jouée au piano flottait dans l'air, complétant l'atmosphère intimiste. Les tables, espacées juste ce qu'il fallait pour offrir une certaine confidentialité, étaient dressées avec une élégance sobre : nappes blanches impeccables, verres étincelants, et couverts en argent.

Edward était déjà là, installé à une table dans un coin stratégique, légèrement en retrait mais avec une vue parfaite sur l'ensemble de la salle. Il se leva dès qu'il la vit entrer, impeccablement vêtu d'un costume gris anthracite et d'une chemise bleu clair. Il était visiblement à l'aise dans cet environnement, comme s'il en faisait partie intégrante.

Isabella traversa la pièce, consciente des regards discrets des autres clients, sans doute intrigués par sa présence. En s'approchant de la table, elle sentit à nouveau ce mélange d'appréhension et de détermination.

Edward la salua d'un sourire poli, sa voix basse tranchant avec l'effervescence discrète du restaurant.
- « Isabella, merci d'être venue. Ce lieu vous plaît ? »

Elle hocha la tête, prenant une grande inspiration pour masquer sa nervosité.
- « C'est charmant, différent de ce que j'ai l'habitude de fréquenter. »

Edward tira légèrement sa chaise pour l'inviter à s'asseoir, puis se rassit face à elle.
- « C'est ce que j'apprécie ici. Calme, hors des radars. Parfait pour… des conversations importantes. »

Isabella ne répondit pas immédiatement, ses yeux parcourant la salle tandis qu'elle s'imprégnait de l'ambiance. La chaleur du lieu contrastait avec le froid extérieur, mais aussi avec la froideur qu'elle avait ressentie en découvrant la trahison d'Emmett.

- « Je suppose que c'est le but, » dit-elle finalement, posant son regard sur Edward, prête à entendre ce qu'il avait à lui proposer.

- « Vous avez pris votre décision, » dit-il avec assurance, avant même qu'elle n'ait eu le temps de parler.

Isabella hocha la tête, s'asseyant face à lui. Son regard perçant la mit légèrement mal à l'aise, mais elle refusa de détourner les yeux. Elle était déterminée à rester maîtresse de cette rencontre.

- « Je veux savoir ce que vous avez en tête, » commença-t-elle d'une voix ferme. « Mais je tiens à être claire : je ne suis pas là pour devenir une femme amère ou pour manipuler les gens. Si c'est ce que vous attendez de moi, je vous arrête tout de suite. »

Edward l'observa un instant, son expression sérieuse mais respectueuse. Puis il acquiesça lentement.
- « Je comprends, et je respecte ça. Ce n'est pas ce que je cherche non plus. »

Il prit une gorgée de son verre d'eau, comme pour marquer une pause, avant de poursuivre.
- « Ce que je vous propose, ce n'est pas de vous venger au sens classique. Je veux que vous retrouviez votre pouvoir. Que vous montriez à Emmett, et peut-être à vous-même, que vous êtes bien plus que ce qu'il semble croire. »

Un silence s'installa entre eux, lourd de promesses et de doutes. Isabella fixa un instant la table, jouant distraitement avec sa serviette, avant de relever les yeux vers Edward.

- « Très bien, » dit-elle finalement. « Mais je veux avoir le contrôle. Et si à un moment, je sens que ça va trop loin, je me retire. »

Edward sourit, presque imperceptiblement, et hocha la tête.
- « Alors, c'est un accord. »

Isabella s'installa plus confortablement sur sa chaise, croisant les bras sur la table, une lueur de défi brillant dans ses yeux. Elle savait que cette conversation serait un tournant. Si elle devait s'associer à Edward, ce serait selon ses propres termes.

- « Alors, par où commence-t-on ? »

Un sourire en coin apparut sur le visage d'Edward, mais il n'avait rien de moqueur. C'était un sourire de quelqu'un qui voyait enfin le potentiel de la personne en face de lui.

- « D'abord, » répondit-il, en appuyant chaque mot, « nous allons redéfinir qui vous êtes, Isabella Swan. »

Il sortit une petite tablette de cuir de sa poche et la posa sur la table, révélant un stylo et un carnet de notes.

- « Imaginez que le monde ne vous connaît pas. Pas comme "la fiancée d'Emmett McCarty", mais comme vous. Qu'est-ce que vous voulez que les gens voient ? Quelle image voulez-vous projeter ? »

Isabella le fixa, déconcertée par la simplicité de la question, mais aussi par son ampleur. C'était une question qu'elle ne s'était jamais posée.

- « Je suppose que… je veux être vue comme quelqu'un de confiante, indépendante, mais accessible. Quelqu'un qui n'a pas besoin de l'approbation de ce cercle fermé pour exister. »

Edward hocha la tête, griffonnant quelques mots dans son carnet.
- « Bien. Alors c'est là que nous commençons. À partir de maintenant, chaque action que nous entreprendrons sera pour renforcer cette image. Pas pour vous venger, mais pour montrer que vous êtes bien plus que ce qu'Emmett vous a laissé croire. »

Isabella sentit un frisson d'excitation mêlé de peur. Pour la première fois, elle entrevoyait une lueur d'espoir, une chance de se reconstruire en dehors de l'univers oppressant des McCarty.

Edward posa son stylo et croisa les mains devant lui.
- « Alors, Isabella, êtes-vous prête à devenir la femme que vous êtes destinée à être ? »

Elle inspira profondément, puis, avec une détermination qu'elle n'avait pas ressentie depuis longtemps, répondit :
- « Oui. Je suis prête. »

La nuit était tombée sur la ville, enveloppant l'appartement d'Isabella et Emmett dans une tranquillité trompeuse. Lorsqu'Isabella franchit la porte, un soupir s'échappa de ses lèvres. L'espace, pourtant si luxueux, semblait terriblement vide. Chaque détail – les murs immaculés, les meubles design, l'éclairage tamisé – lui rappelait combien elle se sentait seule malgré tout ce qu'elle possédait.

Elle posa son sac sur le comptoir de la cuisine et resta un instant immobile, le regard perdu. Puis, avec une lassitude palpable, elle se dirigea vers la salle de bain.

La douche chaude était apaisante, mais pas assez pour effacer le poids qui pesait sur ses épaules. L'eau ruisselait sur sa peau, emportant avec elle les traces de sa journée, mais pas ses pensées tumultueuses. L'image d'Emmett et de cette femme, les mots d'Edward, et la décision qu'elle avait prise tournaient en boucle dans son esprit.

En sortant de la salle de bain, elle enfila un pyjama confortable – un simple débardeur et un short en coton, bien loin des tenues sophistiquées qu'elle portait lors des soirées mondaines. Elle s'installa dans le lit, ajustant les draps autour d'elle. La solitude dans cet immense appartement lui semblait presque oppressante.

Elle entendit finalement la serrure tourner. Le bruit familier des clés d'Emmett résonna dans l'entrée, suivi de ses pas sur le parquet. Isabella ferma les yeux, son cœur battant plus vite, mais elle décida de feindre le sommeil.

Emmett entra dans la chambre sur la pointe des pieds. Elle sentit sa présence avant même qu'il ne parle. Le matelas s'enfonça légèrement sous son poids lorsqu'il s'allongea à ses côtés. Il ne la toucha pas, mais elle pouvait presque sentir son regard posé sur elle dans la pénombre.

Un moment passa dans le silence, ponctué uniquement par le bruit régulier de sa respiration. Puis, doucement, il murmura :
- « Bonne nuit, Bella. »

Ces mots, simples et tendres, eurent l'effet d'une lame dans son cœur. Elle resta immobile, respirant lentement pour ne pas trahir son éveil. Quelques instants plus tard, elle entendit Emmett s'endormir, son souffle devenant régulier et profond.

Le premier rayon de soleil filtra à travers les rideaux, baignant la chambre d'une lumière douce. Isabella ouvrit les yeux, fixant un point invisible au plafond. Emmett dormait toujours à côté d'elle, paisible, comme si rien n'avait changé.

Elle se redressa lentement, veillant à ne pas le réveiller, et sortit du lit. Ses pieds nus effleurèrent le sol froid alors qu'elle traversait la chambre pour récupérer des vêtements. Elle enfila un chemisier blanc, un jean et des ballerines, choisissant une tenue simple mais élégante.

Dans la cuisine, elle se servit rapidement un verre d'eau. La maison était silencieuse, le genre de silence qui amplifie les pensées les plus sombres. Elle jeta un dernier regard vers la chambre, où Emmett dormait encore, et se dirigea vers la porte.

Sans un mot, sans une note laissée sur le comptoir, elle quitta l'appartement. L'air frais du matin l'accueillit, vif et stimulant, lui rappelant que le monde continuait de tourner malgré ses tourments intérieurs.

Alors qu'elle s'éloignait, Isabella sentit un mélange d'émotions : une tristesse sourde, une colère enfouie, mais aussi une détermination naissante. Cette journée, elle le savait, serait le début de quelque chose de nouveau.

Le soleil avait déjà pris place dans le ciel lorsque Isabella arriva au bureau. Le bourdonnement familier de l'open space la frappa dès qu'elle franchit les portes vitrées : des téléphones qui sonnent, des discussions animées autour de projets, et le cliquetis des claviers. Elle se força à arborer un sourire neutre et à saluer ses collègues comme si de rien n'était.

Elle se plongea immédiatement dans son travail, revisitant des articles, peaufinant des mises en page, et répondant à une montagne d'e-mails. La rédaction était son refuge, un endroit où elle pouvait s'oublier dans les mots et les délais serrés. Son esprit, d'ordinaire si clairvoyant, était pourtant encombré. Les images de la nuit précédente et la voix d'Emmett murmurant "bonne nuit" refaisaient surface malgré ses efforts pour les repousser.

À midi, elle s'était installée seule dans une petite salle de pause avec une salade qu'elle picorait distraitement. La vibration de son téléphone sur la table interrompit ses pensées. Elle hésita avant de regarder l'écran, craignant qu'il s'agisse d'Emmett. Mais ce n'était pas lui.

Le message était concis, direct, comme toujours :
« Boutique Eden, 18h. J'ai quelque chose à vous montrer. »

Isabella sentit son cœur s'accélérer. La mention de la boutique haute couture, "Eden", piqua sa curiosité. C'était un lieu réputé pour accueillir les élites, une véritable vitrine de glamour et de luxe. Pourquoi Edward l'y conviait-il ?

Elle relut le message, son esprit oscillant entre hésitation et intrigue. Mais avant qu'elle ne puisse trop y réfléchir, ses doigts avaient déjà tapé une réponse :
« J'y serai. »

L'après-midi passa dans un flou d'activité. Isabella s'immergea dans chaque tâche qui croisait son chemin, cherchant désespérément à maintenir son esprit occupé. Mais derrière chaque action, l'invitation d'Edward rôdait. Ce rendez-vous n'était pas anodin, elle en était certaine.

À mesure que l'horloge avançait, un mélange d'appréhension et d'excitation monta en elle. L'idée de le revoir, dans un cadre aussi spécifique, éveillait quelque chose qu'elle n'osait encore nommer.

À 17h45, Isabella quitta le bureau. Son jean décontracté et son chemisier paraissaient bien loin de la sophistication attendue dans une boutique comme Eden. Alors qu'elle montait dans un taxi, elle se demanda brièvement si elle faisait le bon choix.

Le taxi la déposa devant une façade immaculée et intimidante. De grandes vitrines laissaient entrevoir des robes de soirée somptueuses et des costumes taillés avec une précision presque artistique. À l'intérieur, des vendeurs en uniforme s'affairaient autour de quelques clients triés sur le volet.

Edward était là, l'attendant près d'un mannequin habillé d'une robe étincelante. Toujours impeccable, vêtu d'un costume gris foncé qui semblait avoir été fait sur mesure, il la salua d'un simple signe de tête, un sourire en coin sur les lèvres.

- « Vous êtes pile à l'heure, » dit-il, son regard perçant la détaillant brièvement avant de se poser sur ses yeux.

Isabella sentit une vague d'intimidation face à son assurance. Mais elle se redressa légèrement et répondit :
- « J'ai dit que je viendrais, et je suis là. Maintenant, expliquez-moi pourquoi cet endroit. »

Edward sourit, comme amusé par son ton direct.
- « Vous comprendrez bientôt. »

Il fit un geste vers une vendeuse qui s'approcha immédiatement.
- « Préparez les pièces principales pour Mademoiselle Swan, » ordonna-t-il calmement. Puis, se tournant vers Isabella :
- « Ce soir, vous allez découvrir une autre version de vous-même. Celle que le monde verra lorsque vous serez prête à leur montrer qui vous êtes vraiment. »

Isabella sentit une boule d'émotion se former dans sa gorge, mais elle n'en montra rien. À cet instant, elle comprit que ce rendez-vous n'était pas seulement une rencontre dans une boutique : c'était une étape dans la transformation qu'elle avait choisie d'entreprendre.

La lumière tamisée de la boutique soulignait les détails luxueux des robes suspendues autour d'eux, chaque pièce semblant être une œuvre d'art. Edward, calme et assuré, se tenait près d'Isabella alors qu'elle hésitait devant un présentoir.

- « Isabella, » commença-t-il d'une voix douce mais ferme, « il ne s'agit pas de vous transformer en quelqu'un que vous n'êtes pas. Tout ceci vise à révéler ce que vous avez toujours été. À faire comprendre au monde que vous êtes une femme qui mérite d'être vue et respectée. »

Elle leva les yeux vers lui, incertaine.

- « Et ça passe par une robe ? » demanda-t-elle avec un brin d'ironie.

Edward sourit légèrement.

- « Ce n'est pas la robe. C'est la façon dont vous la porterez. »

Une vendeuse s'approcha avec plusieurs tenues soigneusement choisies. Parmi elles, une robe rouge élégante attira immédiatement l'attention d'Isabella. Elle hésita, tendant la main vers le tissu soyeux, mais se ravisa.

- « Essayez-la, » insista Edward, ses yeux perçants croisant les siens.

Après un moment de réflexion, elle acquiesça et suivit la vendeuse vers une cabine d'essayage. Derrière les rideaux, Isabella enfila la robe, ajustant les bretelles et lissant le tissu contre sa peau. Le rouge éclatant contrastait avec ses cheveux sombres, et la coupe cintrée soulignait sa silhouette d'une manière qu'elle n'avait jamais explorée auparavant.

Lorsqu'elle sortit, hésitante, elle croisa le regard d'Edward. Il resta silencieux un instant, ses yeux détaillant chaque ligne, chaque détail de la tenue.

- « C'est parfait, » dit-il finalement, sa voix teintée d'admiration.

Isabella se tourna vers le grand miroir, scrutant son reflet. Elle ne se reconnaissait presque pas. La femme qui la fixait semblait confiante, forte, et déterminée. Elle effleura le tissu de ses doigts, une lueur de doute persistant dans ses yeux.

- « Ce n'est pas moi, » murmura-t-elle.

Edward s'approcha, gardant une certaine distance respectueuse.

- « Ce n'est pas qui vous pensez être, » corrigea-t-il doucement. « Mais c'est vous. Et vous devez apprendre à le voir. »

Isabella inspira profondément, puis observa à nouveau son reflet. Cette fois, quelque chose changea. Elle releva légèrement le menton, une étincelle de défi allumant son regard.

Edward hocha la tête, satisfait.

- « Maintenant, vous êtes prête. »

Elle se retourna vers lui, une lueur nouvelle dans ses yeux.

- « Prête pour quoi ? »

Son sourire devint plus marqué, presque mystérieux.

- « Pour reprendre le contrôle. »

À cet instant, Isabella comprit que ce moment, cette robe, et cet homme allaient marquer le début d'un changement qu'elle n'aurait jamais envisagé auparavant.