Chapitre 56 - Flashback 31
Avril 2003
Drago l'appelait. Souvent.
Parfois, ses obligations dans l'armée de Voldemort s'arrêtaient tard le soir, mais la plupart du temps il l'appelait aux petites heures du matin. Hermione travaillait dans son cabinet de potions ou de recherche jusqu'à ce que son anneau brûle. Alors elle se glissait hors du Square Grimmaurd et transplanait à Whitecroft.
Elle passait à peine la porte avant que Drago n'apparaisse, l'attrape et les fasse transplaner ailleurs. Toujours un hôtel. Rarement le même, même d'une nuit à l'autre.
Il l'embrassait, prenait son visage en coupe entre ses mains, et elle avait l'impression qu'il la respirait.
Puis il faisait un pas en arrière et la regardait.
"Tu vas bien ? Est-ce que tu vas bien ? Est-ce que quelque chose t'es arrivé ?" Il passait ses mains sur elle pour vérifier en demandant.
À chaque fois la même question, comme s'il ne la croyait pas avant de l'avoir vérifié personnellement.
Elle ne s'était pas attendue à ce qu'il soit si excessivement inquiet. Elle avait observé le moment suivant immédiatement son arrivée à Whitecroft au fil des mois ; la façon attentive avec laquelle il faisait courir ses yeux sur elle après qu'elle ait été attaquée dans le Hampshire. Elle n'avait pas réalisé à quel point la peur le rongeait.
Elle se détendait sous son toucher alors que ses doigts couraient le long de ses bras, sur ses mains et le long de sa colonne vertébrale.
"Je vais bien, Drago. Il ne faut pas t'inquiéter."
Les mots ne semblaient jamais avoir d'effet. Il levait le visage d'Hermione vers lui et regardait dans ses yeux comme s'il s'attendait à y trouver quelque chose.
Elle levait les yeux vers lui et le laissait calmement se rassurer.
Quoi qu'il soit arrivé à sa mère, Narcissa ne le lui avait jamais raconté complètement ; soit parce qu'elle ne pouvait pas, soit pour l'épargner. Retenir ces informations avait probablement été le pire choix.
Drago était comme elle. Il était obsédé par ce qu'il ne savait pas plus que par tout le reste.
Elle croisait son regard. "Drago, je vais bien. Il ne m'est rien arrivé."
Quand il était certain qu'elle était réellement intacte, c'était comme si une tension en lui se brisait. Il la prenait dans ses bras, soupirant de soulagement en posant sa tête sur celle d'Hermione.
C'est toi qui lui a fait ça, se rappelait-elle, et elle enroulait fermement ses bras autour de lui. Tu as deviné quelle était sa vulnérabilité et tu l'as exploitée.
Elle passait ses propres doigts sur lui, essayant de détecter des blessures avant qu'il ne l'embrasse de nouveau.
"Drago, laisse-moi te soigner."
Elle n'avait jamais, et ne soignerait jamais quelqu'un de la façon dont elle soignait Drago : dans ses bras, pressée contre son corps. Elle glissait ses mains sur lui et pressait des baisers la bouche ouverte sur ses épaules, ses mains, son visage en murmurant les sorts. Elle l'inspectait méticuleusement jusqu'à ce qu'il lui prenne sa baguette des doigts et l'envoie voler dans la pièce. Alors il l'allongeait sur le lit et la prenait lentement.
C'était presque toujours délicieusement lent. Il la regardait dans les yeux jusqu'à ce qu'elle sente presque leurs esprits se toucher.
D'autres fois il arrivait trempé de magie noire. Elle s'accrochait sur ses vêtements et sa peau. Quand il était comme ça, il était toujours plus désespéré. Plus dur. Plus rapide. Essayant de se perdre dans quelque chose qu'il pouvait sentir.
Contre un mur. Ou juste sur le sol de la chambre d'hôtel où ils arrivaient.
Ses baisers avaient le goût de la glace et du péché, et Hermione les buvait jusqu'à ce qu'elle soit hors de souffle.
"Tu es à moi. Tu es à moi." Il répétait les mots encore et encore comme un mantra. "Dis-le. Dis que tu es à moi."
"Je suis à toi, Drago," promettait-elle contre ses lèvres ou en le regardant dans les yeux.
Il entrelaçait ses doigts avec ceux d'Hermione et pressait son front sur le sien, et parfois son corps entier tremblait. Elle enroulait ses bras autour de lui et pressait des baisers dans ses cheveux.
"Je te le promets, Drago. Je serais toujours à toi."
Il y avait une terreur possessive dans ses yeux quand il la regardait… dans la façon dont il la touchait… comme s'il s'attendait toujours à ce que ça soit la dernière fois qu'il la voyait.
Les jours où il ne l'appelait pas, elle marchait dans le Square Grimmaurd en ayant l'impression de ne pas pouvoir respirer jusqu'à ce qu'elle sente l'anneau brûler.
Alors c'était elle qui voulait désespérément savoir s'il allait bien.
"Ne meurs pas, Drago."
C'était toujours la dernière chose qu'elle lui disait.
Au moment juste avant qu'il ne transplane, alors qu'il se tenait dans ses robes de Mangemort, elle le lui disait plutôt qu'un aurevoir. Elle attrapait son menton dans sa main et le regardait dans les yeux. "Fais attention. Ne meurs pas."
Il penchait la tête en avant et embrassait sa paume alors que ses yeux gris et froids se verrouillaient dans les siens. "Tu es à moi. Je reviendrai toujours à toi."
Il le faisait toujours.
Chaque jour, elle avait l'impression que les probabilités diminuaient. De plus en plus. Elle ne savait pas jusqu'à quel point les runes et sa propre détermination pouvaient l'emmener avant qu'il n'atteigne un point d'improbabilité maximale et que tout s'effondre.
Elle pouvait le sentir.
Il était sur le fil du rasoir.
Quand il dormait, elle fixait son visage et souhaitait qu'il survive à la guerre.
Ils s'enfuiraient quand ça serait fini. Loin. Si loin que personne ne les trouverait jamais. Elle se promit de trouver un moyen. Elle le lui promit : qu'il y aurait un après.
Il y avait des moments où ils oubliaient presque la guerre autour d'eux. Mangeant des petits-déjeuners commandés au room service. Se disputant sur quelle nourriture de fast food constituait une véritable nourriture. Profitant de la baignoire démesurément grande que ses suites d'hôtel avaient toujours. L'embrassant.
Elle aurait pu passer une décennie à l'embrasser ; à sentir la révérence brûlante dans la façon dont il la touchait.
Au moment où leurs lèvres se touchaient, il écrasait le corps d'Hermione contre le sien. Ses mains se glissaient le long de sa gorge et dans sa nuque, emmêlant ses doigts dans ses cheveux alors qu'il approfondissait le baiser. Il prenait son visage dans le creux de sa main puis la glissait le long de son corps.
Alors, quand elle haletait pour respirer, il retirait sa bouche et commençait à l'embrasser le long de sa gorge. Suçant l'endroit où on sentait son pouls en enlevant les vêtements d'Hermione. Elle remarquait à peine ses vêtements qui glissaient et tombaient sur le sol alors qu'il la déshabillait et explorait sa peau nue. Alors qu'elle déboutonnait la chemise de Drago et glissait les mains le long de son corps.
Il dégrafait son soutien-gorge et le faisait tomber avant que ses mains foncent pour empalmer ses seins et les titiller jusqu'à ce qu'elle gémisse. Sa bouche se glissait le long de la jonction de son cou et de son épaule en embrassant et mordillant son chemin sur sa peau.
"Parfaite." "Belle." "À moi." "À moi." Il soufflait les mots contre son corps alors qu'il la mettait à nu pour lui. Quand qu'il se poussait en elle. Quand il l'agrippait contre lui. Quand qu'elle jouissait dans ses bras ou sous sa bouche. Quand il entrelaçait leurs doigts et qu'elle sentait les siens se tendre alors qu'il venait.
"Je vais prendre soin de toi. Je le jure, Hermione, je prendrai toujours soin de toi." Il murmurait les mots contre sa peau ou dans ses cheveux d'une voix si basse qu'elle l'entendait à peine.
Une nuit au débit du mois de mai, alors qu'elle était enroulée dans ses bras à moitié endormie, elle l'entendit le répéter ; comme si c'était une promesse qu'il se faisait à lui-même encore et encore. Comme s'il ne pouvait s'amener à arrêter de le dire.
Elle leva la tête et tint son visage dans ses mains pour qu'elle puisse le regarder dans les yeux.
"Drago, je vais bien. Il ne va rien m'arriver."
Il ne fit que la fixer avec la même expression amère et résignée qu'il arborait quand il la formait. Il se préparait, attendait ce qu'il voyait comme inévitable.
La guerre était enroulée autour d'eux comme un nid d'épines auxquelles ils ne pouvaient échapper.
Il se calma et reposa sa tête contre la poitrine d'Hermione, enroulant ses bras autour d'elle pendant qu'elle passait ses doigts dans ses cheveux.
Elle pouvait toujours le sentir répéter les mots.
Elle hésita quelques minutes avant de parler.
"Parle moi de ta mère, Drago. Dis-moi tout ce que tu n'as jamais pu dire à personne."
Il se raidit et resta silencieux. Elle glissa ses doigts sur ses épaules et traça le contour de ses runes. "Utiliser l'occlumencie ne fait que le masquer. Tu peux m'en parler, je t'aiderai à le porter. Parle moi de ta mère."
Il ne parla ni ne bougea pendant un si long moment qu'elle crut qu'il s'était endormi. Puis il tourna la tête juste assez pour qu'elle puisse voir son profil. Son expression était soigneusement fermée mais elle pouvait le voir réfléchir.
"Je n'avais jamais vu quelqu'un se faire torturer avant," dit-il finalement. "C'était… la première personne que j'ai jamais vue torturée. Il…" Hermione sentit sa mâchoire rouler alors qu'il hésitait. "... il a fait des expériences sur elle et a laissé… quelques autres Mangemorts proposer des idées sur quoi lui faire. Pour punir les Malefoy."
Alors qu'il parlait, ses yeux s'écarquillaient progressivement et son expression perdait son masque. Il fixait la pièce, le regard lointain..
Hermione le regarda, et elle put le voir, ayant tout juste seize ans et rentrant à la maison pour les vacances.
"Je pensais…" sa voix était soudainement plus jeune. Enfantine. "Pendant un moment, j'ai pensé que si je tuais Dumbledore assez vite elle pourrait s'en remettre. Que je pouvais réparer ça… si j'arrivais à réussir. Mais… elle n'était que l'ombre d'elle-même quand je suis rentré de l'école. Je pense… qu'elle avait essayé de s'accrocher pendant l'été, pendant qu'on me formait. Mais quand je suis parti, elle s'est brisée…"
Il resta silencieux un moment.
Il allait recommencer à parler mais referma la bouche. Ses lèvres tressaillaient comme s'il ne cessait de choisir ce qu'il allait dire ensuite avant de changer d'avis.
"Ce n'était même pas un mois. Je ne suis même pas parti un mois," dit-il finalement.
Hermione emmêla ses doigts dans les cheveux de Drago. Il ferma les yeux et baissa le menton.
"C'était censé n'être que des choses réversibles, pour me motiver, rien qui ne la mutile physiquement. Mais il a anéanti son esprit. Utiliser la légilimancie pour torturer est sa technique favorite. Elle avait des crises d'épilepsie, petites pour la plupart, mais occasionnellement elles étaient sévères. Surtout plus tard. Elle dépérissait juste dans sa cage. Quand elle avait peur, elle fermait les yeux et commençait à se balancer et à faire ces gémissements. Elle ne s'arrêtait pas pendant des heures, et je ne pouvais pas… pouvais pas toujours rester avec elle… parce que je devais m'entraîner."
Il ne regardait pas Hermione en parlant. Il continuait de regarder dans la pièce. Sa voix était basse et hésitante.
"Le jour où j'ai tué Dumbledore, le Seigneur des Ténèbres a demandé à ce qu'on dîne avec lui. Pour célébrer… il disait qu'on célébrait mon succès. Elle n'avait été libérée que depuis quelques heures, et il voulait qu'elle joue les hôtesses. Ses tremblements étaient si sévères qu'elle pouvait à peine tenir les couverts. Sa fourchette ne cessait de cliqueter contre l'assiette, puis elle la faisait tomber et paniquait en essayant de la ramasser. Apparemment le bruit était dérangeant. Alors le Seigneur des Ténèbres a planté un couteau à viande à travers sa main et dans la table. Puis il l'a laissée là, à saigner, jusqu'à ce qu'il se retire. J'étais assis en face d'elle, et elle m'a juste regardé pendant tout ce temps, secouant la tête pour m'avertir de ne rien faire."
Il agrippa la main d'Hermione. "Je ne pouvais… rien faire. J'ai essayé de la protéger. Je la gardais dans sa chambre le plus possible. J'amenais des guérisseurs pour l'aider à se remettre. Le guérisseur de l'esprit n'a pas pu faire la moindre chose. J'aurais dû la faire traîter plus tôt. C'est ce qu'ils m'ont tous dit. Que j'aurais dû la faire traîter plus tôt."
Hermione pressa sa main et glissa ses doigts sur ses runes. Sûr de lui, rusé, infaillible, impitoyable et inflexible ; déterminé à réussir.
Pour venger sa mère. En pénitence pour toutes les façons dont il l'avait laissée tomber.
"Je suis tellement désolée, Drago."
Il resta silencieux. Il ferma les yeux et prit une vive inspiration.
"Puis…" sa voix se brisa. Il essaya encore. "Puis…" Il grimaça et il resta silencieux quelques secondes.
"Puis… elle avait juste commencé à se remettre un peu, et j'ai hésité chez les Finch-Fletcher. Il y avait une petite fille ; elle ne devait pas encore être à l'école primaire. Les Impardonnables… on ne triche pas avec eux. Il faut les sentir. Il faut le vouloir vraiment. On m'a ordonné d'utiliser le Doloris et je n'ai pas pu… je n'ai pas réussi. Elle était… si petite."
Il déglutit. "Bellatrix m'a jeté le maléfice à moi et à la petite fille avant de laisser Fenrir Greyback s'occuper d'elle à la place. Il… aime les enfants. Quand mon échec a été rapporté, le Seigneur des Ténèbres a pris ça comme un signe que je n'étais pas assez dévoué ou motivé. Il a fait venir ma mère pour qu'il puisse démontrer comment utiliser correctement le Doloris."
Il y eut un long silence.
"Elle avait juste commencé à aller mieux quand c'est arrivé."
Hermione suspectait que sa main aurait des hématomes là où leurs doigts étaient entrelacés.
"Bellatrix se souciait de sa sœur, d'une certaine façon. Elle ne parlait jamais en mal du Seigneur des Ténèbres, mais elle a essayé de m'empêcher d'échouer. L'été avant que je ne retourne à l'école, et quand elle s'est rendue compte que mes punitions seraient reportées sur ma mère, elle a tout donné pour m'amener à un point où cela arriverait rarement. Je lui ai demandé de m'enseigner tout ce qu'elle avait appris du Seigneur des Ténèbres, et elle l'a fait."
Sa voix avait changé. Elle était devenue plus familière alors que le récit passait à celui de sa vie. Des traces de son ton direct commençaient à émerger.
"J'ai tout essayé pour faire s'enfuir ma mère. Pour la faire partir. Mais je ne pouvais pas m'enfuir avec elle. J'avais tout préparé… mais je n'ai pas pu la convaincre de partir sans moi. J'ai considéré l'idée de la mettre sous Impero pour la faire partir. Mais je la connaissais. Si j'étais inconscient ou mort, à la seconde où il serait tombé, elle serait revenue me trouver. Et je n'aurais pas pu l'enfermer dans un endroit où elle ne l'aurait pas pu. Je n'étais pas… je ne voulais pas être celui qui la mettait en cage. Je ne voulais pas qu'elle se sente de nouveau piégée."
Sa voix se fit plus morte. "Quand elle est morte… je suis arrivé pour trouver le Manoir Lestrange en ruines. Je ne savais pas ce qu'il s'était passé jusqu'à ce qu'on me convoque. Il avait été à peine mentionné qu'elle y avait été… comme si ça comptait pour rien qu'elle soit morte. La baguette de Dumbledore s'était cassée en deux. Quelque chose à voir avec Bellatrix d'une certaine façon. La baguette était la seule chose qui comptait. Il a tué tous les Mangemorts qui avaient survécu pour rapporter les événements. Je me tenais là, entouré de cadavres, essayant de ne pas me mettre à hurler."
Il sombra dans le silence et ne dit plus rien pendant un long moment. Hermione bougea de sous lui et s'assit. Il y avait une sensation terne de déchirement dans sa poitrine alors qu'elle baissait les yeux vers lui.
Les yeux de Drago étaient prudents en lui rendant son regard.
Elle le toucha légèrement sur la joue. "Drago… Je ne suis pas ta mère."
Il tressaillit et commença à ouvrir la bouche, mais elle continua sans le laisser l'interrompre. "Maugrey et Kingsley ne vont pas me faire du mal si tu rates une mission. Ils ne vont pas me torturer ou me mettre en danger pour te punir. Je ne suis pas un otage. Je suis engagée dans cette guerre parce que je l'ai choisi. Je ne suis pas fragile. Je ne vais pas me briser. S'il te plait," elle caressa l'arche de sa pommette de son pouce, "crois-moi là-dessus."
"Laisse moi te faire partir. S'il te plait, Hermione. Je te le jure, ça n'affectera pas mon aide à l'Ordre. Laisse moi te faire partir."
Elle secoua la tête. "Je ne peux pas partir. Je suis loyale à l'Ordre. Je ne vais pas m'enfuir alors que tout le monde se bat. Nous nous battons ensemble dans cette guerre. Laisse-moi t'aider. Tu n'as pas à tout faire tout seul."
Les yeux de Drago vacillèrent, et elle vit le désespoir et la résignation en eux. Cela déchira quelque chose en elle.
"Drago, tu ne peux pas me demander de fuir la guerre."
Ses lèvres se retroussèrent et il ricana. "Pourquoi pas ? Comment peux-tu ne pas déjà en avoir assez fait pour eux ? Ils t'ont vendue. Et si je…" sa voix s'éteignit. Il détourna les yeux d'elle. "La même offre par quelqu'un qui le pensait vraiment. Tu y serais quand même allée… et si je ne t'avais pas formée, Potter t'aurait quand même laissée livrée à toi-même sur ce terrain."
Elle caressa sa peau de son pouce. Il y avait la plus petite, discrète trace d'une cicatrice à cet endroit, là où elle l'avait touché d'un maléfice. "Je l'ai accepté, Drago, tout ça. Personne ne m'a forcée. Nous ne choisissons pas quand on en a fait assez et on ne laisse pas les autres derrière soi pour en assumer les conséquences. Ce n'est pas comme ça que marche la guerre."
Il serra la mâchoire et leva amèrement les yeux vers elle.
Il s'en foutait. Il ne se souciait pas que quiconque survive à la guerre à part elle. Ils pouvaient tous mourir, il s'en fichait.
Il avait fait un Serment Inviolable. Même s'il pouvait enlever sa Marque des Ténèbres, il ne pourrait pas s'enfuir, pas tant que la guerre continuerait. Il s'était lui-même piégé au cœur de la guerre.
Hermione poussa un soupir triste et laissa tomber sa tête, enfouissant son visage dans l'épaule de Drago. Il enroula fermement ses bras autour d'elle.
Elle était presque endormie quand elle entendit le léger murmure de sa voix recommencer à parler. "Je vais prendre soin de toi. Je le jure, je prendrai toujours soin de toi."
Les sauvetages s'arrêtèrent. Kingsley les avait suspendus en attendant d'en savoir plus sur la trace du Sussex. Les premiers prototypes des entraves étaient en usage dans toutes les prisons.
La Résistance était presque entièrement confinée sous terre ou dans le monde Moldu. Il y avait tant de créatures sombres et de Rafleurs qu'il était difficile de se déplacer.
Kingsley commença à se reposer encore plus lourdement sur ses équipes de reconnaissance et à utiliser Drago dans l'armée de Voldemort. Désinformation. Sabotage. Comme si l'armée des Mangemorts était une machine à démonter. Les enveloppes de ses ordres étaient de plus en plus épaisses à chaque fois qu'Hermione en ramenait une.
Drago mentionnait rarement ce qu'il faisait, mais elle pouvait voir qu'il était sur le point de se briser sous la pression. Il devenait de plus en plus désespéré à chaque fois qu'elle le voyait.
Ça brûlait en elle. De le regarder s'éroder sous tout ce qu'on attendait qu'il maintienne et produise des deux côtés.
Presque toute la pression que l'Ordre exerçait sur Hermione disparut. Elle était un collier autour de la gorge de Drago ; Kingsley et Maugrey n'avaient rien de plus urgent à lui demander que de le maintenir.
On la laissait simplement vivre avec.
Elle se sentait comme un animal en cage au Square Grimmaurd. Elle voyageait de planque en planque simplement pour changer de paysage.
Quand elle ne soignait pas ou ne s'occupait pas de Ginny, elle mettait son énergie dans la recherche et la magie expérimentale. Elle plongea dans l'étude de la magie noire plus profondément que jamais dans le passé. Peut-être que l'Ordre ne l'utiliserait pas, mais Drago le pourait.
Elle essaya de trouver un moyen de contourner les entraves. Drago amenait régulièrement des rouleaux de parchemins remplis d'analyses pour elle, et elle se penchait dessus, essayant de trouver une faille, quelque chose à exploiter. Elles étaient ingénieuses. Elles étaient une œuvre d'art.
Elles horrifièrent Hermione par leur rapide évolution.
En addition des traces in-enlevables, le Sussex commençait à expérimenter des entraves qui avaient pour but de supprimer la magie. Du tungstène incrusté de fer. Du tungstène plaqué de cuivre ou d'aluminium. Des entraves avec des matériaux de cœur de baguette.
Elle dormait à peine à moins d'être avec Drago. Le reste du temps, elle restait juste allongée pétrifiée de terreur à la pensée de ce qui arriverait à ceux qui seraient capturés. L'Ordre pourrait ne jamais être capable de les sauver.
On donnait déjà des entraves aux Mangemorts pour pouvoir mieux appréhender les membres de la Résistance. Une fois refermées, les entraves ne s'ouvraient pas sans que deux porteurs de la Marque des Ténèbres ne profèrent une incantation qui était une variante du Morsmordre.
Dean Thomas apparut au Square Grimmaurd un jour après avoir été capturé. Sa main était amputée. Il avait volé un couteau et s'était scié la main au niveau du poignet pour pouvoir s'échapper.
Une semaine plus tard Severus apporta la nouvelle que les entraves étaient déplacées hors du Sussex pour en augmenter la production. Elles venaient maintenant par paires.
Drago apporta une paire de prototypes à Hermione un soir et la regarda les analyser.
Elles ressemblaient presque à des bracelets.
Hermione construit une toile élaborée de magie analytique autour d'elles, disséquant toutes les composantes ; l'alchimie, les charmes, l'arithmancie, les runes gravées dans le cœur de fer.
Elle passa des heures à essayer de trouver une faille, jusqu'à ce qu'elle s'endorme au milieu du procédé et se réveille quand Drago la porta jusqu'à son lit.
"Je ne peux pas… il n'y a pas de façon de les contourner." Son cerveau lui semblait brumeux d'épuisement. Elle tremblait presque de frustration. "Il devrait y avoir quelque chose. Utiliser l'Impero ne fonctionnera pas, ça se voit dans la signature du sort et annule l'incantation. Je pensais, juste les couper, mais le cœur est ensorcelé pour exploser. Je ne suis juste pas… peut-être qu'il faut que je vois ça sous un angle différent. J'ai appris l'alchimie seule. Peut-être que je n'ai pas fait assez de recherches."
Elle commença à s'éloigner de lui pour essayer de retourner vers les piles de livres qu'elle avait apportés. Drago l'arrêta. Il glissa un bras autour de sa taille et enroula l'autre autour de ses épaules.
"Tu ne peux pas sauver tout le monde, Granger."
Elle se figea et fixa la pièce avec désespoir.
"Je ne sais pas comment on va gagner cette guerre," dit-elle finalement.
Drago resta silencieux. Il n'y avait rien à dire qui ne serait pas un mensonge.
Elle leva la main et agrippa le bras de Drago autour de ses épaules.
"Je ne sais pas comment sauver tout le monde. Tout ce que je fais c'est repousser l'échéance pour qu'ils meurent d'une façon encore pire. J'aimerais… j'aimerais ne jamais être devenue guérisseuse."
Elle ne l'avait jamais admis à personne auparavant. Qu'elle détestait ça.
Elle lui parla des Horcruxes. Elle n'était pas censée le faire. On ne le lui avait pas dit clairement. Elle le lui dit quand-même. Tout ce qu'elle savait, sur leur fabrication et leur destruction, et toutes les idées de l'Ordre sur ce que ça pouvait être. Les objets perdus des fondateurs de Poudlard.
"Nous pensons qu'il pourrait y en avoir un à Poudlard," dit-elle quand elle lui montra ses recherches. "Mais je ne sais pas combien il pourrait y en avoir. Il ne pourrait pas y en avoir plus que cinq, non ? Découper son âme comme ça… c'est du poison pour le corps. Ça le rongerait de l'intérieur. Sa forme actuelle est la meilleure restauration qu'il a pu faire avec la potion de régénération. Ça aurait dû le faire retourner à sa forme initiale, mais son âme est si détériorée que faire une sorte de corps a été le mieux qu'il a pu faire. Alors il doit y avoir une limite aux Horcruxes. Je ne pense pas qu'il puisse encore en faire. Si on peut détruire tous les Horcruxes, il deviendra assez instable pour que même si personne ne le tue, il cesse finalement d'exister. Mais nous ne savons pas où ils pourraient être. Il y a si peu d'informations sur son passé."
"Il en a donné un à mon père pendant la première guerre ?"
"Quand la Chambre des Secrets a été ouverte pendant notre deuxième année, c'était causé par le fragment d'âme qui possédait Ginny Weasley. Ton père a mit le Horcruxe avec ses livres dans une tentative de discréditer Arthur Weasley."
"S'ils ont été faits pendant la première guerre, et qu'il a eu confiance pour en confier un à ses serviteurs… je regarderai. Tu aurais dû me le dire plus tôt."
"Je n'aurais même pas dû t'en parler maintenant." Elle posa sa main contre le cœur de Drago. "Je n'essayais pas d'ajouter quelque chose. J'ai juste… je n'ai personne à qui en parler. Ça m'aide à réfléchir si je peux en parler à voix haute."
Il renifla. "Si ça met fin à tout ça, ça vaut le coup. Que fait l'Ordre ? Tout ce que Maugrey et Kingsley me font faire ne fait que gagner du temps." Sa voix vibrait de fureur.
"Drago…"
Il ne dit rien d'autre, mais sa rage était palpable.
Il ne faisait pas confiance à Kingsley ou Maugrey ou à l'Ordre. Il était terrifié à l'idée que s'il mourait, il puissent la vendre à quelqu'un d'autre pour essayer de survivre.
Et elle ne pouvait pas lui promettre qu'elle ne le ferait pas. Elle ferait n'importe quoi pour gagner la guerre. Il le savait. Elle suspectait que cette peur le poussait en avant plus que tout le reste.
Il enroula ses bras autour d'elle, et elle put le sentir dans ses mains, dans la façon dont il la toucha.
Elle posa sa tête contre son torse et écouta son cœur.
"Tu devrais porter une armure," dit-elle. "Je faisais des recherches là-dessus. La peau de Pansedefer Unkrainien. C'est léger, hautement résistant à la magie, et c'est presque impénétrable aux attaques physiques. Si tu la portes sous tes robes, personne ne saura qu'elle est là. Ça pourrait te sauver la vie un jour."
Il ne dit rien. Il était toujours en train de regarder les recherches d'Hermione sur les Horcruxes.
Parfois ils ne quittaient pas la masure de Whitecroft immédiatement. Il arrivait avec tant de blessures qu'il était en état de choc. D'autres fois, elle sentait les tremblements du Doloris dans ses mains.
Elle le soignait et s'asseyait avec sa tête sur les genoux pendant que son état se stabilisait. Elle traitait les tremblements de ses bras et ses mains pendant qu'il flottait à la limite de l'inconscience. Elle lui murmurait des excuses dans un souffle alors qu'elle tapotait sa baguette sur ses mains, pliant, frottant, massant ses doigts jusqu'à ce qu'ils arrêtent de trembler.
Tu es en train de le tuer. Tu es en train de le tuer. C'est à cause de toi.
Elle se laissait pleurer sur lui quand il n'était pas conscient pour le voir. Elle agrippait ses mains dans les siennes et essayait de le réparer.
"Je suis désolée. Je suis désolée. Je suis tellement, tellement désolée," disait-elle encore et encore.
Elle essuyait ses yeux et faisait disparaître toutes ses larmes avant de le réanimer. Elle sentait la tension déchirer son corps alors qu'il reprenait conscience et le sentait respirer quand il levait les yeux et la voyait.
Il les faisait transplaner dans un hôtel et dormait avec ses bras possessivement enroulés autour d'elle.
Quand même la présence de Drago était insuffisante pour faire taire ses démons, elle étudiait son visage et écoutait le battement de son cœur, lui promettant silencieusement, "je vais prendre soin de toi. Je le jure, je prendrai toujours soin de toi."
