Chapitre 33: La Musicienne

«… vous étiez un tremplin vers l'espoir, et ce n'est nullement une chose dont avoir honte.»

Naegi ouvrit les yeux. Le papier froissé bruissa dans sa main quand ses bras retombèrent. Derrière lui, Komaeda était assis sur son lit, le visage plissé reflétant ses réflexions. Quand Naegi lui rendit l'oraison funèbre, il ne paraissait pas particulièrement impressionné.

«Pas assez optimiste», marmonna Komaeda dans sa barbe. Naegi fit de son mieux pour l'ignorer, même si l'anxiété grimpait en lui.

La soirée était bien avancée. Réciter l'oraison funèbre semblait être un nouveau rituel que Komaeda avait décidé de mettre en place, comme pour remplacer le Notre Père. Approprié, supposait-il. Cela devait sans aucun doute avoir trouvé un écho en Komaeda.

«Prêt à faire dodo? demanda soudain Komaeda, inclinant la tête d'un air curieux.

-Je suppose... Komaeda-kun, est-ce que je peux te demander quelque chose?

-Bien sûr. Que puis-je faire pour toi?

-Est-ce que je peux...?» Il dut prendre un moment pour se ressaisir. La dernière fois qu'il s'était senti aussi excité... remontait à loin. «Est-ce que je pourrais parler à ma sœur?»

… Komaeda n'aurait pas dû garder le silence si longtemps.

«Tu sais, Naegi-kun. Je me suis posé la question.

-Ah oui? dit-il avec impatience en se dressant sur ses orteils dans son excitation.

-… Je commence à me demander si ce n'était pas une erreur.»

Ses talons retombèrent sur le tapis avec un bruit sourd.

«Ce n'était pas une erreur!» protesta-t-il. Il avança de quelques pas chancelants et regarda Komaeda dans les yeux. Comment lui faire partager son point de vue? «Tu avais raison. J'ai ressenti tellement d'espoir en la voyant. J'aimerais vraiment ressentir à nouveau cet espoir!

-Ce n'est qu'une solution temporaire, Naegi-kun, et je ne suis pas sûr que ce soit bon pour ton développement sur le long terme. Depuis que tu l'as vue, tu me parais distrait.

-... Comme distrait par l'espoir? tenta-t-il avec l'énergie du désespoir.

-Non.» Komaeda se leva, le dominant de toute sa hauteur. «Ton esprit semble être parti si loin maintenant. Tu n'es pas du tout concentré. Comme cet éloge que tu viens de lire. On n'aurait pas dit que tu y mettais tout ton cœur.»

C'était la vérité, évidemment. Mais ça n'avait rien à voir avec Komaru, et de plus, Naegi soupçonnait que Komaeda s'en doutait lui aussi. Ce n'était sans doute qu'une excuse toute trouvée pour lui.

Ah, alors c'était ça la contrepartie. Au fond de lui, il s'était toujours demandé si Komaeda n'avait pas une arrière-pensée en le laissant voir sa sœur. Et la réponse était, sans surprise, oui. Komaru était la carotte qu'il offrait en opposition du bâton.

Et le pire, c'était que Naegi savait que ça fonctionnerait.

«Alors, je me trompe?» demanda Komaeda.

Il était inutile de mentir.

«Non», dit Naegi à mi-voix.

Komaeda l'observa avec des yeux calculateurs, un sourire malin se dessinant sur ses lèvres. «Alors penses-tu que tu mérites de lui parler?»

Pourquoi? Pourquoi poser une pareille question? Ce n'était même pas une question. Komaeda lui avait déjà décrété quelle réponse Naegi devait donner. Ils répétaient le même schéma encore et encore. Komaeda savait déjà. Naegi savait ce qu'il était censé dire. C'était tellement redondant.

(Il en avait quand même mal au cœur).

«Non, dit-il d'une voix rauque. Je ne mérite pas de lui parler.»

Komaeda lui enfonça l'oraison dans la poitrine.

«Tu veux encore essayer?» demanda-t-il.

Il n'avait pas le choix. Que pouvait-il faire d'autre qu'essayer d'aider sa sœur?

Il lui était impossible d'injecter de l'enthousiasme dans sa voix, mais ça ne signifiait pas qu'il ne pouvait pas faire mieux. Il prit conscience de ses mots cette fois, parlant plus lentement et plus fort, prenant soin de ne pas penser vraiment ce qu'il disait. A la place, il imagina Komaru, ne cessa de se répéter mentalement la raison pour laquelle il devait faire ça. Ce n'était que des mots, n'est-ce pas? Komaeda était le seul ici à les entendre. Ils ne signifiaient rien.

Il termina son deuxième essai, conscient des yeux perçants de Komaeda dans son dos. Le silence paraissait s'étirer sans fin et Naegi dut se retenir d'harceler Komaeda pour avoir une réponse.

«Naegi-kun, viens.»

Komaeda s'éloigna et Naegi le suivit. Le Chanceux le mena... à la salle de bain? Naegi resta sur le seuil, totalement perplexe, jusqu'à ce que Komaeda tende la main vers lui et le tire devant le miroir.

«Je veux que tu te regardes quand tu lis, d'accord? ordonna Komaeda. Essaie encore une fois.»

Naegi jeta un coup d'œil à Komaeda, puis à son reflet (yeux sombres, lèvres gercées, la peau encore gonflée et rêche là où il avait été frappé avec la clé à molette). D'accord. Ce ne serait pas si différent, n'est-ce pas?

Il avait tort. Se tenir là, plonger son regard dans ses propres yeux alors que les mots se bousculaient hors de sa bouche leur donna un nouveau poids. Maintenant, il trouvait impossible d'ignorer ce qu'il disait. Les mots le piquaient comme un essaim d'abeilles et il trébuchait sur ses phrases. A deux reprises, il dut recommencer, la voix trop étranglée pour continuer, et Komaeda lui offrit généreusement un verre d'eau. La troisième fois, il parvint à terminer, avec l'impression qu'il venait de courir un marathon.

«C'était comment? croassa-t-il.

-Mieux, dit Komaeda. Mais pas encore suffisant. On recommencera demain.»

Cela lui fit l'effet d'une gifle. Naegi ferma les yeux. Komaru, je suis désolé...

Komaeda lui ébouriffa les cheveux. «Ne sois pas déçu. J'ai foi en toi. Je sais qu'un jour, tu me donneras exactement ce que je recherche.»


Se promener seul dans les couloirs était étrange (bien qu'il ne soit pas réellement seul. Un des robots ou des soldats lui emboîtait systématiquement le pas quand ils le surprenaient à vagabonder). Il ne cessait de jeter des coups d'œil par-dessus son épaule, convaincu que chaque courant d'air était le souffle de Komaeda sur sa nuque. Son cœur semblait battre plus doucement que d'habitude, comme s'il voulait l'aider à entendre les pas imminents de l'autre. Chaque ombre plus grande que sa taille exigeait une observation plus poussée, au cas où Komaeda s'y dissimulerait. Il trouvait ces précautions raisonnables. Komaeda avait déjà envahi une si grande partie de sa vie. Pourquoi ne devrait-il pas ouvrir l'œil?

Avec un peu de chance, dès qu'il aurait atteint sa destination, il pourrait baisser sa garde. Il y aurait quelqu'un d'autre là-bas, après tout. Et si le soldat l'emmenait dans la bonne direction, il savait exactement de qui il s'agirait. Le jour où était arrivé le corps d'Enoshima, il avait rencontré deux nouveaux membres du Désespoir Ultime et il devait avouer, au moins l'une d'entre elles l'intéressait. Mioda Ibuki avait une attitude complètement contraire à celle des autres membres du Désespoir Ultime qu'il avait vus. Elle semblait si gaie. Rien qui n'évoque le Désespoir.

Il devait enquêter davantage.

Le soldat s'arrêta devant l'épaisse porte en bois de l'auditorium. Si Naegi tendait l'oreille, il croyait pouvoir entendre les sons d'une guitare qui s'en échappaient. Il sourit ; il allait apparemment arriver pendant que la Musicienne Ultime répétait. Ce serait forcément incroyable!

Il ouvrit la porte...

… Dans quelle sorte d'enfer avait-il mis les pieds?

Toutes les lumières avaient été éteintes. A la place, des rangées de bougies traçaient les bords de la scène, illuminant la silhouette de Mioda Ibuki par en-dessous. Ses yeux rouges brillaient, débordant d'une lueur éclatante alors que ses doigts s'abattaient sur les cordes de sa guitare dont la tête faisait jaillir du feu. Le feu monta en spiralant haut dans les airs, s'effaçant en une cascade de flammèches et de braises qui en retombant formèrent un cercle autour de leur créatrice alors qu'elle tendait la main et s'emparait du microphone...

Oh mon dieu qu'est-ce que c'était que ça?

Ce devait être ça le langage du désespoir. Ou bien Mioda avait découvert la langue ancienne des démons. Un torrent de sons agressifs et abominables tomba de ses lèvres, paraissant jeter un voile noir autour d'elle. Naegi se plaqua les mains sur les oreilles. C'était trop. C'était trop fort. C'était trop horrible!

«...Hé, Makoto-chan! Personne n'avait dit à Ibuki qui tu viendrais la voir.»

Il n'entendit même pas Mioda lui parler. Il remarqua uniquement que ce son s'était arrêté, et il retira lentement les mains de ses oreilles.

«Euh, salut.» Parlait-il vraiment si bas, ou était-il juste devenu un peu sourd? «Je n'avais pas vu que tu étais occupée.

-Pas occupée, dit Mioda. Je répète! C'est ce que font les musiciens. Répéter, répéter, répéter. Tu devrais le savoir. T'étais pas super pote avec Sayaka-chan?»

Il en fut touché en plein cœur. Une sensation pas complètement désagréable – il ne s'était simplement pas attendu à ce qu'elle soit mentionnée.

«J'espère que oui», dit-il doucement. Leur histoire pendant le Killing Game ne s'était pas bien terminée, c'était le cas de le dire, mais il était sûr que les choses avaient été différentes avant que leurs souvenirs ne soient effacés.

Sur scène, Mioda fit la moue. «Sayaka-chan voulait jamais se produire avec moi. Elle disait que ma musique était trop forte pour son chant. Tu penses qu'elle aurait changé d'avis? Parce que maintenant, la musique d'Ibuki est ce que veulent tous les fans!»

Comme pour appuyer ses propos, Mioda gratta sa guitare et, derrière les bougies, une douzaine de geysers de confettis explosèrent dans les airs.

«Makoto-chan! s'écria-t-elle. Pourquoi tu restes planté là-bas? Le premier rang est ici. Oh, tu as décidé d'accepter l'offre d'Ibuki de jouer la batterie?

-Honnêtement, je voulais juste apprendre à te connaître un peu mieux», dit Naegi.

Mioda lui jeta un regard très étrange, comme un mélange de surprise et de confusion.

«Alors, Mikan-chan avait raison quand elle disait que t'étais mignon. Mais mignon comme un petit chiot... et c'est pas le type d'Ibuki.»

Maintenant, c'était au tour de Naegi de la regarder avec perplexité.

Une seconde.

Oh.

«C'est pas ce que je voulais dire! cria Naegi, écarlate. Je voulais dire d'une manière complètement platonique!»

Mioda soupira distinctement. «Oh, tant mieux. Ibuki a eu peur de devoir encore briser un cœur.

-Tu as beaucoup de soupirants? demanda Naegi, en se rapprochant de la scène.

-Oui oui. Tout le monde veut sortir avec le membre d'un groupe.» Ibuki inclina la tête de côté et ferma les yeux, souriant avec tendresse. «Mais Ibuki est pas trop intéressée par tout ça.»

Naegi s'arrêta au pied de la scène et dut lever les yeux vers Ibuki. De sa position, la lumière était étrange et sinistre ; il ne pouvait voir de son visage que l'arc de son cou, et ces yeux ardents.

«Mioda-san, qu'est-ce que tu fais exactement pour le Désespoir Ultime?»

Lesdits yeux s'illuminèrent. Mioda prit une profonde inspiration et ouvrit la bouche...

«Je joue!

-...C'est tout?

-Ouaip! Ibuki fait ce qu'Ibuki sait faire de mieux.»

Il ne comprenait pas. Ça n'avait rien de désespérant. Enfin, il supposait que la qualité de sa «musique» pouvait compter comme du désespoir, mais quand même. C'était à mille lieues des actes de Kuzuryu, ou de ce que faisait Tsumiki pendant ses spectacles.

«Qu'est-ce que tu veux dire exactement par jouer? insista-t-il.

-Je joue de la musique!» Elle gratta de nouveau sa guitare, mais cette fois, il n'y eut pas de confettis. «Parfois, Hiyoko-chan se joint à moi et elle danse, et l'audience part en délire!

-Et c'est comme ça que tu répands le désespoir?

-Hein?» A nouveau, Mioda parut perplexe. «Non, Ibuki joue de la musique pour tous ses fans merveilleux!»

Il sentait un décalage, là. Elle faisait partie du Désespoir Ultime. Elle devait participer d'une manière ou d'une autre. Et pourtant, elle ne paraissait pas comprendre de quoi il parlait. Comme si le concept lui était complètement inconnu.

«Mais tu joues des chansons qui parlent de poignarder ses amis en pleine figure. Pourquoi jouer ce genre de chose ?»

On aurait dit que Mioda peinait à comprendre, mais elle répondit quand même clairement.

«Parce que c'est ce qu'aiment les fans d'Ibuki.

-T'es sûre?»

-Ouaip. Ibuki le sait. Regarde.» Mioda s'échappa dans les coulisses. Quand elle revint, elle tenait ce qui semblait être un album. Avec un large sourire, elle s'accroupit au bord de la scène pour le lui montrer et l'ouvrit. Les deux pages étaient recouvertes par une série de photos de ce qu'il imagina être un de ses concerts. Elle avait l'air farouche ; ses cheveux volaient autour d'elle comme s'ils étaient animés. Elle portait des vêtements sombres, accentuant les reflets qui rebondissaient sur ses piercings. Sa guitare était noire et rouge, un instrument aux arêtes tranchantes. Aucun feu ne s'échappait de celle-là, mais sur une des photos, il pouvait voir des flammes sortir de terre. Saionji se trouvait également sur deux ou trois photos, toujours dansant dans les ombres. Les photos figeaient les scènes représentées, mais il y avait quelque chose d'hypnotisant dans la manière dont elle se tenait.

«Tu vois? Regarde combien de fans il y a.» Le doigt de Mioda passa sur la foule, dont tous portaient, remarqua-t-il, un casque Monokuma. «Ibuki n'avait jamais attiré de foule aussi grande, avant. Les gens... ils n'aimaient pas mes chansons. Ils disaient qu'elles étaient trop bruyantes, et qu'Ibuki devrait jouer de la musique «normale». Mais je ne peux pas faire ça, je ne veux pas jouer cette musique, et Ibuki joue avec son âme!»

Elle laissa tomber l'album entre les mains de Naegi. Ses doigts caressèrent les cordes de sa guitare, leur arrachant un accord qui résonna dans l'auditorium.

«Donc c'est pour ça qu'Ibuki joue des chansons de désespoir, parce que c'est là-dessus que s'accordent Ibuki et les fans!»

Ça paraissait toujours si innocent. Elle paraissait si innocente. Mais Naegi n'était pas dupe. Elle était membre du Désespoir Ultime, ce qui signifiait qu'elle ne pouvait pas l'être. Il y avait une ombre que Naegi n'avait pas encore aperçue. Il ne pouvait simplement pas comprendre laquelle.

«Mioda-san, est-ce que tu... Est-ce que tu tues des gens?»

Mioda rit. «Parfois, la musique d'Ibuki est si passionnément palpitante qu'ils tombent dans les pommes.»

S'évanouir, mais pas mourir. C'était une différence énorme, et il se doutait que Mioda le savait elle aussi. Si Mioda disait vrai, si elle se contentait de jouer de la musique et ne tuait pas, alors qu'était sa participation? Il devait bien y avoir une contribution de sa part. Il ne pensait pas que Kuzuryu la laisserait s'attarder dans le coin si ce n'était pas le cas.

Il ouvrit de nouveau l'album et posa les yeux sur une photographie. Mioda était au centre de la scène, tirant la langue alors qu'elle hurlait des paroles dans le microphone. La foule derrière elle paraissait une masse, une mer de têtes d'ours monochromes aux yeux rouges. Beaucoup d'entre eux, remarqua-t-il, alarmé, brandissaient des battes de baseball, des pieds-de-biche et d'autres armes au-dessus de leurs têtes. Près du bord de la scène, Saionji était en plein tournoiement, un rictus sournois sur le visage alors que son kimono se déployait autour d'elle...

«Mioda-san, à la fin de tes concerts, qu'est-ce que font tes fans?»

Mioda eut un large sourire. «Ils mettent en scène leurs moments favoris!»

Poignarde ton meilleur pote dans la figure, c'est génial.

Ah, il comprenait maintenant. Mais ce ne semblait pas être son cas. Tout comme Soda ne paraissait pas saisir la vraie horreur des casques Monokuma, elle paraissait incapable de comprendre le vrai objectif de ses performances.

«Mioda-san.» Il se laissa aller contre la scène, posant ses bras croisés sur les planches. «Tu dis que ce sont tes fans qui répandent le désespoir?

-Pas le désespoir, protesta Mioda. Ils propagent le message de la génialité de la musique d'Ibuki. En plus, ils lui donnent plein d'images cool à utiliser dans ses clips vidéo.»

Il leva les yeux vers elle et aborda le sujet sensible:

«Alors, tu t'en fiches d'encourager les gens à s'entretuer?

-Non. Non, non, non! Les amis d'Ibuki ne s'entretuent pas ; ils ne font que s'exprimer. Ils célèbrent leur passion pour sa musique. Ce n'est pas à Ibuki de leur dire ce qu'ils peuvent faire ou non. C'est... Ibuki veut que ses fans passent un bon moment. Elle veut... elle veut qu'ils s'amusent... Ibuki veut juste jouer de la musique.»

A chaque pause, son visage enjoué se décomposait un peu plus. Elle commença à bégayer lors de ses dernières phrases, comme un robot qui dysfonctionnait. Il ne pouvait pas encore voir les tourbillons de désespoir, mais s'il continuait, il savait qu'ils apparaîtraient.

«Mioda-san, tu pourrais pas juste jouer des chansons moins désespérantes? Comme ça, tu n'aurais plus à t'inquiéter de ce qu'ils pourraient faire.

-Je peux pas, dit Mioda. C'est pas ce qu'ils veulent. Les fans veulent du désespoir. Ibuki doit leur donner du désespoir!

-Non, ce n'est pas vrai, dit-il doucement. C'est toi la musicienne. Tu es celle qui mène le navire. Ce que tu décides fait loi. En plus, c'est le même style de musique, non? Tu changes juste les paroles. Je suis sûr qu'ils l'apprécieront toujours.

-Ils n'aiment que le désespoir, marmonna Mioda, l'air distante. Ils n'aimaient pas la musique d'Ibuki avant.

-Mioda-san...

-Tu te bouchais les oreilles», fit-elle remarquer.

Il n'était pas sûr de comment y répondre. C'était vrai ; il n'avait pas aimé ce qu'il avait entendu. A ce moment, en plus, il ne savait pas que ça parlait de désespoir. C'était juste... ça.

«Je sais, dit-il. Je suis désolé. Je ne m'y attendais pas. Je suis rarement allé à des concerts avant, et ils étaient assez différents de celui-là. Mais Mioda-san, si tu veux vraiment jouer quelque chose de différent un jour, je te promets d'écouter.

-Mais Makoto-chan n'aime pas ma musique.» Elle le fixait d'un air sérieux cette fois, presque renfrognée.

Il choisit ses mots avec soin. «Ce n'est pas ce que j'écoute d'habitude, mais ça ne me dérange pas. Du moment que c'est quelque chose que tu aimes... c'est le moins que je puisse faire. C'est à ça que servent les amis, n'est-ce pas?»

Mioda le regardait attentivement. Peut-être était-il juste optimiste, mais il avait l'impression qu'il avait un impact sur elle.

«Ibuki va y réfléchir, déclara-t-elle. Makoto-chan, tu devrais reculer, parce que ça va pééééééééétttttttttEEEEEEEEEEEERRRRRRRRRRRRRR!»

… Oui, ça semblait être une bonne idée, à présent.