Chapitre 33 - Flashback 8
Mai 2002
La nouvelle de l'absence de Voldemort était l'opportunité que Maugrey et Kingsley avaient attendue.
Ils avaient lentement partagé les plans, les rotations des prisons, et d'autres informations que Malefoy avait fournies à l'Ordre. Mettant un plan sur pied. Attendant pour frapper.
Ils étaient prêts.
Charlie, Harry et Ron attendaient une telle attaque depuis des mois.
Enfin, tout était aligné.
C'était la plus grosse attaque coordonnée jamais entreprise par la Résistance. Presque chaque combattant avait été impliqué. Ils avaient ciblé plusieurs des prisons les plus grosses et les mieux protégées, ainsi que la division de développement des sorts.
Hermione était si stressée d'avoir mené à ça qu'elle fit presque une crise de nerfs. Faisant l'inventaire de l'hôpital. Fabriquant de grosses quantités des potions de guérison les plus cruciales. Essayant de se préparer à tout.
Elle avait le doute terrifiant, profondément enfoui en elle, qu'elle pouvait avoir envoyé la Résistance à la mort. Qu'il était possible que ça soit un piège très élaboré au long cours, tendu par Voldemort et Malefoy.
Elle ne cessait de se repasser le moment d'hésitation de Malefoy, se demandant si ça avait été un signe de trahison.
Tous ceux qui étaient restés, Hermione, Poppy et une poignée d'autres guérisseurs attendaient nerveusement au Square Grimmaurd. Attendant des nouvelles.
Hermione creusa presque un trou dans le sol de l'entrée à force de faire les cent pas jusqu'à ce que les corps commencent à arriver massivement.
C'était un flot de gens mourant et blessés.
Ses vêtements et ses mains étaient trempés de sang, et la maison entière fut convertie en hôpital pour pouvoir accueillir tout le monde.
Elle le crut à peine quand elle fut informée des heures plus tard que ça avait été un succès spectaculaire.
L'Ordre avait libéré plusieurs centaines de prisonniers et avait rasé les prisons et la division des sorts en repartant.
Sur les conseils de Severus, l'Ordre avait attaqué les laboratoires de la division des sorts et ramené une énorme quantité d'ingrédients rares et extrêmement précieux pour les potions qu'Hermione avait été incapable de trouver depuis des années, incluant un flacon entier de venin d'acromentule. Hermione avait presque pleuré quand Padma Patil le lui avait donné.
L'état des survivants ramenés de la division des sorts était épouvantable. Ils étaient si horriblement torturés et avaient reçu tant de maléfices que beaucoup en étaient devenus fous. Leurs corps détruits et ravagés au-delà de toute réparation possible. Il n'y avait pas de remède pour la plupart d'entre eux ; elle ne pouvait qu'alléger leur douleur et espérer qu'ils meurent rapidement.
L'animosité envers Severus parmi les plus jeunes membres de l'Ordre et de la Résistance conscients de son rôle dans la division des sorts avait augmenté à un degré explosif. Maugrey avait dû exclure Severus des réunions de l'Ordre pour maintenir la paix.
Pour les combattants qui n'avaient pas été blessés, l'attaque coordonnée avait été accomplie en moins d'un jour. Mais pour Hermione et tous ceux qui avaient ne serait-ce qu'un fragment de formation de guérisseur, ça n'avait été que le début.
Ils étaient sur les genoux à essayer de gérer l'inondation de gens horriblement blessés et malnutris abruptement confiés à leur soin, en addition à toutes les blessures reçues pendant l'attaque.
Ils déménagèrent les blessures les plus basiques hors du Square Grimmaurd le plus vite possible, pour libérer des lits pour les sorts complexes et les blessures qui requerraient les soins spécifiques d'Hermione.
Il fallut des semaines avant qu'on puisse suffisamment se passer d'Hermione pour qu'elle puisse aller faire une récolte ou faire le lien avec Malefoy. Il l'avait, sur ce temps-là, convoquée urgemment deux fois pour récupérer des notes qu'il lui avait laissées, avertissant de contre-attaques imminentes. Voldemort avait été furieux de l'attaque et avait répliqué durement. Godric's Hollow avait été entièrement brûlé, que ce soit les parties moldues ou les parties magiques. Voldemort avait enchaîné les os de Lily et James et les avait pendus à une potence pour que l'Ordre les trouve en arrivant.
Voldemort avait lancé des attaques vicieuses sur l'Angleterre moldue ; inondant Hermione d'un flot de Moldus blessés qu'elle devait stabiliser avant que l'Ordre ne leur efface la mémoire et les envoie récupérer dans des hôpitaux moldus.
Hermione fit des gardes de vingt-quatre heures avec quatre heures de pause pour dormir jusqu'à ce que sa magie s'épuise complètement à la fin de la troisième semaine.
Poppy l'avait tirée hors de la salle d'hôpital et avait dit à Maugrey que s'il ne voulait pas qu'Hermione meure ou n'abîme sa magie de façon permanente, Kingsley et lui devaient trouver des guérisseurs pour la relayer.
Hermione suspectait que Kingsley avait pris en otage des guérisseurs de Sainte Mangouste pour les deux jours où elle récupérait. Poppy avait refusé de croiser son regard ou de répondre à la question quand Hermione avait demandé qui la remplaçait.
Après presque un mois, les choses se calmèrent enfin un peu.
Hermione était à court de la plupart des ingrédients qu'elle récoltait localement. Elle était sortie. Dans la campagne luxuriante de la fin juin, elle fut capable de refaire le stock de la plupart de ses ingrédients rapidement avant d'aller voir Malefoy. Elle avait à peine eu le temps de penser à lui pendant les dernières semaines.
Il transplana au moment où elle passait par la porte. Son expression quand il apparut se tordit et il trébucha légèrement.
Ils se fixèrent l'un l'autre.
"Tu as l'air affreux," dit-il finalement.
"Merci," dit-elle acerbement.
"Que s'est-il passé ?" s'enquit-il.
"La Résistance n'a pas d'autre guérisseur avec ma spécialité," dit-elle d'une voix lasse.
Elle le fixa.
"Tu as l'air assez affreux aussi," dit-elle, le regardant attentivement. C'était un énorme euphémisme.
Il baissa les yeux vers elle. Son visage était tendu et émacié, comme s'il avait drastiquement perdu du poids. Ses traits étaient tirés. Sa peau était grise et semblait faite de papier. Il avait l'air de ne pas avoir dormi depuis la dernière fois qu'Hermione l'avait vu.
"Tu auras peut-être remarqué que le Seigneur des Ténèbres était plutôt mécontent après les attaques," dit-il d'une voix lasse.
Hermione se sentit pâlir, et sa poitrine lui fit mal comme si elle avait été frappée. Elle n'avait même pas pensé… elle avait eu les informations et était partie avec. Elle s'était inquiétée de la possibilité d'une trahison, mais elle ne s'était même pas arrêtée pour réfléchir que leur légitimité signifiait que Malefoy pourrait payer le fait de les lui avoir données.
"Que s'est-il passé ?" demanda-elle, sortant sa baguette et s'avançant vers lui.
"Ça va," dit-il d'une voix hachée.
"Que t'a-t-il fait ?"
"Dégage, Granger," dit Malefoy, grimaçant. Ses doigts étaient légèrement agités de spasmes alors qu'il s'éloignait d'elle.
Hermione l'ignora et lança un sort de diagnostic. Il ne bougea pas.
Le diagnostic indiquait qu'il avait abondamment subi le Doloris. Probablement jusqu'à ses limites, étant donné qu'il avait toujours les effets secondaires des semaines après. Ou peut-être que c'était arrivé à répétition.
Il y avait quelque chose d'autre sur le diagnostic. Elle lança un sort de diagnostic plus obscur pour essayer d'identifier ce que c'était.
"Que-ce… qui est arrivé à ton dos ?" demanda-elle, trouvant difficile de maintenir sa voix calme alors qu'elle essayait de lire les informations que le charme révélait. C'était un mélange flou de Magie Noire et de poison ; elle ne savait même pas comment l'interpréter.
Le visage de Malefoy se tendit légèrement.
"Le Doloris est une excellente punition pour l'échec," dit-il d'un ton léger, "mais l'utiliser avec excès risque de compromettre l'esprit. Parfois, un rappel différent, permanent, est jugé nécessaire en addition."
"Enlève ta chemise," ordonna Hermione. Elle avait besoin de voir ce qui avait été fait ou elle ne serait pas capable de lire correctement les résultats du diagnostic. Les dommages qu'il indiquait était un mélange extensif de blessures qui ne ressemblait à rien de ce qu'elle avait vu précédemment.
"Laisse tomber, Granger," dit-il d'une voix dure. "Ton Ordre a eu ce qu'il voulait." Il s'esclaffa faiblement. "J'espère juste que ça valait le coup et que vous n'avez pas juste récupéré plein d'estropiés inutiles."
"Laisse-moi voir," le pressa-elle. "Laisse-moi juste voir."
"Ne fais pas semblant de t'en soucier," dit-il froidement. "Est-ce que tu vas vraiment jouer la surprise ? Tu espères me faire croire que tu n'avais pas anticipé ça ? Après tout, n'espérais-tu pas que je meure une fois que tu aurais obtenu tout ce que tu pouvais de moi ?"
L'amertume dans sa voix était si mordante qu'Hermione pouvait presque en sentir le goût. Elle envahit la pièce et Hermione put sentir son ressentiment. Sa solitude.
"Non. Je… je suis désolée. Je n'ai pas…" Elle s'approcha de lui.
Il avait été blessé depuis des semaines à cause de l'opportunité qu'il leur avait donnée. Avec son rang dans l'armée de Voldemort, le blâme allait forcément retomber sur lui même s'il n'était pas soupçonné d'en être la cause.
Elle ne s'était même pas arrêtée pour le réaliser. Ne l'avait pas remercié. Il était juste… sorti de son esprit. Il ne lui était pas venu à l'esprit qu'il pourrait le payer très cher.
"Je suis désolée," dit-elle, tendant la main vers lui, se sentant submergée par l'horreur et la culpabilité. "J'ai été tellement prise par le travail… je n'ai pas pensé…"
Elle dégraffa la cape de Malefoy et la fit doucement glisser de ses épaules. Il tressaillit et regarda vers le plafond, l'air résigné.
Elle déboutonna lentement ses robes et sa chemise puis, passant derrière lui, aussi légèrement qu'elle le put, enleva les vêtements de ses épaules.
Elle étouffa une exclamation.
Il y avait des douzaines de runes gravées dans chacune de ses omoplates. Profondes. Droites. Coupées jusqu'aux os.
La magie noire qui s'en dégageait était palpable, de manière écoeurante. Juste à se tenir près d'elles, Hermione sentit son corps se couvrir de sueur froide.
Hermione avait lu des choses sur les mages qui utilisaient des rituels runiques maléfiques pour lier leurs serviteurs. La cérémonie, brutale, avait été interdite depuis des milliers d'années.
Malefoy avait été conscient alors que le sang et la magie étaient invoqués dans sa chair ; chaque ligne était gravée en lui.
Les coupures de chaque runes étaient toujours à vif, comme si elles ne pouvaient pas guérir, même si elles étaient clairement vieilles de plusieurs semaines. Cela lui rappelait les blessures des loup-garous. La Magie Noire s'était visiblement infectée.
Elle leva la main mais se retint de le toucher. "Qu'a-t-il fait ? Drago, comment t'a-t-il fait ça ?"
"Une lame d'argent forgée par les gobelins, infusée dans du venin de Nagini. On m'a dit qu'elles pourraient finir par guérir," dit-il d'une voix tendue. "Il n'y a rien que tu puisses faire. Maintenant que tu as satisfait ta curiosité, on devrait revenir à nos affaires."
Il essaya de se tourner face à elle mais Hermione marcha autour de lui, lançant différents charmes de diagnostic obscurs et les inspectant. Sa magie était de nouveau stable, bien que la privation de sommeil rendait sa tête légère et creuse.
Il y avait des vrilles noires sous sa peau à cause du mélange entre le venin et la magie noire. Elle pouvait voir le poison dans ses veines, jusqu'à la moitié de son dos vers le bas, jusque dans ses épaules vers le haut, et autour de sa cage thoracique comme une plante grimpante empoisonnée. Rampant en lui et plongeant au cœur de sa magie.
Elle fit venir sa sacoche.
"Je suis vraiment désolée. Je… ne peux pas soigner ça. Mais je pense que je peux aider à les contenir. Laisse-moi essayer, s'il te plait."
Malefoy la regarda par-dessus son épaule mais n'essaya plus de s'éloigner d'elle.
Hermione lança un sort complexe puis, aussi doucement qu'elle le put, passa le bout de sa baguette lentement le long de l'une des longues vrilles noires. En commençant près de sa côte la plus basse, elle força progressivement le poison à retourner vers les incisions puis siphona le minuscule fil hors de la rune depuis laquelle il s'était étendu. Alors qu'elle faisait sortir le poison et le versait dans une fiole vide, elle dût renforcer la connexion entre le fil et les tissus d'une brusque secousse.
Malefoy tomba presque à genoux en hurlant. C'était un râle guttural, presque inaudible, de quelqu'un qui était intimement habitué à la torture.
"Qu'est-ce que tu fais ?" dit-il, grondant à moitié, grognant à moitié. "Est-ce que ce n'est pas suffisamment douloureux pour toi ?"
Hermione posa une main sur son bras, essayant de le tenir fermement. "Je suis désolée. Je n'essaie pas de te faire mal. Je dois faire sortir l'excès de magie noire. C'est du poison. Si tu la laisses là, ton corps et ta magie vont essayer de l'assimiler. Et… quand tu as de la magie noire en toi au niveau cellulaire comme ça… il n'y a pas de retour en arrière. Elle commence à te manger de l'intérieur. Ce genre de magie est la raison pour laquelle ton Seigneur des Ténèbres ressemble à ça. Et… avec la quantité de runes… tu en as au plus pour quelques années. Soit ton corps, soit ton esprit, la magie noire prend son dû."
"Je sais comment fonctionne la magie noire," siffla-il. Ses poings étaient serrés et il tremblait légèrement.
"Alors, s'il te plait, laisse-moi essayer d'arranger ça."
Drago baissa légèrement la tête et souffla légèrement comme s'il était en train de rire. Hermione l'étudia pendant un moment. Il ne dit rien d'autre.
Elle traça deux autres fils. Au troisième, Drago s'effondra à genoux. Il était mortellement pâle et sa peau semblait froide et humide au toucher.
Elle posa une main aussi doucement que possible à l'avant de son épaule. Elle pouvait sentir l'arche de sa clavicule sous ses doigts, et voir le battement follement rapide de son pouls sous sa mâchoire.
"Est-ce que tu veux que je te stupéfixie ?" demanda-elle à voix basse. "Je peux le faire plus vite de cette façon. Cela ne changera pas l'efficacité. Mais il faut que tu me fasses confiance."
Malefoy se figea. Y réfléchissant apparemment.
"Vas-y," dit-il après une minute. "Tu es déjà plus que capable de me faire tuer n'importe quand s'il t'en prend l'envie."
Elle le serra contre elle, sa tête pressée contre le diaphragme d'Hermione.
"Stupefix," dit-elle doucement, et elle l'attrapa alors que son poids mort se pressait contre elle. Avec un sort d'allègement qu'elle connaissait bien, elle l'allongea doucement contre le col et posa sa tête sur sa cape.
Hermione travailla rapidement. Elle avait déjà fait ce travail quand elle était en formation dans un hôpital en Albanie. Ça avait été une seule rune auto-infligée sur un mage noir débutant qui n'avait pas compris la magie noire qu'il essayait d'invoquer jusqu'à ce que l'empoisonnement ne manque de le tuer.
Avec Malefoy inconscient, la culpabilité d'Hermione put la frapper pleinement.
Elle aurait dû s'en rendre compte. Elle aurait dû revenir plus tôt pour vérifier comment il allait. Elle avait peur qu'il ne soit trop tard. Les runes étaient fixées. Profondément.
Elle siphonna la magie noire jusqu'à ce qu'elle ait huit fioles remplies du mélange du sort et du poison. Elle devrait les incinérer dans un feu magique.
Elle plaça précautionneusement un sort de contenance autour des runes sur chaque omoplate. C'était un sort que Severus lui avait enseigné ; il l'avait utilisé pour contenir le sort dans la main de Dumbledore. Etant donné le niveau de magie qu'il y avait dans le dos de Malefoy, elle doutait que cela aurait un effet mais elle essaya quand même.
Les blessures de Malefoy n'avaient pas pour but de le tuer immédiatement ; elles étaient plutôt faites pour faire mal et corrompre sa magie. Une sentence de mort progressive. La magie noire comme les rituels de sang runiques était puissante et ancienne.
Elle lut le serment.
Ce n'était pas un serment runique classique. Voldemort, dans son orgueil, n'avait pas utilisé un serment traditionnel de loyauté ou d'honnêteté. Il semblait plutôt forgé pour cet échec spécifique. Les runes forçaient Malefoy à être sûr de lui, rusé, infaillible, impitoyable et inflexible ; déterminé à réussir.
Hermione ne savait pas quelle était l'efficacité des serments de sang runiques ; mais elle suspectait que la confiance aveugle de Voldemort dans la Marque des Ténèbres avait sauvé la vie de Malefoy. Si Malefoy avait été forcé de porter un serment de loyauté et d'honnêteté gravé dans ses os, il aurait probablement été forcé d'admettre sa trahison. À la place, Voldemort avait accidentellement utilisé l'ancienne magie pour pousser la force de Malefoy à faire ce qu'il voulait.
L'excès de cruauté était horrifiant. Ce n'était pas comme une blessure de bataille ; rapidement infligée, mais lente à guérir. Le rituel avait probablement pris des heures pendant lesquelles Malefoy avait été attaché et gardé conscient. La précision et l'uniformité des coupures. La calme invocation de la magie noire. Le temps prit pour essuyer le sang avant de passer à l'incision suivante. Enfoncer la pointe de la lame jusqu'aux os n'était pas nécessaire ; cela n'avait été fait que pour renforcer la douleur. C'était un serment dans la chair ; il n'y avait rien qui ne requerrait qu'il soit écrit sur les os. Il avait aussi subi le Doloris, soit avant, soit après que le rituel ait eu lieu, possiblement les deux.
Elle avait envie de vomir rien que d'y penser.
Hermione sortit son essence de Dictame. Il ne lui en restait plus que quelques fioles.
Elle sortit ses tentacules de Murlap et les écrasa avec dix gouttes d'essence de Dictame pour faire un baume qu'elle pressa doucement dans les coupures des runes. Elle ne pouvait pas soigner les incisions mais elle pouvait réduire la douleur et atténuer les effets du venin pour qu'elles puissent s'apaiser plus rapidement. Puis elle jeta un sort de protection sur le dos de Malefoy pour tout sceller sans utiliser de bandages.
Elle fit courir ses doigts sur ses bras, sentant les nœuds rigides dans ses muscles à cause du Doloris. Il apparaissait qu'il s'était au moins fait soigner pour ça.
Voldemort ne voulait clairement pas endommager Malefoy au point de le ruiner complètement, mais il n'avait pas eu de scrupules à torturer Drago jusqu'à ce qu'il atteigne ses limites.
Malefoy était une arme pour Voldemort. La décision de graver des runes en lui rendait Drago plus mortel. Elles affutaient ses contours, mais elles faisaient aussi de lui un outil à court terme.
L'usage intensif de la magie noire érodait les gens sur plusieurs années. Il y avait une raison pour laquelle les mages noirs atteignaient rarement les cent ans. Ils devenaient fous, ou se détérioraient physiquement. Avec la quantité de magie noire qui avait émané des runes avant qu'Hermione ne les traite, Malefoy aurait été chanceux de vivre une décennie ; quelques mois probablement avant que son esprit ne commence à faillir. Il avait déjà tendance à arriver imprégné de magie noire.
Les mains d'Hermione remontèrent jusqu'à son cou, et elle enroula la chaîne de son collier autour de ses doigts alors qu'elle regardait Drago.
Elle prit sa main gauche dans les siennes. Ses longs doigts rendaient les siens tous petits. Il y avait les callosités familières dues au vol et au duel sur sa paume et ses doigts.
Elle massa légèrement sa main. Les doigts de Malefoy tressaillirent légèrement sous son toucher, même s'ils devaient être insensibles. Elle tapota le bout de sa baguette aux divers points de pression de sa main, envoyant de petites vibrations dans les muscles tirés pour aider à relâcher la tension.
Quand ses doigts s'ouvrirent, elle commença à les plier, les frotter et les masser jusqu'à ce qu'ils puissent s'ouvrir complètement et se fermer sans être agités de spasmes. Ce genre de spasmes pouvait être une question de vie ou de mort en duel, gênant les mouvements de baguette ou la précision d'une personne.
Tout en travaillant, elle pencha la tête sur le côté et étudia le visage de Malefoy. Inconscient, ses traits se détendaient, effaçant l'expression dure et fermée qu'il arborait habituellement. Il avait l'air triste.
Elle se sentait si coupable que c'en était douloureux. Elle se sentait bête. Elle aurait dû s'en rendre compte. Il aurait pu être tué.
Contrairement à elle, il avait dû savoir qu'il serait puni pour l'attaque dont il avait été à l'origine. Son hésitation…
Il aurait pu s'être préparé. Ça aurait pu avoir été un piège. Il savait exactement sur quelles prisons ils avaient des renseignements.
Comment avait-il formulé son conseil ?
"Les réponses aux activités de l'Ordre seront retardées. Si l'Ordre attend une ouverture, ça pourrait être l'occasion qu'il cherchent. Je ne suggérerai pas d'essayer de reprendre le Ministère, mais si l'Ordre venait à attaquer plusieurs prisons simultanément, la réponse serait… moins cohésive."
Il leur avait donné leur première victoire éclatante depuis des années. Il la leur avait donnée, puis avait payé pour ça. C'était sa réponse qui avait été retardée et moins cohésive.
Quel que soit ce qu'il pouvait obtenir en aidant l'Ordre, il le voulait clairement plus que tout.
Elle passa de l'autre côté de son corps et lança un sort de réanimation progressif. Cela réduirait l'étourdissement et la probabilité qu'il souffre de maux de tête quand il reprendrait conscience.
Alors qu'il se réveillait, elle commença à tapoter son autre main avec sa baguette puis à la masser. À l'instant où il redevint conscient, elle put sentir la tension irradier dans tout son corps. Il se figea instantanément.
Cela avait été, suspectait-elle, une immense preuve de foi de sa part de la laisser le stupéfixer. Faire confiance à quelqu'un ne lui venait pas naturellement. Elle continua à masser ses doigts pour les plier alors qu'il tournait la tête. Elle put sentir ses yeux sur elle pendant qu'elle continuait à travailler sans lever les yeux.
"Pas besoin," dit-il après quelques minutes. "J'ai une séance avec un guérisseur plus tard dans la journée."
"Si c'est le même que celui qui n'a rien fait pour ton dos, je te recommanderais de donner cet idiot à manger au calmar géant," dit-elle vivement.
Il leva la tête et regarda vers ses épaules avec une grimace de douleur.
"Qu'est ce que tu as fait ?"
"Après avoir siphonné l'excès de magie et de venin, j'ai placé un sort de contenance sur les runes. Je ne peux pas les annuler, mais avec un peu de chance ça gardera la magie noire dans les runes plutôt qu'elle ne plonge dans ton âme. Je les ai traitées avec du Murlap et du Dictame pour aider à soulager la douleur. J'ai supposé que tu prenais déjà des potions anti-douleur." Il hocha faiblement la tête. Hermione fit courir ses doigts d'un bout à l'autre de sa main avec précaution, sentant les cals dûs à sa baguette le long de ses doigts, cherchant une trace de tremblement, marmonnant des sorts en les pliant et les massant. "Avec un peu de chance ça soignera les incisions un peu plus vite. Je ne peux rien faire pour les cicatrices, ou le sort du rituel qu'elles contiennent. Je suis désolée… j'aurais dû revenir plus tôt. Si je l'avais fait… on aurait peut-être pu enlever les os et les faire repousser avant que ça ne soit imprégné. Maintenant, même si je les remplace et que je j'enlève la peau, le serment va ré-émerger…"
"Ça n'a pas d'importance," dit-il, lui arrachant brutalement sa main et se levant. Cela avait dû être un mouvement extrêmement douloureux mais il n'émit pas un son. Mais il était plus pâle et vacilla légèrement une fois debout. "Comme tu l'as mentionné, tu étais très occupée. Tu n'as pas l'air d'avoir été en vacances au bord de la mer à bronzer tout en négligeant volontairement ton Mangemort de compagnie. Me soigner n'a jamais fait partie de ton travail."
Il se sentait apparemment un peu mieux, étant donné que son sarcasme était revenu.
"J'aurais dû venir," répéta-elle. "Il faut surveiller les plaies. Et le baume, il devrait être changé tous les jours pour une meilleure efficacité…"
"Dommage."
"Je peux venir," dit-elle. "Cela ne prendra que quelques minutes. Si tu peux trouver du temps le matin ou le soir. Je viendrai."
Il la fixa.
"Vraiment ? Tu as du temps pour ça ?" demanda-il sournoisement.
"Je trouverai du temps."
Il sembla réfléchir à quelque chose pendant plusieurs minutes. "Bien. Vingt heures. Si tu viens, je viendrai. Si tu ne peux pas ce n'est pas grave."
"Je serai là."
Elle l'aida à glisser sa chemise sur ses épaules et la boutonna. Elle s'arrêta à la moitié.
"Je suis vraiment désolée, Drago," dit-elle.
Il baissa les yeux vers elle et haussa un sourcil.
"Si j'avais su qu'un peu de guérison allait te rendre si familière avec moi, je ne t'aurais jamais laissé faire."
Elle leva les yeux vers lui en finissant son reboutonnage.
"Tu ne veux pas que je t'appelle Drago ? Ça me semble juste bizarre de continuer d'utiliser nos noms de famille après si longtemps. En supposant qu'aucun de nous ne mourra pendant la guerre et si tu ne te lasses pas de moi, j'imagine qu'on va se fréquenter pendant un moment."
Il leva dubitativement les yeux au ciel.
"Appelle-moi comme tu veux, Granger. Je ne changerai rien."
Typique.
Elle suspectait que les noms de famille étaient juste une autre façon de maintenir la distance. Ce qui était la raison pour laquelle il lui était venu à l'esprit qu'elle pourrait peut-être l'appeler Drago.
La distance inconsciente affectait le comportement. Si elle voulait être plus proche de lui, elle devait faire le premier pas, et elle ne pouvait pas laisser sa propre attitude inconsciente la retenir.
"Des renseignements cette semaine ?"
Il hocha brièvement la tête, le coin de sa bouche tressaillant légèrement. "La nouvelle division de développement des sort va se trouver dans le Sussex. Il est prévu qu'elle soit considérablement plus grande. Ils agrandissent les laboratoires au-delà de ce qui est possible avec des sorts. C'est un bâtiment de recherche, utilisant des prisonniers."
Hermione déglutit. "Bien sûr."
"Poudlard est en train d'être transformé en prison. Il a déjà assez de protections ; cela va remplacer toutes les prisons perdues. Ils sont en train de le purger de toute magie considérée non coopérative."
Quelque chose au fond d'Hermione se déchira face à cette nouvelle. Quand Poudlard avait été abandonné, ils avaient essayé de faire ce qu'ils pouvaient, mais les elfes de maison et les portraits avaient été liés à l'école ; ils les avaient laissés là-bas. Elle grimaça légèrement.
"Je suis sûre que l'école va résister," dit-elle.
"Sans aucun doute. Ce choix a été fait parce que le Seigneur des Ténèbres espère que ça fera enrager Potter. Et… c'est aussi une insulte finale pour Dumbledore."
Les yeux d'Hermione foncèrent jusqu'au visage de Drago puis se détournèrent rapidement quand il prononça le nom du Directeur. Elle força son expression à ne pas changer.
"Je m'assurerai que Harry soit préparé pour ça et qu'il ne fasse rien de stupide."
Il hocha brièvement la tête.
"Je te vois demain alors," dit-elle en le regardant de nouveau. "Prend soin de toi… Drago. Je suis vraiment désolée."
Le coin de sa bouche s'agita pendant un moment, puis il pinça les lèvres et son expression se tendit ; s'armant avant de transplaner.
