Bonjour à tous !
Le résumé vous a plu, alors je vais continuer ! Puis comme ça, ça m'oblige à me rappeler ce qui s'est passé, et c'est pas plus mal... J'avance bien sur la partie 3, mais il reste encore teeeeelllement de scènes que je veux écrire !
Résumé : John est inscrit en 1ere année de médecine à l'Imperial College of London, fac très réputée. Il y est boursier, et vit dans un petit appartement off campus, contrairement à ses amis, Judith, Peter, Mike, Caitlin et Alec. De manière improbable, il a rencontré Sherlock, génie certain, drôle d'énergumène qui apparaît et disparaît au gré de ses envies, et devenu le meilleur ami de John. A la fin de ses partiels du 1er semestre, avant Noël 1995, John sort officiellement avec une fille de 4e année, Neil. Pour leur dernier jour ensemble avant que Sherlock ne parte pour les fêtes de Noël, Sherlock et John passent leur samedi ensemble, et se sont introduits illégalement sur le campus déserté de l'Imperial.
Chapitre 9
Ils redescendirent, refermant derrière eux toutes les portes qu'ils trouvaient. John savait les ouvrir, mais pas les verrouiller. Sherlock, cambrioleur accompli et sous l'injonction d'un John trop sérieux qui voulait que personne ne soit accusé de négligence et puni pour leur escapade, obligea Sherlock à refermer toutes les portes qu'ils avaient ouvertes.
— On fait quoi maintenant ? demanda John une fois ressorti de la fac.
Il resserra les bretelles de son sac à dos, et son écharpe autour de son cou. Il faisait sec, mais glacial.
— J'ai faim, rajouta-t-il. Tu veux pas aller déjeuner ?
Il était bientôt treize heures, et ils avaient passé plus de trois heures à explorer l'Imperial. John n'avait pas vu le temps passer.
— Allons chez Leandro, indiqua Sherlock en hochant la tête.
John acquiesça, et ils se mirent en chemin.
Le vieil italien avait décoré sa vitrine pour les fêtes, mais rien n'était droit, ou convenablement mis. John grimaça.
— C'est triste, commenta-t-il.
— Quoi donc ?
— Leandro ne voit plus assez pour installer des guirlandes droites, et personne ne lui dit rien.
Sherlock leva un sourcil méprisant.
— Parce que tu t'attends à ce que sa clientèle habituelle lui fasse remarquer et lui file un coup de main ? le railla-t-il en poussant la porte du restaurant.
John le suivit, sans jeter un regard aux gens attablés là, comme d'habitude. Il ne les regarda pas plus d'une seconde, comme Sherlock le lui avait appris. Mais comme Sherlock le lui avait appris, cela suffisait pour récupérer un certain nombre d'information, par exemple noter l'absence d'Angelo, le fils de Leandro. Ça faisait longtemps qu'ils ne l'avaient plus vu, d'ailleurs. Et le vieil homme, quand la salle était vide et qu'il apportait du café aux deux adolescents qui annexaient des tables pour réviser l'après-midi, se lamentait sur son fils.
— Eux non. Mais nous, oui ! décréta John avec fermeté, jetant son écharpe sur le comptoir.
— Pardon ? s'étrangla Sherlock.
— Leandro ! cria John en direction de la cuisine. Tu vois un inconvénient à ce qu'on ajuste les guirlandes de travers ?
— John, bambino ? lui répondit la voix lointaine du restaurateur. Fais ce que tu veux, je suis occupé, là, je ne peux pas bouger !
— Sherlock est là aussi ! lui cria John en réponse. Il va m'aider !
L'air très fier de lui, John se retourna vers Sherlock, qui fulminait.
— Je croyais que tu avais faim ! l'accusa-t-il.
— C'est le cas, répondit John joyeusement. Et je refuse de manger dans un endroit aussi tristement décoré ! Allez viens, à nous deux, ça ira vite, et ce sera amusant !
Il fit mine de ne pas entendre le « amusant ! » méprisant, et étranglé sorti à mi-voix de la gorge de Sherlock, et le prit par la main, l'obligeant à se débarrasser de son manteau, qu'ils fourrèrent dans un coin avec leur reste de leurs affaires.
Cela leur prit en effet une demi-heure à peine, le temps de retendre les guirlandes, réarranger les décorations pour mieux alterner et harmoniser les différentes couleurs, ajuster le tout pour être plus droit, harmonieux, carré et logique. John sifflota Jingle Bells, Mon beau sapin et Last Christmas durant toute la durée de l'opération.
Amusés par leurs actions, même les clients habituels se joignirent à eux, indiquant rapidement s'il fallait remonter ou redescendre les guirlandes, ou chantonnaient avec John.
— Tu vois ! décréta John en s'asseyant enfin à leur table, au fond, loin de tout. Ce n'était pas si compliqué !
— Tu as des goûts musicaux désastreux, indiqua Sherlock en secouant la tête de désespoir.
— Laaaaast Christmas, I gave you my heart, but the very next day you gave it awaaaaaay ! Thiiiiis year, to save me from tears, I'll give it to someone spe-ciaaaaal ![1] s'amusa John.
— Je ne sais même pas ce que tu chantes.
John s'interrompit brusquement.
— Tu plaisantes ? Tu ne connais pas Wham! ?
— Absolument pas. C'est un vrai mot ?
— Rassure-moi, le reste tu connaissais ?
— Jingle Bells, oui. L'autre, tu as chantonné des trucs en anglais, mais je n'en connais que sa version originale.
— C'est une chanson allemande.
— C'est bien ce que je disais.
— Combien de langues parles-tu au juste ? Je me souviens que tu avais dit que tu savais lire le cyrillique, mais...
La première fois qu'ils étaient allés chez Sherlock, il se souvenait que son ami lui avait dit n'avoir effectivement pas spécialement de problème avec l'apprentissage des langues, du fait de sa famille, mais ils n'en avaient jamais reparlé.
— Couramment ? Trois seulement, répliqua Sherlock, l'air vaguement honteux. Mais je connais les bases pour me faire comprendre sans accent en cas de besoin dans un pays étranger pour au moins douze autres, rien qu'en Europe.
John recracha son verre d'eau de surprise. Sherlock, surpris de se faire asperger, fit un bond en arrière, manqua de chuter de sa chaise au passage, et renvoya une œillade courroucée et dégoûtée à John.
— Pardon, s'excusa ce dernier en épongeant l'eau renversé et son visage dégoûté. Mais c'est quatorze langues de plus que moi et les gens normaux, tu en as conscience ?
Maintenant qu'il le disait, John se souvenait qu'il avait déjà mentionné pouvoir s'en sortir dans n'importe quel pays d'Europe, mais il n'avait pas réalisé que c'était à ce point.
Sherlock haussa les épaules. Parfois, il aimait se vanter de ce qu'il savait, et roulait des mécaniques avec arrogance. Parfois, comme en cet instant, il paraissait juste gêné, et John ne savait pas vraiment pourquoi. Il aurait eu toutes les raisons de se rengorger de fierté, pourtant.
— Bambini ! s'exclama Leandro en se matérialisant enfin à côté d'eux. C'est repas de fête aujourd'hui, c'est moi qui offre ! Qu'est-ce que je vous sers ?
John tenta d'argumenter, de payer leur repas, refusant de se faire entretenir, mais le vieil italien était trop têtu, et il n'eut pas gain de cause. Ils finirent par commander, faisant promettre à Leandro de crier quand ce serait prêt, et qu'ils viendraient chercher leurs plats, pour éviter à l'homme de se fatiguer. Il connaissait peut-être le resto par cœur, et savait s'y déplacer les yeux fermés (ce qui, considérant sa cécité progressive, était proche de la réalité), mais ils ne voulaient pas le fatiguer inutilement.
— Et l'italien, tu le parles couramment ? Ou non ? demanda John en revenant de la cuisine avec une nouvelle carafe d'eau, du pain et des gressins. Parce que parfois, Leandro oublie que je ne suis pas toi, et je ne comprends rien à ce qu'il dit.
— Non. Mais je parle français. Et l'italien est proche du français.
John haussa les sourcils, perplexe. Il avait fait un semestre de français, au lycée, en avait surtout retenu quelques insultes, grivoiseries et des phrases pour draguer, et ça ne l'aidait absolument pas à comprendre l'italien chantant et rapide du vieil homme.
— Quand on a des notions d'italien et qu'on parle français, c'est facile, reprit Sherlock avec insolence.
John lui envoya une pichenette, le traita de con arrogant en riant, puis le pria de lui en dire plus, et de lui dire des choses dans plusieurs langues différentes.
Il adorait entendre Sherlock parler. Sa voix avait quelque chose d'hypnotisant, à cause de son ton grave. Et il aimait en savoir plus que le jeune homme, et au cours du repas, Sherlock lui livra des informations personnelles. Notamment le fait que ses parents, que John savait d'origine étrangère, avaient toujours parlé dans leur langue maternelle à leurs enfants, dès la naissance. C'était la raison pour laquelle Sherlock ne tirait aucune fierté à parler couramment trois langues à la perfection. Il s'agissait de quelque chose dont n'importe qui ayant des parents étrangers pouvant s'enorgueillir, pas quelque chose qu'il avait décidé, travaillé, et qui le rendait spécial.
— Allez, dis-moi un truc dans une langue que je ne peux vraiment pas comprendre et que je ne pourrais même pas identifier ! réclama John.
Sherlock avait demandé de l'eau ou du pain en français, en espagnol et en italien, et John avait maladroitement compris. Par contre, s'il décidait de parler allemand, comme il l'avait fait à quelques reprises au cours du repas, John n'en comprenait pas le premier mot, mais il reconnaissait les sonorités rudes et gutturales de la langue germanique. Harriet avait étudié l'allemand au lycée, il se souvenait des leçons qu'elle récitait à voix haute.
— Pourquoi ? grommela Sherlock en faisant tourner le vin dans son verre.
Leandro avait absolument tenu « parce que c'était Noël ou presque » de leur offrir de l'alcool, alors même qu'ils n'avaient ni l'habitude ni l'envie d'en boire, ni l'un ni l'autre. Il fallait reconnaître que le vin italien proposé s'accordait à merveille avec les délices du vieux cuistot.
— À cause de ta voix, avoua John, que le vin rendait prolixe et faisait rougir ses joues. T'as une voix hyper particulière, et dans les autres langues, c'est hyper sexy. Encore plus quand je ne connais pas la langue.
Il ne réalisait pas vraiment ce qu'il disait, et Sherlock avait le teint rougi par le vin, lui aussi. Ses rougissements gênés n'étaient alors pas vraiment décelables. Alors sans réfléchir, il lui répondit :
— Glædelig jul, John. Jeg elsker dig[2].
Et son ami, ravi de sa voix profonde, applaudit sans songer à demander la traduction de ce qu'il venait de dire. C'était heureux, car Sherlock ne lui aurait absolument jamais donné, et il était évident que John ne parlait pas un mot de danois.
C'était déjà le milieu de l'après-midi quand ils émergèrent du restaurant, ayant promis à Leandro qu'ils passeraient l'année prochaine pour lui souhaiter la nouvelle année. Ils n'avaient pas vu le temps de passer.
— On fait quoi maintenant ? demanda John. Tu as encore du temps ?
Sherlock réajuste le col de son blouson, ce qui ne fit que le rendre plus ridicule encore.
— On ne part que demain en début d'après-midi. Je suis seul aujourd'hui, cette nuit et demain matin.
Le cœur de John bondit de joie.
— On peut rester ensemble alors ?
— Cette nuit ?
John rougit brusquement, avant de réaliser qu'il n'avait aucune raison d'être gêné.
— Je voulais déjà dire cet aprèm et ce soir, avant ça, répondit-il, esquivant la question.
Sherlock, qui semblait n'avoir aucune conscience de l'état dans lequel il avait plongé son ami, acquiesça distraitement.
— Viens. Allons trouver des trucs illégaux à faire sans peser à quiconque pour être acceptable par ta grande noblesse d'âme.
John laissa échapper un rire, se mettant en route derrière Sherlock.
— Mais c'est que tu deviendrais presque drôle ! Mes leçons portent leurs fruits !
Ils se mirent en route au hasard. John savait que tant qu'il était avec Sherlock, il ne pouvait pas être perdu. Ils marchèrent des heures durant dans la ville glaciale, observant les gens pressés. Noël était lundi, c'était le dernier samedi pour faire les courses et acheter les cadeaux, et ils observèrent joyeusement le ballet des gens qui se hâtaient, allaient et venaient dans les magasins aux abords d'Oxford Circus, achetaient des jouets, des livres, des bibelots et autres gadgets.
John, battant des mains, plus joyeux qu'un enfant, réclamait sans cesse à Sherlock qu'il lui analyse les gens, devine ce qu'ils allaient ou venaient d'acheter, à qui c'était destiné. Et Sherlock, un sourire aux lèvres, le teint vivifié par le vent froid, se pliait complaisamment à ses demandes et lui déduisait tous les passants qu'il désignait.
Avec n'importe qui d'autre, John aurait parfois crié au mensonge, à l'affabulation, mais Sherlock ne savait pas faire ça. Il n'en rajoutait pas pour l'impressionner, n'inventait pas des détails absurdes pour rendre le tableau plus drôle. Il faisait réellement ses déductions sur la base de ce qu'il voyait et que John ne détectait même pas.
— Dis-moi un truc sur cette dame et j'irai lui demander si c'est vrai ! le mit au défi John.
— Même si c'est affreusement gênant, grave, et qu'elle va t'en vouloir ? Tu vas oser ? s'amusa Sherlock.
— Bien sûr ! s'emballa John. Notre propre version de l'action-vérité !
Il fallut dans un premier temps expliquer le jeu à Sherlock, qui n'avait jamais joué. Il trouva cela complètement stupide. Il n'avait aucun filtre, et aurait sans doute accepté de livrer n'importe quelle vérité brute à quiconque la demandait, et aurait relevé tous les défis sans honte, parce qu'il ne doutait jamais de rien, annonça-t-il.
— Le but du jeu est surtout de jouer bourrés avec des potes, mettre au défi des gens de s'embrasser, se déshabiller, ou de révéler des trucs intimes, du genre s'ils sont vierges, ou quel est l'endroit le plus exotique où ils se sont envoyés en l'air, indiqua John calmement.
— Ah, commenta Sherlock d'un ton plat. Je retire ce que j'ai dit. Je n'y jouerai jamais.
John pouffa. Ils achetèrent un café à emporter pour réchauffer leurs mains et leurs corps de l'intérieur, et se mirent d'accord sur le fait qu'ils ne joueraient jamais à la version stupide des adolescents en soirée, et définirent leur propre version du jeu : Sherlock s'occupait de la vérité, mais pas à son propos. Il devait déduire un élément d'une personne tierce, un truc un peu spécial, pas anodin, et décréter qu'il s'agissait de la vérité.
John s'occupait de la partie action, et était donc mis au défi d'aller demander à la personne en question si le secret que Sherlock avait détecté était vrai ou non.
La plupart du temps, John osait, mais se faisait hurler dessus, ou risquait de se prendre une gifle bien sentie, et c'était souvent la preuve que Sherlock avait eu totalement raison, mais qu'une femme de cinquante ans avait du mal à avouer au premier venu qui l'interpellait que l'homme à ses côtés de trente ans son cadet n'était pas le meilleur ami de son fils venu l'aider à choisir un cadeau mais bien son amant.
Quand ils répondaient posément à John, soit c'était parce qu'ils n'avaient aucune honte du secret que Sherlock avait détecté, soit que le détective en herbe s'était trompé.
Et dans ce dernier cas, John avait le droit de lui donner un défi à son tour, du genre d'aller chanter à pleins poumons une chanson de Noël en plein milieu de la place (bien sûr, Sherlock le fit en allemand, et bien sûr, il chantait juste et très bien, et se fit applaudir). C'était absurde, mais ils s'en amusaient terriblement.
Ils partagèrent leurs cafés, poursuivirent leur exploration de la ville, au fur et à mesure que la nuit tombait.
Les bâtiments se parèrent de lumières et de guirlandes, et ils continuèrent de se balader dans la joie et la bonne humeur. Autant que faire se peut, ils se tinrent loin des magasins bondés de gens qui faisaient des courses de dernière minute. Ils les observaient de loin, n'ayant aucune raison d'entrer dans les magasins. Sherlock n'aimait pas la foule, et John respectait cela.
À plusieurs reprises, il le vit angoisser alors que la rue était trop étroite, et trop pleine de gens, qui allaient les croiser, leurs heurter, les toucher, et alors il lui prenait la main, l'attirait ailleurs, contre lui, lui faisait prendre une rue parallèle, et poursuivre leur route sans heurts.
Sherlock n'en dit pas un mot à voix haute, mais à chaque fois, il serra la main de John fort, en signe de reconnaissance.
Le temps fila sans qu'ils s'en rendent compte, et la nuit noire était tombée sur la ville. John indiqua avoir encore faim, parce que c'était l'heure du dîner.
— Tu es le pire morfale que je connaisse, se lamenta Sherlock. Ton corps est un moyen de transport, il est soumis à ton esprit, tu n'as qu'à lui dire que tu n'as pas faim, et tu n'auras pas faim, ce n'est quand même pas si compliqué.
— Tu ne connais personne d'autres que moi, répliqua John. Je ne suis pas un morfale, je mange trois fois par jour comme tous les gens normaux qui n'ont pas de liaisons directes entre les bonhommes de leur cerveau et leur estomac.
— Il n'y a pas de bonhomme dans ton cerveau, qui t'a dit un truc pareil ? s'horrifia Sherlock.
John leva les yeux au ciel.
— L'ironie, parfois, c'est pas encore ça. Je suis médecin, enfin à terme. Évidemment que je sais que mon esprit n'est pas régi par des petits bonhommes aux commandes de mon cerveau. Ce serait quand même rigolo, et ça fait des images sympas[3]. Toujours est-il que j'ai faim. On fait quoi ?
Sherlock soupira, et dans un élan dégoûté, accepta de lui trouver un fast-food où ils trouvèrent de la nourriture à emporter. Il considéra les burgers emballés qui teintaient le papier de gras et les frites qui salissaient ses doigts avec étonnement.
— Je n'ai jamais mangé ce genre de choses, indiqua-t-il calmement.
— Ça ne m'étonne qu'à moitié ! s'amusa John. Viens ! Tu vas goûter !
Il récupéra le sac tendu par l'employé, tandis que Sherlock réglait, et John le laissa faire. Il était hors de question de dîner dans la salle du fast-food. Les lumières, les bruits et les odeurs semblaient agresser Sherlock et le mettre aussi mal à l'aise que la foule dans les rues.
Conformément à leurs habitudes, Sherlock leur trouva alors un chantier fermé pour la nuit, avec un immeuble en construction. Ils crochetèrent les serrures, s'introduisirent illégalement, montèrent le plus haut possible, et s'installèrent au bord du vide pour déguster leurs burgers.
John dévora le sien. Sherlock décréta avec fureur que ce n'était bon ni nutritionnellement parlant, ni gustativement, mais que c'était addictif, et il en était agacé.
John n'en rit que davantage en avalant des frites.
Puis le silence retomba entre eux, et ils regardèrent briller la nuit.
— Douce nuit, sainte nuit, chantonna John à mi-voix, que la période des fêtes de Noël et l'euphorie rendait bavard.
— Ça aussi, je la connais en allemand, indiqua Sherlock.
Sans l'avoir prévu, ils se mirent à chanter en canon un chant de Noël religieux, dans deux langues différentes, au sommet d'un immeuble en construction, et John n'avait jamais été aussi heureux de sa vie.
La nuit était bien installée, et ils avaient perdu la notion du temps, quand John se racla la gorge.
— Hum, Sherlock, je...
Son ami se retourna vers lui, perplexe.
— J'ai quelque chose pour toi.
Il attrapa son sac à dos, et l'ouvrit pour y piocher un paquet emballé maladroitement.
— Joyeux Noël. Je sais que c'est dans deux jours, mais comme tu vas partir demain, je voulais...
Sherlock ouvrait des grands yeux abasourdis, et John fut gêné.
— C'est... c'est la première fois que je reçois un cadeau, bégaya Sherlock.
L'expression étonnée de John ne lui échappa pas.
— À l'exception de ma famille, je veux dire. Mais... ce ne sont pas vraiment des cadeaux. Ça ne compte pas vraiment. Je peux tout deviner en avance.
— Tu n'as jamais cru au Père Noël, quand tu étais petit ?
— Non. Pas le genre de la maison, et puis... mon esprit était trop cartésien pour ça. À cinq ans, j'ai fait tous les calculs prouvant que c'était absolument impossible à mettre en œuvre, cette fable d'une personne unique qui faisait une distribution dans le monde entier en une nuit... Mes camarades de classe se sont majoritairement mis à pleurer. On m'a renvoyé de l'école pendant une semaine, parce que les parents refusaient que je sois dans la même pièce que leurs enfants. J'y suis retourné seulement à la rentrée de janvier.
Il disait cela d'un ton détaché, comme toujours quand il révélait des bribes de son passé, mais John pouvait entendre les fêlures de sa voix.
— Je suis désolé pour toi, Sherlock, murmura-t-il.
— Parce que je n'ai jamais cru à la fable populaire d'un vieux cinglé distribuant des cadeaux ? s'étonna le génie.
John le pinça sans répondre dans un premier temps, juste pour le plaisir de l'entendre pousser un petit cri de douleur et râler. Il se le permettait parce qu'ils n'étaient plus assez proches du vide pour tomber si Sherlock sursautait de surprise et de douleur.
— Pour tes camarades de classe qui ne te comprenaient pas. Pour leurs parents qui t'ont méprisé. Pour tes parents et tes enseignants qui ne t'ont pas protégé. Je sais ce que tu penses de mes parents...
— Doux euphémisme, marmonna Sherlock.
— Mais les tiens aussi, à leur manière, t'ont fait du mal. Ça ne se voit peut-être pas autant que moi. Mais ça peut être pire, au final.
Il était terriblement sincère, et quand il regarda dans les yeux de Sherlock, à la lumière des étoiles, il vit combien personne n'avait jamais dit ça à Sherlock.
— Ils n'ont rien fait de mal... murmura le génie. Ils ne m'ont jamais blessé.
— Pas directement. Mais le rôle des parents n'est pas seulement d'aimer inconditionnellement leurs enfants. Sur ça, les miens ont échoué, mais je pense que les tiens ont réussi. Je suis sûr qu'ils sont fiers de toi, de toutes tes réussites, de ton esprit.
Sherlock répondit à sa déclaration par une moue désabusée, mais ne le contredit pas.
— Mais leur rôle, c'est aussi de protéger. De défendre. Et en ça, les tiens aussi ont échoué. T'as jamais eu personne comme moi, pas vrai, Sherlock ? Quelqu'un qui, à défaut de te comprendre entièrement, te respecte et te protège. Protège tes différences.
Ce n'était pas de l'arrogance de la part de John. Il était parfaitement sincère, et il était suffisamment intelligent pour comprendre du comportement de Sherlock qu'effectivement, il n'avait jamais connu quelqu'un comme lui.
— Non... murmura Sherlock. Jamais.
— Eh bien tu aurais dû. Tes parents auraient dû tenir ce rôle.
— Est-ce que tu essayes de me dire que tu prends le rôle de mes parents ? interrogea le jeune homme.
Il y avait une drôle de blessure dans sa voix, que John ne savait pas interpréter.
— Bien sûr que non, répliqua l'étudiant en médecine. Je veux te dire que tu aurais dû connaître ça, et ne pas être surpris de mon comportement. Mais tu es surpris, et tu me regardes encore parfois comme si j'allais disparaître du jour au lendemain. Ce n'est pas le cas. Tu es mon ami, Sherlock. Mon meilleur ami, et je te connais depuis quelques semaines à peine, mais je ne partirai pas. Jamais. Quoi que tu fasses, je te soutiendrai et serai là pour toi. Et je t'offre un cadeau à Noël pour ça. Pour te rappeler que je tiens à toi, et que je serai toujours là.
John le regardait droit dans les yeux, terriblement sincère. Il ne réalisait pas à quel point ce qu'il faisait était une erreur. À quel point il jurait des promesses impossibles à tenir. À quel point il s'engageait envers la seule personne qui serait capable de lui citer ses propres mots exacts un an plus tard, quand il ferait voler en éclats les serments qu'il prononçait alors.
— Quoi que je fasse ? demanda Sherlock avec un petit sourire ironique. On peut aller plus loin dans l'illégalité, alors ?
— Non, rit John. Tu sais très bien que non. Allez, ouvre ton cadeau.
— Je n'ai rien pour toi. Je n'y ai même pas pensé.
— Je ne t'offre pas quelque chose pour obtenir autre chose en retour, crétin. C'est le but d'un cadeau. Être désintéressé.
— N'importe quoi. Tous les gens qui disent ça mentent totalement. Ils offrent des présents pour en avoir en retour. C'est pour ça que Noël est si hypocrite.
John leva un sourcil cynique. Sherlock n'avait pas entièrement tort, sur certains points.
— Noël est hypocrite parce qu'on se sent obligés d'offrir des cadeaux aux autres pour ne pas passer pour radins, méprisants, ou ce genre de choses, pas forcément pour obtenir quelque chose en retour. Mais vu que tu sais tout de moi, est-ce vraiment ce que je fais en cet instant ?
Sherlock l'observa de haut en bas, et John se laissa faire. C'était plus pour se donner une contenance qu'autre chose. L'un et l'autre savaient très bien que John était parfaitement sincère et désintéressé dans sa démarche, et que Sherlock n'avait pas besoin de l'analyser pour le savoir.
— Non, finit par avouer le génie. Mais tu es la première personne que je rencontre qui est réellement sincère vis-à-vis de ça.
— Je serai ton premier pour beaucoup de choses, Sherlock, je le crains, répondit John sans réaliser le double sens de sa phrase. Mais si ça peut t'aider à mieux comprendre l'humanité, je le fais avec plaisir. Tu comptes prendre ce paquet et l'ouvrir maintenant, oui ou non ? Je crève de froid.
Sherlock obtempéra sans réfléchir, récupérant le paquet des mains de John, qui se pressa de les remettre au fond de ses poches. Malgré ses gants, il gelait à pierre fendre, et si le spectacle du haut des bâtiments était magnifique, il y faisait toujours glacial.
Sherlock, qui ne semblait pas être capable de souffrir du froid, fit glissa ses doigts de manière experte sous les morceaux de scotch. John aurait dû se douter qu'il n'était pas du genre à déchirer sauvagement, mais à ouvrir chaque attache, pour ensuite plier le papier proprement.
— Oh, murmura Sherlock en découvrant son cadeau.
— Désolé, expliqua John alors que Sherlock prenait le tissu dans ses mains et le dépliait. J'aurais voulu le modèle 100% soie, mais... je n'avais pas les moyens. Mais je refusais de te laisser avoir froid plus longtemps.
Sherlock enroula aussitôt l'écharpe autour de son cou, en faisant plusieurs fois le tour, vu la longueur. Il avait l'air sincèrement ravi. Pas beaucoup moins ridicule qu'avant, avec l'épaisseur supplémentaire que cela créait autour de son cou et déformait sa silhouette, mais au moins il serait au chaud. Ce n'était pas exactement ce que John aurait voulu lui offrir, mais il n'avait pas pu faire mieux. Au moins, l'écharpe avait la couleur qu'il désirait, ce bleu très profond qui faisait ressortir sa peau pâle, ses yeux clairs. Il était magnifique, et John sourit pour masquer les battements furibonds de son cœur.
— Ne sois pas stupide, John. Elle est parfaite. Merci beaucoup.
Il enfouit son visage dedans en souriant, et il avait l'air tellement sincère que John en avait mal au cœur.
— De rien, Sherlock. Joyeux Noël. Et merci à toi.
— De quoi ?
— Pour ton cadeau.
— Je ne t'ai pas fait de cadeau, rappela le génie sur le ton lent et patient qu'il employait quand il voulait souligner que son auditoire était peuplé d'abrutis.
— Bien sûr que si, répliqua John. Merci pour cette parfaite journée de Noël. Je ne me suis jamais autant amusé de ma vie !
Sherlock le considéra un instant, mais John savait qu'il ne cherchait pas à évaluer sa sincérité. Il réfléchissait à autre chose. Alors il attendit tranquillement que ça finisse de maturer dans le cerveau du jeune génie.
— Viens ! décréta soudain Sherlock en se relevant brusquement. La journée n'est pas finie !
John aurait eu un excellent argument à opposer à cela, l'heure qu'il était. La soirée était déjà pas mal entamée, et techniquement, il aurait dû rentrer chez lui. Au lieu de quoi, il tendit la main, Sherlock la prit, et il suivit le génie les yeux fermés.
— Tu m'expliques, s'il te plaît ? réclama John.
— On rentre chez moi, répondit Sherlock.
— Tu sais qu'on a inventé un truc très bien qu'on appelle une porte ?
— Impossible à utiliser.
Ils étaient dans la rue derrière chez Sherlock, et ce dernier venait d'indiquer qu'il fallait qu'ils s'introduisent dans le jardin en face d'eux, contournent la maison illuminée, grimpent à l'arbre du fond du jardin, atteignent grâce à ses branches le toit de la maison de Sherlock, puis ensuite se glissent dans la chambre du jeune homme. C'était le plan le plus débile que John n'avait jamais entendu. D'accord, ils étaient déjà sortis par là, mais bizarrement, il lui semblait plus facile de descendre d'un arbre que d'y monter.
— Tu n'as qu'à me suivre et faire comme moi, indiqua Sherlock en s'éloignant.
John soupira et le suivit. Ce n'était pas comme s'il prévoyait de ne pas le faire, au fond. Ce n'était pas comme s'il était capable de refuser quoi que ce soit à Sherlock, s'il devait être honnête avec lui-même.
La première étape ne fut pas aussi compliquée que prévu. Le jardin dans lequel ils pénétrèrent était sombre, et aucun détecteur automatique de lumière ne se mit en route. La famille qui y vivait était installée bien au chaud dans son salon, et ne jeta pas un seul coup d'œil vers l'extérieur. Ils atteignirent l'arbre, sans difficulté.
L'escalade de celui-ci fut plus compliquée. Sherlock n'était pas beaucoup plus grand que John, mais suffisamment pour qu'il ne se rend pas compte, parfois, que quelques centimètres pouvaient faire la différence, surtout dans le sens de la montée plutôt que la descente que John avait déjà pratiqué avec son ami. Malgré sa carrure très fine, il était aussi plus musclé, plus assuré dans ses gestes, et son sens de l'équilibre était parfait. Avec l'agilité d'un singe, il s'éleva plusieurs mètres au-dessus du sol sans la moindre hésitation.
John, plus lent, plus lourd, plus maladroit, le suivit avec difficulté. Pourtant, pas une seule seconde, il ne songea à renoncer, ou à combien le sol s'éloignait de plus en plus, et combien la chute serait fatale dans le pire des cas. Bizarrement, il faisait confiance à Sherlock, et estimait que s'il y avait eu le moindre danger et qu'il n'en pensait pas John capable, il ne l'aurait pas mis ainsi en danger.
Une fois sur le toit, tout fut plus simple, et riant à voix basse, ils traversèrent la largeur de la bâtisse pour être du côté de la chambre de Sherlock.
— Je passe en premier, indiqua le génie. Ouvrir la fenêtre. J'ai l'habitude.
John le laissa faire sans broncher, puis une fois le jeune homme disparu à l'intérieur, il attendit le signal, et reproduisit ses gestes. C'était une folie. Pendant une seconde, John se maintenait à la force de ses bras dans le vide, avant de tomber à travers la fenêtre ouverte et être en sécurité. C'était une seconde à peine, mais c'était la fois si long et si court. Une seconde suspendue, littéralement. C'était ce qu'il ressentait en permanence avec Sherlock.
Il atterrit sur le sol encombré de la chambre avec un total manque de grâce.
— Très délicat, John, commenta Sherlock ironiquement.
— Merde ! Je suis désolé ! J'espère que personne n'a rien entendu, chuchota John en s'immobilisant dans l'obscurité de la pièce, le cœur battant.
Il ne voyait pas le visage de Sherlock, qui le regardait, perplexe et amusé.
— Je doute sincèrement que quiconque à trois kilomètres à la ronde ne t'ait pas entendu, tu as la discrétion d'un éléphant, répliqua le génie à voix haute.
— Chhhhh !
Sherlock traversa la pièce dans le noir sans rien heurter, et atteignit son bureau. Il alluma sa lampe, et la lumière jaillit dans la pièce, faisant cligner John des yeux.
— Pourquoi chh ? Pourquoi je devrais me taire ? demanda Sherlock.
— Pour... éviter de savoir qu'on est là ? proposa John, désormais perplexe.
— Je ne vois pas comment quiconque pourrait le savoir, ou en avoir quelque chose à faire. Nous sommes seuls.
— Hein ? s'ahurit John.
D'accord, Sherlock lui avait dit plus tôt dans la journée qu'il était disponible et qu'il était seul jusqu'au lendemain, mais comme ensuite, il avait refusé d'utiliser la porte, John avait cru qu'il avait mal compris, ou que dans le langage de Sherlock, cela voulait dire « personne d'intéressant » ou « personne de sa famille ». Peut-être que sa femme de ménage était là, qu'il ne fallait pas la déranger. Peut-être qu'il ne fallait pas laisser de preuve sur le fait que Sherlock faisait entrer un autre garçon en douce dans sa chambre.
— Il n'y a personne dans la maison, explicita Sherlock, et John pouvait dire au ton de sa voix qu'il n'aimait pas devoir expliquer quelque chose d'aussi simple.
— Mais pourquoi on est rentrés en douce par la fenêtre, alors ? s'abasourdit John.
— En douce ? Vu le bruit que tu as fait, je n'aurais pas défini ça ainsi.
John leva les yeux au ciel, excédé.
— Tu m'as compris. On est entrés par la fenêtre.
— Certes.
— Mais pourquoi, s'il n'y a personne qui aurait pu nous voir entrer par, je ne sais pas, au hasard, la porte ?
— Même quand il y a quelqu'un dans la maison, tu pourrais passer par la porte, tu sais. Tout le monde s'en ficherait.
John se massa les tempes. Il venait de se gameller après avoir grimpé dans un arbre et monté sur un toit, son cœur battait encore trop vite du fait de l'adrénaline, et il ne comprenait rien à cette conversation et à la logique de Sherlock. Il tentait de le suivre, échafaudait des hypothèses quand rien ne semblait logique et à écouter le génie, John avait systématiquement tort et c'était évident. Sauf que rien ne l'était pour l'étudiant en médecine.
— Je ne comprends plus rien. Pourquoi on n'est pas passés par la porte cette fois ? Et pourquoi de manière générale, tu sembles sous-entendre que je pourrais quand même passer par la porte aussi ?
— Je suis sorti par la fenêtre en partant, indiqua Sherlock comme si ça répondait à tout.
Il y eut un instant de silence, et John attendit. De son point de vue, ça ne répondait à rien du tout.
— Et alors ? insista-t-il quand il vit que Sherlock n'ajoutait rien.
— Je n'avais pas pris mes clés, indiqua le génie en pointant son trousseau du doigt.
En effet, l'anneau de métal qui retenait une douzaine de clés était posé sur son bureau. John se demandait d'ailleurs pourquoi il en avait autant.
— Donc tu as pensé à prendre ton kit de crochetage de serrure au fond de tes poches, mais pas tes clés ? s'ahurit-il.
— Ne sois pas stupide, John. Mon kit de crochetage ne quitte jamais le fond de mes poches.
Ce faisant, Sherlock se débarrassa de son manteau et caressa du bout des doigts sa nouvelle écharpe avant de la poser délicatement sur son bureau, alors que le reste de ses vêtements et chaussures n'avaient pas le droit à autant de soin de sa part. John, lui, avait l'impression d'avoir pénétré dans un monde parallèle. Qui partait de chez soi par la fenêtre en oubliant ses clés ?
— Et tu ne pouvais pas crocheter la serrure de chez toi, du coup ? proposa-t-il.
— Ne sois pas stupide, John, répéta Sherlock. Il y a l'alarme. Si je force la serrure, elle se déclenchera.
— Mais elle ne se déclenche pas quand tu rentres par la fenêtre ?
— Bien sûr que non, puisque je ne l'ai pas activée en partant.
— Tu as conscience que ce que tu dis n'a aucun sens ? Si l'alarme n'est pas branchée, tu aurais pu crocheter la serrure.
Sherlock soupira profondément, comme désolé de devoir expliquer des choses qui paraissaient si simples pour lui.
— L'alarme de la maison est désactivée, parce que je ne l'ai pas branchée en partant. L'alarme liée aux fenêtres, j'ai réussi à la désactiver de manière permanente en ce qui concerne ma chambre, mais elle reste active pour les autres fenêtres. Et l'alarme de la porte est toujours active, si quelqu'un utilise une clé qui n'est pas reconnue et enregistrée par le système, ça lancera l'alerte.
John le regardait, bouche bée. Il avait définitivement atterri dans un monde parallèle.
— Vous avez trois systèmes d'alarme distincts ? Se déclenchant pour trois types d'intrusion différents ?
— Exactement. L'alarme liée à la porte est liée aux clés utilisées, l'alarme aux fenêtres détecte les franchissements de cadre, et l'alarme globale de la maison évalue les masses se déplaçant à l'intérieur. Enfin, c'est un même système globalisé qui gère le tout, mais trois circuits différents sont mis en place. Tu veux voir ? C'est intéressant.
— Voir ça comment ? demanda John.
— Viens !
Sherlock, soudain joyeux, bondit à travers sa chambre, et en ouvrit la porte. Il se retourna dans l'ouverture, fixant John, l'invitant à le suivre. Ce dernier, soupirant, abandonna ses chaussures, son sac, son manteau, histoire de ne pas mourir de chaud, et suivit son ami qui sautillait dans l'escalier. Il allumait les lampes au fur et à mesure de son passage, rendant la vie à la maison plongée dans le noir. John la connaissait bien, depuis le temps, mais il se cantonnait généralement à la seule chambre de Sherlock, et à tout le rez-de-chaussée (salon, cuisine et compagnie). Ils n'étaient jamais entrés dans cette pièce, au 1er étage, et fut surpris de découvrir un bureau banal. Vu l'originalité de Sherlock, il avait tendance à imaginer l'incroyable et improbable pour tout le reste de la maison.
— Je vais te montrer ! indiqua Sherlock en allumant un ordinateur posé sur une table.
John n'avait jamais vu un modèle aussi perfectionné. Ils n'avaient jamais eu d'ordinateurs à la maison, mais il était quand même capable de savoir que ce modèle-là était du dernier cri, et devait coûter plus cher que ce que John dépensait en un trimestre pour se loger, se nourrir, payer ses charges et ses frais courants.
Sherlock pianota sur l'écran qui s'allumait, et expliqua :
— Le système d'alarme est entièrement géré par ça. Je n'ai techniquement pas le droit de m'en servir, alors on ne sait pas que je suis capable de le trafiquer. C'est assez intéressant, d'ailleurs. Même si je ne suis pas encore au point en langage informatique.
— Toi, tu reconnais ne pas savoir quelque chose ? ricana John. C'est une première !
— Ça changera la vie des gens ! prophétisa Sherlock. J'en suis certain ! Je trouve ça absolument fantastique, mais c'est encore si méconnu, je ne peux pas facilement me former, aussi !
John lui sourit, ayant l'envie déraisonnée de lui ébouriffer les cheveux en voyant son enthousiasme. Il tira une chaise à lui, s'assit à côté de Sherlock, et ils s'absorbèrent dans l'écran.
John ne comprit pas tous les détails techniques. Sherlock lui afficha le circuit des alarmes, avec le plan global de tout le bâtiment, et c'était fascinant, voire même très poétique, à sa manière. La manière dont Sherlock s'y était pris pour désactiver l'alarme qui se déclenchait si quelqu'un tentait de forcer une fenêtre, briser un carreau, ou franchir un encadrement (du moins pour un corps assez gros pour être un humain) uniquement pour sa chambre faisait appel à des connaissances de paramétrage que John n'avait pas, mais il aimait écouter Sherlock parler.
Ils quittèrent ensuite la pièce en replaçant les choses exactement comme elles étaient quand ils étaient arrivés. Heureusement que Sherlock avait une excellente mémoire, et qu'il avait observé la chaise de John avant que celui-ci ne la bouge.
[1] La chanson est sortie en 1984. L'histoire se passe environ en 1995 et je ne sais pas si à l'époque, elle était déjà culte !
[2] Je ne parle pas danois non plus, mais Google, oui. Et non, je ne vous donnerai pas la traduction, pour que vous restiez autant dans le flou que John ! Même si la construction de la phrase donne des certains indices !
[3] John est scénariste chez Pixar avant l'heure et sans le savoir.
Prochain chapitre ! Me 30/10? Reviews, si le coeur vous en dit ? :)
