Bien que Harry continuait de surveiller Malefoy de loin, il se montrait beaucoup plus discret, utilisant la carte du Maraudeur pour suivre ses déplacements.
Il avait noté que son rival de toujours semblait toujours aussi nerveux et les cernes sombres sous ses yeux ne diminuaient pas.
Puisqu'il était en retrait, il était également témoin de la façon dont les autres élèves de Poudlard le bousculaient ou l'injuriaient. Là où autrefois Malefoy aurait riposté sans hésitation, il courbait désormais l'échine, baissait la tête et s'éloignait sans un mot. Son manque de réponse encourageait ses agresseurs, qui ne se cachaient même plus, comme si l'issue de la guerre leur donnait tous les droits.
Harry ne pouvait rien faire ou dire sans attirer l'attention de Malefoy, mais ces comportements le faisaient bouillir de rage.
Hermione aborda le sujet un midi, alors qu'ils mangeaient tous dans la grande salle. Voyant Malefoy être bousculé par un Poufsouffle, elle secoua la tête en reniflant, les sourcils froncés.
—Ces idiots sont pathétiques avec leur vengeance mesquine…
Harry serra les poings sous la table, mais il garda le regard fixé sur son assiette. Il ne savait pas si le commentaire d'Hermione était innocent ou s'il avait pour but de le faire réagir. Ginny lui jeta un bref coup d'œil, puis elle haussa les épaules.
—Le pire c'est que ce n'est pas ceux qui ont le plus souffert qui s'en prennent aux Serpentard.
Hermione leva un sourcil curieux et tourna la tête pour observer la scène avec attention, les lèvres pincées.
—Quelqu'un devra les arrêter avant qu'un accident ne se produise.
À ces mots, Harry leva la tête et fusilla son amie du regard.
—Vraiment? Et qui va les arrêter? La majorité de Poudlard les encourage en les laissant faire ce qu'ils veulent!
Hermione sursauta et ses joues s'empourprèrent légèrement. Elle ouvrit la bouche comme pour protester, avant de la refermer brusquement, puis elle se leva d'un pas décidé et se précipita vers l'altercation.
Les yeux ronds, Harry la vit s'interposer, renvoyer le Poufsouffle hargneux et dire quelques mots à Malefoy. Ce dernier semblait extrêmement mal à l'aise, mais il hocha la tête avec raideur, comme s'il la remerciait. Puis, il se rendit à sa place sans nouvel incident, alors que Hermione était le centre de l'attention.
La jeune fille prit le temps de regarder autour d'elle sans cacher son mécontentement, puis elle revint à sa place sans un mot, la tête haute et les poings serrés.
Elle se rassit dans un silence assourdissant et elle regarda leurs camarades de maison avec un sourcil levé.
—Des commentaires?
Son ton de préfète suffit à faire baisser les yeux de tout le monde. Neville lui adressa un clin d'œil moqueur.
—Bien joué.
Harry hocha distraitement la tête en la dévisageant, perplexe.
Voyant son expression, Hermione soupira.
—Oh par pitié, Harry! Je sais parfaitement que Malefoy nous a sauvé la vie. Que sans lui, cette cinglée de Bellatrix m'aurait torturé pendant des heures! Il mérite la paix, lui aussi.
Harry hocha la tête, satisfait d'entendre des hoquets de stupeur autour d'eux. Il se doutait que Hermione avait choisi avec soin ses mots et que désormais, la majorité des Gryffondor ne s'en prendrait plus au Serpentard en disgrâce.
Le jeune homme se servit tranquillement, perdu dans ses pensées. Il jouait depuis un moment avec sa nourriture lorsqu'il demanda à Hermione, hésitant.
—Donc, tu ne vas pas me hurler dessus si je l'aide ?
Hermione marqua un silence, le fixant attentivement, mais Harry gardait le regard obstinément fixé sur son assiette. Finalement, elle soupira.
—Harry… tu fais ce que tu veux. Je m'inquiète juste pour toi quand tu te montres aussi obsédé… je veux dire, en sixième année, les choses auraient pu terriblement mal tourner.
Harry blêmit et repoussa son assiette, mal à l'aise. Le commentaire d'Hermione lui avait rappelé le jour où il avait lancé ce maudit sortilège, sans se soucier des conséquences. Il vérifia que personne ne les écoutait, puis il secoua la tête avant de murmurer.
—Ce n'est pas comme ça.
Hermione leva un sourcil moqueur.
—Vraiment? Qu'est-ce qui a changé?
Harry se ratatina, mal à l'aise, et il se passa les mains sur le visage, essayant de se justifier, mais sans trouver le moindre argument logique.
Finalement, il murmura, le cœur au bord des lèvres.
—J'ai besoin de l'aider.
Il y eut un lourd silence et il se tendit, prêt à subir les remontrances d'Hermione ou les reproches de Ron ou de Ginny. Après un long moment, Hermione finit par chuchoter, le ton empli d'une insupportable pitié.
—Oh Harry…
Le jeune homme cligna des yeux, immobile et tendu, prêt à fuir si la conversation prenait un tournant désagréable. C'était probablement puéril, mais il n'était pas prêt à discuter de tout ça en pleine Grande Salle, au moment du repas.
Ginny intervint, acide.
—Ce n'est peut-être pas le moment de parler de ça? De toute façon, Harry n'a pas de comptes à nous rendre!
Ron grogna immédiatement.
—Ne t'en mêle pas, Ginny. Tu ne comprends pas…
Harry leva la tête, sidéré que Ron puisse reprocher à sa sœur son intervention. Il constata avec soulagement que personne ne faisait attention à eux, grâce à l'assurdiato discrètement lancé par Hermione.
Le frère et la sœur se défiaient du regard, aussi têtus l'un que l'autre, et Harry secoua la tête, perplexe.
—Qu'est-ce qui vous prend tous les deux?
Ron lui lança un regard agacé et il leva les yeux au ciel.
—Ginny est toujours prête à te défendre et à se mettre de ton côté, mais elle ne se rend pas compte… Bon sang, je ne veux pas qu'elle ait le cœur brisé parce que tu es trop… concentré sur Malefoy!
Les joues de Ginny prirent une couleur rouge trahissant sa colère et elle se pencha vers son frère, se retenant de ne pas hurler.
—Je suis assez grande pour savoir ce que je fais, merci bien!
Harry se leva brusquement, interrompant la dispute sur le point de démarrer.
—Je n'ai plus faim. Je… j'ai besoin de prendre l'air. On se retrouve plus tard?
Hermione hésita, prête à le suivre, mais Harry secoua la tête fermement.
—J'ai besoin d'être seul.
Il partit à grands pas de la Grande Salle, presque comme s'il fuyait, cependant, il ne put s'empêcher d'échanger un long regard avec Malefoy au moment où il passait près de la table Serpentard.
Harry eut l'impression de mieux respirer en poussant les portes du château et en sortant dans le parc. L'ai frais lui fit du bien et il fit quelques pas, refusant de regarder en direction de la forêt interdite ou de la cabane hurlante, où il y avait beaucoup trop de souvenirs désagréables.
Il s'approcha du lac et marcha au bord de l'eau, ne cherchant même pas à chasser la mélancolie qui l'avait envahi.
