Partie IV: Le calme avant la tempête

Chapitre 36: «L'Ami»

Comme c'était approprié que sa «mère» soit celle qui le punirait. Du moins, ce fut ce que pensa Naegi quand Tsumiki entra dans la pièce. Il fit de son mieux pour se composer un visage farouche, et ses membres se raidirent, prêts. Il avait vu personnellement ce dont étaient capables les membres du Désespoir Ultime quand ils se sentaient rancuniers. La manière dont ils répondraient à sa tentative d'évasion allait être...

Tsumiki se pencha sur lui et entreprit de défaire les sangles.

Oh.

Même quand toutes furent retirées, il ne bougea pas, suspicieux. Ce ne fut que lorsque Tsumiki commença à tirer sur ses poignets et à les détacher qu'il osa croire que c'était réel. Une fois qu'ils furent libres, il leva ses bras devant lui, laissant respirer la peau irritée. Il ne vit même pas les menottes avant que Tsumiki n'en ait refermé une extrémité sur la rambarde du lit, puis lui ait attrapé le bras.

«Je suis désolée!» s'exclama-t-elle en claquant la seconde autour de son poignet. «Mais tu as vraiment fait peur à tout le monde et ils sont très inquiets. On veut t... te garder en observation pendant quelques jours.»

Bien sûr. Il se laissa retomber en arrière, résigné. Il ne se donna même pas la peine de tenter de se libérer des menottes.

«On t'en a donné des rembourrées mais, hum, n'essaie pas de trop tirer dessus. Elles risqueraient de s'enfoncer dans ta peau.

-Génial», asséna-t-il d'un ton monotone.

Il fixa le plafond. Quels merveilleux motifs tachetés et craquelés ils avaient là. Il fut tenté de se détourner de Tsumiki, se rouler en boule, fermer les yeux et tout simplement ne plus exister pendant un moment, mais la portée des menottes était insuffisante pour le laisser en faire ainsi. Alors il resta allongé là, ignorant résolument l'Infirmière à ses côtés, sans penser ni rien ressentir.

Du moins jusqu'à ce qu'il l'entende pleurer.

«Mikan?»

Tsumiki renifla bruyamment. «Désolée! Je sais... que tout est de ma faute! C'est à cause de moi que tu t'es enfui!»

D'où venait donc cette logique? Naegi se redressa, totalement perdu concernant ce qui lui causait de s'effondrer devant lui.

«Mikan, de quoi tu parles?

-Komaeda-kun nous a raconté, dit-elle et pendant un moment, son cœur s'arrêta. Tu as paniqué et tu t'es enfui parce que tu commençais récemment à voir tout ça comme un kidnapping. Et... et ces derniers jours, tu passais la plupart de ton temps avec Komaeda-kun et moi ; mais tu étais avec Komaeda-kun depuis le début, alors ça doit être moi...»

Il faillit émettre une remarque à propos de son choix du mot «récemment», mais ses sanglots reprirent. Ils n'avaient pas l'intensité de la plainte dont il avait été témoin devant le corps d'Enoshima, mais c'étaient les sons étouffés de quelqu'un tentant désespérément de se contrôler. Entendre ça lui brisait le cœur.

«Je suis désolée, je suis désolée! Je sais que je ne suis pas assez bien. Peu importe à quel point j'essaie, je ne suis jamais assez bien!

-Mikan!» Il tenta de se relever, mais les menottes lui mordirent le poignet et l'obligèrent à rester allongé. «C'est faux. Ce n'était pas ta faute!

-S... si. Je le sais.» Enserrée dans ses bras, Tsumiki s'enfonça les dents dans sa lèvre inférieure jusqu'à ce qu'il vit du sang. «Je ne suis jamais assez bien. Je suis inutile. Tout le monde me déteste parce que je suis tellement dégoûtante. C'est pour ça qu'ils... c'est pour ça que personne...

-Arrête!» cria-t-il. Il ne pouvait pas le supporter, surtout à la suite de cette journée. «Arrête de dire ça. Tu n'es pas inutile!»

Ses yeux tourbillonnaient. «Si! Je le sais. Je suis inutile, je suis inutile...»

Il... il n'en pouvait plus. Pas aujourd'hui. Pas après tout ce qui s'était passé.

«Mikan, tu n'es pas inutile!»

Il attrapa Tsumiki par le col et tira. Elle s'interrompit net. Leurs têtes fusèrent l'une vers l'autre, et manquèrent entrer en collision. Les yeux de Tsumiki étaient immenses et choqués par l'agression inattendue. Naegi maintint sa prise en haletant.

«Tu n'es pas inutile, siffla-t-il. Tu te souviens de qui a diagnostiqué ma malnutrition?

-Ce n'était pas... Je...

-Si. C'était toi.» Il déglutit avec peine, cherchant son visage. Comment pouvait-il lui faire voir? Comment pouvait-il lui faire comprendre? «Même avant que tu n'en sois sûre, tu as dit à Komaeda-kun que je devais aller à l'infirmerie. Tu t'en souviens pas?

-Ça ne...

-Si! Sans toi et ton attention, si tu n'avais pas été constamment là à m'apporter mes repas et à t'assurer que je mange, je serais encore en train de me laisser m'affamer. J'avais déjà perdu cinq kilos quand tu es passée à l'action. Combien tu crois que j'aurais perdu en plus avant que quelqu'un d'autre ne remarque que quelque chose n'allait pas?»

Ses yeux étaient encore embués. «Komaeda-kun...

-Non. Il ne voulait pas m'emmener à l'infirmerie, tu te souviens? Il ne savait pas que quelque chose n'allait pas. Il allait faire empirer les choses.» Sa prise sur son col trembla alors qu'il se retenait de la secouer. «Tu ne vois pas? C'était juste toi. Tu m'as aidé. Tu m'as protégé. Personne d'autre. Tu n'es pas inutile!

-M... Makoto...

-Juste... s'il te plait, arrête de dire ce genre de choses sur toi. S'il te plaît.»

Ah, maintenant c'était à son tour d'avoir les larmes aux yeux. Il les essuya d'un revers de main, avant de reprendre la parole.

«Mikan, tu n'es pas l'horrible personne que tu dis être. Tu es incroyable et intelligente et attentionnée... Je ne comprends pas que tu ne le vois pas.» Il repoussa un sanglot. «Je... je veux juste que tu comprennes. Tu es une personne géniale. Tu n'es pas une tocarde, et je veux que tu arrêtes de dire ça. S'il te plait

Il y eut un long silence. Tsumiki leva la main pour repousser doucement les siennes.

«Makoto... tu es une personne très gentille. Tu as toujours été beaucoup plus g... gentil avec moi que je le mérite.»

Il ravala un cri de frustration. In extremis, car Tsumiki n'avait pas fini.

«Mais si ça t'embête à ce point, je... je vais essayer d'arrêter de parler de moi comme ça.»

Il la regarda, guettant le moment où elle ferait marche arrière. Quand elle n'en fit rien, il dit avec sidération:

«Vraiment?»

Elle hocha la tête. «Oui. Mais il y a quelque chose que je veux te demander, aussi...»

Il s'efforça de garder une voix calme. «Qu'est-ce que c'est?»

Tsumiki déglutit. «La prochaine fois que tu te sens aussi chamboulé que tout à l'heure, je veux que tu viennes m'en parler, d'accord? T... tu ne devrais pas avoir à gérer ces sentiments tout seul.

-... D'accord. Je pense que je peux faire ça.

-Merci.» Elle l'embrassa sur le front. «Je... je m... m'inquiète beaucoup pour toi. Tu es très important pour moi.

-Désolé.

-C'est bon. Du moment que tu te sentes mieux maintenant.»

Les menottes n'offraient guère de marge de manœuvre, mais il parvint quand même à se rapprocher assez de Mikan pour poser sa tête sur son épaule. Elle passa ses doigts dans ses cheveux comme un peigne, démêlant les nœuds et mèches enchevêtrées obtenus lors de sa fuite effrénée. Dans sa barbe, elle fredonnait une berceuse. Il n'avait pas envie de dormir, mais il ferma quand même les yeux et écouta.

«Est-ce que les autres m'en veulent?

-Personne ne t'en veut, promit Tsumiki. Tout le monde s'inquiète. Ils ne s'attendaient pas à quelque chose comme ça. Komaeda-kun pense que c'est sa faute.

-Ce n'est pas sa faute», dit Naegi. (Il ne disait ça que par instinct de conservation, n'est-ce pas? N'est-ce pas?) «C'est la mienne. J'ai perdu de vue... des choses.

-Chhh, ne dis pas ça.» Ses ongles effleurèrent son cuir chevelu. C'était agréable. «Ce n'est pas ta faute. Nous savons que nous avons été distants. Ce n'est pas étonnant que tu te sentes seul. Mais nous allons faire plus d'efforts pour toi, d'accord?

-Vous n'avez pas besoin de faire ça. Je ...»

Ma place n'est pas ici.

«C'est notre volonté, répliqua Mikan. Personne ne veut que tu penses qu'on ne tient pas à toi. Tout le monde t'aime très, très fort.»

(Qu'est-ce que ça voulait dire, aimer? Qu'est-ce que ça signifiait encore?)

«Je t'ai apporté ton lapin.»

Naegi accepta avec joie l'animal en peluche et le serra fort contre sa poitrine. Sa joue frotta contre le tissu usé.

«Mikan... est-ce que je peux avoir du chocolat chaud?»


«Où est Komaeda-kun?»

La question de Naegi résonna dans l'infirmerie comme si elle était déserte. Tsumiki leva la tête de là où elle avait posé les mugs vides et revint vers lui.

«Euh, je ne sais pas. Il est peut-être toujours avec les autres.

-Ils laissent Komaeda-kun passer du temps avec eux», releva-t-il surpris. D'habitude, les autres membres du Désespoir Ultime étaient plutôt méchants avec le Chanceux.

«Oui, ils parlaient... des événements récents.»

Oh. C'était compréhensible. Komaeda avait été avec lui avant qu'il n'essaie de s'enfuir, c'était donc normal que le Désespoir Ultime l'interroge. Ils voudraient probablement comprendre quoi exactement l'avait mis dans tous ses états, et comment s'assurer que ça ne se reproduise pas...

Non.

Non.

Non, non, non!

«M... Mikan...» Sa voix tremblait tant qu'il dut s'y prendre à deux fois. «Qu'est-ce que Komaeda-kun vous a dit?»

Tsumiki détourna les yeux, nerveuse. «Que vous vous étiez disputés. Et que tu... tu étais troublé et tu as pensé qu'on t'avait kidnappé. Après, tu as fait une c... crise de panique et Komaeda-kun t'a aidé, mais après il est parti et tu as rechuté...

-C'est tout? dit-il à mi-voix.

-Euh, c'est l'essentiel?»

Il serrait le lapin avec tant de force que si sa main avait été posée sur l'œil, il l'aurait brisé. Alors, c'était ce qui avait été dit. Komaeda avait porté le chapeau. Il n'avait pas dévoilé que Naegi était entré en contact avec sa sœur. Le secret était sauf. Seuls lui et Komaeda étaient au courant.

… Mais ça ne signifiait pas forcément que Komaru était protégée.

«Tu es sûre que Komaeda-kun est avec eux? s'enquit Naegi. Tu es là depuis un moment. Peut-être qu'ils ont fini de parler et qu'il est parti ailleurs?

-Tu te demandes pourquoi il n'est pas venu te voir? demanda Tsumiki. Oh, il n'est pas en colère contre toi, chéri. Il s'en veut à lui-même et a besoin d'un peu de temps seul.

-Mais... mais qu'est-ce qu'il fait? Komaeda-kun... il... je ne peux pas...»

Il ne pouvait rien dire de plus. Il ne pouvait pas lui révéler pourquoi il devait absolument voir Komaeda. Si elle savait, elle s'en prendrait à Komaru. Mais il devait voir Komaeda. Il devait s'assurer que le Chanceux n'était pas mécontent et ne ferait pas de mal à...

«Tu peux cesser de t'inquiéter. Il ne pense pas à ça.»

Tsumiki sursauta. «Ah! Kamukura-kun!»

Kamukura se tenait devant la table où Tsumiki avait déposé les mugs. Ni l'un ni l'autre ne l'avait entendu entrer, mais ça n'avait rien d'inhabituel. Il fixait Naegi de ses yeux rouges en répétant ce qu'il venait d'annoncer.

Naegi hocha la tête et se laissa aller dans son lit. Si Kamukura affirmait que Komaeda ne ferait pas de mal à Komaru, alors il lui faisait confiance.

«E... est-ce qu'on peut faire quelque chose pour toi?» demanda Tsumiki. Elle lâcha un petit cri apeuré quand Kamukura se contenta de la regarder.

«Ça fait un moment que je ne t'ai pas vu hors de ta chambre», dit Naegi avec désinvolture. Pour toute réponse, Kamukura le fixa à son tour.

«M... mais il n'y a rien de mal à ça!» ajouta rapidement Tsumiki. Elle s'employa à l'obliger à rester allongé, ostensiblement pour le border – ce faisant, soustrayant comme par hasard Naegi au champ de vision de Kamukura. «Makoto ne faisait qu'une observation.

-Mikan...! s'écria Naegi quand il fut de nouveau repoussé sur son oreiller.

-... Je n'en ai vraiment rien à faire», dit Kamukura.

Tandis que Tsumiki se tenait là nerveusement, Naegi demanda: «Je peux m'assoir maintenant?»

Apparemment, oui, car elle le laissa faire sans trop d'histoires. Il demanda à Kamukura: «Qu'est-ce que tu fais là?»

(En arrière-plan, Tsumiki gémit de détresse).

En guise de réponse, Kamukura jeta un coup d'œil à une horloge. «Vous devriez rejoindre le hall d'entrée. Il sera bientôt là.

-Qui? voulut savoir Naegi.

-Ah, un autre membre de la famille, rit Mikan. Et un ami pour toi!»

Alors voilà venu le moment fatidique. Naegi déglutit, et raffermit mentalement son courage. Ça ne devait pas être si horrible, non? Ce n'était pas comme si ce serait quelqu'un qui lui ferait du mal. Le Désespoir Ultime ne le permettrait pas. Ils ne laisseraient personne lui faire du mal.

(Mais seulement physiquement. Mentalement était une tout autre histoire).

Il crut presque que Tsumiki comptait l'obliger à utiliser la chaise roulante, mais après qu'elle eut ouvert les menottes, elle le prit par la main et commença à le mener hors de l'infirmerie. Juste avant que la porte ne se referme derrière eux, Naegi se retourna. Le jeune homme aux longs cheveux n'avait pas bougé de l'endroit précis où Naegi l'avait vu se tenir précédemment. Il les observait, sans faire mine de les suivre. Mais qui pouvait dire ce qu'il avait l'intention de faire.

«Alors, tenta Naegi alors qu'ils faisaient route, à quoi ressemble cet ami?

-Oh, ne t'inquiète pas. Tu vas l'aimer, dit Mikan d'un ton rassurant qui n'était pas vraiment rassurant. Il est juste pour toi!

-Juste pour moi, répéta Naegi d'une petite voix.

-Il est très intelligent! Enfin, en considérant que... mais je suis sûre que ce sera très amusant de jouer avec lui et de le câliner. Il tiendra en respect ces méchants membres de la Fondation du Futur, aussi!

-Tu peux me dire qui c'est?»

Tsumiki porta un doigt à ses lèvres. «C'est une surprise!»

Ça ne le réconforta pas. Il voulait se glisser dans un coin et y disparaître.

Quand ils arrivèrent dans le hall d'entrée, ils n'étaient pas seuls. Pekoyama et Kuzuryu se tenaient devant la porte ouverte, et le Yakuza semblait très impatient, tapant du pied et croisant les bras. Quand les pas de Naegi et de Tsumiki parvinrent à ses oreilles, Pekoyama plaça sa main sur le pommeau de son épée, les yeux rivés sur eux, ne se détendant que lorsqu'elle constata qu'il n'y avait aucun danger. En dix minutes, le reste du Désespoir Ultime avait rejoint les lieux.

Enfin, presque tout le Désespoir Ultime.

«Où est Komaeda-kun? demanda Naegi.

-Je ne sais pas... commença Tsumiki.

-Nagito-chan a dit qu'il avait quelque chose à faire tout à l'heure, intervint Mioda. C'est comme s'il avait disparu!»

Si Kamukura ne lui avait pas assuré plus tôt que Komaeda n'allait pas s'en prendre à sa sœur, Naegi en aurait sans doute tiré la pire des conclusions possibles.

Un talkie-walkie grésilla à la taille de Soda. Le Mécanicien le porta à son oreille et après un moment d'écoute, fit une annonce:

«Très bien, on dirait que Tanaka-kun est entré dans la ville!»

Tanaka... c'était Tanaka Gundam, l'Eleveur Ultime, non? Un autre membre du Désespoir Ultime. Naegi attendit que Soda annonce qui l'accompagnait – cet ami qu'il était censé rencontrer – mais Soda garda le silence. Le Désespoir Ultime était-il à ce point déterminé à faire planer le mystère? Ou ne pensaient-ils simplement pas que cette autre personne valait la peine d'être mentionnée?

«… Komaeda-kun ne vient pas? répéta Naegi.

-Je ne sais pas», répondit Tsumiki.

Quelques minutes supplémentaires défilèrent. Kamukura se montra, mais demeura au fond de la pièce.

Puis, au centre de l'entrée, une silhouette apparut.

La silhouette de Tanaka Gundham était effrayante. Sa longue veste noire semblait aspirer toute lumière autour de lui, alors même que sa peau d'une pâleur fantomatique émettait la sienne. Une cicatrice grise était tatouée de manière à lui traverser l'œil gauche, qui demeurait clos alors qu'il avançait à grandes enjambées confiantes. Au début, Naegi pensa simplement que Tanaka portait une écharpe duveteuse ; bien qu'il vit en effet une écharpe violette (la seule touche de couleur dans ce spectacle monochrome), il réalisa que le duvet qu'il avait cru deviner n'était pas artificiel. Une sorte d'animal s'était enroulé autour du cou de Tanaka, sifflant en enfonçant ses griffes dans les cheveux noirs de son maître.

Bien que ses deux yeux soient clos, Tanaka parvint quand même à marcher jusqu'à Naegi. Puis, ses paupières s'ouvrirent, et la lueur rouge soudaine sembla l'aveugler temporairement. Avant qu'il ne puisse dire un mot, Tanaka s'agenouilla sur un genou, inclina la tête et étendit son bras d'un geste exagéré.

«Euh, bonjour?» dit Naegi.

Tanaka se releva sans un bruit. Il dominait Naegi de toute sa hauteur et Naegi se tortilla et recula contre Mikan alors que l'Eleveur l'examinait.

«Je m'appelle Naegi Makoto», dit-il. Il tendit maladroitement la main.

L'Eleveur n'accepta pas de lui serrer la main. A la place, Tanaka posa ses mains sur les épaules de Naegi et le regarda dans les yeux. A peine un moment plus tard, l'Eleveur ferma les yeux et un petit sourire se dessina sur ses lèvres. Tanaka hocha la tête sans s'adresser à quiconque en particulier, puis recula, apparemment satisfait.

«Tanaka-kun ne parle pas, lui chuchota Tsumiki. C'est son désespoir.

-Oh, désolé.

-Tu n'as pas à t'excuser, idiot! dit Tsumiki. Continue de lui parler. Ça le désespère de ne pas pouvoir répondre.»

Naegi était sur le point de dire quelque chose quand...

«Ah, je vois que Naegi-kun n'a pas encore rencontré son nouvel ami.

-Komaeda-kun!» Naegi fit volte-face, à deux doigts de se précipiter hors de la surveillance vigilante de Mikan et vers le Chanceux. Komaeda n'avait pas l'air différent de d'habitude. Naegi n'était pas sûr de pouvoir dire pourquoi il avait pensé que ce serait le cas.

Deux grosses mains s'abaissèrent soudain sur ses yeux. Il sentit plus qu'il n'entendit le rire de Nidai quand le Coach lança: «Ne regarde pas, Naegi-kun! On ne peut pas te laisser gâcher la surprise.»

Alors c'était le moment. Le moment de faire face aux conséquences. Il laissa Nidai le tourner, lui obéit quand il lui enjoignit de fermer les yeux, et apaisa son esprit même quand les autres rirent autour de lui. Les surprises ne signifiaient rien de bon. Il le savait. Mais il ne pouvait s'attarder sur ça maintenant. Il avait un public et c'était le moment d'entrer en scène.

Il ne sut combien de temps il attendit ainsi. Les autres avaient fini par se taire. Il crut entendre des bruissements et une respiration, mais qui auraient pu venir de n'importe qui. Les mains de quelqu'un reposaient sur ses épaules ; de par leur taille, il soupçonnait que c'étaient celles de Nidai.

(Etrangement, alors que ses yeux étaient clos, il pouvait sentir exactement où se trouvait Komaeda).

Un air chaud et humide le frappa soudain au visage, accompagné d'une odeur fétide.

«Ok, ouvre les yeux!» ordonna Nidai.

Naegi s'exécuta.

Il cligna des yeux.

Il cilla encore, incapable de croire ce qu'il voyait.

«C... c'est... c'est...

-Est-ce qu'il te plait?» demanda Tsumiki avec anxiété.

Et Naegi retrouva sa voix.

«Vous m'avez apporté un ours