Hey !
Après une petite pause (de deux mois quand même mais voilà), le premier chapitre de la seconde partie est là !
(En vrai, je l'ai écrit juste après le premier chapitre de la première partie. Il date un peu, mais je l'aime bien.)
Cette fois on commence avec Julian !
(Merci à Ya pour sa relecture !)
Retour à la case départ
Julian
.
De la lumière derrière les stores. Ok. Ça lui brûle la rétine et… Il n'a pas de stores. Donc : il n'est pas chez lui. Premier constat. Son réveil n'a pas sonné – où il était trop déchiré pour l'entendre – deuxième constat. Il a mal au cul.. Troisième constat. Et il est à poil sous un plaid – pas le sien. Sur un canapé – toujours pas le sien.
Julian marmonne dans le vide. Il tapote autour de lui, laisse sa main traîner sur le tapis jusqu'à trouver un truc dur et froid. Carré, petit. Son portable. Bingo. Il le traîne sous sa trogne et l'allume. La lumière lui saute à la gueule. Ça cogne comme la cloche d'une église à midi.
Sauf qu'il est 14 heures et qu'au parfum d'eau de cologne qui imprègne la pièce, il comprend qu'il a perdu sa place au paradis.
— Jules !
Oh non.
— Fais pas genre tu dors encore, je t'ai entendu !
— Ta gueule.
Tout n'est pas perdu. Peut-être qu'il était – encore – trop torché pour rentrer chez lui. Lucio aura eu l'amabilité de lui faire une place sur son immense canapé d'angle ; celui qui doit coûter deux fois un smic. Il sait qu'il se plante. Mais franchement, il n'a pas envie de penser qu'il a – encore – fait ce qu'il croit qu'il a fait.
Et pourtant, maintenant que le brouillard de l'alcool s'évapore…
— Lève ton cul de mon canapé, Noddie rentre dans moins d'une heure.
— Laisse-moi deux minutes, il souffle.
— Quoi, t'es toujours pas remis d'cette nuit ?
Le sourire goguenard de Lucio l'agace. Son timbre aussi. Tout, en fait. Tout Lucio.
— T'es con.
— Eh ! C'est pas une manière de parler à un poto qui t'héberge.
Quand le poto en a largement profité pour se vider les couilles, il se réserve le droit de l'envoyer chier.
Au fond, Julian sait qu'il n'est pas en position de se plaindre. Ce n'est pas comme si Lucio lui avait forcé la main. Il a merdé tout seul comme un grand. Il n'a pas le droit d'être en colère, pas pour ça. Et de toute façon, il n'a pas la force d'être en colère. Il a juste envie de vomir, avant d'avaler toute une plaquette de Doliprane. Et de retourner se coucher.
Et de mourir dans un trou.
— La salle de bain est par là, Lucio lance alors qu'il trouve enfin la force de se redresser.
Bon, ses vêtements. Il préfèrerait autant que Nadia ne les trouve pas avant lui. Il devait porter… Ah, oui, cette chemise noire, ouverte, avec les chaînes qui pendouillent. Un slim – noir aussi – et un débardeur – noir toujours – et… Est-ce qu'il a mis un caleçon, avant de sortir ?
— Et récupère ça en passant !
Lucio lui en lance un sur la tête. Ça répond à sa question.
Julian rapatrie ses affaires, puis il s'enferme dans la salle de bain. Une salle de bain plus grande que sa proche chambre. En fait, avec une salle de bain pareille, pas besoin de chambre.
Il renifle sa propre odeur de sueur, grimace et file dans la douche avant d'ouvrir le jet d'eau froide. Ça le réveillera.
Vingt minutes et un coup de déo plus tard, Julian est prêt. Il a enfilé ses vêtements de la veille, brossé ses dents comme jamais et il tripote son portable. Arrive alors la vraie question. La seule qui compte.
Bon.
Il lui dit, ou il ne lui dit pas ? S'il ne lui dit pas Neal ne l'apprendra jamais. Mais il comprendra que quelque chose ne va pas. Julian ment beaucoup et toujours aussi mal. S'il lui dit, il est mort. Enfin, leur relation est morte. Et ça fait six mois. Julian n'a – presque – jamais tenu six mois. Tout se passe bien, le gars est cool et…
Est-ce qu'il aurait vraiment couché avec Lucio si tout se passait bien ?
Non. Pas une question à se poser maintenant.
— Tu comptes rester planté là longtemps ? T'as pas, genre, cours ?
— Pas le samedi.
Sa présence fait chier Lucio. Grand bien lui fasse, il n'a qu'à pas ramener ses plans cul à l'appart. En fait, il n'a qu'à pas avoir de plans culs tout court. Merde, il sait bien que Julian est maqué, il…
Non. Non, c'est de sa faute. Toujours de sa faute. Il sait dire non.
Et il ne l'a pas fait.
Julian déglutit. Il connaît ça, ce stress qui remonte le long de ses doigts, cette peur sourde dans ses os comme une douleur. La nausée, la sueur. Chaud froid. Sa peau est humide, et la douche n'y est pour rien.
— T'es sûr qu'on est samedi ?
— Oui.
Si Lucio se donnait la peine d'aller en cours, il le saurait.
— T'as pas prévu de rester, hein ? Parce que Noddie va arriver dans cinq minutes et-
— J'ai compris.
Il soupire. Encore.
— Tu vas réussir à marcher jusque chez toi ?
Il entend son sourire gras jusqu'ici. Lucio sait se faire détester.
Mais effectivement, il a encore mal aux reins. Et il sait pourquoi. Il sait aussi que ça lui a plu.
Il se mord la lèvre. Fort. Du sang dans sa bouche. Il regarde la peau sèche et rongée de ses doigts. Les points rouges tout autour. Il trouve une cuticule récalcitrante à arracher.
Ça pique.
Il dit au revoir, vaguement, avant de filer. Dehors il fait froid. Le soleil pète la forme, le ciel est trop bleu et le vent lui gèle la peau. Il renfile le pull autour de sa taille – le seul truc qui ne peut pas la sueur, même s'il porte le parfum de Lucio, ce qui n'est franchement pas mieux. Il va falloir qu'il se change, s'il veut passer voir Neal.
Son téléphone vibre dans sa poche. Il le sort et, quand on parle du loup, on en voit la queue.
Enfin. Celle de Lucio lui a suffi, il ne va pas remettre ça aujourd'hui.
Ses doigts blancs de trouille tremblent sur l'écran. Il inspire. Bloque. Expire. Recommence. Pacha fait ça quand elle stresse – et dieu sait qu'elle stresse – sa poitrine monte et descend et, à chaque fois, Julian se demande comment sa petite sœur chérie a pu grandir autant en si peu de temps. Pasha avait cinq ans et brusquement elle en a vingt et…
Le téléphone arrête de vibrer. L'appel est passé. Julian sourit sale. Il attend quelques secondes. Tape du pied. Une minute passe.
Merde. Il faut bien qu'il se lance, alors il le fait. Il retourne sur son journal d'appel et il clique.
Son cœur remonte dans sa gorge. Il a deux lacs sous les bras. Ça sonne.
Bip.
Qu'est-ce qu'il va lui dire ?
Pas le temps d'y penser, ça décroche.
— Julian ?
— Ouais.
Il déglutit.
— Désolé, j'étais occupé, je-
— T'embête pas.
Ah.
— T'as écouté mon message ?
— Non. J'ai rappelé dès que j'ai pu.
Techniquement, c'est vrai. Le ton tranchant de son petit ami n'en reste pas moins flippant. Il va lui faire lâcher le cœur.
Il entend son souffle. Saoulé. Il est saoulé. Julian aurait dû écouter le message. Il n'a même pas remarqué qu'il en avait laissé un.
— T'es encore chez Lucio ?
— Non.
Presque. Il est devant l'immeuble, dans la rue. Donc, il n'est plus chez lui.
Mais Neal sait où il a dormi et ça, c'est inquiétant.
— Ah ce sujet…
Est-ce qu'il va se mettre en colère ? Il ne se met pas souvent en colère. Non, en général, quand Julian merde, il a plutôt l'air dépité. Une sorte de résignation agacée. Un truc qui le fait se sentir minable, parce que si au moins il pouvait s'énerver, lui gueuler dessus, il aurait la satisfaction d'avoir ce qu'il mérite.
Il merde tellement. Parfois, il voudrait qu'on le lui reproche. Ses exs le faisaient. Certains. Ils criaient.
— Mm, J'ai… Avec Lucio, il se pourrait que-
— Te fatigue pas.
Ça coupe sec.
— Je sais que vous avez baisé. Lucio raconte sa vie sur Twitter.
Ah.
— Attends, tu le suis sur Twitter ?
— C'est tout ce qui te choque ?
Non. Evidemment, non. Mais il ne sait pas quoi dire maintenant qu'il n'a plus rien à avouer.
Il aurait dû y penser. Bien sûr que Lucio allait poster. C'est un miracle qu'il n'ai pas ajouté une photo de son joli petit cul blanc sur le canapé en cuir. Et encore. Il l'a peut-être fait, il faut qu'il vérifie.
— Désolé.
— Tu dis ça à chaque fois.
Et à chaque fois il est vraiment désolé. Il recommence quand même.
— J'avais beaucoup bu.
Il l'aurait fait sobre. Même, il l'a fait sobre. Deux fois. Deux fois, Neal a laissé couler. Il a essayé de comprendre. Comme d'autres avant lui.
Silence. Même pas un soupir.
— Julian ?
— Ouais ?
Il sait ce qui va suivre. Il ne veut pas l'entendre.
— C'est fini.
Il se serre contre le mur dans son dos. Serre, aussi, ses lèvres.
— Ah.
Il a les yeux humides. Mais il ne va pas pleurer, il sait. Il n'est même pas triste. Pas de se faire quitter au téléphone.
Non, Julian est triste parce qu'il sait qui est le salaud dans l'histoire. Et ce n'est pas la première fois qu'il fait ce constat. Pas la dernière. Il est triste parce que sa vie est une suite interminable d'échecs et de mauvaises décisions.
Et il trouve ça réconfortant.
— D'accord. Oui, c'est- oui. C'est mieux comme ça.
— Je passerai récupérer mes affaires ce soir.
— Bien.
Il y a une forme d'au revoir vague. Ensuite, il contemple son écran noir. Un poids se lève de ses épaules, remplacé par celui qui tire dans son ventre. Il essuie ses yeux. Avale sa salive.
Range son téléphone.
C'est samedi, il est 11 heures, et il est célibataire.
Tadam. Ça commence bien. (non)
(oui, je case des OC parce que j'avais plus de perso à utiliser comme petit copain pour Julian. Voilà.)
J'espère que ça vous a plu !
A la prochaine !
