Écrit par HateWeasel

401. Blocage.

La douleur dans l'abdomen du bleuté ne faisait pas aussi mal que les moqueries de l'homme. Il aurait dû se douter du fait qu'il n'était pas essentiel, mais les paroles de Lilith lui avaient fait croire à un autre scénario. Krampus se leva avec un sourire narquois.

- Lilith, le poignard, dit-il en tendant la main.

La fille mit la lame dans sa paume sans hésitation, l'observant marcher vers le Phantomhive.

- AUGH! Arrrgh... hurla Ciel sans le vouloir tandis que l'homme leva le pied afin de l'envoyer contre sa blessure toute fraîche.

Le démon plus âgé le regarda de haut.

- Mort ou vivant, je finirai par obtenir ce dont j'ai besoin, dit-il. J'ai juste besoin de ton sang, c'est tout.

Alors, il leva le poignard en l'air et se prépara à frapper.

- Au revoir, Sir Phantomhive. Ce fut un plaisir de te rencontrer, plaisanta-t-il.

- Krampus, une seconde !

L'homme se retourna, la surprise écrite sur son visage alors qu'il avait été appelé par la démone. C'était comme s'il n'avait pas l'habitude qu'elle l'interrompe.

- Quoi ? demanda-t-il en retirant son pied du pauvre garçon. Pourquoi est-ce que je devrais attendre ?

- Nous pourrions encore avoir besoin de lui, dit la fille. Et s'il avait modifié la barrière, et que son sang ne suffisait plus. S'il meurt, nous ne saurons jamais comment la traverser si elle a été changée.

Krampus s'arrêta. Il prit un moment pour fixer le garçon blessé assis dans son salon, et pour faire le pour et le contre. Puis, il rendit le poignard à Lilith.

- D'accord, dit-il. Emmène-le dans le sous-sol et garde-le là-bas jusqu'à ce que nous partions.

Lilith sourit et acquiesça.

- Oui, Monsieur.

Ainsi, elle prit le bras de Ciel pour le passer au-dessus de ses épaules, avant d'aider le garçon à se lever. Puis, elle l'aida à se traîner hors de la pièce et jusqu'au sous-sol du manoir. Comment Ciel pouvait-il refuser ? Il était blessé, et elle avait déjà le poignard en main. Chaque pas qu'il faisait était une agonie. Du sang gouttait sur le sol alors que le démon avait du mal à se régénérer. Les lames bénites, ça ne rigolaient pas. Elles étaient plus douloureuses, et leurs plaies plus dures à guérir.

Bientôt, ils arrivèrent à leur destination, s'arrêtant juste devant la porte. Lilith mit alors le garçon contre le mur. Heureusement pour lui, il arrivait à se tenir debout. Elle fit alors quelque chose d'inattendu. Ciel écarquilla l'œil avec surprise avant de regarder la fille d'un air surpris. Elle venait de mettre le poignard dans sa main.

- Que se passe-t-il ? demanda-t-il.

- J'ai besoin que tu me blesses, répondit-elle.

Elle était parfaitement sérieuse.

- Quoi ?!

- J'ai besoin que tu me blesses pour qu'ils me croient lorsque je dirai que tu t'es enfuis, expliqua Lilith.

Ciel ne savait pas quoi en penser. Il était juste en colère.

- Pourquoi ? demanda-t-il, haletant et sifflant à cause de sa blessure. Pourquoi me poignarder, puis m'aider à m'échapper ?

- Je te l'ai dit. Je ne fais rien sans raison, Sir Phantomhive, répondit la fille. Krampus n'allait pas te laisser vivre s'il était allé au bout de son geste. J'ai dû agir avant qu'il ne te tue.

- Et tu t'attends à ce que je te crois ?

- Non, mais est-ce que tu as d'autres choix ?

Bien que Ciel n'aimait pas du tout cela, la démone avait raison. Il n'avait pas vraiment beaucoup de choix. C'était soit faire confiance à Lilith maintenant, ou être jeté dans le sous-sol. Au vu de la situation, le garçon réalisa amèrement que se fier à son ennemi était la meilleure chose à faire. Il serra le poignard dans ses mains.

- Très bien... siffla-t-il en se préparant.

- Ne réfléchis pas, fais-le, dit la fille en appréhendant le coup tout en fermant les yeux.

Prenant une profonde inspiration, le Phantomhive poignarda la fille à l'estomac.

Du sang tacha sa robe et elle gémit, mais elle ne hurla pas. Ciel lâcha l'arme et la laissa dans son flanc. A sa grande surprise, Lilith retira la lame et la remit dans sa paume, toussant.

- Prends-la avec toi, dit-elle. Tu vas en avoir besoin pour fuir.

Ainsi, elle échangea sa place avec celle du garçon contre le mur. Ciel grimaça à cause du mouvement soudain qui fit bouger ses organes, mais il réussit d'une manière ou d'une autre à garder son équilibre. Il regarda la fille, comme pour s'assurer qu'elle allait bien.

- Je m'en sortirai, geint-elle. Va chercher ton blondinet et pars.

Alors, Ciel lui offrit un léger hochement de tête et lui fit ses au revoir.

- Merci, dit-il avant de se retourner pour partir.

Il n'allait pas particulièrement vite dans son état actuel. Il lui fallut beaucoup plus longtemps pour traverser un simple couloir que ce qu'il aurait cru. La lame dans sa main ne l'avait vraiment pas manqué, le rendant vulnérable à n'importe quelle attaque. Il ne pensait pas être en mesure de s'en sortir seul ; il avait besoin d'Alois, mais il ne savait pas tout à fait comment le retrouver. Il ne pouvait pas juste se traîner dans une grande fête recouvert de sang, si ?

Oh, comme le blond allait paniquer en apercevant Ciel boiter jusqu'à lui dans cet état. Ciel sortit son téléphone portable pour tenter d'appeler le garçon et le mettre au courant de la situation mais il n'y avait pas de réseau. Appeler des renforts était donc d'autant plus improbable que de réussir à transmettre un message à la menace blonde qui avait actuellement un problème similaire quoique moins douloureux.

Alois devait trouver un moyen de retrouver le bleuté et s'assurer qu'il aille bien. Ces domestiques, cependant, étaient un gros problème alors qu'ils l'empêchaient de quitter la salle de bal. Ils le surveillaient comme des loups s'apprêtant à se jeter sur un lapin. Il les observer en retour, voyant d'autres servants arriver et chuchoter quelque chose aux oreilles du premier groupe. Puis, quelques uns partirent, mais le reste se mit à s'avancer vers la menace blonde.

Immédiatement, Alois se mit à foncer vers la porte, poussant la foule, avant d'être arrêté par d'autres domestiques. Il regarda en arrière et vit qu'il était encerclé. Il fronça les sourcils.

- Mais que se passe-t-il ? demanda-t-il, imitant presque le ton autoritaire de Ciel.

Le blond fusilla du regard ses obstacles, les regardant quelque peu de haut, et il serra les poings.

- Nous avons ordre de vous emmener avec nous, Monsieur, dit l'un des servants, se courbant.

- Et si je refuse ? demanda Alois.

- Ce n'est pas une option, répondit l'homme devant lui.

- Je vois, dit le Macken, remarquant à quel point les servants dans son dos s'étaient rapprochés. Dans ce cas...

Surprenant les domestiques, ils furent soudainement chargés par le garçon. Ils firent de leur mieux pour former une barrière humaine, mais le blond l'avait vu venir. Les muscles de la jambe d'Alois se tendirent et il se contenta de sauter par-dessus la barrière, riant alors que leurs têtes se tournèrent avec incrédulité. Il atterrit sur ses pieds de l'autre côté avant de se remettre à courir, finissant par traverser les énormes portes de la salle de bal. Le problème était qu'il ne savait pas tout à fait par où aller maintenant.

Il essaya d'abord de descendre, des domestiques en paniques à ses trousses. Ses connaissances du manoir lui étaient bien utiles alors qu'il tentait de bluffer ses poursuivants, ces derniers s'attardant à chaque virage. Chaque pièce secrète, chemin alternatif et escalier, ils les connaissaient du bout des doigts, au grand dam des démons communs. Alois tourna à un nouveau coin, sûr d'avoir duper ses ennemis pour de bon, avant de tomber sur quelque chose de beaucoup plus déroutant.

Il s'agissait de Ciel.

Le garçon était écroulé par terre, sur le ventre. Son visage était écrasé contre la moquette par un servant qui l'avait trouvé et l'avait intercepté avec quelques autres. Ils tenaient le garçon, restreignant ses mouvements tout en l'obligeant à rester au sol alors qu'il se débattait. Le Phantomhive était quelque peu dépassé par les démons communs, mais cela ne découragea pas la furie d'Alois.

Plissant les yeux tout en serrant les dents, Alois mit la main dans sa veste et en sortit son pistolet, Kaspar. Il tira sans y réfléchir à deux fois, et se débarrassa rapidement des nuisances, les touchant tous à la tête sauf un. Le dernier avait besoin d'une deuxième balle alors que le garçon avait raté, et touché l'épaule du servant la première fois.

- Ciel ! cria-t-il en se précipitant vers le Phantomhive.

Le blond s'accroupit à côté de lui et s'empressa de dégager les corps des attaquants du garçon. Une fois cela fait, il écarquilla les yeux, son visage se tordant avec horreur.

- Oh, Ciel... non...

Le blond regarda le Phantomhive et découvrit qu'il était couvert de sang. Ses vêtements étaient déchirés, tout autant que sa chair. Une lame sainte sortait de son dos alors qu'il sifflait, son œil regardant Alois. Il se ferma alors que Ciel essaya de bouger, mettant un bras en arrière afin d'atteindre l'arme.

- Ciel ! Arrête... dit Alois en prenant le poignet du garçon.

- C'est une arme bénie... réussit à dire le Phantomhive, sa voix faible et rauque. Elle doit sortir...

Le blond acquiesça face à cette explication.

- Laisse-moi faire, dit-il en tenant la main du garçon.

Alois se mordit la lèvre et mit ses doigts autour de l'arme.

- J-J'y vais...

Il grimaça en sentant la lame sortir du muscle du Phantomhive, mais pas autant que Ciel.

- RRrrrrghhh... grommela le bleuté en tentant de garder la face pour son bien-aimé alors qu'il faillit briser la main de ce dernier.

Son corps se tendit à cause de la douleur, mais il se relaxa aussitôt lorsque la lame fut entièrement retirée et mise sur le côté. Sa respiration était lourde alors qu'il essayait de s'en remettre, se laissant être mit sur le dos par l'autre garçon.

- Merci, dit-il en regardant la menace.

Malgré son agonie, il tentait de sourire.

- Je dois ressembler à Jules César, hein ?

- La ferme ! aboya Alois, ses yeux piquant.

Il approcha le torse du garçon de ses jambes pour le tenir tendrement.

- Ce n'est pas drôle...

Sa voix craquait alors qu'il observait le Chien de Garde. Le garçon était froid au toucher, et presque dénué de toute couleur. Une couche de sueur recouvrait sa peau alors qu'il toussait et haletait, du sang séché entourant sa bouche.

- Ne t'inquiète pas, je m'en sortirai, dit le bleuté. Ils n'ont pas touché mon cœur, et Krampus a spécifiquement demandé à ce que je reste en vie.

- Comment je pourrais ne pas m'inquiéter ?! répliqua le blond. Tu es recouvert de sang et... et...

Il s'arrêta. Ciel écarquilla l'œil en sentant une goutte chaude tomber sur sa joue.

- ... Tu es blessé... reprit Alois, larmoyant, ... J'étais coincé dans la salle de bal... J'aurais pu m'échapper plus tôt, mais... geint-il, posant son front contre celui du Phantomhive.

- Oh, Ciel... C'est ma faute... conclut-il.

- Non, répondit Ciel. Personne n'est fautif. Ce sont des choses qui arrivent. Je m'en sortirai. Je guérirai un peu plus lentement, mais je guérirai, et alors tout reviendra à la normale.

Alois renifla.

- Promis ? demanda-t-il.

- Promis, répondit le bleuté en inclinant la tête afin d'embrasser la joue du garçon. Rentrons chez nous, dit-il finalement. Tu penses pouvoir me ramener ?

Les larmes d'Alois s'arrêtèrent et il sourit.

- Yes, my lord, dit-il en embrassant le front du garçon.

Ainsi, il souleva doucement le garçon, le portant comme une mariée pour ne pas trop le brusquer, et il se prépara à rejoindre en un temps record leur voitu-

BOOM !

La terre trembla avec le son de l'explosion. Les deux garçons se regardèrent, tous les deux horrifiés, comprenant qu'il n'y avait qu'une seule explication possible. Leur seule échappatoire, leur véhicule de sortie, avait été saboté, réduisant à néant tout espoir de s'échapper du manoir.

L'esprit de Ciel était en surchauffe. Sans voiture, ils devraient fuir à pieds, ce qui les rendaient plus vulnérables. Alois ne pouvait pas porter le bleuté dans son état actuel, et ils étaient clairement en sous nombre. Même si un démon pouvait définitivement courir plus vite qu'une voiture, une voiture permettait de se fondre plus facilement dans la masse avec les humains, les rendant invisible. Fuir n'était pas un problème.

Maintenant, cependant, ils devaient partir à pieds. Ils devraient courir à travers Londres, être pourchassés par des démons qui n'avaient aucune considération pour la vie humaine, tout en étant une attraction vivante alors que le Macken devait désormais porter un Ciel blessé et saignant à travers la ville d'une manière horriblement suspecte. Ciel s'arrêta de penser, et il regarda le blond qui le fixait d'un air inquiet.

- Tout ira bien, dit Alois d'une voix tremblante.

Il esquissa le sourire le moins crédible du monde.

- Je vais quand même nous ramener chez nous. Je peux courir. Tout ira bien.

Le Phantomhive regarda le garçon, examinant son expression. Il savait que ce n'était pas vrai. Il savait que Alois en était conscient. Il mit une main sur le côté du visage du blond, sur sa joue tout en regardant ses yeux bleus glacés.

- Repose-moi, dit Ciel. Rentre, Jim.