Depuis les premiers âges de la Terre du Milieu, une figure énigmatique et terrifiante hantait les récits et les chants, connue seulement comme le Maître de la Mort. D'aucuns disaient qu'il avait été une création de Morgoth lui-même, un être façonné dans les ténèbres du Vide. Cette silhouette, vêtue d'une cape noire si dense qu'elle semblait absorber la lumière, était parfois aperçue dans les batailles des Jours Anciens. Sous son capuchon, on murmurait qu'il n'y avait rien, sauf deux billes d'un vert absinthe ardent, qui semblaient sonder les âmes et dévoiler les plus sombres secrets de ceux qu'elles fixaient.
Pendant des siècles, le Maître de la Mort fut considéré comme l'un des plus redoutables alliés de Morgoth. On le disait invincible, fauchant les vies des héros comme un moissonneur abat le blé. Sa présence dans les armées de Morgoth semait le désespoir parmi les Elfes et les Hommes, car nul ne semblait pouvoir l'égaler en force ou en ruse.
Cependant, des rumeurs circulaient parmi les sages. Certains prétendaient que cet être n'était pas une création de Morgoth, mais qu'il s'était lié à lui par choix, en quête de pouvoir ou d'une sombre vérité. D'autres osaient affirmer qu'il portait un fardeau plus lourd, un secret que même les Valar ne comprenaient pas entièrement.
Le Maître de la Mort resta fidèle à Morgoth jusqu'à un moment décisif dans l'histoire de la Terre du Milieu : la rencontre avec Túrin Turambar. Túrin, le fils maudit de Húrin, avait été destiné à une tragédie sans fin, manipulé par Morgoth à chaque tournant de sa vie. Lorsqu'il affronta finalement le dragon Glaurung, il fut dit que le Maître de la Mort observa la bataille de loin, comme s'il attendait un moment crucial.
Après la chute de Glaurung, Túrin, consumé par la douleur et la colère, chercha à défier Morgoth lui-même. C'est à ce moment que le Maître de la Mort intervint, mais pas comme un ennemi. Dans une trahison inattendue, il permit à Túrin de lui porter un coup fatal, offrant ainsi à l'humanité une victoire contre l'influence de Morgoth. Certains disent que le Maître de la Mort, en cet instant, se libéra d'une servitude millénaire, tandis que d'autres croient qu'il avait toujours suivi un plan connu de lui seul.
Bien que Túrin soit devenu un héros légendaire pour cet acte, l'histoire du Maître de la Mort ne trouva pas de conclusion. Même après la chute de Morgoth et son bannissement dans le Vide, des récits émergèrent à travers les âges. On prétendit parfois voir une silhouette noire errer dans les lieux abandonnés ou sur les champs de bataille dévastés. Certains voyageurs affirmèrent avoir croisé cette figure, et ceux qui osèrent lever les yeux sous son capuchon virent deux flammes vertes les fixer, comme si elles sondaient leur âme et jugeaient leur destinée.
D'autres croyaient que cette ombre n'était plus un être maléfique, mais un gardien, veillant à ce que les puissances oubliées ne reviennent pas troubler l'équilibre de la Terre du Milieu. Mais les sages, même parmi les Elfes, restaient divisés sur sa nature et son rôle.
Alors que le Troisième Âge approchait de sa fin et que l'Anneau Unique refaisait surface, la légende du Maître de la Mort se raviva. Certains aventuriers jurèrent avoir vu cette silhouette aux abords de lieux hantés, tels que les Monts Brumeux ou les ruines de l'ancien Dorthonion. On disait qu'un regard de ses yeux d'absinthe suffisait pour réveiller les souvenirs des actes les plus sombres et des regrets les plus enfouis.
Nul ne savait si cette ombre agissait pour le bien ou le mal. Mais tous comprenaient qu'elle appartenait à un âge révolu, un vestige d'une époque où la Terre du Milieu n'était pas encore dominée par les Anneaux de Pouvoir, mais par des forces encore plus insondables.
Cela faisait des heures que le groupe de cinq personnes progressait dans les collines, leurs pas lourds s'enfonçant dans les feuilles mortes et la terre humide. Selon Aragorn, la cité elfique n'était plus qu'à quatre jours de marche, mais cette perspective n'apportait que peu de réconfort aux quatre hobbits, épuisés par l'allure soutenue du rôdeur. La nuit, pesante et froide, tombait autour d'eux, drapant le paysage de ses ombres mouvantes. Fatigués, Merry, Pippin, Sam et Frodo trébuchaient presque à chaque pas, leur souffle court trahissant leur épuisement.
Aragorn, marchant légèrement en avant, s'arrêta soudain. Il scruta les alentours, ses yeux perçants cherchant un abri sûr. Non loin de là, une vieille tour de garde en ruine se dressait, son sommet effondré et ses pierres rongées par le temps.
« Nous nous arrêterons ici pour la nuit, » annonça Aragorn d'un ton ferme. Il se retourna vers les hobbits. « Pas de feu. Si vous avez besoin de vous reposer, le rez-de-chaussée suffira. »
Les quatre hobbits hochèrent la tête, soulagés à l'idée de pouvoir enfin poser leurs sacs et se reposer. Ils se dirigèrent prudemment vers la tour, la lumière pâle de la lune peignant des ombres inquiétantes sur les murs croulants.
À peine avaient-ils franchi le seuil qu'un cri étouffé retentit, suivi de pas précipités. Les hobbits ressortirent en trombe, leurs visages pâles comme la lune au-dessus d'eux.
« Qu'est-ce qui se passe ? » demanda Aragorn, accourant aussitôt.
Frodon, tremblant, désigna l'intérieur de la tour d'un doigt hésitant. « I-il y a quelqu'un… un homme… il est là, juste à l'entrée ! »
Les autres hobbits hochaient frénétiquement la tête, leurs yeux ronds de terreur.
Aragorn fronça les sourcils. « Restez derrière moi. »
Le rôdeur s'avança prudemment dans l'obscurité, une main posée sur la garde de son épée. Les hobbits le suivirent à contrecœur, serrés les uns contre les autres. L'intérieur de la tour était glacial, une odeur de pierre humide et de terre froide emplissant l'air. Et là, dans un coin sombre, une silhouette se détachait faiblement.
Un homme était assis, adossé contre le mur, son visage caché par la pénombre. Mais lorsqu'ils entrèrent, il bougea lentement, ses muscles raides protestant contre le mouvement. Une lame scintilla faiblement dans la lumière de la lune, fermement tenue dans une main sale et ensanglantée.
Aragorn leva la main pour apaiser les hobbits, avançant d'un pas lent. « Qui êtes-vous ? » demanda-t-il, sa voix grave résonnant dans le silence oppressant de la tour.
L'homme ne répondit pas tout de suite. Il redressa légèrement la tête, et les rayons de la lune dévoilèrent un visage marqué par les épreuves. De longues griffures zébraient sa joue gauche et descendaient sous un bandage taché de sang qui entourait son cou. Ses cheveux noirs et emmêlés tombaient en mèches collées par la sueur et le sang, et ses yeux verts, brillants comme des flammes dans l'obscurité, observaient Aragorn et les hobbits avec une intensité presque douloureuse.
Enfin, une voix rauque, comme un souffle écorché, s'éleva. « Je… ne suis pas une menace… » Ses mots étaient entrecoupés de pauses, comme s'il luttait pour parler. La blessure à sa gorge semblait en être la cause.
Aragorn inclina légèrement la tête, scrutant l'homme avec prudence. « Ton nom ? »
L'homme hésita, comme s'il avait oublié jusqu'à son identité, ou peut-être cherchait-il à jauger s'il pouvait faire confiance à celui qui se tenait devant lui. Enfin, il répondit d'une voix toujours brisée :
« Azraël. »
Il baissa légèrement son épée, mais garda sa main ferme sur la garde, ses yeux ne quittant pas Aragorn. Le rôdeur remarqua les bandages crasseux qui enveloppaient ses avant-bras, les entailles profondes sur ses mains, et le sang séché qui maculait sa tunique sombre. Sa tenue ressemblait à celle des rôdeurs du Nord, mais elle était d'un noir si profond qu'elle semblait aspirer la lumière.
Les hobbits restaient en arrière, leurs regards oscillant entre Aragorn et Azraël. La peur était visible sur leurs visages, mais Frodon, rassemblant son courage, murmura : « Vous êtes blessé… Vous avez besoin d'aide. »
Azraël tourna lentement la tête vers le hobbit, et son regard sembla le transpercer. Une lueur indéfinissable brilla dans ses yeux verts, un mélange d'épuisement, de douleur, mais aussi de détermination.
« Ce n'est… rien, » grogna-t-il. Mais sa main tremblante et la manière dont il serrait les dents révélaient le contraire.
Aragorn s'accroupit lentement, les yeux toujours fixés sur Azraël. « Vous avez été attaqué. Qui, ou quoi, vous a infligé ces blessures ? »
Azraël ne répondit pas tout de suite. Il regarda ses mains ensanglantées, comme s'il hésitait à revivre ce qu'il avait traversé. Puis, après un long silence, il murmura : « Des choses… dans l'ombre… elles me traquent encore. »
Sa voix, bien que faible, portait un poids qui fit frissonner les hobbits. Aragorn, pourtant, ne recula pas.
« Si elles vous traquent, elles pourraient nous traquer aussi. »
Azraël leva les yeux vers lui, et un sourire faible, presque imperceptible, tordit ses lèvres fendues. « Alors… restez en dehors… de mon chemin. »
Aragorn jeta un regard appuyé à Azraël, évaluant à la fois l'homme et la situation. L'étrange rôdeur paraissait épuisé, presque à bout de forces, mais une lueur de défi brillait encore dans ses yeux verts. Aragorn se redressa lentement, son regard perçant sondant l'obscurité au-delà des murs effondrés de la tour.
« Restez ici, » dit-il d'une voix grave, s'adressant aux hobbits. « Surveillez-le. Essayez de le convaincre de se laisser soigner. Je vais vérifier les environs. S'il est traqué, je dois m'assurer que rien ne rôde dans les parages. »
« Vous allez… nous laisser seuls avec lui ? » balbutia Pippin, visiblement mal à l'aise.
Aragorn posa une main apaisante sur l'épaule du hobbit. « Il est blessé et seul. Il ne vous fera aucun mal. »
Azraël, toujours appuyé contre le mur, émit un rire rauque, presque imperceptible. « Laissez-les partir… Je n'ai pas besoin… d'aide. »
Aragorn le regarda avec un mélange de compassion et de détermination. « Cela, c'est à vous d'en juger, mais vous saignez toujours. » Il tourna ensuite son attention vers Frodon, qui semblait un peu moins effrayé. « Frodon, je compte sur toi pour veiller à ce qu'il accepte de recevoir des soins. »
Frodon acquiesça, bien qu'un peu nerveusement, et Aragorn s'éclipsa, disparaissant rapidement dans l'obscurité de la nuit.
Le silence s'installa dans la tour. Seule la respiration lourde d'Azraël, entrecoupée de quelques grognements étouffés, résonnait faiblement. Sam, prenant son courage à deux mains, sortit une petite trousse de soins rudimentaire de son sac. Ses mains tremblaient légèrement alors qu'il s'approchait.
« Vous… vous devriez vraiment vous laisser soigner, monsieur, » dit-il d'une voix douce mais ferme. « Ces blessures-là… elles ne vont pas se guérir toutes seules. »
Azraël tourna lentement la tête vers lui, ses yeux verts brillants sous la lumière vacillante de la lune. « Pourquoi… perdre votre temps ? Je ne vais pas… mourir. Pas encore. »
« Vous ne savez pas ça, » intervint Merry en s'avançant un peu, bien qu'à distance prudente. « Vous avez l'air d'avoir survécu à des choses terribles, mais ces griffures… elles pourraient s'infecter. »
Azraël les observa tour à tour, comme s'il cherchait à comprendre leur insistance. Il lâcha un soupir rauque, une main toujours posée sur sa lame.
« Vous êtes têtus… pour des… petits êtres, » murmura-t-il, sa voix brisée laissant transparaître un soupçon d'amusement.
Sam profita de ce moment pour avancer encore. « Bon, alors têtu pour têtu, laissez-moi au moins regarder cette plaie sur votre cou. Cela ne vous coûtera rien de me laisser essayer. »
Azraël le fixa longuement, puis hocha imperceptiblement la tête. Sam se mit immédiatement au travail, ses doigts malhabiles retirant le bandage imbibé de sang. Une grimace se dessina sur son visage en découvrant la blessure – une profonde entaille qui semblait presque avoir traversé la gorge.
Pendant ce temps, Aragorn progressait rapidement dans la nuit, ses pas silencieux parmi les pierres et les racines. Son regard balayait les ombres, chaque bruissement attirant son attention. Il finit par tomber sur une petite clairière, où une odeur âcre lui parvint. Là, sous la lumière froide de la lune, il découvrit les corps de plusieurs bêtes immenses. Des loups noirs, mais bien plus grands que ceux qu'il avait l'habitude de croiser. Leurs poils hérissés et leurs crocs encore découverts témoignaient de la férocité de l'affrontement.
Aragorn s'agenouilla près de l'un des cadavres, examinant les blessures. Les coups portés étaient précis, tranchant profondément dans la chair. Une lame habile avait mis fin à leur vie. Il fronça les sourcils en remarquant des traces de griffures sur le sol et des éclaboussures de sang qui s'éloignaient vers la tour.
« Il s'est défendu avec une force surprenante pour quelqu'un d'aussi mal en point, » murmura-t-il pour lui-même.
Satisfait qu'il n'y avait pas de menace immédiate, Aragorn retourna à la tour, ses pensées tournées vers cet homme énigmatique.
Lorsqu'il revint, il trouva Sam en train de changer les bandages d'Azraël avec une concentration admirable, tandis que Merry et Pippin tentaient de plaisanter pour alléger l'atmosphère. Frodon, lui, restait silencieux, son regard pensif posé sur le visage marqué de l'étranger.
« Tout va bien ici ? » demanda Aragorn en entrant.
Sam se tourna vers lui avec un sourire timide. « Oui, monsieur Aragorn. Il nous a laissé faire, finalement. »
Azraël émit un grognement qui aurait pu être un rire. « Vous avez des alliés… persuasifs. »
Aragorn posa son épée contre le mur avant de s'accroupir devant Azraël. « J'ai trouvé ce qui vous traquait. Les bêtes sont mortes. Vous les avez toutes abattues. Dans l'action, il est possible que vous ayez cru qu'il en restait d'autres. »
Azraël releva les yeux vers lui, un éclat de doute mêlé à de l'épuisement dans son regard. Aragorn continua d'une voix calme et rassurante : « Vous n'avez plus à vous inquiéter. Vous êtes en sécurité maintenant. Laissez-nous vous aider. »
Azraël hésita, puis hocha lentement la tête. Aragorn prit la place de Sam, examinant les plaies avec une expertise tranquille. Il remarqua les nombreuses cicatrices anciennes qui parsemaient le torse et les bras de l'homme, mais il se concentra sur les blessures les plus récentes. Une profonde entaille sur l'avant-bras nécessitait des points de suture improvisés, tandis que la plaie à la gorge devait être nettoyée avec soin.
Alors qu'Aragorn travaillait, il parla d'un ton presque paternel : « Vous avez beaucoup survécu, Azraël. Vous portez les marques d'une vie difficile, mais cela ne veut pas dire que vous devez tout endurer seul. »
Azraël le fixa longuement, puis détourna les yeux, visiblement troublé. « Je n'ai jamais eu… le choix. »
Le silence retomba, chargé d'une lourde signification. Les hobbits échangèrent des regards, touchés par les mots de cet homme étrange. Aragorn termina de poser les bandages, son visage grave mais serein.
« Ce soir, » dit-il doucement, « vous n'êtes pas seul. »
Azraël ne répondit pas, mais un infime relâchement de ses épaules tendues suggéra qu'il avait entendu.
La nuit passa dans un calme étrange, presque inquiétant. Les ombres des arbres dansaient sous le clair de lune, projetant des formes mouvantes sur les ruines de la tour. Aragorn, fidèle à sa promesse, ne ferma pas l'œil. Il effectua des rondes silencieuses autour de la tour, sa main posée sur la garde de son épée. Chaque bruissement dans les fourrés, chaque cri lointain d'un hibou attirait son attention. Mais rien, ni bête ni homme, ne troubla la paix précaire de la nuit.
À mesure que l'aube approchait, une lumière dorée se répandit sur l'horizon, chassant lentement les ombres nocturnes. Aragorn s'arrêta au sommet d'une petite butte, contemplant les premiers rayons du soleil. La tranquillité de ce moment contrastait avec le poids qui pesait sur son esprit. Il tourna les talons et retourna vers la tour.
En entrant, Aragorn fut frappé par une vision inattendue. La lumière du matin se déversait à travers les fissures des murs, illuminant Azraël, qui était toujours assis contre la paroi de pierre. Ses longs cheveux noirs, tombant en mèches désordonnées jusqu'au milieu de son dos, captaient les rayons du soleil, reflétant des éclats presque dorés. Pour un instant fugace, le rôdeur perçut une beauté austère et étrange chez cet homme blessé, comme une ombre transpercée par la lumière.
Il déglutit, secouant légèrement la tête pour chasser cette pensée. Approchant, il s'agenouilla pour secouer doucement l'épaule de l'homme.
« Azraël, réveillez-vous, » murmura-t-il, sa voix basse mais ferme.
Aucune réponse. Aragorn fronça les sourcils et répéta, plus fort cette fois : « Azraël. »
Les hobbits, déjà à moitié réveillés, se levèrent en se frottant les yeux. Frodon, toujours attentif, nota immédiatement la tension sur le visage d'Aragorn. Il s'approcha.
« Qu'est-ce qui se passe ? » demanda-t-il, inquiet.
« Il ne se réveille pas, » répondit Aragorn d'une voix grave. « Peut-être… peut-être dort-il simplement profondément après tout ce qu'il a traversé. »
Mais il savait que ce n'était pas normal. Frodon s'accroupit à son tour, posant une main hésitante sur le bras d'Azraël. « Monsieur Azraël ? Réveillez-vous, s'il vous plaît. »
Sam, Merry et Pippin se joignirent à eux, l'inquiétude croissant rapidement. Sam secoua doucement Azraël par l'épaule, son visage se crispant en constatant qu'il était brûlant au toucher.
« Il est brûlant ! » dit-il, sa voix montant d'un cran. « Il a de la fièvre, et pas qu'un peu ! »
Frodon, la panique perçant dans son ton, appela Aragorn, qui s'était légèrement écarté pour réfléchir. « Aragorn ! Il est malade, vraiment malade ! »
Le rôdeur revint rapidement, s'agenouillant à nouveau près d'Azraël. Il posa une main sur son front et grimaça. « Par Eru… il a une fièvre terrible. Cela a dû commencer pendant la nuit. »
Pippin, dont les mains tremblaient légèrement, balbutia : « Qu'est-ce qu'on va faire ? Et si… et si c'était grave ? »
Aragorn inspira profondément pour calmer sa propre angoisse. Il ne pouvait pas se permettre de perdre son sang-froid. « Nous devons agir vite. Frodon, va chercher de l'eau dans la gourde. Sam, prends des tissus ou des bandages propres. Il faut le rafraîchir pour tenter de faire baisser cette fièvre. »
Les hobbits s'exécutèrent immédiatement, leurs mouvements précipités mais pleins de bonne volonté. Pendant ce temps, Aragorn examina de plus près les blessures d'Azraël. Certaines saignaient encore légèrement, et d'autres montraient déjà des signes d'infection. Les griffures sur son cou, en particulier, étaient enflammées, des veines rouges se ramifiant autour des plaies.
« Ce sont ces blessures, » dit Aragorn à voix basse. « Elles s'infectent. Si nous n'agissons pas vite, cela pourrait devenir fatal. »
Merry, qui avait observé en silence jusqu'à présent, murmura : « Mais qu'est-ce qu'on peut faire ? Vous avez de quoi soigner une infection ? »
Aragorn hocha la tête. « J'ai des herbes. De l'Athelas, si je peux en trouver encore frais dans mes affaires. Cela ne fera pas tout, mais cela ralentira l'infection. »
Frodon arriva avec la gourde, Sam tenant des morceaux de tissu déjà prêts. Aragorn mouilla un des tissus et commença à éponger le front d'Azraël, son visage concentré. Les hobbits observaient avec une angoisse palpable.
« Parlez-lui, » leur dit Aragorn sans détourner les yeux de sa tâche. « Cela pourrait l'aider à se réveiller. »
Sam prit une grande inspiration et s'exécuta. « Allez, monsieur Azraël… restez avec nous. Vous avez survécu à des choses terribles, alors ce n'est pas une petite fièvre qui va vous abattre, hein ? »
Merry ajouta timidement : « On a besoin de vous en vie, vous savez. Vous nous avez déjà assez effrayés hier soir. »
Un faible grognement s'échappa des lèvres d'Azraël, mais il ne bougea pas. Aragorn leva les yeux brièvement, un éclat d'espoir traversant son regard. « Il vous entend. Continuez. »
Frodon se pencha un peu plus près, parlant d'une voix douce mais ferme. « Azraël, nous voulons vous aider. Vous devez vous battre contre cette fièvre. Vous êtes un survivant, n'est-ce pas ? Alors, ouvrez les yeux. »
Après un instant de silence tendu, Azraël remua légèrement. Ses paupières papillonnèrent, révélant ses yeux verts, mais ils étaient voilés, comme s'il regardait à travers un brouillard.
« Où… suis-je ? » murmura-t-il d'une voix rauque, presque inaudible.
Les hobbits poussèrent un soupir de soulagement collectif, tandis qu'Aragorn restait concentré. « Vous êtes en sécurité, » répondit-il calmement. « Vous avez de la fièvre, Azraël, mais nous faisons tout notre possible pour vous soigner. »
Azraël ferma à nouveau les yeux, sa respiration laborieuse. « Les bêtes… elles sont encore là… »
Aragorn posa une main rassurante sur son épaule. « Non. Elles sont mortes. Vous les avez tuées. Il n'y a plus de danger. Reposez-vous, mais laissez-nous vous aider. »
Azraël sembla lutter contre l'inconscience. Ses lèvres bougèrent faiblement, mais aucun son ne sortit. Aragorn échangea un regard grave avec Frodon. « Sa fièvre est trop élevée. Si nous ne parvenons pas à la faire baisser, il ne tiendra pas longtemps. »
« Alors on ne le laissera pas tomber ! » s'exclama Sam avec une ferveur soudaine. « Je vais chercher plus d'eau et… et tout ce qu'il faut ! »
Aragorn acquiesça. « Bien. Restez près de lui. Il va avoir besoin de nous tous. »
Dans la lumière de l'aube, les compagnons s'armèrent de courage et continuèrent leur lutte contre l'ombre qui semblait vouloir emporter Azraël.
L'aube se leva doucement sur la tour délabrée, baignant les ruines d'une lumière dorée. Le groupe s'était rassemblé, l'atmosphère tendue et empreinte d'une inquiétude silencieuse. Aragorn, debout près de l'entrée, contemplait Azraël, toujours allongé contre la paroi. Sa fièvre ne s'était pas améliorée, et ses légers mouvements de délire avaient tenu les hobbits éveillés toute la nuit. Malgré leurs efforts pour le soulager, il était clair que son état nécessitait des soins bien au-delà de ce qu'ils pouvaient offrir ici.
Frodon, les traits tirés mais résolus, fut le premier à briser le silence. « Nous devons avancer. Plus nous attendons, plus ses chances diminuent. Foncombe est notre seule option. »
Aragorn se tourna vers lui, réfléchissant un instant. Les hobbits semblaient tous d'accord, même Sam, qui serrait ses poings avec une expression inquiète. « Vous savez ce que cela implique ? » demanda Aragorn d'une voix grave. « Nous devrons marcher plus vite que ces derniers jours, même avec lui à porter. Vous devrez tenir le rythme, quoi qu'il arrive. »
Les quatre hobbits hochèrent la tête sans hésitation. Merry prit la parole, sa voix trahissant une légère nervosité : « Ce n'est pas comme si nous avions le choix. Si nous restons ici, il… il n'y arrivera pas. »
Sam, toujours pragmatique, ajouta : « Je préfère avoir mal aux pieds pendant des jours que de le voir mourir là, sous nos yeux. »
Aragorn acquiesça. Il s'agenouilla près d'Azraël, glissant ses bras sous lui avec précaution. À travers les vêtements, il sentit la chaleur intense de la fièvre. L'homme était légèrement plus léger que prévu, malgré la protection de cuir et la cape sombre qui enveloppaient son corps. Aragorn ne put s'empêcher de remarquer la finesse de son torse et de ses bras sous les bandages et les vêtements tachés de sang.
Il ajusta Azraël pour qu'il repose fermement contre lui, tout en saisissant l'épée du blessé qu'il plaça sur son dos pour ne pas être gêné. La sensation de la chaleur fiévreuse qui émanait du corps inconscient l'inquiétait profondément, mais il dissimula ses craintes pour ne pas alarmer davantage les hobbits.
« Allons-y, » dit-il finalement d'un ton ferme.
Le groupe quitta la tour en silence, avançant à travers les forêts et les collines qui s'étendaient devant eux. Les hobbits, bien que habitués à des rythmes de marche plus tranquilles, mirent tout leur cœur à suivre Aragorn, même si leurs jambes courtes peinaient à garder le rythme.
Azraël, porté par Aragorn, semblait sombrer plus profondément dans un délire fébrile. Par moments, il murmurait des mots incompréhensibles, sa voix rauque à peine audible. Aragorn, dont l'oreille aiguisée captait certains fragments, devina qu'il revivait des événements traumatiques.
« … Non… pas encore… trop de sang… » gémissait-il faiblement, la tête basculant contre l'épaule d'Aragorn.
Sam, qui marchait à côté, leva les yeux vers le rôdeur. « Il… il parle, mais… qu'est-ce qu'il dit ? »
Aragorn secoua la tête. « Rien de clair. La fièvre le fait délirer. Mais cela montre qu'il lutte encore. »
Merry, essoufflé mais déterminé, proposa : « On pourrait faire une pause ? Il n'y a pas de mal à reprendre notre souffle, n'est-ce pas ? »
Aragorn regarda autour de lui, puis hocha la tête. « Très bien. Mais seulement quelques minutes. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire. »
Ils trouvèrent un petit repli de terrain, où une grande pierre leur offrait un semblant d'abri contre le vent. Aragorn posa Azraël avec précaution, vérifiant une nouvelle fois ses blessures. Certaines avaient recommencé à saigner légèrement, tâchant les bandages déjà sales.
Frodon s'accroupit près de lui, tendant une gourde. « Est-ce qu'il peut boire ? Peut-être que cela pourrait l'aider. »
Aragorn hocha la tête. Avec beaucoup de soin, il souleva la tête d'Azraël et fit couler une petite quantité d'eau sur ses lèvres. L'homme sembla réagir faiblement, avalant une gorgée avant de retomber dans son inconscience.
« C'est un bon signe, n'est-ce pas ? » demanda Pippin, sa voix teintée d'espoir.
Aragorn répondit sans le regarder. « Cela montre qu'il est encore là. Mais sa fièvre ne faiblit pas, et Foncombe est encore loin. »
Après une journée harassante de marche, ils firent halte près d'un ruisseau pour la nuit. Aragorn prépara un camp sommaire, posant Azraël sur une couche de mousse et de feuilles sèches. Le rôdeur était visiblement préoccupé : chaque heure qui passait semblait aggraver l'état du blessé.
Alors que les hobbits s'occupaient à rassembler quelques herbes fraîches et de l'eau, Aragorn retira doucement la cape et la protection en cuir d'Azraël pour mieux examiner ses blessures. Sous la lumière vacillante des étoiles, il découvrit un torse marqué par d'anciennes cicatrices, témoins d'un passé violent. Il y avait des marques de griffes et de lames, et certaines blessures récentes montraient clairement des signes d'infection.
Frodon, qui était resté près d'Aragorn, murmura : « Il a dû traverser des choses horribles. On dirait qu'il a passé sa vie à se battre. »
Aragorn acquiesça sans un mot. Il appliqua les herbes qu'ils avaient trouvées sur les plaies, espérant ralentir l'infection. Azraël remua légèrement sous son toucher, murmurant à nouveau des mots indistincts.
« Ne… laissez pas… mourir… » souffla-t-il faiblement.
Sam, qui était revenu avec de l'eau, s'accroupit à côté. « Vous voyez, il ne veut pas abandonner. Alors on ne doit pas le laisser tomber. »
Aragorn, touché par la détermination du hobbit, répondit avec un léger sourire. « Non. Nous ne le laisserons pas tomber. »
Le lendemain matin, ils reprirent leur marche. Azraël semblait glisser de plus en plus profondément dans son délire. Par moments, il se débattait légèrement dans les bras d'Aragorn, murmurant des phrases incohérentes.
À un moment, alors qu'ils traversaient une clairière, Azraël ouvrit les yeux et fixa Aragorn avec une intensité troublante. « Ils arrivent… les ombres… elles nous traquent… »
Aragorn posa une main apaisante sur son épaule. « Personne ne vous traque. Vous êtes en sécurité. Calmez-vous. »
Frodon s'approcha, observant l'échange avec inquiétude. « Vous pensez qu'il parle de quelque chose qu'il a vu ? Ou est-ce juste… la fièvre ? »
« Peut-être les deux, » répondit Aragorn sombrement. « Les souvenirs et la fièvre se mêlent. Mais nous devons continuer. »
La tension s'intensifia au fil des heures. Les hobbits étaient fatigués, mais leur résolution ne faiblissait pas. Aragorn, portant Azraël sans relâche, semblait presque inébranlable, bien que son visage trahisse une profonde inquiétude.
Enfin, au bout de deux jours de marche incessante, ils atteignirent la frontière de Foncombe. Les arbres, majestueux et lumineux, semblaient vibrer d'une énergie apaisante. Aragorn s'arrêta un instant, scrutant les environs.
« Nous y sommes presque, » dit-il, sa voix emplie d'un soulagement palpable. « Les elfes nous trouveront rapidement. »
Les hobbits s'effondrèrent presque de fatigue, mais un sourire de soulagement éclaira leurs visages. Frodon regarda Azraël, toujours inconscient, et murmura : « Tenez bon. Vous allez être sauvé. »
Et comme pour répondre à cette prière silencieuse, une lumière douce apparut entre les arbres, annonçant l'arrivée des elfes.
Aragorn se tenait droit, ses yeux fixés sur les lumières qui scintillaient entre les arbres, annonçant l'arrivée des elfes. Il expira profondément, laissant un soupçon de soulagement traverser son visage fatigué. Mais à cet instant, le poids qu'il portait contre lui changea brusquement. Azraël, jusque-là inerte et fiévreux, fut secoué par des tremblements violents.
Le rôdeur s'agenouilla précipitamment, ajustant sa prise pour soutenir le corps tremblant. Azraël tenta de se dégager, mais ses forces déclinantes ne lui permirent que de se pencher en avant. Soudain, des spasmes parcoururent son corps tandis qu'il vomissait violemment. Il n'y avait que de la bile et des traînées de sang sombre qui s'écoulaient, mais les bruits rauques de douleur qui s'échappaient de sa gorge étaient déchirants.
« Azraël, reste avec nous ! » murmura Aragorn, sa voix empreinte de fermeté et de sollicitude.
Les hobbits, pris de panique, se levèrent précipitamment. Frodon attrapa l'un des bras ballants d'Azraël, tandis que Sam posait une main rassurante sur l'épaule de son compagnon.
« Qu'est-ce qu'on peut faire ?! » s'exclama Merry, ses yeux passant de l'homme blessé à Aragorn.
« Aidez-moi à le tenir. Il doit rester immobile, » ordonna Aragorn, ses muscles tendus pour empêcher Azraël de s'effondrer entièrement.
À ce moment, les elfes, alertés par le tumulte, accélérèrent leur approche. Leur démarche élégante se mua en une course souple et rapide. Une silhouette familière s'avança, son visage grave éclairé par la lueur argentée de la lune : Elrohir, fils d'Elrond.
« Aragorn ! Que se passe-t-il ici ? » demanda-t-il en sindarin, sa voix teintée d'inquiétude.
Aragorn releva la tête, son expression empreinte d'urgence. « Il est grièvement blessé et fiévreux. Nous avons fait aussi vite que possible, mais son état empire. Il a besoin de soins immédiatement. »
Elrohir s'agenouilla à côté d'Azraël, posant une main délicate sur son front. Son visage se durcit en sentant la chaleur intense de la fièvre. « Il est brûlant. Cette infection le consume. Nous devons le transporter à Foncombe sans attendre. »
« Peut-il tenir le voyage ? » demanda Elladan, qui venait de rejoindre son frère.
« Il n'a pas le choix, » répondit Aragorn en serrant la mâchoire. « Aidez-moi à le stabiliser. »
Les elfes prirent rapidement les devants, leur agilité naturelle leur permettant de guider le groupe à un rythme rapide, malgré l'urgence de la situation. Aragorn portait toujours Azraël, son regard scrutant les alentours avec une vigilance accrue. Les hobbits suivaient, leur fatigue évidente mais contenue par une détermination farouche.
Azraël, pour sa part, sombrait et émergeait par intermittence d'un état semi-conscient. À plusieurs reprises, il marmonna des mots confus. À un moment, sa main saisit faiblement la tunique d'Aragorn.
« … Ne… me laissez pas… dans l'ombre… » murmura-t-il, sa voix rauque presque inaudible.
Aragorn se pencha légèrement pour parler à l'homme, son ton aussi apaisant que possible. « Nous ne vous laisserons pas. Vous êtes en sécurité. Je vous le promets. »
Elladan, qui marchait à côté de lui, observa la scène avec une expression indéchiffrable. « Il lutte, » remarqua-t-il doucement.
Aragorn hocha la tête. « Oui. Et c'est ce qui le maintiendra en vie. Mais chaque pas est une bataille pour lui. »
Après plusieurs heures de marche, Aragorn ordonna une halte. Malgré leur avance, il voyait les hobbits peiner à suivre le rythme. Sam s'effondra presque contre un tronc d'arbre, essuyant son front avec sa manche.
« Juste… une minute, » haleta-t-il.
Aragorn posa Azraël avec précaution sur un lit de mousse, s'accroupissant immédiatement pour vérifier ses blessures. Les bandages improvisés étaient maintenant imbibés de sang, et la fièvre continuait de ravager son corps.
« Elrohir, donnez-moi de l'eau, » ordonna-t-il.
Elrohir s'exécuta rapidement. Aragorn humidifia un morceau de tissu et le pressa contre le front d'Azraël, espérant réduire un tant soit peu la chaleur. L'homme frémit à ce contact, ouvrant brièvement des yeux vitreux.
« … Où… suis-je… ? » balbutia-t-il, sa voix déformée par la douleur et l'épuisement.
« Vous êtes presque à Foncombe, » répondit Aragorn calmement. « Restez tranquille. Nous y arriverons bientôt. »
Mais Azraël, délirant, secoua la tête faiblement. « Non… les ombres… elles viennent… vous ne comprenez pas… »
Frodon, qui s'était rapproché, regarda Aragorn avec anxiété. « Il parle encore des ombres. Vous pensez que c'est un souvenir ? »
Aragorn soupira, ajustant la couverture sur les épaules d'Azraël. « Peut-être. Ou peut-être que sa fièvre le pousse à confondre le passé et le présent. Quoi qu'il en soit, il doit être apaisé. »
Alors que l'aube approchait, les lumières de Foncombe commencèrent à percer entre les arbres. Aragorn sentit un poids se lever de sa poitrine en apercevant la vallée illuminée.
« Nous y sommes presque, » dit-il aux hobbits, leur adressant un sourire rassurant.
Pippin trébucha presque de soulagement. « Enfin… Je pensais que mes jambes allaient se détacher… »
Sam, toujours altruiste, jeta un regard inquiet vers Azraël. « Est-ce qu'il tiendra jusque-là ? »
Aragorn, bien qu'épuisé, serra légèrement Azraël contre lui. « Il tiendra. Je m'en assurerai. »
En atteignant les portes de Foncombe, un groupe d'elfes les attendait déjà, ayant été prévenus par Elrohir et Elladan. Parmi eux se trouvait Elrond lui-même, dont le visage noble exprimait une inquiétude mesurée.
« Aragorn, » salua-t-il, son regard se posant immédiatement sur Azraël. « Apportez-le ici. Nous allons nous occuper de lui. »
Aragorn traversa la distance qui les séparait et déposa Azraël sur une civière préparée par les elfes. Alors qu'ils transportaient le blessé vers l'intérieur, Aragorn posa une main sur l'épaule de Frodon.
« Nous avons réussi, » dit-il doucement.
Frodon, les yeux brillants de fatigue et d'émotion, hocha la tête. « Oui… mais cela semblait presque impossible. »
Aragorn regarda Azraël disparaître à l'intérieur, son cœur lourd malgré la réussite. Il savait que le combat pour la vie d'Azraël n'était pas encore terminé.
Les heures s'étiraient dans une attente lourde. Aragorn et les hobbits étaient assis dans un petit salon éclairé par la lumière douce des lampes elfiques. Les fauteuils richement sculptés, les tapis moelleux et les senteurs apaisantes de la vallée n'apportaient qu'un faible réconfort au groupe.
Sam était assis sur le bord de son siège, tripotant son chapeau entre ses mains calleuses. Merry et Pippin, d'ordinaire bavards, étaient silencieux, les yeux baissés vers le sol. Frodon regardait fixement la porte, son visage pâle marqué par la fatigue et une angoisse palpable.
Aragorn, de son côté, restait debout près de la fenêtre, les bras croisés. Sa silhouette rigide trahissait l'agitation intérieure qu'il essayait de contenir. Ses doigts tapotaient distraitement le manche de son épée, un geste nerveux qu'il n'avait pas conscience de faire.
« Vous pensez qu'il va s'en sortir ? » demanda doucement Frodon, brisant le silence.
Aragorn détourna son regard de la fenêtre et observa les hobbits. Ils avaient tous l'air si jeunes, si vulnérables dans cet instant de répit incertain. Il inspira profondément avant de répondre.
« Si quelqu'un peut le sauver, c'est Elrond, » dit-il, sa voix grave mais empreinte d'assurance.
« Il avait l'air si mal, » murmura Sam, son regard inquiet. « J'ai jamais vu quelqu'un trembler comme ça… Et tout ce sang… »
« Nous avons fait ce que nous pouvions, » répondit Aragorn. Mais à l'intérieur, une part de lui-même ne pouvait s'empêcher de douter. Il aurait voulu faire plus, courir encore plus vite, arrêter le temps pour arracher Azraël aux griffes de la mort.
Le silence retomba, alourdi par l'attente. Les minutes se transformèrent en heures, chaque tic-tac du temps semblant étirer leurs nerfs au point de rupture.
Enfin, la porte s'ouvrit doucement, et Elrond entra. Sa démarche était calme, mais son visage portait une gravité qui fit immédiatement bondir le cœur d'Aragorn.
« Seigneur Elrond ! » s'écria Frodon, se levant précipitamment.
Elrond leva une main pour calmer leur excitation. « Rassurez-vous, » dit-il d'une voix apaisante. « Le blessé est hors de danger. »
Un soupir collectif de soulagement parcourut la pièce. Sam posa une main sur sa poitrine comme pour calmer son cœur, tandis que Merry et Pippin échangeaient un regard soulagé.
« Il a eu de la chance, » poursuivit Elrond. « Les blessures qu'il a subies étaient graves, et la fièvre aurait pu l'emporter si vous aviez tardé davantage. Mais il est fort. Il récupérera, avec du temps et du repos. »
Aragorn ferma brièvement les yeux, un poids immense s'envolant de ses épaules. Il hocha la tête, mais son soulagement fut rapidement tempéré par une pensée plus sombre.
« Vous avez dit qu'il est hors de danger, » intervint-il, ses yeux se fixant sur Elrond. « Mais qu'en est-il des alentours ? Avez-vous eu des nouvelles des éclaireurs ? »
Elrond hésita une fraction de seconde avant de répondre. « Oui. Nos éclaireurs ont repéré des Nazgûls. Ils rôdent dans la forêt aux abords de la vallée. »
Un silence glacial tomba sur le groupe. Les hobbits échangèrent des regards terrifiés, et Frodon serra instinctivement la poche où l'Anneau était dissimulé.
« Les… les ombres, » murmura-t-il. « C'est ça. Azraël parlait des ombres. »
Aragorn grogna, passant une main sur son visage fatigué. « Cela fait sens. Quand nous l'avons trouvé, il disait être poursuivi par des bêtes. Mais ces bêtes étaient mortes. J'ai cru que c'était un délire dû à la fièvre… mais maintenant… »
« Il a dû croiser les Nazgûls en fuyant, » conclut Elrond. « Son esprit, déjà affaibli, a confondu réalité et hallucination. »
« Et pourtant, il avait raison, » répondit Aragorn, la voix grave. Il regarda les hobbits avec une expression de regret. « Nous leur avons apporté ce danger. Les Nazgûls nous traquent depuis Bree. Nous avons attiré leur attention. Et maintenant, même cet homme, qui n'a rien à voir avec nous, a failli mourir à cause de notre présence. »
« Ce n'est pas votre faute, » intervint Elrond, posant une main sur l'épaule d'Aragorn. « Les Nazgûls cherchent l'Anneau. Leur présence ici était inévitable. Mais Foncombe est protégée. Ils ne peuvent pas entrer. Vous êtes en sécurité ici. »
Malgré les paroles rassurantes d'Elrond, Aragorn ne put s'empêcher de ressentir un pincement de culpabilité. Les hobbits baissèrent les yeux, chacun portant sa part de ce fardeau invisible.
Après un moment de silence, Elrond se redressa légèrement. « Vous pouvez aller le voir, si vous le souhaitez. Il est encore faible et endormi, mais votre présence pourrait l'apaiser. »
Les hobbits hochèrent vigoureusement la tête, impatients de voir leur compagnon d'infortune. Mais alors qu'ils se dirigeaient vers la porte, Elrond retint Aragorn d'un geste discret.
« Une dernière chose, » murmura-t-il à voix basse. « Arwen a demandé à vous voir. Elle vous attend dans le jardin. »
Aragorn se figea, son cœur bondissant à l'évocation du nom de celle qu'il aimait. L'idée de revoir Arwen après tant de temps éveillait en lui un tourbillon d'émotions : la joie, le désir, mais aussi une pointe d'appréhension.
« Merci, » répondit-il enfin, la voix rauque.
Elrond inclina la tête et s'éloigna, laissant Aragorn seul avec ses pensées.
Aragorn resta immobile un moment, les yeux fixés sur le sol. Il sentit une lutte intérieure monter en lui. Arwen l'attendait, et chaque fibre de son être lui criait d'aller la rejoindre, de retrouver la chaleur de son sourire et la douceur de sa voix. Mais en même temps, une autre image s'imposait à son esprit : celle d'Azraël, étendu et vulnérable, luttant pour sa vie.
Pourquoi était-il si troublé ? Pourquoi sentait-il une urgence presque irrépressible d'aller voir cet homme, un étranger qu'il ne connaissait que depuis quelques jours ?
Il inspira profondément, cherchant à apaiser son esprit. « Arwen comprendra, » murmura-t-il pour lui-même.
Sans un regard en arrière, il suivit les hobbits, son cœur décidé mais encore lourd de confusion.
Quand ils entrèrent dans la pièce où Azraël reposait, une vague de calme les enveloppa. La lumière dorée du soleil filtrant à travers les rideaux baignait la pièce d'une chaleur apaisante. Azraël était allongé sur un lit, son visage encore marqué par la pâleur de la fièvre, mais son souffle était plus régulier.
Les hobbits s'approchèrent timidement. Frodon posa une main légère sur le bras d'Azraël. « Il a l'air mieux… » murmura-t-il, comme pour ne pas briser la tranquillité.
Aragorn resta en arrière un moment, observant l'homme allongé. Il remarqua pour la première fois les nombreuses cicatrices anciennes qui marquaient ses bras et son cou, un témoignage silencieux d'un passé difficile.
« Vous avez beaucoup enduré, » murmura Aragorn à voix basse.
Une vague de compassion le traversa, accompagnée d'un étrange sentiment de responsabilité. Peut-être était-ce parce qu'il voyait en Azraël une partie de lui-même : un homme marqué par les épreuves, mais toujours debout.
Alors qu'Aragorn s'approchait enfin, Azraël ouvrit légèrement les yeux. Sa voix rauque brisa le silence.
« Vous êtes… encore là… ? »
Aragorn s'agenouilla près du lit. « Oui. Nous sommes là. Vous êtes en sécurité. »
Azraël hocha faiblement la tête, un soupçon de soulagement passant sur son visage. « Je pensais… que c'était fini… »
« Pas encore, » répondit Aragorn avec un sourire faint. « Vous avez encore beaucoup à faire. »
Azraël ferma les yeux, sombrant de nouveau dans un sommeil réparateur, tandis qu'Aragorn restait à ses côtés, veillant une fois de plus.
En premier lieu j'espère sincèrement que vous avez appréciez ce premier chapitre.
Ensuite je vais juste donner une légère chronologie du chapitre car je comprend qu'avec les coupures entre les scènes cela puissent être compliquer. Entre la rencontre du groupe avec Azraël et la fin du chapitre il se passe 4 jours et demi. Ils reste à la tour deux nuit et une journée. Partent à l'aube et voyage durant 2 jours. Le trajet de la frontière jusqu'à Foncombe dure toute la nuit. Ils arrive à l'aube du 4 ème jours et attende plusieurs heures pour le voir.
J'espère que c'est un peu plus claire.
Merci aux personnes qui ont lu ce premier chapitre. Si vous voulez laissez une review vous pouvez, ça pourrait me permettre de savoir si je dois expliquer ou décrire certaines choses pour le prochain chapitre.
Bonne journée/soirée.
