Chapitre 36


Après l'arrivée de l'étrange rapport, L nous a congédié sèchement avec Tasi et nous retournons, entourés de 6 gardes du corps à nos appartements respectifs. Nous sommes silencieuses et calmes, alors que nous arrivons devant la porte du logis de Tasi. Cette dernière se tourne vers moi, pour me saluer d'un sourire amical.

- Ne t'en fais pas pour L. Il ne supporte pas avoir tord. On va prouver ton innocence, peu importe le temps que ça prendra. Je te l'ai juré il y a cinq ans.

Je hoche la tête, soulagée de sa sollicitude et de son assurance. Tasi rentre dans ses appartements et deux soldats se postent à l'entrée pour la surveillance habituelle. Les quatre soldats restants se positionnent autour de ma personne et nous partons à l'étage inférieur où se trouve ma demeure dans laquelle je loge depuis presque 5 ans. Depuis ce jour où j'ai été suspecté d'être Kira. Cette seule pensée me déprime un peu plus. J'essaie de garder la tête hors de l'eau chaque jour que je passe en présence de L, de son majordome et pour Tasi qui sacrifie tout son temps pour me soutenir dans cette épreuve.

Je suis si profondément dans mes pensées que je marche jusqu'à la porte de ma chambre sans faire attention. Si bien que lorsque les deux soldats s'arrêtent et se tournent vers moi, je n'y fais pas attention et me heurte à eux et tombe en arrière, directement sur le derrière. Je suis rapidement mis en joue par quatre fusils des soldats, qui sont tendus à cette simple altercation. Je ne bronche pas et garde les mains à terre, fixant dédaigneusement le bout des armes devant moi. Leurs visages sont masqués mais je sens leurs yeux remplis de haine sur moi.

- Détendez-vous, c'était un accident.. J'étais perdue dans mes pensées !

- Ferme-la, criminelle ! siffle un soldat derrière moi. Si ce n'était pas L qui nous ordonnait de te garder en vie, tu serais déjà pendue à l'échafaud !

- Et si on ne me pend pas encore, c'est pour quelle raison à votre avis ? répondais-je tout aussi férocement. Parce qu'il y a doute ! Et quand il y a doute, il y a présomption d'innocence ! Mais si vous me tuez, vous deviendrez des criminels au même titre que Kira. C'est ça que vous voulez ?!

- ….

Alors que je me relève malgré les fusils pointés sur moi. Je sors mes clés pour déverrouiller ma chambre et j'y rentre sans plus de salutations à ces idiots. La porte claque et je vais immédiatement dans ma salle de bain retirer mes vêtements que je jette dans la corbeille de linge sale. Je m'habille nonchalamment d'un vieux pyjama récupéré à la hâte par Tasi, lors d'un passage dans mes appartements à Marineford. Pour éviter des représailles, c'est Tasi qui a été mandaté pour réaliser toutes les tâches et les passations liés à mon ancien poste.

Enfin, ancien poste, façon de dire. J'ai refusé de signer la lettre de démission que mon adorable amiral en chef avait préparée pour m'éjecter de ses rangs si ma culpabilité était avérée. Mais j'ai déchiré le papier en le fusillant du regard….


- " Je préfère encore mourir que de signer votre papier de démissionnaire ! Rien à foutre de votre dignité et celle du Gouvernement Mondial ! Je ne suis pas Kira et je vous le prouverai ! "


S'en est suivi d'un tabassage en règle par le volcan en fusion sous les regards ébahis de L, Tasi et Kizaru, qui sirotait son thé, appréciant le spectacle. Finalement, après une demi-heure interminable, Akainu s'est arrêté et j'entends encore son rire rauque en voyant que je continue de lui résister.


"Vous pouvez bien m'accuser d'être Kira ou même d'avoir tué le roi des mers, mais tabasser une femme pour la faire plier, c'est tout ce que vous valez, hein ?! Vous voulez ma démission ? Venez la chercher ! Arrachez-la de mes mains mortes, si vous en avez le cran ! Vous n'êtes qu'un chien pathétique qui se cache derrière son grade et ses papiers !"


J'ai vu la mort de près ce jour-là. C'est Borsalino qui nous a séparé sur l'ordre direct de L, appréciant assez peu la scène. Depuis, nous ne nous sommes plus croisés. Par sécurité pour l'un et pour l'autre.

J'observe mon reflet fatigué dans le miroir et tourne le dos pour aller m'écrouler dans le lit. A l'aide d'une télécommande, je ferme les rideaux puis mes yeux, attendant que le bruit léger des rideaux disparaisse. Je calme ma respiration un peu laborieuse par l'angoisse intérieure qui me ronge, à l'aide de plusieurs exercices de relaxation. Je sens mon corps s'engourdir très lentement dans le doux matelas…. L et son majordome me guettent chaque seconde que je passe dans cet hotêl, prêt à ressortir une intonation ou un regard prouvant que je suis Kira. Ça m'use physiquement et mentalement tellement d'être prudente à chaque parole, chaque geste au quotidien… Avec le temps, j'ai compris que ma chambre et toutes les pièces de vie dans lesquelles je me trouve sont surveillées. Tasi m'a confirmé l'information au détour d'une conversation.

La chambre est plongée dans l'obscurité, et elle est agréablement silencieuse, presque apaisante. Pour la première fois de la journée, je suis seule avec mes pensées, mes craintes et mes doutes. Je ferme les yeux, espérant trouver un semblant de répit.

- Hin hin…. Tu t'es bien relâché depuis tout ce temps….

La voix surgit des ténèbres, rauque, moqueuse, comme un grattement sur une porte qu'on aurait laissé fermée trop longtemps. Je me fige, mes paupières s'ouvrant brusquement. Une sueur froide glisse sur ma nuque. Lentement, presque à contrecœur, je tourne la tête vers le coin sombre de la pièce. J'aperçois une forme monstrueuse. Mes yeux s'adaptent peu à peu et alors qu'il s'avance jusqu'au lit, où je me suis tétanisé. Ryuk, imposant et sinistre, s'avance doucement. Son sourire, tordu et carnassier, brille dans l'obscurité, et ses yeux jaunes globuleux me transpercent, brillants d'une malice glaciale.

- Surprise ! s'exclame-t-il, étirant ses bras décharnés dans un geste théâtral. Tu ne pensais tout de même pas que je t'avais oubliée ? Je t'ai fait une promesse et je m'y tiens toujours…. !

Je me redresse sur le lit et me recule instinctivement contre le mur, mes mains agrippant désespérément les draps. Mon cœur bat à tout rompre et ma respiration devient hachée et sifflante face à cet être décharné.

- Ça faisait un bail, hein ? Cinq ans, si je ne me trompe pas… ! continue Ryuk, sa voix grondant comme un orage lointain.

Il rit, un son grotesque qui emplit la pièce et semble se répercuter sur les murs.

- Et regarde-toi maintenant. Une pauvre petite souris, piégée par des chats qui veulent tout savoir. Hin hin hin… Pathétique.

J'ai envie de parler, de crier à l'aide, mais les mots restent coincés dans ma gorge. Je suis pétrifiée, clouée par son regard, ce regard qui semble fouiller au plus profond de mon âme.

- Oh, allez, fais pas cette tête, gamine ! raille-t-il en penchant sa tête osseuse sur le côté. Tu savais que ça arriverait, pas vrai ? On ne peut pas fuir ce qu'on est. Et toi… Toi, tu es Kira. Même si tu prétends le contraire.

Il s'approche encore, son ombre couvrant maintenant tout le lit. Je tremble, incapable de détourner les yeux. Mon souffle est court et mon esprit vacille entre la peur et la panique. J'ai envie de crier au secours, qu'on vienne me tirer de ce cauchemar ! Ryuk éclate de rire une nouvelle fois, le son résonnant dans la pièce comme une moquerie sans fin. J'ouvre la bouche pour essayer de crier mais il m'arrête aussitôt, mettant un doigt devant son sourire mauvais.

- Pas la peine de crier, ricane-t-il en s'accroupissant pour se mettre à ma hauteur, ses yeux jaunes brillant comme deux phares dans la pénombre. Ni d'appeler au secours. Personne ne viendra. Personne ne peut me voir, ni m'entendre. Pas plus aujourd'hui qu'autrefois.

Sa voix, rauque et moqueuse, résonne dans la pièce comme un coup de tonnerre étouffé. Je sens mon cœur tambouriner dans ma poitrine, comme s'il cherchait à s'échapper.. Mes mains, crispées sur les draps, tremblent de manière incontrôlable.

- Tu te souviens, pas vrai ? Tu le sens en toi que tu me connais, reprend-il, son sourire s'étirant encore, au-delà de ce qui semble possible. Ce bon vieux temps où tu avais le pouvoir entre tes mains. Le pouvoir de vie et de mort, Kira…

Je secoue faiblement la tête, mes yeux se brouillent de larmes.

- Ce… ce n'est pas possible… Tu n'es pas réel… murmurais-je, mais ma voix est à peine un souffle.

Ryuk penche la tête, son sourire sadique s'élargissant encore laissant apparaître ses dents jaunies et pointues. Il semble savourer ma panique, se nourrir de ma peur et de mon angoisse croissante. Puis, dans un geste théâtral, il tend la main, et un objet apparaît entre ses longs doigts osseux. Un carnet. Noir. J'aperçois deux mots sur la couverture.

Death Note.

Je le fixe, incapable de parler davantage. Ma gorge se serre si fort que j'ai l'impression que mes cordes vocales vont imploser, mon corps refuse de bouger, comme si un poids invisible l'écrasait.

- Non… murmurais-je encore.

- Ce n'est pas possible, hein ? dit-il en ricanant, approchant lentement le cahier.

Ses yeux brillent d'une malice cruelle.

- Alors voyons voir si ça te revient.

D'un geste rapide, il appuie le carnet contre mon front. Une vague brûlante traverse mon esprit, comme une étincelle ravivant un feu éteint. Mes yeux s'écarquillent et mon corps se tend, mais ce n'est pas la peur qui m'envahit. Les souvenirs affluent à une vitesse fulgurante: les noms que j'ai écrits, les vies que j'ai pris, la sensation de pouvoir et… l'exaltation d'être craint par les vrais criminels. Et la présence de Ryuk, qui était plus gênante que terrifiante..

Quand il retire le carnet, je reste immobile, l'esprit embrumé par mes anciens souvenirs. Je cligne des yeux, laissant les larmes rouler sur mes joues, mais mon expression a changé. Ce n'est plus de la terreur dans mes yeux, mais une reconnaissance. Une clarté.

J'inspire profondément, posant une main tremblante sur la poitrine, comme pour contenir les émotions qui me submergent. Puis, un sourire timide, presque soulagé, se dessine sur mes lèvres.

- Ryuk…

Il éclate de rire, un rire tonitruant et moqueur, mais pas aussi cruel qu'auparavant.

- Hin hin… Voilà qui est mieux. Tu te souviens enfin, hein ? Avoue que ça te manquait.

Je hoche lentement la tête, un mélange de nostalgie et de gratitude brillant dans les yeux. Je ne réponds pas, sachant que je ne suis sûrement pas totalement seule. Je fais mine d'être malade, et je me rallonge dans le lit, tirant la couverture sur moi. Je couvre mon corps jusqu'à mon visage, laissant juste mes yeux dépasser pour continuer d'observer Ryuk. Ce dernier se décale et vient s'asseoir en tailleur sur le sol. Ses yeux rieurs me fixent alors que je chuchote.

- Je savais que ce jour finirait par arriver… Et quelque part, je l'attendais.

- Tu es décidément une humaine fascinante, Chesca.

Je secoue vigoureusement la tête, le regard désormais clair, déterminé. Un sourire, cette fois plus assuré, s'affiche sur mon visage.

- Alors, Ryuk… Par où commençons-nous ? Tant de victimes ont été épargnées ces 5 dernières années.

Ryuk éclate de rire, un son rauque et tonitruant qui emplit la pièce comme un écho macabre.

- Hin hin hin… Voilà pourquoi tu es ma préférée, Chesca! Je savais que tu n'avais pas changé. Ça promet d'être un vrai spectacle!


Allez, chapitre bonus parce que je suis motivée à écrire et me faire pardonner mon absence !

Bisous

ChescaShan