Le drame d'une vie

Pour la énième fois depuis des mois, Elyra Nott étouffa une impressionnante quinte de toux sois le regard inquiet de son fils âgé de maintenant 9 ans.

-Tout va bien, ne t'en fais pas...lui murmura-t-elle d'une voix douce en passant une main tendre dans les cheveux de son fils.

Théodore hocha la tête et replongea dans son livre.

Les semaines passèrent et un soir alors que Théodore était au lit depuis un moment déjà, Elyra prit une profonde inspiration et se tourna vers son mari :

-Mon état ne s'améliore pas, il va falloir s'y préparer...

-Attendons le médicomage, il vient demain, peut-être qu'il trouvera d'autres potions qui pourront te soulager répondit précipitamment le vieil homme.

Elyra eu un sourire attendri. Elle le savait sa fin approchait et elle ne savait qui de son mari ou de son fils allait le plus souffrir. Décidant d'épargner le vieil homme d'une profonde tristesse prématurée, elle hocha la tête et vint se blottir dans ses bras. A la façon dont il la tenait contre lui, elle comprit que malgré le mince espoir qu'elle avait perçu dans sa voix, lui aussi n'était pas très optimiste.

Le lendemain matin, juste avant que le médicomage n'arrive, Elyra supplia son mari :

-S'il te plaît fais ton possible pour éloigner Théodore... Je ne veux pas qu'il assiste à la consultation et qu'il entende le verdict du médicomage.

Son mari eu un petit rire et rétorqua :

-De toute façon, il a une peur bleue du médicomage, il ne devrait pas traîner dans les parages...

-C'est vrai mais garde un œil sur lui s'il te plaît...

-S'il n'y a que ça pour te tranquilliser je le ferais assura Nott Senior.

Anxieux, Théodore errait dans le salon telle une âme en peine après avoir pris son petit déjeuner. Il savait que le médicomage devait venir pour examiner sa mère qui n'était pas en grande forme depuis quelques temps et il était confronté à un dilemme. Il souhaitait rester auprès de sa mère durant la consultation mais il était en même temps terrifié par le médicomage.

Depuis toujours, le jeune garçon craignait le corps médical. Il n'avait pourtant jamais eu de mauvaise expérience. Il avait été très peu manipulé depuis sa naissance, simplement par ses parents et le médicomage de la famille qui avait toujours été d'une grande douceur.

A chaque fois qu'il avait dû être examiné, sa mère avait été obligé de le tenir dans ses bras et même cela n'avait jamais réussi à rassurer pleinement le petit garçon, qui ne cessait de couiner de panique et de peur.

Lorsque l'on toqua à la porte du manoir, Théodore n'y tint plus et couru se réfugier à l'étage.

-Ah tu es là, je te cherchais... Lui dit son père lorsqu'il le croisa à l'étage.

-Le médicomage est là... Murmura le petit garçon d'une voix tremblante.

-Il ne vient pas pour toi ! Tu sais, Théodore, un jour il va falloir que cette comédie cesse à propos du médicomage. Il ne t'a jamais brutalisé n'est-ce pas ? De toute façon je ne l'aurai jamais permis et ta mère encore moins !

Le petit garçon, conscient que son comportement était ridicule hocha la tête et promis de prendre sur lui la prochaine fois qu'il devrait être examiné.

-Viens avec moi, j'aimerais faire un peu de rangement dans la bibliothèque.

Docilement, Théodore suivit son père en direction de la bibliothèque.

Elyra attendait le verdict du médecin même si au fond d'elle elle le connaissait déjà.

-Je suis désolé d'être porteur de mauvaise nouvelle mais je pense que vous le savez comme moi mais la fin est proche...

Elyra hocha la tête et demanda :

-Combien de temps il me reste à vivre ?

Le médicomage haussa les épaules et répondit :

-Cela peut varier quelques mois comme quelques semaines... Mais une chose est presque certaine pour moi, c'est la dernière fois que je vous vois Mrs Nott...

Comprenant qu'il n'y avait plus aucune issue possible, que la maladie avait pris le dessus, Elyra leva courageusement la tête et remercia chaleureusement le médicomage.

Celui-ci pris sa main dans la sienne et lui dit avec sincérité :

-J'admire votre courage. Je peux quand même vous donner quelques potions pour soulager la douleur. Votre mari et votre fils sont au courant ?

-Mon mari naturellement mais je ne suis pas certaine qu'il soit prêt à admettre que bientôt je ne serais plus à ses côtés et en ce qui concerne Théodore, il devine que quelque chose ne va pas mais je n'en ai pas encore parlé clairement avec lui.

-Je vous souhaite un immense courage dans ce cas-là alors... Lui souhaita-t-il tandis qu'elle le raccompagnait à la porte.

Le soir venu, éloigné des oreilles indiscrètes de leur fils, Elyra décida d'avoir une discussion avec son mari.

-Le médicomage m'a confirmé que la fin était proche mais il n'a pas pu être plus précis, quelques mois comme quelques semaines. Est-ce que tu crois que l'on devrait en parler à Théodore maintenant ?

Nott Senior réfléchit un moment. Malgré le fait qu'il avait réussi à occuper son fils durant la consultation, celui-ci s'était précipité au salon pour rejoindre sa mère sitôt le médicomage parti et n'avait pas quitté sa mère de toute la journée.

-Comment te sens-tu en ce moment ?

-Je suis affaiblie c'est certain mais pas encore au seuil de la mort.

-Je pense que l'on peut peut-être attendre encore un peu alors. Ton rendez-vous avec le médicomage l'a beaucoup affecté et même s'il ne devine pas l'issue de ta maladie, il sait que c'est quelque chose de grave...

Elyra hocha la tête. Autant préserver le petit garçon encore un peu.

Deux semaines passèrent et son état s'était gravement dégradé. Elyra passait ses journées au lit avec son fils qui lui tenait compagnie. Celui-ci lui faisait la lecture, lui apportait ses repas et faisait de longue sieste blottie tout contre elle.

Elyra le savait elle allait devoir lui dire. Alors qu'elle réfléchissait à la manière la plus douce possible de lui présenter la chose, une quinte de toux terrible la prit.

-Maman ? L'interrogea Théodore la voix remplie d'inquiétude

.

Elyra n'arrivait plus à respirer. Le moment était venu, elle le savait. Théodore, ses yeux bleus écarquillés de panique lui avait saisi la main. Elyra trouva la force d'adresser quelques derniers mots à son fils avant de rendre son dernier souffle et de clore pour l'éternité ses yeux bleus.

Assis dans son habituel fauteuil en cette belle journée d'août, Nott Senior sursauta en entendant un cri strident provenant de l'étage.

Il se précipita en direction de la chambre de son épouse et ouvrit la porte à toute volée mais c'était déjà trop tard. Théodore était accroché au cadavre encore chaud de sa mère et pleurait à chaude larmes.

A son tour il craqua et fondit en larme, le jour tant redouté était enfin là, il venait de perdre son épouse adorée. S'approchant doucement du corps et du petit garçon qui y était accroché, il murmura à son fils unique :

-Je suis vraiment désolé, Théodore...

Il posa une main qu'il voulait apaisante dans le dos de son fils qui s'étouffait à moitié avec ses larmes. Après l'avoir laissé pleurer quelques minutes auprès de sa mère, il tenta de le décoller de la dépouille mais Théodore continuait de s'y accrochait comme si sa vie en dépendait.

-C'est terminé mon garçon, elle ne reviendra pas...

Ses paroles firent redoubler les pleurs du petit garçon. Commençant à perdre sérieusement patience et souhaitant se recueillir seul auprès de sa femme, il l'attrapa un peu brutalement pour le forcer à lâcher le corps.

-Lâche là ! Je te l'ai dit elle ne reviendra pas !

Théodore fini par lâcher prise et se précipita à l'extérieur de la pièce en gémissant.

Le calme était revenu et pour la première fois, le vieil homme s'autorisa à verser toutes les larmes qu'il contenait depuis longtemps. Il resta presque trois heures auprès de sa défunte épouse. Même morte elle était toujours aussi belle. Ses cheveux noirs étaient étalés sur l'oreiller et on aurait pu croire qu'elle dormait simplement.

Se souvenant soudainement de son fils en état de choc, le vieil homme quitta la chambre et se rendit devant celle de Théodore. La main sur la poignée de la porte il s'apprêta à entrer, quand le souvenir de son fils en larmes agrippant le cadavre de sa mère le fire se raviser. Il n'était pour l'instant pas en état de gérer le chagrin de son fils en plus du sien.

Ne voulant cependant pas le laisser dans un état aussi critique il envoya l'elfe de maison.

Aux alentours de minuit, alors que le vieil homme tentait de reprendre ses esprits dans son habituel fauteuil, l'elfe fit son apparition.

-Comment va-t-il ? Questionna le vieil homme.

-Pas très bien. Tinky a mis presque une heure à lui faire boire un peu d'eau et le petit maître vient juste de s'endormir épuisé par ses pleurs...

Nott Senior se prit la tête dans les mains, les jours qui venaient allaient être particulièrement difficiles autant pour lui que pour son fils.