Hey !
Et hop. Nouveau chapitre. TW en fin de page. J'espère qu'il vous plaira !
Bonne lecture !
Troubles doutes
Julian
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Julian referme la porte du congélateur, satisfait.
— T'es sûr que ça va marcher ? Asra demande, à moitié convaincu.
— Je ne suis jamais sûr de quoi que ce soit. C'est pour ça que je teste.
— C'est rassurant, ça.
Le gloussement d'Asra réveille des frissons dans son dos. il retourne s'installer - s'avachir, en l'occurrence - près de lui sur le canapé. Sa tante au travail et sa soeur en cours, c'est un merveilleux vendredi après-midi qui s'annonce.
— Et si ça rate ?
— Pense plutôt à ce que ca va donner si ça réussi ! C'est tout un univers de glace qui s'offre à nous. Tu trouves pas ça merveilleux ?
— Mm. J'attends de voir.
Dans le congélateur, le bac plein de yaourt attend. Ils y ont mélangé du sucre pour éviter que la chose ne congèle complètement et, si tout va bien, ils auront une délicieuse glace au yaourt à manger d'ici quelques heures. Julian adore la glace au yaourt. D'une, parce qu'elle est bonne. De deux, parce qu'on peut y mélanger à peu près n'importe quoi qui soit tout aussi bon pour en changer le goût.
Et si ça rate, il aura juste trouvé une occasion de rire avec son petit ami.
Son petit ami.
Ça fait deux mois. Deux mois et trois jours, en fait. Février approche de sa fin. Dans deux semaines, il fête son anniversaire, et il a vraiment très envie de le passer avec Asra. Une journée tranquille en ville. Ils pourraient aller au cinéma, où retourner dans ce café qui fait des bubble tea - quoique le souvenir du café froid et sucré est encore trop présent dans sa mémoire. Ou alors ils pourraient prendre des billets de train au dernier moment et partir à la mer. Oh, il rêve, mais quel beau rêve. Il se voit marcher le long du port avec Asra, le nez plein d'odeurs marines et d'air iodé. Ce serait parfait, le meilleur anniversaire de sa vie - jusqu'au suivant ? Est-ce qu'Asra sera encore là, pour le prochain ?
— Tu veux un truc en attendant ? On a… Plus de sirop. Mais j'ai acheté du thé.
Pas j'ai, il veut dire sa tante.
— Et on a des gâteaux. Belvita. Les trucs par quatre au chocolat. Portia a fini les barquettes trois chatons.
— Tu as quoi, comme thé ?
— Je te dis ça tout de suite.
Donc, Asra choisit le liquide. Julian ne s'en serait pas inquiété en d'autres circonstances, mais il se souvient de ce que Muriel lui a dit. Et…
Il s'inquiète sans doute pour rien. C'est une spécialité, chez lui. Mais depuis qu'ils ont eu cette discussion, il ne peut pas s'empêcher de remarquer plein de petits détails. Comme cette manière que l'angelot a de fuir chaque fois qu'il essaie d'aborder un sujet sérieux. Il pose une question - une vraie question - et Asra vient l'embrasser, lui murmurer qu'il l'aime ou s'asseoir sur ses genoux, et le cerveau de Julian grille. Il adore cet aura aérien qu'il dégage, ce côté flottant qui le fascine, mais…
Parfois, il a l'impression de se faire avoir.
— J'ai un thé noir russe au citron, du thé à la menthe et du thé au… Ah non, ça c'est une infusion. Verveine. C'est la même chose, non ?
— Bien sûr. Comme le café et le chocolat chaud ?
— Le… Oh, mm. Pas de verveine, alors ?
— Plutôt du thé à la menthe.
— Je te prépare ça tout de suite.
Il se lance un café en passant - ce n'est que le troisième aujourd'hui - puis revient vers son petit ami. C'est là que ça se complique. Il ne veut pas forcer, il sait ce que serait contre productif, mais faire comme s'il n'avait rien remarqué… Un bon petit ami n'est pas censé ignorer ce genre de chose.
Il suppose ? Julian n'a jamais été un bon petit ami. Un vrai petit ami.
— T'es sûr que tu veux rien à manger ? il demande en apportant sa tasse à Asra. On a aussi un reste de gâteau au chocolat. Puis je peux passer acheter des croissants. Ou des chocolatines. Il y en a une offerte pour deux achetées à la boulangerie.
— C'est bon. Je garde de la place pour la glace.
— Loin de moi l'idée de vouloir te dissuader, mais s'il se trouvait que notre expérience n'était pas fructueuse…
Il s'assoit près de lui, avale une gorgée de café et le regarde souffler sur sa propre tasse. Trop tard, il réalise qu'il a oublié de sucrer le thé. Asra ajoute presque toujours un carré dans sa boisson, quand il en fait chez lui. Merde.
— Tant pis.
— Bien. Bien. T'es sûr ?
— Tu comptes me le demander combien de fois ?
— Simple précaution.
Son sourire l'achève, mais pas le temps de se pâmer devant ses airs d'ange cornu. Il le regarde boire du bout des lèvres. Asra a mis fin à la conversation. Échec. Il va falloir trouver une autre ouverture.
Julian a fait des recherches sur internet. Et il n'est pas bien sûr d'avoir compris tout ce qu'il a lu. Il est tombé sous une avalanche de vocabulaire et de troubles du comportement alimentaire qu'il ne soupçonnait pas, des explications qui se sont mélangées dans sa tête et y ont fait péter des boules d'angoisse. Asra ne ressemble pas à quelqu'un… D'anorexique. Il n'est pas gros, pas maigre non plus. Il l'a vu manger chaque fois qu'il est allé à la cantine avec lui. Il ne fait pas de sport, à sa connaissance. Et il ne l'a jamais vu avaler quoi que ce soit qui ressemblait à un laxatif.
Sauf qu'il n'est pas toujours près de lui.
Quand le garçon bohème vient se lover sur son torse, son bras s'enroule sans hésiter autour de ses épaules. Il s'allonge pour mieux l'allonger contre lui.
— Mm, err, Asra ?
— Tu veux que je me décale ?
— Pas du tout.
Pour rien au monde il ne voudrait le chasser de ses bras.
— Tu… T'es sûr que t'as pas faim ?
— Sérieusement ?
— C'est juste… On a pas eu le temps de manger avant de partir. Enfin, pas sûr qu'on puisse considérer un chausson aux pommes comme un repas. Et… Un thé non plus.
— Tu te nourris bien de café.
Il glousse. Oh, non, ce n'était pas du tout l'objectif. Il est censé rester sérieux.
— Pas que de café. Je mange aussi des spéculoos.
Désamorcer le sujet pour mieux y revenir. Il inspire, retrouve son sérieux.
— Tu manges peu. En général.
— J'ai un petit appétit. Il n'y a pas grand chose à nourrir, de toute façon.
Asra se désigne, et comme il hausse les épaules, Julian le sent qui se tend. Ses muscles se contractent sous la main qu'il a posée dans son dos. Des épaules de petit chat ondulent.
— Un très petit appétit, Julian souligne.
— Au moins je ne coûte pas cher.
Oui, c'est… Pragmatique. Julian l'envierait presque, maintenant qu'il pense au coût que la bouffe lui demandera quand il vivra dans sa chambre étudiant et-
Non non non. Il ne doit pas penser comme ça. C'est mauvais pour la santé. Un comble pour un étudiant en médecine.
— Je mange ce dont j'ai besoin, c'est tout, Asra insiste.
Mais il zieute ailleurs, et Julian ne sait pas comment traduire ce geste. Il caresse ses boucles, descend son index sur son nez, ses lèvres, ses épaules. Peut-être qu'il a raison, après tout. Qu'il n'a pas besoin de plus. Si ça se trouve, il prend un énorme petit déjeuner tous les matins. Julian ne sait pas, il n'est pas avec lui. Il panique sans doute à tort, et…
Est-ce qu'il pense ça, parce que c'est vrai, ou est-ce qu'il cherche à se rassurer ?
— Oui, mm…
— Arrête de te prendre la tête.
— Je suis juste-
— Ilya.
Oh. Oh. Non. C'est la première fois qu'il l'appelle comme ça.
Ilya. Ce nom qu'on garde dans sa famille comme une marque d'affection, dans la bouche d'Asra, ça roule comme un bonbon. Son cœur s'emballe. Et le fait que le garçon grimpe au-dessus de lui n'y est pas pour rien.
Asra croise les bras sur son torse, ses jambes passées autour de son bassin, et toutes les lumières s'allument dans sa tête. Alerte.
— Je peux t'appeler comme ça, il lui demande ?
— Oui. Oui, bien sûr, tu- pas de problème.
Ilya. Il adore la manière dont il prononce ce nom, ce nom dont il ne lui a jamais expliqué le sens et il n'a pas le temps de le faire, parce qu'Asra se penche sur sa bouche et qu'il l'embrasse. Longtemps. Plus longtemps que d'habitude.
Il a imaginé cette scène des dizaines de fois. Sa bouche sur la sienne, puis plus bas, ses pas partout sur lui, le bruit d'un pantalon qui tombe et… Et ça lui fait peur autant que ça lui crame le ventre. Il voudrait croire qu'il ne fait des idées, mais là…
Est-ce qu'Asra joue avec lui, ou est-ce qu'il…
— Arrête de te prendre la tête pour rien, Ilya.
— Oui.
Non. Ce n'était pas la bonne réponse, il… Le bassin d'Asra roule, et Ilya a honte de sentir qu'il commence à bander. Merde. Oh, il va forcément le remarquer. Il ne peut pas le rater dans cette position.
Julian inspire et va pour se redresser, mais le torse d'Asra sur le sien pèse plus lourd qu'il ne pensait. Ses bras de part et d'autre de sa tête sont une merveilleuse prison.
Et ils sont sur le canapé du salon. Le canapé où Pasha s'assoit quand elle regarde la télé avant que Tasia ne rentre.
— Asra…
Est-ce qu'il l'interpelle, ou est-ce qu'il le supplie ? Julian ne sait pas. Un part de lui meurt d'envie d'aller plus loin, sauf qu'il est à peu près certain qu'Asra n'a jamais rien fait - avec quelqu'un d'autre, en tout cas - et qu'ils sont dans le salon de sa tante. L'endroit le moins sexy du monde, donc.
Pas la place idéale pour une première fois.
— Tu…
— Je ?
— Mm, je me fais peut-être des idées, mais-
— Quel genre d'idée ?
Sa main caresse sa joue. Il le regarde comme un renard prêt à bouffer. Oh, non. C'est mauvais. Ilya ne devrait pas autant aimer ça. Il ne devrait pas frissonner, pas… Merde.
— Disons que tu es installé sur moi, et tu… M'embrasse. De manière plutôt insistante.
— Mm, continue.
— Et…
Ses mots s'effritent. C'est grave, s'il retourne l'embrasser plutôt que de lui répondre ? Il croit savoir ce qu'Asra veut, mais il a peur de se tromper et il ne peut pas se tromper, là, c'est trop important, trop… Asra n'a rien fait. Il ne peut pas gâcher ça.
— Tu veux…
Les doigts d'Asra passent sur les bretelles de son col. Il sent son regard hésitant, intéressé. Sa phalange qui s'enroule autour du tissu et tire doucement dessus avant de revenir à lui. Il essaie de lui faire passer un message, là, non ?
— Je veux ?
— Oh, Asra…
Il a très bien compris, et il essaie de le faire tourner en bourrique. Il ne peut pas sentir le truc qui appuie sans doute contre son bassin, et ne pas savoir ce que c'est. Asra a la même chose au fond du pantalon. Il…
Est-ce qu'il a peur ? C'est pour ça qu'il l'allume à demi-mot, sans oser dire ce qu'il cherche ?
Ilya pose une main sur sa joue tendre. Sa peau encore lisse vierge de tout bouton, à croire que l'adolescence l'a préservé de ce fléau qui terrifie les ados de leur âge. Pas un bouton ni une cicatrice, même pas un pauvre petit herpès, il a une peau parfaite. Pas comme lui, qui a passé son année de seconde à se tartiner la face de crèmes en tout genre.
Asra est parfait, là, toujours. Et c'est avec tout ce qu'il a de délicatesse qu'Ilya se redresse pour l'embrasser encore. Sa bouche sur la sienne, son cœur qui tape sous son haut et ses dents qui frôlent les siennes quand un élan trop entreprenant. Ce n'est pas un bisous échangé devant le lycée, ça. C'est long, langoureux, ça leur coupe le souffle et le sien s'affole comme il passe ses mains le long du dos d'Asra. Il le sent qui se colle contre lui alors qu'il arrive contre ses hanches et le bruit, ce soupir qu'il pousse… Merde, définitivement.
Julian ne doute pas qu'il a le visage rouge quand il se séparent.
— Tu… Mm, j'ai un lit plus confortable dans la chambre, si jamais…
— Va pour le lit.
Ok. Donc, c'est en train de se passer. Bien. Il a tout ce qu'il faut, des capotes cachées sous le tiroir de sa table de chevet et même un ou deux jouets, mais il ne pensait pas avoir à s'en servir si tôt. Deux mois. Est-ce que c'est assez, deux mois ? Oh, Ilya a déjà couché beaucoup plus vite que ça. Mais Asra n'est pas comme lui. S'il avait su, il aurait préparé un truc, des bougies autour du lit et il aurait acheté… Quelque chose de romantique. Oui. Il…
Il pousse la porte de la chambre les jambes en coton, et quand elle se referme sur Asra, il comprend que c'est lancé. Pour de vrai.
— T'es sûr ? il demande, alors que son petit ami revient sur ses genoux.
— Oui.
— Mm, bien, c'est…
— Et toi ?
— Moi ?
La main d'Asra touche sa joue, son coup, son épaule. Et Ilya ne comprendre ce qui le bouleverse. Il est sûr, évidemment. Il en rêve. Une part de lui n'y croit toujours pas, parce que les gars comme lui ne font pas l'amour avec des garçons comme Asra. Parce qu'il baise à l'arrache dans des coins qui ne sont pas prévus pour ça, et pas dans un lit dur contre une peau qui sent la lavande et…
Et c'est la première fois qu'on lui pose cette question.
— Tu me mets une tarte au citron sous le nez, et tu me demandes si je suis sûr de vouloir la manger ? il demande. Enfin, pas que tu sois… Mm, pardon, la comparaison est pas terrible mais-
— Un tarte au citron, vraiment ?
— J'aime beaucoup les tartes au citron. Mais tu n'es pas une tarte au citron, évidemment.
Son rire le rassure, l'enchante et l'effraie. Au moins, il ne l'a pas vexé.
— Et donc, tu as assez faim pour une tarte au citron ?
— J'ai toujours faim pour une tarte au citron.
Enlever son haut, celui d'Asra. Toucher sa peau lisse. Le laisser caresser la sienne, à son rythme. C'est nouveau. Julian ne prend pas souvent son temps, et les mains de son petit ami ont cette maladresse des premières découvertes. Il cherche à son rythme, appuie sur la pointe de ses os qu'il croise. Et Ilya sait qu'il est fini chaque fois qu'il s'entend soupirer. Quand sa voix flanche et le trahit. Il a faim, oui.
Ce n'est pas un coup de queue de dix minutes dans une cage d'escaliers. Pas un plan cul trouvé sur une application, ni un type croisé en soirée qui le pousse à se mettre à genoux. C'est Asra, et ça dure longtemps, ça cherche, ça rit. C'est loin de ses fantasmes. C'est nouveau, pour lui aussi.
De prendre son temps, ses précautions.
De rester à la fin, dans la chaleur d'un lit trop petit pour deux personnes.
[TW : sexe] [Pas explicitement décrit mais quand même]
Et voila. Je n'ai plus d'avance, aaaaah. Je me bougerai le cul la semaine prochaine. En attendant, je m'en retourne jouer à Sally Face.
A plus !
