Titre : Dérapage
Rating : NC-17. TRÈS.
Thème : 16. Invincible ; sans égal
Disclaimer : L'univers d'Harry Potter et tous ses personnages appartiennent à JK Rowling.

Notes : Prequel du baiser précédent !


Ce n'était pas comme s'il avait vraiment eu beaucoup de marge de manœuvre, se justifierait mentalement Severus par la suite. Ce n'était pas comme s'il avait eu à aucun moment l'occasion de lui dire pour les fiançailles, Ophelia, la fillette qui venait avec, le mariage dans quelques mois, sa maison en Irlande. Ce n'était pas comme s'il avait pu faire quoi que ce soit pour empêcher ce qui était arrivé. Quand Sirius Black voulait vraiment quelque chose, avait-il découvert ce soir-là, il devenait assez difficile de le lui refuser. Ne serait-ce que parce que Sirius Black ne demandait pas : il prenait.

Severus revoyait l'intensité insensée de son regard. Personne n'avait jamais regardé Severus de cette façon auparavant. Comme s'il était la personne la plus désirable qui ait jamais vu le jour. Sous ce regard, Severus s'était senti sexy – grotesque, non ? Et pourtant.

Severus n'avait pas tellement eu le temps de réfléchir. Il se trouvait coincé dans un canapé un peu trop mou, Sirius Black et son regard à sa gauche, un gros arbuste en pot à sa droite. Il n'avait aucune idée de ce que cet arbuste faisait là. Il n'avait aucune idée de ce que lui-même faisait là.

Encore une minute auparavant, la pièce était pleine de gens qui fêtaient la fin des cours et des examens. Où étaient-ils tous passés ? Severus se rappela le feu d'artifice. Avait-il pu être si absorbé par sa conversation avec Black qu'il n'avait pas entendu l'annonce du feu d'artifice ?

Quoi qu'il en soit, c'était très sot de sa part. Il paraissait nettement moins étrange d'être assis sur un canapé mou, à discuter avec l'un de ses collègues, dans une pièce remplie d'autres de ses collègues, que dans une pièce vide. On les avait privés de leur contexte. L'intéressant professeur de Métamorphose était redevenu l'insolent Sirius Black. Severus lui-même était, inexplicablement, devenu sexy.

Severus n'était pas du genre à avoir peur d'un regard. Il était lui-même très doué pour les regards. Lorsqu'il remarqua le regard de Sirius, ce regard qui disait « Je veux mes lèvres sur tes lèvres, maintenant », Severus se contenta de lui renvoyer un très convaincant « Essaie seulement, pour voir ». Grave erreur. On ne défie jamais un Gryffondor à la légère.

Sirius l'avait l'embrassé.

Il ne l'avait pas embrassé par tendresse ou parce qu'il fallait bien commencer par là. Il l'avait embrassé comme s'il ne désirait rien d'autre. Il l'avait embrassé comme s'il lui était impossible d'empêcher leurs lèvres de s'étreindre, leurs langues de se caresser, leurs respirations de se mélanger. Il l'avait embrassé dans un mouvement de tout son corps pour rejoindre Severus et lui voler ses lèvres, les presser contre sa bouche, les faire siennes d'un seul baiser sauvage.

Severus ne s'était pas attendu à quelque chose de ce genre, sans quoi il aurait réagi plus vite, il aurait eu la présence d'esprit de repousser Sirius plus tôt – il l'agrippa par le devant de sa robe et étendit le bras pour le tenir à distance, mais le mal était déjà fait. Severus était pantelant et décontenancé, incapable de parler.

Sirius posa une main sur le poing de Severus qui enserrait le tissu de sa robe, le força à s'ouvrir, à glisser entre les pans du vêtement dont il avait fait sauter quelques boutons, à toucher sa peau, à remonter vers sa clavicule, à caresser sa gorge – Severus en profita pour retrouver l'usage de sa main et resserrer ses doigts sur le cou de Sirius, le tenant à sa merci.

« Non. »

Il n'était pas assez sûr de sa voix pour en dire davantage. Sirius respirait fort, sa pomme d'Adam roulait contre la paume de Severus. Severus hésita.

« Ma chambre est tout près d'ici », murmura Sirius, sa gorge vibrant légèrement dans la poigne de Severus.

Severus le lâcha. Sirius se leva.

Lorsque les autres fêtards revinrent dans la pièce, ils n'y trouvèrent que l'arbuste en pot sur son canapé.

Jamais Severus n'aurait cru qu'il serait un jour projeté contre un mur par le désir d'un autre, qu'il se laisserait plaquer contre le torse d'un homme, qu'il sentirait son érection grossir contre sa cuisse – qu'il trouverait cela assez excitant pour vouloir la toucher. Sirius lui mordit la lèvre lorsqu'il introduisit sa main dans son pantalon, trouva son sexe et l'entoura de ses doigts. Profitant de cet avantage, Severus prit momentanément le dessus sur Sirius et le poussa autoritairement vers le lit.

Rencontrant le bord du matelas derrière lui, Sirius lui échappa et, tombant assis, s'empressa aussitôt d'écarter les pans de la robe de Severus, défaire sa ceinture dans un tintement de métal, ouvrir son pantalon, baisser son sous-vêtement et le prendre dans sa main ; avant d'avoir compris ce qui se passait, Severus sentit la bouche de Sirius envelopper son membre durci. Oh. Il poussa un gémissement qui se voulait un juron et ferma les yeux, lèvres entrouvertes sur son souffle fébrile. Les mains de Sirius étaient posées sur les hanches de Severus, les mains de Severus plongées dans la chevelure de Sirius. Les lèvres de Sirius, la langue de Sirius, la gorge de Sirius, dédiées à ce contact impossiblement intime et excitant, faisaient trembler tout son corps, l'obligeant à se raccrocher aux épaules devant lui, qu'il serra fort entre ses doigts. Une gêne diffuse le troublait pourtant, et il écarta bientôt Sirius, en disant d'une voix rauque : « Pas comme ça. » Sirius eut un sourire indéchiffrable et l'attrapa aussitôt par le bras pour l'attirer sur le lit.

Déjà, Sirius se plaçait au-dessus de lui, se défaisant prestement de sa robe professorale et de la chemise qu'il portait en-dessous, exposant son torse élancé. Severus décida immédiatement qu'il aimait ses épaules – larges, parfaitement dessinées. Il commença alors à réaliser qu'il n'avait jamais désiré qui que ce soit comme il désirait Sirius à cet instant, au point de sentir son sexe se tendre rien qu'au frôlement de leurs peaux, rien qu'au regard qu'il lui lançait à travers ses mèches rebelles, rien qu'à sa voix près de son oreille. Puis Sirius se pencha pour l'embrasser à nouveau, ses cheveux tombant sur le visage de Severus, et d'une main, saisit son érection, l'unissant à la sienne dans une friction lente.

Chacune des réticences de Severus se faisait balayer par la fougue de Sirius, contredire par le plaisir qu'il déchaînait en lui, mais dans ce qui lui restait de pensée rationnelle, il refusa de simplement se laisser faire. Il renversa Sirius sur le dos et, à califourchon sur ses cuisses, lui maintint les bras contre le matelas. Là, il l'observa quelques secondes – les lèvres rougies par leurs baisers violents, les mèches brunes en bataille, les pupilles dilatées, terriblement beau. Qu'est-ce qu'un homme comme lui pouvait bien lui trouver ? Severus n'était pas beau, il n'avait jamais rien eu de désirable. Sa robe ouverte dévoilait un corps maigre, disharmonieux, sec et rude comme un tronc d'olivier.

« Qu'est-ce que tu veux de moi ? murmura Severus.

– Embrasse-moi », souffla Sirius.

Il était tentant d'obéir mais ce n'était pas la réponse attendue.

« Qu'est-ce que tu veux de moi ? répéta Severus.

– Baise-moi », dit Sirius en faisant une brusque poussée pour libérer ses bras, sans succès.

La vulgarité n'avait jamais été du goût de Severus, et pourtant de telles paroles sortant de la bouche de Sirius n'étaient pas sans lui faire de l'effet. Mais ce n'était toujours pas ce qu'il voulait entendre.

« Qu'est-ce que tu veux de moi ? demanda-t-il une dernière fois.

– Je te veux, toi, Severus. »

Et comme il disait ces mots, Sirius se dégagea de son emprise et, tout en se redressant, passa les bras autour de son buste étroit, parcourant son dos sous sa robe béante, stimulant un de ses mamelons avec la langue et les dents. Severus glissa ses doigts dans ses cheveux pour lui faire pencher la tête en arrière, levant son visage vers le sien, et l'embrassa lentement, longuement, profondément. Les mains de Sirius sur son dos se resserraient compulsivement, des sons lascifs sortaient de leur gorge et vibraient dans leur bouche. Oh, bon sang. Encore quelques secondes de ce baiser affolant et Sirius n'y tint plus ; il fit retomber Severus sur le matelas et entreprit de le sortir des dernières couches de tissus superflues, ce à quoi Severus prit le relai en lui intimant : « Occupe-toi donc de tes propres vêtements, Black. »

Alors que Sirius s'allongeait à côté de lui pour finir de se dénuder avec empressement, Severus observa le reste de son corps svelte, légèrement musclé, parfaitement proportionné. Au-delà de la simple esthétique, il y avait de la grâce dans les gestes de Sirius : même lorsqu'il se coinçait les pieds dans son jean, cet homme-là ne paraissait jamais ridicule. Severus n'était pas coutumier de cette exposition des corps, cette nudité impitoyable ; il ne connaissait l'intimité que sous les couvertures, dans la pénombre où la place était laissée à l'imagination. Il s'étonnait de ne pas grimacer aux imperfections exhibées, d'en trouver plutôt exacerbé son propre besoin de toucher l'autre, de l'embrasser tout entier, et se redressant sur un coude, il lui arracha le jean récalcitrant d'un seul mouvement de bras. Le regard de Sirius croisa le sien, et il dut se sentir obligé de se justifier à ce point critique, car il susurra :

« J'y pense depuis des semaines, Severus. Je n'arrive pas à te sortir de ma tête…

– Par pitié, Black, ferme-la. »

Dans le moment de silence des respirations retenues, Severus passa le plat de sa main le long du torse de Sirius, sentant sous sa paume ses tétons durcis, descendant de la poitrine au plexus et du plexus au nombril… Le ventre tendu de Sirius frissonna légèrement, et alors que Severus allait continuer à descendre, Sirius arrêta sa main et revint se placer au dessus de lui. Leurs jambes s'emmêlèrent – des jambes d'homme, se dit Severus, minces et poilues – et leurs sexes entrèrent en contact. Sirius tenait toujours le poignet de Severus et le dirigea vers leurs érections lancinantes, ses doigts resserrant les doigts de Severus sur la chair brûlante.

« Severus, souffla-t-il, haletant. Je veux… »

De la main, il apprécia le galbe de la fesse de Severus, embrassant sa gorge. Celui-ci en ressentit une brusque appréhension et lâcha tout pour s'appuyer sur le matelas, faisant mine de se dégager.

« Je ne devrais pas être… Black, je ne crois vraiment pas que…

– Je te promets que tu ne vas pas le regretter », dit Sirius contre sa bouche, le forçant à se rallonger.

J'en doute fort, songea Severus, et Ophelia apparut derrière ses paupières closes, créant un sentiment de malaise dans son estomac, un dégoût de lui-même qui à lui seul aurait pu le décider à partir d'ici en courant.

« Regarde-moi. »

Sans réfléchir, Severus obéit et le visage d'Ophelia fut remplacé par celui de Sirius, son regard dévorant qui incendiait son bas-ventre, bannissait dégoût et malaise, les remplaçait par du désir et encore du désir. Éraflant ses lèvres entre ses dents, enroulant sa langue avec la sienne, Sirius souleva légèrement une de ses cuisses et, ayant enduit ses doigts de quelque chose qu'il avait sorti de sa table de nuit, en enfonça un en lui – sensation étrange et inadéquate, dont Sirius s'appliqua à le distraire de ses baisers insoutenables. Mais très vite, le doigt trouva ce qu'il cherchait et Severus ressentit – Oh, bon sang de bordel. Il se détendit quelque peu, permettant à un second doigt de s'introduire rapidement entre ses fesses, puis un troisième, tandis que penché au-dessus de lui, Sirius jouait à nouveau de la langue et des dents, tantôt sûr son torse, tantôt sur sa gorge, tantôt sur sa bouche – Severus l'attrapa par la nuque pour un baiser prolongé – et Sirius stimulait inlassablement cette zone sensible en lui offrant ses lèvres, remontant parfois à son oreille pour chuchoter son nom.

Puis Sirius retira ses doigts et cala dans le creux de ses bras les jambes de Severus. Celui-ci songea à protester le temps d'une demi-seconde contrariante, mais de sa bouche ouverte ne sorti en fait qu'une plainte sourde – le sexe de Sirius le pénétrait, doucement mais implacablement, chaud et dur et, oh, très différent des doigts. Le visage de Sirius était caché derrière ses cheveux ; lorsqu'il le releva, Severus s'aperçut qu'il avait les yeux mi-clos et se mordait la lèvre inférieure avec une expression d'extase pure. Puis il commença à bouger, ressortant lentement, passa ses mains sous les fesses de Severus pour ajuster l'angle, et il donna un coup de reins plus rapide – Severus étouffa un cri contre le dos de son poing. Sirius recommença, et ôta cette fois la main de Severus de sa bouche.

« Je veux t'entendre, Severus… »

Et il se plongea en lui, et encore, et encore, lui arrachant des grondements au rythme de son va-et-vient déchaîné. Sirius se penchait pour coller son front contre le sien et lui murmurer des paroles pleines de désir, ou recueillir sur ses lèvres son souffle erratique, tirant sur leurs visages joints le rideau de cette masse de cheveux sombres. Si Sirius commençait à trembler et freiner ses mouvements pour se contenir, les mains de Severus courant dans son dos, s'égarant sur ses fesses, le pressaient de continuer, plus vite et plus fort et plus loin, et Sirius s'exécutait avec un grognement dans le fond de la gorge et un éclat particulier dans le regard que Severus ne lui avait jamais vu auparavant. Quand Severus se sentit finalement emporté par l'orgasme, il l'exprima enfin sans retenue, tête rejetée en arrière tandis que les lèvres de Sirius venaient goûter la sueur de sa gorge, et Sirius se laissa enfin aller en appelant son nom – Severus – avant de s'effondrer hors d'haleine entre ses jambes. Étendu sur lui, il l'étreignit alors avec douceur, glissant ses mains sur ses flancs et derrière ses épaules, comme s'il n'était pas souillé ni en sueur ni, oh, Severus Snape.

C'est à peu près à ce moment que Severus prit conscience de l'ampleur de ce qui venait de se passer, de toute sa dimension absurde, de son vilain goût de tromperie. Il fit semblant de sombrer dans le sommeil pour ne pas avoir à affronter le regard de Sirius ou une discussion avec lui, et Sirius ne chercha pas à le réveiller, se contentant de les nettoyer de quelques sorts, avant de s'étendre près de lui et de tirer les couvertures sur leurs corps épuisés, laissant bientôt Severus seul avec ses pensées.

Sirius s'était endormi le nez dans le creux de son épaule, une main en travers de son torse, comme pour lui intimer de rester. Severus avait attendu que sa respiration se fasse profonde, puis il s'était glissé hors du lit et rhabillé à la hâte. Au moment de partir, il avait eu un remord et avait voulu laisser un message à Sirius ; il n'avait pas su quoi écrire et s'était contenté de griffonner deux mots d'adieu. Rentré dans ses appartements, il avait pris une longue, longue douche.

Le lendemain à l'aube, il avait quitté Poudlard pour l'Irlande.