Déjà de retour en 1972, chez les Mangemorts, avec un chapitre de plus de 9 000 mots. Décidément, je n'arrive pas à faire plus court ! Il faut dire que je suis un plan détaillé, mais mes personnages ont une fâcheuse tendance à devenir de plus en plus bavards et à vouloir agir à leur guise. C'est toujours un vrai défi, à mesure qu'on avance dans une fanfiction, de les faire rentrer dans le cadre qu'on avait imaginé au départ.
Mais... j'y suis finalement parvenue (et en un temps record). J'espère que ce chapitre vous plaira !
Chapitre XVII : L'Indomptable
Une fois sortis de la Pensine, Lord Voldemort et Bellatrix se retrouvèrent face à face dans la chambre à la décoration ascétique du Seigneur des Ténèbres. Bellatrix détourna les yeux, incapable de soutenir le regard implacable de son Maître. La honte l'envahissait. Elle savait qu'elle avait franchi une limite en s'introduisant ainsi dans des souvenirs qui ne lui appartenaient pas. Mais ce qu'elle n'avait pas prévu, c'était le poids de ce silence où flottaient, comme des ombres, le mépris et une désapprobation glacée. Elle était allée beaucoup trop loin. Elle soupira. Par moments, elle se demandait si elle n'était pas tout simplement folle. Pourquoi se mettre en danger ainsi? Pourquoi risquer de faire éclater la bulle de familiarité à peine ébauchée qui s'était tissée autour d'eux ?
— Maître, je vous demande pardon, murmura-t-elle, la voix pleine de contrition. Je n'ai aucune excuse.
— Que t'a révélé la Pensine ? demanda Voldemort, d'un ton autoritaire et froid. Tu y es restée longtemps.
Bellatrix hésita, son esprit en ébullition. Devait-elle tout avouer ? Même ce qu'elle n'aurait jamais dû voir ? Ou devait-elle tenter de contenir les dégâts en ne révélant que l'essentiel ?
— Je vous ai vu avec le père de Rodolphus, mon Seigneur… à plusieurs reprises, répondit-elle finalement. Vous discutiez de mon infertilité… de mon mariage… – sa voix s'enroua un peu – … et du moment où il a appris mon allégeance à l'Ordre des Ténèbres.
Elle revit Reginaldus Lestrange torturé dans un cimetière une nuit d'été.
— Ensuite, j'ai vu Rodolphus se plaindre de moi à Rabastan, Rosier et Dolohov.
Lord Voldemort ne prononça pas un mot. Il dardait sur elle un regard sévère et impitoyable.
— Et après ? s'enquit-t-il, toujours impassible.
— J'ai vu… un carnet dans lequel figuraient les initiales de Ludmilla Thenn et une note mentionnant la potion d'Éros. Alors, j'ai voulu en savoir davantage, et j'ai creusé autour de ce nom.
— La Pensine t'a laissé faire ? demanda-t-il, une inflexion quelque peu étonnée dans la voix.
— Oui, Maître, répondit-elle, en tentant de contrôler l'élan nerveux qui étirait ses lèvres.
Ce n'était pas de la moquerie ou de la raillerie. C'était une prise de conscience – amère et accablante – de l'ampleur de son indiscrétion. Qui se permettait une telle chose? Pour qui se prenait-elle? Elle se souvenait des efforts qu'il lui avait fallu déployer pour déverrouiller certains souvenirs. Ce n'était pas la Pensine qui l'avait obéie, mais sa ténacité, presque obsessionnelle, qui l'avait contrainte à céder.
Le visage de Voldemort s'assombrit légèrement.
— Cela te fait rire, Bellatrix ?
— Non, Maître, dit-elle aussitôt. Je suis profondément honteuse. Je ne comprends pas ce qui m'a poussée à agir ainsi.
Un silence s'étira, lourd et oppressant.
— Qu'as-tu vu ensuite ?
— Votre entretien avec Dmitri Jdanov à New York… pendant que je… m'occupais de sa femme, répondit-elle, pesant soigneusement ses mots.
Elle osa lever les yeux. Voldemort la fixait, la tête inclinée dans une posture presque contemplative. L'intensité de son regard, plus tranchant que jamais, semblait sonder les moindres recoins de son âme.
Le cœur de Bellatrix ne semblait pas vouloir se calmer.
— Et c'est tout ? gronda-t-il d'une voix basse, empreinte d'une autorité sèche.
— Non, Maître, répondit-elle, le timbre légèrement vacillant. J'ai poursuivi mes investigations concernant Jdanov… et j'ai vu votre première rencontre dans cet amphithéâtre, là où vous êtes venu me chercher.
Elle serra les mains dans son dos, tentant de contenir le léger frisson qui parcourait son échine. Quelle allait être sa punition après tant de transgressions? Allait-il se rendre compte qu'elle avait omis de mentionner certains souvenirs ?
— À t'écouter, on pourrait croire que tu serais restée enfermée dans mes souvenirs jusqu'à mourir d'épuisement si je ne t'en avais arrachée, railla-t-il, une nuance d'ironie glacée perçant dans sa voix.
— Je me suis… égarée, Maître. Le temps m'a échappé. Je reconnais volontiers que mon acte fut quelque peu… gonflé, répondit-elle avec une humble inclinaison de la tête.
Un ricanement bref et teinté de sarcasme s'échappa de ses lèvres.
— Gonflé est un euphémisme. Tu n'as rien vu d'autre, tu en es sûre ?
— Rien d'autre, Maître, répondit-elle avec aplomb.
Il la dévisagea un instant, le silence devenant presque palpable.
— Je vois, finit-il par déclarer, sa voix aussi cruelle que le sort qu'il allait lancer. Nous allons en avoir le cœur net. Legilimens !
Bellatrix s'était préparée. Avec un sang-froid qu'elle ne pensait pas posséder, elle guida sans accroc l'esprit de son Maître vers les souvenirs qu'elle voulait bien lui montrer : les échanges avec Reginaldus et sa femme, les plaintes de Rodolphus dans la salle de réunion, l'entrevue avec Jdanov et la Confrérie des Sept Sorciers. Chaque détail avait été soigneusement arrangé, chaque émotion calibrée pour détourner l'attention de ce qu'elle voulait protéger à tout prix : les souvenirs qui n'auraient jamais dû être les siens, ceux où Ludmilla Thenn, à Poudlard, apparaissait à ses côtés. Elle mettait en application la méthode qu'il lui avait enseignée quelques mois plus tôt.
Elle sentit Voldemort tenter de pénétrer au-delà des barrières qu'elle avait dressées, cherchant à forcer l'entrée de passages plus obscurs et sinueux de son esprit. Mais à chaque fois, elle réussit à le détourner, guidant son attention vers des souvenirs où l'intensité émotionnelle suffisait à capter son intérêt. Elle ne fabriquait rien. Tout était sincère. Face au mépris déroutant de Reginaldus, l'indiscrétion désinvolte de Rodolphus à son encontre, la roublardise monstrueuse de Jdanov… autant de scènes qu'elle avait traversées avec une rage et une vulnérabilité qu'elle savait authentiques.
Mais plus encore que ces fragments de son propre passé, elle avait ressenti avec une intensité déchirante la trahison que son jeune Maître avait subie. La révélation de la duplicité de Ludmilla Thenn, complice de ces mages noirs aussi mesquins que méprisables, l'avait profondément bouleversée. Elle se rappelait encore la fureur viscérale qui l'avait saisie, cette envie irrépressible de descendre les marches de cet amphithéâtre pour défendre son Maître soumis aux tortures de ces abjects mages noirs.
Mais le Seigneur des Ténèbres savait forcer des passages scellés. Lorsqu'il pressa de toute sa puissance sur les dernières barrières mentales, menaçant d'exploser les portes qu'elle avait si soigneusement fermées, Bellatrix joua son atout ultime : elle laissa émerger les allusions venimeuses de Dmitri Jdanov à New York, ces insinuations méprisantes sur les origines du Seigneur des Ténèbres. Comme elle l'avait escompté, la réaction fut immédiate : le sort fut levé.
Elle vacilla légèrement, reprenant son souffle. Ce qu'elle venait d'accomplir était sans précédent. Elle avait réussi à dissimuler une partie de son esprit au Seigneur des Ténèbres. À présent, il ne lui restait plus qu'à maintenir une façade impénétrable pour ne pas se trahir.
Lord Voldemort se tenait droit, son regard noir fixé sur Bellatrix avec une intensité peu commune. Dans ses yeux, une lueur qu'elle ne lui connaissait pas : un mélange subtil de surprise et, peut-être même, d'admiration.
— Tu essaies de me cacher quelque chose, n'est-ce pas ? dit-il, calmement.
— Maître, répondit-elle en soutenant son regard, vous avez bien vu que je n'ai rien dissimulé.
— Rien vu, certes, j'en conviens. Mais tu ne m'aurais jamais laissé accéder à ces dernières pensées, à ces calomnies détestables à mon sujet, si tu n'avais pas quelque chose à me cacher.
Bellatrix eut toutes les peines du monde à rester impassible. Il avait entièrement raison.
— Je ne vous mens pas, Maître, assura-t-elle, le visage fermé, déterminée à ne pas laisser transparaître la moindre faiblesse.
Cette fois, elle en fut certaine : un sourire effleura ses lèvres, presque imperceptible. Était-il amusé ? Peut-être même… fier ? Comme s'il goûtait personnellement à la prouesse de sa Mangemort.
— C'est inédit… murmura-t-il, davantage pour lui-même que pour elle. Ce matin, lorsqu'Avery m'a appelé, j'ai songé à ma Pensine, à quel point elle pourrait attiser ta curiosité insatiable. J'avais pleine confiance dans les mécanismes de défense que j'y ai moi-même élaborés… Je me suis dit qu'ils suffiraient à te tenir en échec.
Il marqua une pause. Un sourire ironique, à peine esquissé, vint ourler ses lèvres.
— Mais il faut croire que je t'ai trop bien formée. Te voilà capable de tromper ma pensine et de me dissimuler des pensées sans que je puisse les percevoir.
Bellatrix baissa les yeux. Une immense fierté monta en elle, irrépressible, au point qu'elle dut faire un effort colossal pour ne pas sourire. Ses mains jointes dans son dos, elle restait immobile.
— Enfin, par la légilimancie, du moins, reprit-il à voix basse.
Puis, se redressant de toute sa hauteur, comme pour balayer toute trace de légèreté, il ordonna d'une voix impérieuse, ne souffrant aucune contradiction:
— Maintenant, dis-moi: qu'as-tu vu ?
Elle garda le silence, serrant légèrement ses doigts derrière elle, la tête baissée. Alors qu'une angoisse sourde montait en elle, elle peinait à réprimer le sourire nerveux qui venait fleurir sur ses lèvres.
— Devrais-je te torturer pour te faire parler ? ajouta-t-il, s'approchant d'un pas fluide.
— Je n'ai rien vu de plus, Maître, contesta-elle, incapable cette fois de masquer le sourire qui dansait sur ses lèvres.
— Tu mens, lança-t-il, son ton presque indolent contrastant avec la menace qui grondait sous ses mots.
Il s'avança encore, et Bellatrix, malgré elle, retint son souffle, les yeux rivés au sol. Il resta immobile pendant quelques secondes, laissant une tension brûlante s'installer dans la pièce. Elle vit ses mains remonter lentement le long de son corps pour détacher la cape qui glissa de ses épaules et s'effondra à ses pieds dans un bruissement feutré. Elle suivit ensuite le parcours de ses longs doigts fins qui s'approchèrent alors de son corset, et paisiblement, méthodiquement, il entreprit d'en défaire chaque lacet. Bellatrix releva les yeux, son cœur battant à tout rompre.
Il la fixait intensément, ses pupilles sombres accrochées aux siennes, presque impassible.
— Je déteste ce corset, murmura-t-il comme une confidence, sa voix douce et détachée.
Bellatrix se mordit la lèvre. Elle se souvenait encore de la manière expéditive dont il s'était servi de sa baguette pour se débarrasser de cette robe le matin même. Le corset finit par rejoindre la cape au sol, la laissant vêtue d'une longue chemise de lin fin noir, vaporeuse, qu'il fit glisser le long de son corps d'un geste sûr.
Était-il possible que cela prenne la même tournure que ce matin ?
En sous-vêtements face à lui, la pointe des seins durcissant sous l'effet du froid et de l'intensité de son regard, Bellatrix sentit ses orteils se crisper dans ses talons. Elle se retint de trembler, mais son corps la trahit. Quand il posa ses mains sur sa taille gracile pour l'attirer à lui, un gémissement irrépressible franchit ses lèvres. Collée contre son torse, elle ferma les yeux l'espace d'un instant, serrant les poings pour réprimer l'élan irrésistible de l'enlacer. De ses seins à la peau sensible de ses cuisses, en passant par le parcours de ses mains froides et fermes qu'elle sentait glisser lentement vers le creux de ses reins, presque à la naissance de ses fesses, tout son corps frémissait, en une ébullition exacerbée, vibrant et ronronnant sous l'intensité de ce contact.
Mais soudain, elle le vit lever les yeux au ciel et pousser un soupir d'agacement. Sans prévenir, il s'éloigna.
— Je dois partir. Tu restes ici. Est-ce clair ?
Sa voix avait retrouvé sa froideur tranchante.
Son corps tout entier, tout comme son esprit, se rebellèrent à cette injonction, prêts à protester.
— Oui, Maître, dit-elle néanmoins.
— Avery requiert encore mon attention. Tu ne quitteras pas cette pièce.
— Maître ?
— Oui ? répondit-il, l'agacement transparaissant dans son ton.
— Je n'ai ni mangé ni bu depuis des heures… Où puis-je trouver de quoi… ?
— Évidemment, passer des heures à fouiner dans mes souvenirs privés devait être bien plus important que tes besoins primaires, répliqua-t-il avec une pointe de sarcasme glacé.
D'un geste brusque et impatient, il fit apparaître une porte près de l'armoire, le bois sombre se matérialisant comme par magie dans le mur. Puis, comme frappé par un détail qu'il avait négligé, il se retourna brusquement et s'empara de la Pensine. Il la déposa dans une alcôve qu'il scella d'une série de maléfices complexes, trop obscurs pour que Bellatrix puisse espérer les comprendre ou, à plus forte raison, les reproduire.
— Étant donné que l'on ne peut pas faire confiance aux fouines de ton espèce… lâcha-t-il, mêlant froideur et une pointe d'amusement. Tu trouveras tout ce dont tu as besoin dans la pièce adjacente.
Son regard perça une dernière fois le sien, avant qu'il ne se détourne, son mouvement empreint de cette autorité naturelle qui ne permettait aucune compromission.
— Je ne serai pas loin. Attends-moi ici.
— Oui, Maître, répéta Bellatrix.
Il disparut derrière la porte menant au salon-bibliothèque et la scella d'un sort. Bellatrix resta quelques secondes figée, interdite. Nue, enfermée, au milieu de la chambre de son Maître, elle observa les vêtements épars autour d'elle, comme si la scène entière n'avait été qu'un rêve étrange.
Elle enfila de nouveau sa robe, ajustant les lacets avec des gestes rapides, avant de se diriger vers la seconde porte, celle qui jusque-là était restée dissimulée. Lorsqu'elle l'ouvrit, elle découvrit une pièce rectangulaire aux murs de pierre brute. Comme le reste du Quartier Général, elle était dépourvue de fenêtres, mais un chandelier suspendu au plafond projetait une lumière tamisée. Au centre trônait une table chargée de victuailles : plats fumants, coupes débordantes de fruits mûrs, cruches de jus de citrouille et de vin épicé. L'arrangement soigné des mets évoquait immanquablement les banquets de Poudlard.
Bellatrix plissa les yeux, intriguée. Il n'y avait pas d'elfe-de-maison dans les appartements de son Maître — du moins, elle n'en avait jamais vu. Pourtant, la profusion et la disposition impeccable de la nourriture suggéraient un service discret et efficace. Elle se demanda un instant si un mécanisme similaire à celui de Poudlard n'opérait pas ici, quelque part dans les entrailles de ce lieu mystérieux. Ce Quartier Général semblait de plus en plus spacieux au fur et à mesure qu'elle en découvrait des pièces : un sanctuaire, une salle de réunion, un laboratoire de potions, un salon-bibliothèque, la chambre, et maintenant une sorte de cuisine. Mais où était situé ce labyrinthe de pièces exactement ? Elle n'avait jamais pu le deviner.
Son estomac gargouilla, rappelant la faim qui la tenaillait depuis des heures. Elle se servit avec soin, goûtant à tout ce qui lui semblait appétissant. Tandis qu'elle mangeait, une pensée la fit sourire : ces mets devaient sans doute être les favoris de son Maître, ou peut-être ceux qu'il avait lui-même choisis.
En mangeant, elle inspecta plus en détails la pièce.
À droite, un vaisselier en bois ancien supportait des rangées de vaisselle d'un blanc éclatant. Au fond, un évier de pierre usée s'encastrait dans le mur, un mince filet d'eau coulant sans interruption dans son bassin. À gauche, une rambarde de fer forgé noire bordait un escalier en colimaçon qui s'enfonçait dans l'étage inférieur.
Bellatrix, poussée par sa curiosité naturelle — ou son irrépressible penchant pour fouiner —, s'approcha de la rambarde et descendit les marches, ses talons claquant doucement sur la pierre. En bas, elle découvrit une salle de bain somptueuse, presque inattendue après l'austérité des autres pièces. Les murs et le plafond étaient recouverts de faïences vert d'eau et argent, leurs reflets aquatiques dansant sous la lumière diffuse des appliques murales. Une immense baignoire creusée dans le sol occupait le centre de la pièce, entourée d'arcades délicates recouvertes des mêmes mosaïques éclatantes. Les robinets multiples de la baignoire, incrustés de runes, semblaient promettre une infinité de parfums et de températures.
L'atmosphère lui rappela immédiatement les cachots de Serpentard. L'ensemble dégageait une élégance distante, presque intimidante.
Elle ne traîna pas. La perspective de faire un brin de toilette avant le retour de son Maître était irrésistible. Son dernier bain remontait à la veille, pris avant de se rendre au mariage d'Ennius Rosier et Geraldine. Après s'être soigneusement lavée de la tête aux pieds, la peau encore tiède et subtilement parfumée, Bellatrix entreprit de coiffer ses cheveux à la hâte. Elle les attacha en un chignon lâche, des boucles indisciplinées s'échappant de chaque côté de son crâne. Agacée par ces mèches rebelles qu'elle ne parvenait pas à dompter, elle jura entre ses dents. Elle n'avait pas le temps de s'attarder. À tout moment, le Seigneur des Ténèbres pouvait revenir, et la trouver ainsi, nue, dans ses appartements. Même si c'était lui qui l'avait laissée dans cet état, l'idée qu'il la surprenne dans une telle posture la remplissait d'une gêne cuisante.
Elle tourna les yeux vers la robe de lin noire, celle qu'elle avait portée la veille pour le mariage, soigneusement pliée sur une chaise à proximité. Mais en la contemplant, une hésitation la saisit. Le tissu, légèrement froissé et marqué par les événements de la veille, lui parut soudain repoussant dans cet environnement immaculé. Elle avait envie de propre.
Décidée à ne pas se contenter de cela, elle ouvrit l'un des placards encastrés dans la faïence. Sans surprise, une collection de robes et de capes noires, impeccablement alignées, occupait l'espace. Leurs coupes sobres mais élégantes et leurs étoffes de qualité irréprochable portaient la marque inimitable du style du Seigneur des Ténèbres. Toutes semblaient identiques à première vue, mais en y regardant de plus près, Bellatrix nota de subtiles différences dans les textures et les finitions : des étoffes de laine légère, des soies sombres, des broderies discrètes.
Elle se saisit d'une cape à capuche confectionnée dans un coton soyeux aux fibres longues, dont la texture caressait ses doigts. Le poids du tissu lui donna une étrange impression de sécurité, comme si elle revêtait une armure légère et pourtant intime. Elle la plaça contre elle, observant que l'ourlet effleurait le sol. Avec un sort rapide, elle rétrécit légèrement la cape pour qu'elle s'ajuste parfaitement à sa silhouette. Nue sous le vêtement, elle s'en drapa, et l'attacha à la taille.
Elle exhala lentement, tentant d'apaiser le nœud de tension qui se formait au creux de son sternum, mélange de stress et d'excitation. Les dernières vingt-quatre heures avaient pris des airs d'irréalité. Sur sa peau, elle sentait encore, comme gravée au fer rouge, la trace des mains de son Maître, le souvenir brûlant de leurs ébats, longs et passionnés. Et ce soir même, il avait amorcé une nouvelle approche qui la galvanisait… et l'intriguait aussi. Allait-il finir par la punir? Était-ce une ruse pour la mener à son châtiment?
Une angoisse sourde, à peine perceptible, se logea au fond de ses entrailles.
Obéissante, elle retourna dans la chambre du Seigneur des Ténèbres, suivant scrupuleusement ses instructions. Elle déposa ses affaires et ses talons dans un coin de la pièce, puis elle alla sagement s'asseoir sur le lit aux draps blancs, son regard se perdant sur les chandelles éteintes disséminées dans la pièce.
Avec sa baguette, elle éteignit le grand chandelier suspendu au plafond, dont la lumière froide et uniforme ne faisait qu'accentuer la frugalité de la pièce. Puis, d'un mouvement plus précis, elle entreprit d'enflammer une à une les nombreuses bougies dispersées autour d'elle. La lumière des flammes dansait sur les murs, projetant des ombres étranges et mouvantes qui semblaient prendre vie à chaque infime mouvement.
Le silence lourd et immuable reprit bientôt ses droits, semblant suspendre le temps lui-même. Elle attendit, immobile, attentive au moindre bruit.
Au bout d'un moment, l'ennui et la curiosité la poussèrent à jeter un sort pour vérifier l'heure. Trois heures du matin ! Cela expliquait la lassitude qui s'abattait peu à peu sur elle. Après les noces, une discussion s'étendant jusqu'au petit jour, des ébats répétés, et à peine quelques heures de sommeil, elle avait passé toute la soirée plongée dans la Pensine. Sans l'excitation du moment, nourrie par l'anticipation de connaître les intentions de son Maître, elle se serait déjà écroulée de fatigue.
Bellatrix s'allongea sur le dos, les yeux fixés au plafond, les jambes pliées, se promettant de ne pas s'endormir. Elle devait s'occuper, mais cette fois, elle s'imposa de ne pas céder à la tentation d'explorer ce qui ne la concernait pas. Non, elle ne toucherait pas aux livres éparpillés sur les tables de chevet. Non, elle n'ouvrirait pas l'armoire, bien qu'elle sache qu'elle recélait des piles de lettres qu'elle avait aperçues plus tôt en manipulant la Pensine. Non, elle ne glisserait pas sous les draps pour échapper au froid. Et surtout, elle ne s'approcherait pas de l'alcôve où son Maître avait enfermé la Pensine derrière une série de maléfices.
Les minutes s'étirèrent dans une sorte de torpeur méditative. Les images de la pensine défilaient. Le souvenir de leurs ébats, aussi. Non, elle ne succomberait pas à la tentation de se caresser, non plus.
Une heure passa. À quatre heures du matin, un frisson la saisit.
Le Seigneur des Ténèbres se tenait là, debout devant le lit, s'étant matérialisé dans un silence absolu. Bellatrix se redressa brusquement sur ses avant-bras, quelques mèches sombres s'échappant encore davantage de son chignon et retombant autour de son visage.
— Mon Seigneur… souffla-t-elle, la voix éraillée par le bonheur de le revoir.
Sans un mot, il posa ses mains sur l'intérieur de ses cuisses, qu'il caressa avec une lenteur presque calculatrice. Après un bref instant, il la saisit fermement à la taille pour la tirer vers lui, l'approchant du bord du lit. La hauteur très surélevée de ce dernier alignait parfaitement son corps à celui de son Maître, et, d'un geste fluide, il écarta les pans de sa cape, exposant son corps nu au froid mordant de la pièce.
— Je constate que tu as subtilisé l'une de mes capes, remarqua-t-il, arquant un sourcil moqueur, ses mains caressantes sur son corps alangui.
Un instant, elle observa ses traits effilés, d'une beauté viscérale, sculptés par les jeux d'ombres. Ses gestes presque hypnotiques sous l'éclat chaleureux des bougies firent battre son cœur plus fort.
— Et si nous reprenions où nous en étions, Bella ? murmura-t-il, un sourire subtil jouant sur ses lèvres.
— Oui… répondit-elle dans un souffle, sa voix tremblant d'un désir à peine contenu.
Ses mains, glacées mais d'une assurance implacable, parcoururent furtivement son corps : des hanches aux seins, avant de descendre jusqu'au creux de son ventre, pour finalement frôler la courbe délicate de ses bras. Bellatrix, frissonnante, saisit l'une de ses mains qu'elle porta à ses lèvres, y déposant un baiser enflammé, sa chaleur contrastant avec la froideur de sa peau. Le souffle court, le cœur battant furieusement, elle planta son regard dans celui du Seigneur des Ténèbres. Il ne bougea pas, se contentant d'observer ses gestes avec une attention détachée.
Se redressant complètement, elle écarta davantage les jambes, cherchant à se rapprocher encore de lui. Lentement, précautionneusement, elle glissa ses longs bras autour de son cou, se retrouvant tout près de son visage, de sa bouche qu'elle mourait d'envie d'embrasser.
Ils ne s'étaient pas embrassés depuis une éternité.
Il y avait d'abord eu ce baiser furtif, le tout premier, lors de leur première fois. Ensuite, ce baiser infiniment tendre, presque doux, qu'il lui avait offert après qu'elle eut tué le Sang-de-Bourbe Maggins. Et enfin, il y avait le baiser en nuisette, comme elle aimait l'appeler dans ses pensées : celui où, tremblante de désir, elle s'était tenue entre lui et son bureau, le lendemain de cette nuit où, après avoir perdu tout contrôle et torturé Rodolphus, elle avait fini par dormir dans le lit de son Maître.
— Ce qui est agaçant avec toi, Bellatrix, c'est que chaque fois que je t'octroie une petite chose, tu t'empresses de t'arroger le double, siffla Voldemort, le timbre de sa voix froide résonnant contre elle.
— Oui, Maître… répondit-elle dans un chuchotement, sa main glissant le long de son torse.
Imitant ses gestes plus tôt dans la soirée, elle détacha la cape de ses épaules et la laissa tomber au sol, un bruissement léger accompagnant la chute du tissu. Elle savait qu'elle n'était encore qu'à l'orée de son but, mais c'était une première couche de gagnée.
— Je commence à cerner ton fonctionnement, Bellatrix, reprit-il, sa voix empreinte d'un sarcasme acéré. Tu dis « oui, Maître » à tout ce que je dis, mais, au final, tu fais exactement ce qui te plaît.
Un sourire discret traversa le visage de Bellatrix alors que ses mains, jusque-là posées autour de son cou, glissèrent vers la base de sa nuque. Gênée par le col rigide de sa chemise, elle prit la liberté de l'écarter avec précaution. Aussitôt, ses doigts effleurèrent la peau nue de son cou, et une onde de plaisir parcourut son corps, lui provoquant des frissons jusqu'au bout des orteils.
— Oui, Maître, répondit-elle dans un souffle joueur, son regard exalté se perdant dans ses yeux glacials.
Elle sentit alors ses mains entre eux, déliées et assurées, s'attaquer la braguette de son pantalon. Profitant de cette ouverture, elle déposa des baisers doux et délicats sur son cou, suivant la ligne de sa mâchoire jusqu'à sa joue, la commissure de ses lèvres traçant un chemin lent mais certain vers sa bouche. Elle savait exactement ce qu'il était en train de faire. Son souffle se suspendit lorsqu'il guida son membre tout contre son entrée. Puis, dans un mouvement vif et implacable, il la pénétra.
Bellatrix gémit contre son cou, le son étouffé par leur proximité. Une main ferme s'immisça derrière son dos, sous la cape, l'immobilisant tout contre lui, tandis que l'autre vint saisir sa mâchoire. Il l'attrapa ainsi, comme pour interrompre ses baisers errants et lui rappeler qui, ici, dictait les règles.
Alors qu'il poursuivait ses mouvements brusques en elle, Bellatrix enroula ses longues jambes autour de lui, comme dans un geste de défi muet. Gémissante contre lui, frémissante, ses bras serrés autour de son cou, elle captura ses lèvres dans un baiser audacieux. Contre toute attente, il ne la repoussa pas. Sa main glissa néanmoins de sa mâchoire à sa gorge comme un avertissement. Puis, lentement, tout en maintenant un contact appuyé sur sa trachée, il répondit au baiser, ses lèvres épousant les siennes dans une étreinte langoureuse.
Une vague brûlante la traversa, et son désir éclata comme une traînée de feu dans ses veines. Elle sentit son cœur battre si violemment qu'elle crut qu'il allait déchirer sa poitrine. Jamais elle ne s'était sentie aussi proche de lui — ainsi dénudée, pressée contre son corps, habitée par lui, embrassée par lui.
Mais soudain, sans crier gare, elle reconnut cette sensation à l'arrière de son esprit, cette marque flamboyante si particulière de son Maître. Avec une brutalité presque animale, il fit exploser les barrières de son esprit, envahissant ses pensées alors qu'il continuait de la pénétrer. Bellatrix se figea, les yeux clos, concentrant toute son énergie sur la tentative désespérée de maintenir quelques défenses. Ses ongles s'enfoncèrent dans ses bras, comme pour le retenir physiquement, tandis qu'en elle, un tsunami faisait rage, soulevant toutes les vannes, ouvrant toutes les portes qu'elle avait si soigneusement verrouillées.
Un rire cruel s'éleva au-dessus d'elle, glacial et triomphant.
— Tu avais pourtant si bien réussi tout à l'heure… Résiste-moi un peu plus, Bella, murmura-t-il, amusé, un peu essoufflé.
Répondre aurait brisé sa concentration. Elle se contenta de gémir, incapable de réprimer le plaisir que lui procurait chaque coup de rein. Pourtant, elle continuait à lutter de toutes ses forces, son esprit cherchant désespérément à détourner l'attention de son Maître, à masquer ce qu'elle voulait protéger. Mais malgré tous ses efforts, elle se retrouva impuissante, offerte à lui dans toute sa splendeur. Les souvenirs qu'elle s'était efforcé de dissimuler lui échappèrent, un à un, comme un navire aux abois aux multiples recoins soudain inondée d'une eau glaciale. Chaque fragment impliquant Ludmilla Thenn s'exposa à lui, tandis qu'il poursuivait son implacable conquête de son corps et de son esprit.
Elle avait l'impression de se noyer, de perdre pied.
— Je ne peux plus rien fermer… haleta-t-elle, la voix brisée par un mélange de panique et de peur.
Un nouveau rire, plus bas cette fois, presque tendre, s'échappa de ses lèvres.
— Lord Voldemort sait toujours lorsqu'on lui ment, Bella, susurra-t-il, sa voix légèrement saccadée, teintée d'un plaisir sombre. C'est presque trop simple de briser tes défenses lorsque je suis en toi, ainsi.
Elle poussa un cri plaintif.
— Vous allez me punir? hoqueta-t-elle, tout en étant incapable de réprimer les gémissements de plaisir qui la saisissaient.
— Plus tard, dit-il.
Puis, d'un geste brutal, il la repoussa, l'obligeant à s'allonger à plat sur le lit. Il la retourna sur le ventre, écarta la cape et la pénétra par derrière. Prenant appui de chaque côté d'elle, il accéléra ses mouvements, s'enfonçant plus profondément, plus violemment, jusqu'à ce que les cris de Bellatrix se muent en râles de souffrance.
Une fois satisfait, légèrement essoufflé, il relâcha les jambes de Bellatrix sans ménagement et se détourna d'elle aussitôt, réajustant sa tenue avec une indifférence glaciale.
— Comme tu le vois, la théorie de Ludmilla sur le sexe était un leurre, déclara-t-il en remontant sa braguette. Le sexe n'est rien d'autre qu'un rapport de domination entre deux individus. Ce n'est pas, et ne sera jamais, une manière de se laisser aller ou de devenir plus réceptif, comme elle le prétendait.
Pantelante, Bellatrix referma les pans de la cape qui la recouvrait encore. Des larmes silencieuses avaient perlé au coin de ses yeux. Tremblante, elle se redressa avec peine, ne parvenant pas tout à fait à comprendre ce qu'elle venait de vivre. C'était comme si un train lui avait roulé dessus, et l'avait laissé pour morte sur le bord des rails.
— J'ai rapidement déduit que c'était bien pour accéder à mes secrets les plus enfouis qu'elle avait tenté ainsi de me corrompre, poursuivit-il, le ton presque désinvolte. Et, se trouvant incapable de briser mes défenses, elle m'a trahi et vendu à cette bande d'imposteurs.
Essuyant ses larmes d'un geste rapide, Bellatrix tenta de rassembler ses pensées et d'envisager avec lucidité ce que son Maître venait de révéler.
— Elle vous a… drogué, Maître ? demanda-t-elle finalement, sa voix à peine audible.
— Je l'ai suspecté un temps, mais, comme je te l'ai expliqué, la potion d'Éros n'est pas une drogue au sens propre. Elle agit comme un catalyseur, un désinhibiteur subtil qui facilite certaines impulsions sans pour autant annihiler le libre arbitre. Si j'avais voulu l'arrêter, j'en aurais été parfaitement capable. Je n'étais ni sous son contrôle, ni léthargique.
Bellatrix hésita un instant avant de poser la question qui lui brûlait les lèvres :
— Mais si vous n'aviez pas bu cette potion à votre insu… auriez-vous eu une relation avec elle ?
Il se baissa pour ramasser sa cape, qu'il rangea dans l'armoire sans un regard pour elle.
— Veux-tu insinuer que si je ne t'avais pas administrée cette potion, tu n'aurais jamais couché avec Rodolphus ? demanda-t-il, un sourire ironique effleurant ses lèvres.
Bellatrix leva vers lui un regard lourd de sens.
— Mon Seigneur, Rodolphus n'a jamais été la raison – ou la personne – pour laquelle j'essayais de surmonter mes peurs et traumatismes, répondit-elle, son ton ferme malgré les tremblements dans sa voix.
— Sois honnête, reprit-il, ignorant délibérément sa remarque. Si tu n'avais jamais reçu cette potion, n'aurais-tu plus jamais eu de relations avec ton mari ? Ou bien la potion n'a-t-elle fait qu'accélérer un processus inévitable ?
Un long silence s'installa alors qu'elle méditait sur ses paroles. Aurait-elle vraiment rejeté Rodolphus pour le reste de sa vie ? Avec le temps et des efforts, n'aurait-elle pas fini par surmonter ses peurs ? Elle baissa les yeux.
— En voyant comment il a comploté avec son père à mon sujet, la manière dont il divulguait mes problèmes à tout le monde… même à Ethan Rosier, alors qu'il sait à quel point je le déteste… j'aurais préféré qu'il reste loin de moi pendant des années, murmura-t-elle. Et si cela avait été le cas, je ne serais pas tombée enceinte.
Voldemort pencha légèrement la tête sur le côté, comme pour mieux la scruter.
— Certes, mais sans cela, tu ne serais pas devenue la Bellatrix indomptable que je vois aujourd'hui. Celle qui a transcendé ses peurs et se permet même des actes d'une impertinence déroutante. Tu serais encore tapie dans tes angoisses, prisonnière des abominations que ce Sang-de-Bourbe t'a infligées. Aujourd'hui, tu es libérée.
Elle releva la tête, ses yeux brillants de larmes qu'elle refusait de laisser couler.
— Êtes-vous satisfait d'avoir retrouvé cette Bellatrix, Maître ? demanda-t-elle d'une voix faible, emplie d'un doute palpable.
— Quand elle ne fouille pas dans mes affaires… oui, répondit-il avec une exaspération non dissimulée. Je n'aurais pas mentionné Ludmilla, ni permis que tu m'accompagnes à New York pour éliminer Isabella Jdanov, ni laissé ces photos de moi traîner, ni même toléré tes questions à ta mère si je n'avais pas voulu que tu connaisses mon passé à Poudlard.
Cette révélation frappa Bellatrix comme un éclair. Elle le fixa, presque émerveillée.
— Mais, ajouta-t-il, un éclat plus dur dans le regard, je ne tolère pas que tu fouilles dans mes affaires.
— Pardonnez-moi, mon Seigneur.
Il se dirigea vers la porte menant à la cuisine, son pas mesuré et assuré.
— Rentre chez toi, maintenant, déclara-t-il d'un ton sans appel. Je commence à ressentir les effets de la fatigue, et il est grand temps que je me sustente. Et puis, ton mari doit sûrement se demander où tu es passée.
Elle émit un petit son désapprobateur et dédaigneux. L'idée de retourner au Manoir Lestrange auprès de son misérable mari lui était insupportable.
— L'avez-vous puni, Maître ? demanda-t-elle avec une lueur d'anticipation dans les yeux.
— Il a reçu une punition appropriée, répondit-il calmement, avec une indifférence glaciale.
Bellatrix baissa un instant les yeux avant de tenter sa chance :
— Mon Seigneur, je vous en supplie… Il est si tard. Puis-je rester ici, juste jusqu'au lever du soleil ?
Voldemort s'arrêta et se tourna légèrement vers elle, haussant un sourcil moqueur.
— Nous sommes en été, Bellatrix, rétorqua-t-il. Le soleil est déjà levé.
— S'il vous plaît… implora-t-elle, sa voix imprégnée d'une vulnérabilité inhabituelle.
Il se redressa légèrement, et malgré la lumière vacillante des chandelles, Bellatrix distingua les marques de fatigue sur son visage. Une âme plus conciliante, plus généreuse qu'elle, y aurait vu un appel à la compassion, une raison d'obéir et de le laisser en paix. Mais Bellatrix n'était pas de ces âmes-là. Elle savait qu'il était trop exténué pour prolonger ce duel de volontés, et elle sentait qu'il finirait par céder.
— Je ne ferai pas de bruit, et je prends très peu de place, Maître, murmura-t-elle d'une petite voix.
— Qu'est-ce qui te fait croire que j'aie la moindre envie d'accéder à tes caprices ? répondit-il froidement. Entre tes doutes à mon sujet et tes indiscrétions monumentales, il est évident que tu ne mérites absolument rien.
— Vous avez raison, je ne le mérite pas, Maître, murmura-t-elle en baissant les yeux. Mais vous pourrez me punir à votre guise plus tard. Et puis, de quoi aurais-je l'air en rentrant à l'aube au Manoir Lestrange ? Si je rentre plus tard, je pourrais prétendre m'être reposée quelques jours chez mes parents… mais dans cet accoutrement et avec cette coiffure, je crains d'être bien vite démasquée.
Elle avait prononcé ces mots d'un ton taquin, presque joueur, consciente de la solidité de son argument et de la fatigue de son Maître, trop exténué pour engager une joute verbale. Il sembla la considérer un instant, à genoux sur son lit, les boucles dans une pagaille monstre autour de sa tête, la cape froissée et ouverte sur son corps nu. Il laissa échapper un soupir audible – un geste inhabituellement expressif chez lui – avant de sortir de la pièce sans un mot. Mais Bellatrix comprit aussitôt qu'elle avait gagné.
Un sourire éclatant illumina son visage, et elle poussa un cri silencieux de triomphe. Sans perdre un instant, elle se glissa entre les draps immaculés et d'une douceur infinie du lit de son Maître, toujours emmitouflée dans sa cape. Elle s'installa du côté gauche, là où la table de chevet portait le moins de livres. L'autre côté, qu'elle supposait être celui de son Maître, croulait sous le poids d'une pile de grimoires anciens, aussi imposants que mystérieux.
Elle tenta de rester éveillée, ses yeux fixés dans la pénombre, espérant son retour. Mais une fatigue accablante finit par la submerger. Cette journée avait sans doute été l'une des plus mouvementées et émotionnellement éprouvantes de toute sa vie.
Alors qu'elle s'abandonnait au sommeil, les paupières lourdes, elle sentit le matelas s'affaisser à côté d'elle, et devina son Maître dans l'obscurité totale de la pièce s'allonger à côté d'elle, apportant avec lui un frisson glaciale enveloppée d'une odeur de savon.
— Maître… chuchota-t-elle, le filet de sa voix presque endormie brisant le silence épais de la pièce.
Un soupir lui répondit, empreint d'une exaspération manifeste.
— Tais-toi, Bellatrix, répliqua-t-il sèchement.
— Je voulais juste vous dire… merci, murmura-t-elle, presque inaudible.
— Dors, ordonna-t-il d'un ton glacial.
Malgré la froideur de sa voix, un sourire vint effleurer les lèvres de Bellatrix. Et ainsi, le cœur étrangement léger, elle s'endormit profondément.
XxXxXxX
Il lui sembla qu'une heure à peine s'était écoulée lorsqu'elle fut réveillée par un courant d'air glacé. Elle ouvrit les yeux aussitôt. C'était comme si son corps, son esprit, tout son être savait précisément où elle se trouvait.
— Maître, dit-elle, la voix enrouée de sommeil.
— Lève-toi Bellatrix, ordonna-t-il froidement.
Elle ouvrit les yeux. La couverture avait été enlevée. La cape avait glissé et son corps nu était à découvert. Elle rougit, remontant lentement les mains sur ses seins. La pièce était éclairée de mille feux. À côté d'elle, debout, parfaitement réveillé et habillé se tenait le Seigneur des Ténèbres, un sourcil levé.
— Il est midi passé, prends tes affaires et rentre chez toi, dit-il d'un ton sec et sans appel.
Maintenant qu'elle posait les yeux sur lui, un désir féroce se logea entre ses jambes. Rentrer chez elle? Alors qu'il était là, délicieux, à côté d'elle? Chassant toute timidité, elle s'étendit sensuellement, consciente du regard qu'il posait sur elle.
— Bellatrix, gronda-t-il, cinglant.
Un écho d'une énergie sombre et menaçante pourchassait sa voix.
Il n'était plus le mage noir exténué et vaguement agacé de la veille. Non, désormais pleinement reposé, il avait retrouvé toute sa puissance. Il était plus irascible, froid et glacial que jamais. Et pourtant, le voir ainsi — fort, redoutable, cruel — éveillait en Bellatrix un désir dévorant. Mais, sachant reconnaître une bataille perdue, elle se leva.
Il quitta la pièce sans un mot, laissant la porte ostensiblement ouverte derrière lui.
— Est-ce que je peux emprunter votre salle de bain ? demanda-t-elle.
— Non, répliqua-t-il aussitôt depuis le salon-bibliothèque où il s'était réfugié, une inflexion implacable dans la voix.
Bellatrix réprima un sourire en se rhabillant, enfilant à contrecœur la robe de mariage qu'elle ne pouvait plus supporter.
— Je vous laisse votre cape, Maître, lança-t-elle en quittant la chambre.
Aucune réponse. Chaussée de ses talons, elle pénétra dans le salon. Installé à son bureau, Lord Voldemort lisait une lettre, le visage marqué par une contrariété visible.
— Encore cet incompétent d'Avery ? demanda-t-elle, d'un ton taquin.
Voldemort leva les yeux, visiblement excédé.
— Va-t'en, dit-il simplement.
— Au revoir, mon Seigneur, et encore merci pour… tout.
Elle ne faisait pas seulement référence à sa permission de dormir avec lui, mais à bien davantage. À tout ce qu'il avait accompli pour elle. Ces gestes, ces décisions, qui, depuis près de deux ans, depuis son enlèvement, avaient été mûrement réfléchis pour la ramener à la vie. Maintenant, elle comprenait. Maintenant, elle voyait.
Ludmilla Thenn avait évoqué trois façons de surmonter un blocage ou de s'élever spirituellement. Et ces trois exutoires, son Maître les avait expérimentés adolescent : l'exercice intense de la magie noire, un sommeil réparateur, et une libido sans entraves.
Bellatrix savait que les moyens pour y parvenir, notamment la potion d'Eros, relevaient à son avis — même si son Maître refusait de l'admettre — d'une atteinte évidente à la notion de consentement. Mais elle ne pouvait nier une chose : tout cela avait été redoutablement efficace.
Lord Voldemort avait appliqué des solutions pragmatiques, logiques, presque mécaniques, pour éradiquer les conséquences du supplice qu'elle avait subi. Elle ne dormait plus ? Potions de sommeil. Elle débordait de haine et de colère ? Sessions de torture et pratique de magie noire, où il l'avait soutenue avec une rigueur implacable, l'aidant à affronter Maggins et à le tuer de ses propres mains. Et enfin… elle craignait l'intimité physique ? Potion d'Eros.
Certes, l'ensemble portait une certaine maladresse, une froideur presque clinique. Mais après avoir exploré cette Pensine, après avoir observé son Maître adolescent — un jeune homme d'un talent inouï, mais désarmé face aux subtilités des codes entre sorciers, au point d'envoyer, avec une candeur presque déroutante, une lettre de candidature à une société secrète de mages noirs affiliés au sorcier le plus dangereux de l'époque — elle discernait une autre facette de lui. Il n'avait fait que suivre, à sa manière, ce qu'il pensait être le chemin le plus direct pour la guérir.
Elle avait déjà effleuré cette compréhension des choses la veille, lorsqu'il lui avait exposé ses intentions après le mariage des Rosier. Mais à présent, tout était limpide.
Et un amour immense, fulgurant, écrasant, venait lui comprimer le cœur.
Elle nourrissait néanmoins l'espoir de le faire fléchir sur un point précis. Car, bien qu'elle eût fini par partager la conclusion de son Maître — que le sexe n'était qu'un jeu de domination et de pouvoir —, elle souhaitait lui faire comprendre qu'il pouvait également constituer une expression d'affection et de tendresse. Elle revoyait ce baiser échangé alors qu'ils faisaient l'amour. Certes, il avait exploité les élans brûlants qui semblaient s'être embrasés en elle pour violer l'accès à son esprit, mais avait-elle rêvé cette tendresse ? Était-il possible qu'il fût si habile dans l'art de simuler une telle proximité ?
XxXxXxX
En franchissant le seuil du manoir Lestrange, Bellatrix s'attendait à retrouver l'atmosphère monotone coutumière des lieux, cet écrin de silence pesant rythmé uniquement par le tic-tac régulier des imposantes horloges du vestibule, et la présence intangible des spectres lugubres et illustres qui hantaient cette demeure ancestrale. Mais, en cette journée lumineuse de juillet, l'air vibrait d'une agitation inhabituelle.
L'elfe-de-maison, généralement si discret qu'il semblait se fondre dans les ombres, s'affairait dans les escaliers, les bras chargés de piles de vêtements et de baluchons d'où s'échappaient des tintements métalliques à chaque pas. Intriguée, Bellatrix s'avança dans les pièces de vie. Dans la cuisine, une multitude de plats, soigneusement recouverts de sorts de conservation, s'alignaient comme des soldats sur un champ de bataille. Plus loin, dans la bibliothèque, des ouvrages flottaient çà et là avant de se ranger méthodiquement dans un sac de jute posé au sol.
Son inspection la mena finalement au salon, où elle découvrit une silhouette négligée – un homme ou plutôt une bête mal dégrossie – avachi dans un fauteuil, un verre de whisky pur feu à la main, sans doute une bouteille rare appartenant jadis à feu Reginaldus Lestrange.
— Qui êtes-vous ? lança-t-elle d'une voix autoritaire, sa baguette jaillissant instinctivement entre ses doigts.
L'homme, d'une trentaine d'années, exsudait une misère repoussante. Ses ongles jaunis, ses vêtements usés et tâchés, et ses cheveux huileux en désordre formaient un ensemble crasseux des plus déplaisants. Il leva vers elle un regard scintillant d'une malice cruelle, un sourire pervers étirant ses lèvres fendues.
— Fenrir Greyback, milady, aboya-t-il d'une voix rocailleuse, où se mêlaient moquerie et lubricité. Et vous ?
Bellatrix, ignorant son insolence, fronça les sourcils. Elle n'avait jamais entendu ce nom auparavant.
— Que faites-vous dans ma maison ?
— J'attends votre mari, ma belle, si vous êtes bien qui que j'crois qu'vous êtes.
L'approximation grammaticale et la familiarité de ses propos lui arrachèrent un soupir exaspéré. Mais avant qu'elle ne puisse riposter, Alecto surgit par une porte dérobée.
— Oh ! Bonjour, Bellatrix, fit-elle avec un sourire radieux.
— Où est Rodolphus ? Et qu'est-ce que cette… chose immonde fait dans mon salon ?
— C'est Fenrir Greyback, expliqua Alecto d'un ton apaisant. Il part en mission avec Rod dans une heure. Rodolphus pensait ne pas avoir le temps de te dire au revoir.
— Ne pas avoir le temps ? ironisa Bellatrix, les lèvres pincées. Comme s'il prenait jamais la peine de me dire au revoir.
Fenrir éclata d'un rire gras, son regard lascif toujours rivé sur elle.
— Alors c'est toi, la p'tite favorite du Seigneur des Ténèbres ? grogna-t-il, ses paroles dégoulinant de vulgarité.
— Pardon ? rétorqua Bellatrix, outrée.
— «La femme de Lestrange», m'a dit Amycus, «le Seigneur des Ténèbres s'amuse bien avec elle», lança Fenrir Greyback.
— Qu'est-ce que ce porc a osé dire ?
Alecto afficha une petite moue réprobatrice. Après tout, c'était de son frère dont on causait.
— Tout le monde en parlait hier. Il a dansé avec toi au mariage des Rosier, non ? Moi, je n'étais pas invité, mais… on m'a raconté.
Fenrir, goguenard, s'adossa plus confortablement, sa main traînant dangereusement près de son entrejambe.
— Tiens-toi, Fenrir, gronda Alecto, sa baguette prête à frapper.
— Ah, mes excuses, mesdames, dit-il avec un rictus, visiblement amusé. Je ne suis pas habitué à côtoyer des femmes de si… haut rang.
Son rire graveleux emplit la pièce, suivi d'une remarque odieuse :
— Le Seigneur des Ténèbres a bon goût. Tu me donnes des envies de quatre heures, ma belle.
Avant que Bellatrix n'explose, Alecto lança un sort fulgurant. Fenrir s'effondra, gémissant sous l'effet de la douleur.
— Ne parle pas ainsi de notre Maître. Tu parles à une Mangemort de premier rang et à la femme de ton coéquipier. Tu ferais bien de la respecter, Fenrir.
Haletant, il finit par marmonner :
— Oui, oui, mon bichon. Je ne voudrais pas attirer les foudres de celui-là…
Alecto, se tournant vers Bellatrix, conclut avec un sourire d'excuse :
— Rodolphus t'attend dans sa chambre. Il finit de faire ses bagages.
Faire ses bagages ?
Sans attendre, Bellatrix quitta le salon d'un pas vif et monta à l'étage, en direction de la chambre de Rodolphus. En pénétrant dans la vaste pièce au parquet ancien, elle fut accueillie par la lumière vive de cet après-midi d'été. Les hautes fenêtres à la française, grandes ouvertes sur le parc verdoyant du domaine, laissaient entrer un souffle léger, imprégné des effluves rafraîchissantes de la rivière serpentant en contrebas. Ce vent doux faisait danser les rideaux vaporeux de soie blanche.
Rodolphus, debout près du lit, s'affairait devant une imposante malle ouverte. Ses gestes, rapides et mécaniques, trahissaient une certaine précipitation. D'un mouvement précis, il jetait pêle-mêle des chemises impeccablement pliées, des chaussures de cuir patiné, des fioles aux liquides iridescents, et, enfin, les lourds sacs de jute remplis de livres qu'elle avait remarqués plus tôt dans la bibliothèque.
Lorsqu'il sentit une présence derrière lui, Rodolphus interrompit ses gestes et tourna brièvement la tête. Ses yeux croisèrent ceux de Bellatrix, et un silence tendu s'installa.
Bellatrix, instinctivement, recula d'un demi pas. Son regard s'attarda sur ses bras, marqués par des bandages maculés de taches rougeâtres, traces évidentes de récentes blessures. Les pansements, enroulés autour de ses avant-bras comme des lanières torturantes, racontaient une histoire brutale dont elle brûlait d'en connaître les détails.
— Enfin rentrée ? s'enquit-il avec un mélange d'ironie et de reproche, ses yeux se posant sur sa tenue. Toujours vêtue de cette robe de mariage, je vois. Où étais-tu ces deux derniers jours ?
— Tu as perdu le droit de connaître tout de mes allées et venues, Rodolphus, répondit-elle d'un ton acide, son regard brûlant de défi. Mais, si tu tiens tant à le savoir, j'étais chez mes parents.
— Menteuse, siffla-t-il, ses lèvres se retroussant dans une grimace de mépris. J'ai écrit à ta mère. Elle m'a dit qu'elle ne t'avait pas vue.
Bellatrix jura intérieurement, maudissant une fois de plus l'indifférence et le manque de soutien de sa mère dans ses affaires personnelles.
— Je cherchais à te fuir, expliqua-t-elle du tac au tac, le ton cinglant. Elle n'allait évidemment pas admettre que j'étais chez eux.
— Bien sûr, ironisa Rodolphus, reprenant d'un geste mécanique l'arrangement de sa malle. Quelle excuse commode.
— Que fait cet individu abject dans mon salon ?
— Je pars avec Greyback pour une mission de la plus haute importance confiée par le Seigneur des Ténèbres, déclara Rodolphus, dit-il d'un ton détaché.
— Il te fait confiance après ce que tu as fait… ? s'étonna Bellatrix, son regard perçant trahissant à la fois l'incrédulité et le mépris.
— Cela prendra plusieurs mois, peut-être plus d'un an, poursuivit-il, ignorant sa remarque. Nous devons rallier les loups-garous disséminés à travers l'Europe, ceux qui montrent un intérêt pour les arts obscurs et cherchent à briser leurs chaînes. L'objectif est qu'ils puissent embrasser pleinement leur nature et servir nos desseins.
Bellatrix resta silencieuse un instant, laissant ces paroles résonner dans l'air lourd de la pièce. Une telle mission n'avait rien de glorieux ; cela ressemblait davantage à une épreuve qu'à une véritable récompense.
— Greyback est un loup-garou ? finit-elle par s'exclamer, son visage déformé par le dégoût. Tu as osé inviter un loup-garou dans notre maison ?
Rodolphus leva les yeux au ciel, agacé par ses objections.
— Ce n'est pas vraiment le sujet, répliqua-t-il froidement.
Il marqua une pause, son regard se durcissant tandis qu'il poursuivait :
— Rabastan sera le seul représentant des Lestrange ici, avec toi. Je compte sur toi pour l'épauler dans sa tâche et veiller aux intérêts de cette famille.
Bellatrix laissa son regard glisser sur les bandages qui enroulaient ses avant-bras.
— Je vois que le Seigneur des Ténèbres t'a puni à la hauteur de ta transgression, observa-t-elle, un sourire railleur naissant sur ses lèvres. Ces bandages apportent une touche décorative des plus exquisément grotesques à ton allure de rustre.
Il se tourna brusquement, la regardant avec une intensité glaciale.
— J'ai fait une erreur, admit-il finalement, sa voix empreinte d'un mélange de lassitude et de frustration. Je n'aurais pas dû le mêler ainsi à nos histoires.
— Nos histoires ? répéta-t-elle, sa voix vibrante d'indignation. C'est une manière bien désinvolte de parler des manigances que toi et ton père avez fomentées dans mon dos.
Rodolphus se redressa lentement, prenant une profonde inspiration. Un tic nerveux agitait sa mâchoire, trahissant la tension qui montait en lui.
— Je n'ai pas manigancé contre toi, Bellatrix.
— Vraiment ? lança-t-elle, son ton glacial. C'est bien toi qui m'as dit que Mirepoix avait été engagé à ta demande et à celle de ton père, non ?
— J'ai dit ça pour te blesser, mais je n'ai pas engagé Mirepoix moi-même. C'est mon père qui est allé chercher du côté français de notre famille. Il ne m'a pas demandé mon avis.
— Mais tu étais au courant, siffla-t-elle entre ses dents.
Elle sentit, avec horreur, les larmes monter malgré elle.
— Tu as fait semblant dès le début. Ce discours de Poufsouffle que tu m'as servi à Sainte-Mangouste sur tes soi-disant sentiments à mon égard… Tout était faux. Tu n'as jamais accepté que je sois infertile. Tu n'as jamais eu de sentiments pour moi.
Sa voix se brisa légèrement, mais elle poursuivit, inflexible :
— Et me reprocher depuis octobre dernier d'avoir perdu cet embryon… alors que je ne suis tombée enceinte qu'à cause de tes complots ! Tu savais que je pouvais tomber enceinte, et tu n'as rien dit. Pendant des mois, tu en as profité, et depuis, tu n'as fait que me martyriser. Toutes ces insinuations, ces insultes immondes sur ce que j'ai vécu, sur mon rapt, en prenant soin de me salir à la moindre occasion. Alors que c'est toi qui m'as trahie…
Rodolphus baissa les yeux, ses mains enfoncées dans ses poches, son visage figé dans un silence lourd. Mais le tic à sa mâchoire persistait.
— Et Alecto, reprit-elle, son ton chargé de mépris. Parlons-en ! Tu la parades depuis des mois dans cette maison. Tu couches avec elle sous mon nez, en prenant soin que je vous entende. Tu me crois si naïve, si stupide, pour ne pas comprendre que tu faisais exprès ? Pour me blesser. Pour m'humilier.
Il releva enfin la tête, un éclat amer brillant dans ses yeux.
— Parce que toi, tu ne m'as pas pris pour un idiot peut-être ? répliqua-t-il, la voix rauque. Tu crois que je n'aie pas vu que tu ne m'as jamais respecté ? Jamais accordé une once d'affection ?
Il s'avança d'un pas, sa voix grondant de ressentiment.
— Je t'ai défendue auprès de tout le monde. Mes parents. Sais-tu combien de disputes, combien de reproches j'ai essuyés pour toi ? Est-ce que tu t'imagines que mes parents sont morts sans que j'aie eu l'occasion de me réconcilier avec eux, parce que j'étais trop occupé à te défendre ? J'ai perdu leur estime, celle de bien des Mangemorts, tout cela pour toi. Et toi, tu oses me traiter avec mépris.
Il la fixa un moment, puis poursuivit, plus doucement, mais d'un ton fielleux :
— Tout le monde parle de toi, Bellatrix. Tu sais ce qu'ils disent, n'est-ce pas ?
— Que disent-ils, Rodolphus ? siffla-t-elle, glaciale, le défi brillant dans ses yeux.
Il hésita, ses lèvres tremblant légèrement avant qu'il ne murmure :
— Que tu couches avec le Seigneur des Ténèbres.
Bellatrix s'avança d'un pas menaçant, son regard lançant des éclairs.
— Comment oses-tu proférer une telle infamie ? Le crois-tu aussi dépravé que toi ?
Rodolphus émit un ricanement amer.
— La vérité, Bellatrix, c'est que je t'ai tout donné. Mon cœur, tu l'avais entre tes mains, et tu as choisi de le jeter à terre pour l'écraser, sans une once de considération ou de respect. Tu as participé à ce raid en Roumanie, sans réfléchir un seul instant aux risques que tu prenais, uniquement parce que tu voulais perdre cet enfant. Et moi ? Je n'ai jamais rien fait d'autre que veiller sur toi, te protéger, et t'aimer, malgré tout.
Elle secoua la tête, son audace la frappant comme une gifle.
— Je n'en reviens pas. Tu m'as trahie de la plus vile des manières, et c'est moi qui t'ai blessé ? Tout ce que j'ai fait, Rodolphus, c'est être moi-même. Je n'ai rien fait pour perdre ce bébé, et tu le sais !
Elle marqua une pause, sa voix se durcissant encore.
— Mais veux-tu connaître l'ironie la plus cruelle de cette histoire, Rodolphus ? murmura-t-elle, son ton chargé d'une froide amertume. C'est que, contre toute attente, à mon corps défendant, je suis bel et bien tombée amoureuse de toi. Il y a eu un moment, lorsque je suis tombée enceinte, où je n'ai plus pu me mentir. Oui, Rodolphus, je crois aujourd'hui que je t'ai sincèrement aimé.
Elle marqua une pause, ses yeux fixant les siens avec une intensité glaçante. Rodolphus resta figé, interdit, un mélange de choc et d'incrédulité déformant son visage.
— J'aurais pu interrompre cette grossesse. J'en avais le pouvoir, sans que tu n'en saches jamais rien. Mais je ne l'ai pas fait. Je m'en suis détournée, uniquement pour toi. Pas pour moi. Pas par faiblesse, mais parce que je ne voulais pas te blesser. Parce que j'avais des sentiments pour toi.
Elle le fixa, son regard désormais aussi froid que l'acier.
— Mais tout cela est terminé, Rodolphus, déclara-t-elle d'une voix glaciale, chaque mot porté par une détermination implacable. La petite flamme que je ressentais pour toi s'est éteinte à jamais. Ce n'est pas de la haine que j'éprouve pour toi, mais un mépris profond et irrévocable. Et lorsque je te regarde désormais, ce n'est plus qu'un sentiment de dégoût qui m'envahit.
Elle s'avança légèrement, son regard brillant d'une froide intensité. Elle était déterminée à lui faire le plus de mal possible.
— Tu es un sorcier de faible envergure, incapable de te hisser parmi les meilleurs, toujours prompt à trouver des excuses pour justifier tes échecs et masquer ta médiocrité. Ton ambition est une façade, Rodolphus. En vérité, tu n'es qu'un lâche, un homme sans substance, un suiveur et un traître.
Elle fit un pas vers lui, et sa voix s'adoucit, mais non sans une pointe d'une cruauté presque affectueuse.
— Regarde-toi. Toujours dans l'ombre des autres. De ton père, de ton frère, et même des hommes que tu prétends appeler tes amis. Jamais tu n'as marqué ton nom par tes actions. Jamais tu n'as eu le courage de briller par toi-même. Et devrais-je mentionner ces orgies immondes auxquelles tu te livres sans vergogne ? Et tu oses parler de sacrifice, de tout ce que tu aurais fait pour moi ?
Elle se redressa, sa silhouette imposant une froide autorité.
— Tu n'as jamais rien fait qui ne soit motivé par ta peur de l'échec. Même ton dévouement envers moi n'a jamais été réel. Tu voulais seulement te prouver quelque chose, te donner l'illusion d'être un homme digne d'intérêt. Mais tu n'es rien.
Rodolphus détourna les yeux, son visage se crispant sous l'effet de ses paroles. Ses mains se contractèrent involontairement, et sa mâchoire se serra comme pour contenir un flot d'émotions qu'il n'était plus capable de réprimer.
Bellatrix pencha légèrement la tête, ses lèvres esquissant un sourire cruel.
— Oh, ne me dis pas que mes paroles t'affectent à ce point, murmura-t-elle avec une fausse douceur.
Elle le fixa avec une intensité dévastatrice, savourant son silence. Rodolphus détourna brusquement le visage, comme s'il cherchait à masquer son humiliation, mais Bellatrix s'avança encore, implacable.
— Même tes larmes sont une faiblesse. Je t'ai regardé si souvent, espérant trouver quelque chose, et pourtant, jamais je n'ai vraiment vu un homme devant moi. Seulement un raté, incapable se montrer à la hauteur.
Elle se détourna alors, ses paroles finales frappant comme une sentence :
— C'est fini, Rodolphus. Je n'ai plus de temps à perdre avec toi. Je te souhaite tout le bonheur possible à patauger dans la boue, en compagnie de ton ami le puant, à traquer des créatures sauvages et abjectes. Bon voyage !
À suivre.
Le prochain chapitre devrait s'intituler "L'Amant", et c'est censé être mon préféré de toute l'histoire. C'est celui qui m'a donné envie d'écrire cette fanfiction dès le départ.
J'espère que cette Muse, qui me pousse à écrire pendant des heures sans boire ni manger (véridique), continuera de m'inspirer ces prochains jours. Pour celles et ceux qui me suivent depuis 2011, j'espère que vous êtes fier·e·s de moi ! :) Quatre chapitres en à peine trois mois, c'est juste incroyable.
Si vous passez par là, laissez donc un petit commentaire. Qui sait, je risque de disparaître de nouveau pendant dix ans. On sait jamais ;)
SamaraXX
