Chapitre 59 - Flashback 34

Juin 2003

Drago apporta la Coupe de Poufsouffle à Hermione en moins d'une semaine.

Elle la reconnut immédiatement pour l'avoir vue sur des photos en faisant des recherches. "Tu l'as trouvée."

Il baissa les yeux sur le gobelet ornementé dans sa main. "Je l'aurais eue hier, mais je me suis occupé des formalités légales pour accéder au coffre en même temps. Il sera transféré à mon nom au cours du mois une fois que les papiers du Ministère qui confirment la mort de Rodolphus arriveront. Traditionnellement, le procédé dure des mois mais les choses sont accélérées par peur que la fille d'Andromeda essaie de le réclamer."

Hermione l'étudia avec attention. "Y a t'il des traces de ton passage ?"

Drago fit un petit sourire fermé. "Aucune."

La gorge d'Hermione se serra. Elle ne regarda pas Drago en déglutissant et en faisant un bref signe de tête.

Ils ne pouvaient se permettre de négliger aucun détail… mais chaque mort était comme une corde additionnelle autour de son cou. Elle chassa cette pensée.

Elle ouvrit sa sacoche et en sortit l'épée de Gryffondor.

Drago leva un sourcil et l'étudia. "Tu te promènes vraiment avec une épée ?"

Hermione baissa les yeux sur la lame entre ses mains. "Je l'ai récupérée la semaine dernière. Je savais que tu serais efficace. Je me suis dis que je devais être préparée."

Les yeux de Drago brillèrent. "Comment on fait ça ?"

Hermione se mordit la lèvre inférieure. "Je ne suis pas sûre. On devrait probablement lancer un sort de bouclier pour essayer de contenir tout contre-coup potentiel. Ensuite, je suppose que je la poignarde." Elle lui fit un petit sourire. "Je n'ai jamais poignardé une coupe."

"Je vais le faire." Il tendit la main pour prendre l'épée.

Hermione secoua la tête et recula, rapprochant l'épée d'elle. "Non. Il faut que ça soit moi. Il y a très peu d'informations sur les Horcruxes dans les livres. Il faut que j'analyse et que j'observe ce qu'il se passe quand on les détruit."

L'expression de Drago se durcit, et il fit un pas vers elle ; ses yeux étaient de silex. "Non. Tu as dit que Dumbledore avait été maudit en détruisant la bague. Donne-la moi, Granger."

Hermione agrippa plus fermement la poignée et leva le menton alors qu'il approchait.

"Dumbledore a été maudit parce que, pour une raison inconnue, il a mis la bague. Je ne vais pas la mettre, je vais l'analyser et la transpercer. Harry à transpercé le journal sans problème."

La main de Drago se referma sur celle d'Hermione. "C'est toi la guérisseuse. Si elle essaie de nous tuer, tu as plus de chance de me sauver que j'en ai de te sauver."

Elle ne relâcha pas sa prise. Elle le regarda calmement. "Je suis aussi spécialiste dans l'analyse et la déconstruction de la magie noire."

Il baissa les yeux vers elle, son expression était un masque. Le cœur d'Hermione commença à tambouriner, et elle raffermit sa prise sur l'épée, s'attendant à moitié à ce qu'il la lui arrache.

"Drago, laisse-moi faire mon travail."

Il hésita, et il lâcha sa main. "Dis-moi quoi faire si quelque chose tourne mal."

Hermione ouvrit le bracelet à son poignet et le lui tendit.

"Ce charme, là," elle pointa un petit chaudron, "si tu l'actives, ça envoie ma localisation à Severus."

L'expression de Drago vacilla, et il fit une grimace de mépris. "Rogue est un agent double. Je pensais que l'Ordre avait cessé de lui faire confiance il y a des années."

"C'est un triple agent. Réduire son niveau d'autorité dans l'Ordre est une couverture. Il a la même autorité que moi. Il sait pour toi depuis le début. C'est lui qui a convaincu Maugrey et Kingsley que ton offre était probablement légitime."

L'expression de Drago se fit incrédule.

Hermione poussa un petit soupir. "Je ne te demande pas de lui faire confiance, mais si je suis mourante et incapable de me soigner, il serait probablement la seule personne à pouvoir faire quelque chose. C'est lui qui a contenu la malédiction de Dumbledore."

L'expression de Drago était mutinée, et il refusa de toucher le bracelet qu'elle lui tendait.

Le coin de la bouche d'Hermione tressaillit, et elle baissa la main. "Tu m'as demandé quoi faire, et je te l'ai dit. Si quelque chose tourne mal, c'est lui qu'il faut appeler. Que tu choisisses de le faire ou pas, c'est ton problème."

Les muscles de la mâchoire de Drago ondulèrent, et il attrapa le bracelet entre les doigts d'Hermione.

Elle se jeta un bouclier et construisit une toile de magie analytique sur la coupe. Les Horcruxes étaient si tabou qu'il n'y avait aucune trace de l'analyse de cette magie. Hermione en comprenait les principes fondamentaux, basés sur la théorie, mais s'occuper réellement d'un morceau d'âme mutilé était d'un niveau de magie noire qu'elle n'avait jamais vu sous aucune forme.

Elle ignora les charmes placés par Helga Poufsouffle quand la coupe avait été créée et se concentra sur la magie noire. La coupe était surprenament vulnérable. Voldemort avait dû penser que le coffre des Lestrange était une mesure de sécurité suffisante par lui-même.

Le fragment d'âme s'était entrelacé dans l'autre magie de la coupe. Empoisonné et malveillant, il semblait sentir qu'il était dérangé. Hermione travailla rapidement ; si elle avait assez d'informations sur la signature magique de Voldemort, elle pourrait peut-être l'utiliser pour trouver d'autres Horcruxes.

Ses yeux filèrent vers Drago. Il était immobile comme une statue en la regardant, comme s'il ne respirait même pas.

Elle nota tout sur un rouleau de parchemin et ramassa l'épée de Gryffondor. C'était une épée parfaitement équilibrée, mais elle semblait encombrante comparée à un poignard. Elle prit une grande inspiration et plongea la lame au centre de la coupe, la coupant en deux.

Il y eut un moment de calmé déconcertant. Hermione saisit sa baguette.

L'air se troubla et bougea autour d'elle.

Il y eut un long cri et le fragment d'âme s'éleva de la coupe comme un spectre noir aux yeux écarlates. Pendant une seconde il sembla prêt à frapper. Il parut détecter Hermione et s'avança vivement vers elle. Puis il vacilla et se dissout dans l'air.

Rien.

Hermione eut une petite exclamation et resta debout, agrippant sa baguette, sa poitrine se soulevant irrégulièrement alors qu'elle essayait de respirer.

Elle lança un sort rapide pour s'assurer que le fragment était parti.

"C'est fait," dit-elle finalement, agitant sa baguette pour faire disparaître toutes les protections autour d'elle. "Ce… n'était pas trop difficile. Je pensais que ça serait bien pire que ça."

Elle leva les yeux et vit que Drago n'était qu'à quelques centimètres d'elle. Il l'attira dans ses bras et l'agrippa jusqu'à ce qu'elle soit écrasée contre son torse. "Jamais… s'il te plait, plus jamais ça."

Elle avait envie de lui dire non, mais il était si tendu qu'il tremblait presque. Elle se vit lentement hocher la tête et dire "D'accord. Je ne le ferai plus."

ooo

Harry était comme une brebis égarée dans le Square Grimmaurd. Ron avait été placé en permission. Il voulait rester avec sa mère pendant qu'il faisait le deuil de Lavande et essayait de surmonter la culpabilité qu'il ressentait pour la mort de Kingsley.

Hermione trouvait Harry attendant apathiquement près de la porte de Ginny plus d'une fois sur deux.

Elle ouvrit la porte après une visite à Ginny et le trouva là, les yeux vides derrière la porte. Il avait un œil au beurre noir et une lèvre fendue, et ses phalanges étaient si salement écorchées que du sang coulait toujours le long de ses doigts, gouttant sur le sol.

Ses yeux s'illuminèrent, et il sembla revenir à lui quand il vit Hermione. "Est-ce qu'elle va bien ? Est-ce qu'elle va mieux ? Penses-tu qu'elle… penses-tu que je pourrai la voir bientôt ?"

Hermione le fixa, son estomac se nouant vivement en le voyant. Harry était fragile au point que c'en était inquiétant. Elle avait essayé plusieurs fois de convaincre Ginny de dire la vérité à Harry sur sa grossesse, mais Ginny était catégorique sur le fait que le lui dire empirerait les choses. Hermione avait fait appel à Maugrey ; à sa déception, il s'était rangé du côté de Ginny. Harry n'était pas en condition de gérer un stress additionnel, et l'Ordre ne pouvait pas gérer les conséquences sur sa confiance si la vérité éclatait à un stade si critique. Les choses étaient trop précaires.

Hermione ravala sa culpabilité en se lançant dans son exagération de sorts de protection et de stérilisation.

Ginny avait un petit ventre qui commençait à requérir un charme de dissimulation par précaution, surtout pour tromper Dobby, à qui Harry parlait régulièrement.

Le bébé était un garçon. Ginny se référait déjà à lui comme James.

"Pas de changement, Harry. Désolée."

Son expression retomba. Il fit un hochement de tête apathique et commença à se retourner pour partir.

Il était mortellement pâle, et l'œil qui n'était pas violet et jaune était creux.

Elle tendit la main pour l'arrêter et lui toucha légèrement le visage. "Tu te bats de nouveau ? Quand as-tu dormi pour la dernière fois ?"

Il recula. "Il… il y a quelques jours. Pendant quelques heures."

Elle lui lança un charme de diagnostic ; il avait plusieurs fractures dans ses mains et son orbite, et son torse était couvert d'hématomes.

Elle le prit doucement par le bras et le mena dans les couloirs vers la salle d'hôpital. "C'est encore des cauchemars ? Je peux t'apprendre quelques techniques d'occlumancie, ça pourrait aider. Allez, laisse-moi te guérir et te donner une potion de Sommeil sans rêves."

Harry eut un petit rire hystérique. "Si seulement je faisais des cauchemars."

Hermione s'arrêta et le regarda. "Qu'est-ce que tu veux dire ?"

Harry grimaça. "Ce ne sont pas des cauchemars, Hermione. Ça n'a jamais été des cauchemars toutes ces années. C'est lui. Quand je m'endors, je suis lui. Je torture des gens et je les tue, et je ressens ce qu'il ressent pendant qu'il le fait. Je n'ai même plus besoin d'être endormi pour que ça arrive, c'est juste pire quand je le suis." Harry tremblait d'épuisement. "La dernière fois que je me suis endormi, il essayait de nouveaux maléfices et ensuite il a bu un verre de sang de licorne, et quand je me suis réveillé, je pouvais sentir le goût dans ma bouche. Je n'ai pas… je n'ai pas réussi à manger…"

"Harry, tu ne m'avais pas dit que les choses avaient autant empiré. Tu aurais dû me le dire."

Il tressaillit. "Quoi ? On se parle de nouveau ?" Son expression était blessée alors qu'il la regardait.

La main d'Hermione retomba, et elle le regarda de nouveau. "Raconte-moi ce qu'il s'est passé."

Il secoua la tête, les yeux vides. "Ce n'est pas si terrible quand j'ai quelque chose sur quoi me concentrer. Quand je suis en mission - quand je suis avec Ron et Gin - quand je me souviens de pourquoi je fais tout ça, je peux le garder hors de ma tête. Mais… c'est comme s'il y avait un endroit dans mon esprit qui était une porte ouverte et que parfois je passais à travers quand je suis distrait. Quand je me réveille… je ne sais pas toujours qui je suis."

Hermione sortit précipitamment plusieurs potions reconstituantes. "Prend ça. Je me fous du fait qu'elles ne soient pas bonnes, tu es malnutri."

Harry en avala deux puis les vomit aussitôt. Hermione fit disparaître les salissures et sortit un calmant pour son estomac qu'elle lui tendit plus doucement.

"Essaie celle-là. Si tu n'as pas mangé depuis quelques jours, ça peut aider. Bois-la doucement."

"Hermione…" dit-il entre deux gorgées alors qu'elle marmonnait des sorts et étalait de la pâte contre les hématomes sur son visage. "Je pense qu'il y a quelque chose qui ne va pas chez moi."

Les doigts d'Hermione tressaillirent, et elle secoua vivement la tête. "Harry… je pense vraiment que pratiquer l'occlumancie pourrait aider pour ça. Je peux t'aider là-dessus. J'ai lu plusieurs livres et je pense que je peux t'aider mieux que Severus ; peut-être que ça irait mieux."

Elle lança un autre sort de diagnostic plus complexe sur lui. Il était en sous-poids. Il avait un manque de sommeil chronique. Il était frêle au point que c'en était inquiétant. Il vibrait de magie d'une façon qu'il avait eue depuis qu'elle le connaissait. Sa signature magique était floue et indistincte. C'était la façon d'être de Harry ; comme il avait toujours été, Pomfresh le lui avait dit quand Hermione avait posé la question pendant ses premières années de formation.

Harry pressa sa main contre sa cicatrice et détourna les yeux. "L'occlumancie n'aide pas."

Hermione poussa un soupir frustré. "Je sais que te séparer de tes émotions peut être difficile au début, mais je pense que si tu essaies, ça pourrait…"

"Ça empire les choses," dit Harry d'une voix dure. "À chaque fois que j'essaie, ça ne fait qu'empirer."

Hermione déglutit et se détourna pour faire venir de nouvelles potions reconstituantes, la mâchoire tendue. Elle lui tendit les fioles sans un mot. Harry réussit à ne pas les vomir.

Elle sortit une fiole de potion de Sommeil sans rêve sans le regarder. "Hé bien, nous pouvons au moins nous accorder sur le fait qu'un sommeil paisible aidera."

Il hocha faiblement la tête et but la potion.

Avec tous les reconstituants dans son organisme, il fallut plus longtemps à la potion pour faire effet. Il s'assit pendant une minute avant que sa tête ne dodeline, et il la laissa tomber sur l'épaule d'Hermione.

Hermione hésita puis enroula ses bras autour de lui, et le serra fort. "Je suis sûre que tu te sentiras mieux après avoir dormi."

"Ginny me manque."

La gorge d'Hermione se serra, et elle posa sa tête sur celle de Harry. "Je sais. Je suis désolée."

Elle le tint pendant qu'il s'endormait. Puis elle le mit soigneusement sous une couverture et partit parler avec Alastor.

Fleur était dans la salle de guerre quand Hermione atteignit la porte.

"Je n'ai pas eu de nouvelles de Gabrielle très souvent ces derniers temps. Elle a toujours envoyé des messages sur la radio pour que je ne m'inquiète pas. Une petite blague ou une phrase pour que je sache que tout allait bien. Mais il n'y a presque plus rien. Tu dois avoir un moyen de la contacter. C'est ma petite sœur, je suis responsable d'elle."

Maugrey grimaça et son œil tourbillonna rapidement. "Ta soeur a toujours travaillé avec ses propres conditions. Je vais voir ce que je peux faire."

Fleur hocha la tête avec raideur. "Merci. Bill et moi avons remplacé toutes les protections des planques une nouvelle fois, et on renouvelle celles de la grotte. Cependant, il y a des limites à ce qu'on peut faire de plus. Nous sommes presque au complet. Nous avons besoin d'un endroit secondaire, ou la quantité de magie pourrait compromettre la sécurité."

Maugrey poussa un soupir et hocha la tête, son œil roulant suspicieusement vers le bas. Il semblait avoir vieilli d'une décennie sur les deux semaines qui s'étaient écoulées depuis la mort de Kingsley. "Je vais mettre une équipe sur la reconnaissance de nouveaux endroits. Nous aurons besoin de nouveaux gardes aussi. Bill et toi devrez les former."

Fleur hocha de nouveau la tête et partit.

Hermione étudia Fleur alors qu'elles se croisaient. Fleur était un visage adorable et éthéré dans une armée qui devenait de plus en plus grise et désespérée, mais la marque de la guerre était visible dans ses yeux. Fleur et Billy se ressemblaient par leur culpabilité silencieuse.

Les parents de Fleur avaient été rapidement victimes de la guerre quand elle avait atteint la France. Gabrielle avait survécu parce qu'elle était à l'école et pas chez elle, mais finalement la guerre avait aussi anéanti Beauxbatons. Peu de membres de la Résistance française avaient survécu. Hermione suspectait que l'allure de Vélane de Gabrielle l'avait sauvée. La façon dont Gabrielle avait continué à l'utiliser comme une arme ressemblait à une forme de compensation et de vengeance menée par la culpabilité.

Les méthodes de Gabrielle étaient devenues plus vicieuses et vindicatives au cours du temps. Éclatantes. À la limite de l'insouciance. Hermione avait commencé à prendre des philtres Calmants avant de se rendre à la plage du Cornwall.

Hermione ne savait pas à quel point Fleur était consciente des activités de Gabrielle, mais elle imaginait que Fleur en savait assez et en suspectait plus sur sa petite sœur toujours si avide de partir en mission.

Les yeux de Gabrielle étaient plus froids et plus âgés que ceux de Drago.

Hermione fixa Maugrey en silence pendant quelques secondes après que Fleur soit partie. Il poussa un petit soupir et commença à lancer des sorts de confidentialité.

"Je m'inquiète pour Harry," dit Hermione alors que Maugrey se rasseyait. "Il semble être au bord du gouffre. Il faut qu'on entre dans Poudlard."

"On essaie. Remus a une équipe dessus."

"Je pense…" Elle hésita et croisa les bras. "J'ai…regardé certaines choses en dilettante ces derniers temps. Je pense que j'ai trouvé comment faire tomber les protections autour du château. J'ai analysé les rapports qui ont été faits. Il y a… une bombe… une bombe que je pense pouvoir faire. Elle peut être placée sous une stase temporaire. On peut demander à Drago ou Severus de la déposer sans risquer leur couverture. Je peux retarder l'explosion jusqu'à trois jours."

Maugey la fixa. "Tu penses ?"

La gorge d'Hermione se serra, mais elle leva le menton. "Hé bien, je n'en ai jamais fait avant. Quand j'ai soulevé l'idée il y a quelques années, on m'a dit que ça n'était pas éthique, indépendamment du fait que l'explosion pouvait être ciblée sur un endroit où se trouvent les Mangemorts. L'Ordre a décidé qu'on ne pouvait utiliser d'explosifs que sur des bâtiments vides. Cependant, celle-là n'aurait pas beaucoup de dégâts collatéraux. L'explosion serait concentrée sur la magie qui entoure le château. Alors… si elle est suffisamment encadrée, l'Ordre ne devrait pas trouver ça immoral dans ce cas."

"De quels matériaux aurais-tu besoin ?"

Elle pouvait voir Maugrey calculer un budget pour sa proposition.

Elle déglutit. "Je… je les ai déjà."

L'expression de Maugrey se tendit. Son œil tourbillonna et se fixa sur elle. "C'est l'idée de Malefoy alors. Est-ce qu'il offre ce dont tu as besoin ?"

Hermione leva le menton. "Non. Ce sont mes recherches exclusives. J'ai le matériel parce que la Résistance l'a apporté l'année dernière quand le laboratoire de la division des sort a été pillé. Il y avait une grande quantité de matériaux…" elle grimaça. "Ils ne sont pas utilisés dans les formes de potions traditionnelles. J'ai plus que ce dont j'ai besoin."

Maugrey la regarda longuement. "Tu ne l'as jamais mentionné."

Elle haussa les sourcils. "J'étais occupée à ce moment-là ; tout ce que je pouvais faire c'était les stocker en attendant d'avoir le temps de les cataloguer. Ce n'est pas avant juillet que j'ai su exactement ce qui était en ma possession." Elle haussa les épaules. "Mes stocks n'ont jamais été un inventaire qui m'a été demandé de rapporter."

Le visage d'Alastor se tordit d'irritation, mais il sembla considérer sérieusement la proposition.

Il fit courir un doigt le long de la poignée de sa baguette. "Utiliser une bombe pour entrer dans Poudlard résulterait en une bataille rangée."

"Je sais." Sa poitrine était serrée, et elle dut se forcer à respirer. "Je pense que si c'est mis en scène comme un sauvetage, on pourrait utiliser une plus grande attaque comme diversion pendant qu'un plus petit groupe rentrerait dans le château. L'école devrait toujours reconnaître Minerva ; elle pourrait coopérer avec nous."

Maugrey hocha lentement la tête, semblant profondément plongé dans ses pensées.

Hermione sortit sans un mot.

Seule dans son cabinet de potions, elle se pencha et posa la tête sur le plan de travail. Ses mains tremblaient de stress et de fatigue. Voldemort ressemblait à une marée montante. La pierre à laquelle la Résistance s'était attachée était en train de s'effondrer sous elle.

Peu importait ce qu'elle faisait, ce n'était jamais assez pour leur permettre de prendre de l'avance.

Drago était à l'étranger depuis presque une semaine, inspectant les marionnettes du gouvernement que Voldemort avait établi sur l'Europe. C'était une responsabilité que Voldemort avait tendance à donner sur un coup de tête.

Rodolphus Lestrange avait été sur une mission de ce genre quand il avait été intercepté par Gabrielle.

Drago avait laissé un mot dans la masure pour expliquer son absence. Ça lui avait été si brusquement assigné qu'un mot était tout ce qu'il avait pu faire.

Depuis le jour où elle l'avait lu, Hermione faisait des cauchemars où elle arrivait à la plage du Cornwall et découvrait Drago mutilé assis dans la petite pièce de la grotte. Des cauchemars où il ne revenait jamais et où elle recevait un mot de Severus qui l'informait qu'il avait été retrouvé démembré dans une ville quelconque à l'étranger.

Elle n'avait jamais pensé à le mettre en garde contre Gabrielle.

Quand son anneau brûla pour la première fois depuis des jours, elle se précipita hors du Square Grimmaurd pour transplaner et se jeta par la porte de la masure.

Il attendait déjà au milieu de la pièce, portant toujours ses robes de Mangemort.

"Tu es revenu," dit-elle, si soulagée qu'elle sentit ses genoux sur le point de flancher. Il était là, il était toujours vivant, il paraissait intact.

Elle tendit les mains vers lui. Ses mains tremblaient alors qu'elle agrippait ses robes et touchait son visage.

"Tu vas bien ?" demanda-il.

Elle fit un petit hochement de tête et posa la tête contre son torse.

"Qu'est-ce qui ne va pas ?"

Elle ferma les yeux pendant plusieurs secondes et écouta son cœur, le sentant juste vivant.

"Rien. Je suis juste si fatiguée. J'ai l'impression que j'avais oublié de respirer jusqu'à maintenant."

Il se figea un moment avant de pousser un soupir. Ses mains hésitèrent avant qu'il ne les pose sur les épaules d'Hermione.

Son ventre se noua, et elle ouvrit les yeux. "Qu'est-ce qui ne va pas ?"

Drago resta silencieux. Ses doigts tressaillirent. "Mon père… il est rappelé en Grande-Bretagne."

Le cœur d'Hermione s'emballa alors qu'elle levait les yeux vers lui.

Son expression était fermée. Résignée. "Il s'attendra à ma compagnie quand nous ne serons pas en service."

"Oh."

Elle ne savait pas quoi dire d'autre. Elle le regarda, et il détourna les yeux d'elle, mais ses mains restèrent sur ses épaules.

Elle chercha ses mots. "Bien sûr, tu devrais passer du temps avec ton père."

Il eut un rire brusque.

"Difficilement. Mon père, il…" Drago hésita, et son regard tomba sur le sol. Il y avait une trace enfantine dans son ton. "… hé bien, il m'a reproché la santé fragile de ma mère." Son expression était fermée, mais ses yeux vacillèrent. "Il a toujours dit qu'il s'attendait à ce que je sois un héritier exceptionnel pour me racheter de… l'avoir presque tuée."

"Drago…"

Il recula légèrement et s'éclaircit la gorge, son ton redevenant irrité. "Tout ça pour dire, je vais avoir peu de disponibilité - pour n'importe qui - dans le futur immédiat. Il pourrait me falloir plus longtemps pour réaliser ce qu'on me demande de faire. Si tu peux en informer Maugrey, j'espère qu'il en tiendra compte."

Pas disponible. Pas pour l'Ordre. Pas pour elle.

Elle se sentait si fatiguée qu'elle pouvait à peine tenir debout, mais elle hocha la tête et se redressa. "Bien sûr. Ne t'inquiète pas. Je suis désolée. Tu vas retourner au manoir alors, non ?"

Il fit un petit hochement de tête.

Elle attrapa ses mains et fit courir ses doigts dessus, cherchant d'éventuels tremblements. Il fallait qu'elle s'assure qu'il allait bien. Si elle ne savait pas quand elle allait le revoir, il fallait qu'elle sache qu'il allait bien. "Quand arrivera-il ?"

"Demain ou après demain. Je l'ai appris quand j'ai fait mon rapport." Sa voix était morne.

Hermione grimaça et se concentra sur les mains de Drago. "Je suis désolée. Peut-être… que ça ne sera pas pour longtemps."

"C'est possible. Il n'aime pas rester en Grande-Bretagne."

Il prit une vive inspiration, et sa mâchoire tressaillit alors qu'il la regardait vérifier ses doigts, encore et encore. "Je suspecte que quelque chose soit en train de se préparer. Dis-le à Maugrey. Il m'a été mentionné que le Seigneur des Ténèbres est allé personnellement au Sussex plusieurs fois pendant que j'étais parti. Quoi qu'il fasse, il ne fait confiance à personne actuellement, excepté peut-être Dolohov. Ça… pourrait être lié au retour inattendu de mon père."

Hermione hocha la tête. "Je le dirai à Maugrey. Je pense… l'Ordre se prépare à attaquer Poudlard."

"Ça serait un soulagement s'ils faisaient quelque chose. Les choses ont été trop calmes ces derniers temps." Il y avait une question informulée dans son ton.

Hermione évita ses yeux. "La perte de Kingsley a été un coup dur. Le moral a été touché." Elle continua de regarder les mains de Drago.

"Ils ont été inhabituellement silencieux avec moi aussi. Y a-t'il des doutes sur ma morale ?" Le ton de Drago était léger, mais il y avait un côté tranchant caché dans ses paroles.

Hermione leva les yeux. "Non. Je n'ai pas parlé de ta menace à Maugrey, si c'est ce que tu demandes."

Les yeux de Drago vacillèrent. Il vit qu'il doutait d'elle.

Le coin de sa bouche se tordit et elle lâcha sa main et recula.

"Après la mort de Kingsley, j'ai dit à Maugrey que Kingsley et lui t'avaient trop utilisé juste pour gagner du temps sans stratégie plus large, et que je n'allais pas rester à regarder ça sans rien faire." Elle haussa les épaules. "Je suis plus cruciale maintenant… sans Kingsley, Maugrey a besoin de mon soutien pour maintenir tous les aspects confidentiels de l'Ordre." Elle lui fit un petit sourire. "Je peux te protéger à présent."

Drago pinça durement les lèvres et son expression se fit froide et fermée.

"Je ne veux pas que tu t'impliques pour me protéger, Granger." Son ton était glacé.

Elle se raidit et un éclair de douleur la traversa. "Pourquoi pas ? Est-ce que la protection est sous tes droits exclusifs ? Suis-je supposée rester tranquillement assise dans les planques pendant que tu gagnes la guerre pour moi ?" Elle leva le menton. "Je ne mène pas de batailles. Je suis toujours soigneusement en cag…"

Drago tressaillit avant qu'elle ne puisse s'interrompre.

Elle baissa la tête et prit une vive inspiration, fermant les poings en détournant le regard. "Je suis désolée. Ce…Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je ne vois pas les choses de cette façon."

Mensonge.

Elle soupira et détourna les yeux. "Je ne quitte pas les planques. Je coordonne juste plus de détails confidentiels au sein de l'Ordre, ce qui veut dire que j'ai plus de leviers maintenant que je n'en avais avant. C'est tout. Je ne… me mets pas en danger."

Elle arrêta de parler et regarda Drago. Son expression était prudente.

L'air resta suspendu entre eux, froid ; comme si leurs fantômes les entouraient. Ils étaient tous les deux entourés par les morts.

La guerre était comme un abysse qui voulait tout et n'était jamais satisfait. Il en fallait toujours plus. Une autre vie. Une autre quantité de sang. Être meilleur. Plus intelligent. Plus impitoyable. Plus rapide. Puis rusé. Accepter une autre dose de douleur.

Ce n'était jamais assez.

Hermione s'était vouée à Eléos et Panacée. Elle s'était prosternée à plat ventre aux pieds d'Athéna. Elle avait construit des tours de prières. Elle avait sacrifié presque toutes les parties d'elle-même qu'elle avait à offrir.

Jamais assez.

Drago avait marché droit jusqu'à l'autel d'Arès.

Jamais assez.

Rien n'était jamais assez. La guerre en voulait toujours plus.

"Quant à celui qui scrute le fond de l'abysse, l'abysse le scrute à son tour."

Que donneras-tu ? Que donneras-tu pour gagner ?

Hermione déglutit. "Drago… Qu'est ce que tu t'attends à ce que je fasse ?"

Il poussa un soupir qui ressemblait à un sifflement. "Je ne te veux pas dans cette putain de guerre." La rage dans sa voix était pure. "Tout ce que je fais c'est m'inquiéter de ce qu'il va t'arriver si j'échoue à faire tout ce qu'on me demande de faire."

Elle prit une vive inspiration et avança vers lui, tendant la main vers la sienne. "L'Ordre n'est pas comme les Mangemorts. Drago…"

Son expression se fit vicieuse avant qu'elle ne puisse le toucher.

"Je suis conscient de la différence." Il ricana. "Est-ce que tu imagines que c'est plus rassurant de savoir que tu serais juste volontaire ?"

Hermione recula et le regarda, les épaules raides. "Je ne suis pas une possession que tu peux cacher quelque part, Drago. J'ai passé des années à me former pour contribuer à la Résistance. Tu ne peux pas me demander d'arrêter ou de partir parce que ça t'inquiète. Tu étais d'accord sur le fait que… tu as juré de ne pas interférer dans mon aide à l'Ordre. Tu ne peux pas essayer de me faire culpabiliser, ni de me rendre passive."

"Tu n'as aucune idée de ce qu'il arriverait si tu étais capturée. Si…"

"Je sais," aboya-elle, l'interrompant. Sa gorge était serrée et sa poitrine semblait compressée au point qu'elle pouvait à peine respirer. "Que penses-tu que je fais de mon temps ? Je soigne les gens que vous les Mangemorts n'arrivez pas à tuer. C'est quasiment tout ce que j'ai fait pendant des années. Je me suis occupée des victimes de la dernière division des sorts jusqu'à ce qu'elles meurent. Et elles sont toutes mortes." Elle essaya de déglutir. "Chacune… d'entre… elle… est morte. Je suis si consciente des risques que je pense parfois que je vais en devenir folle. Ne t'avise pas… ne t'avise pas d'essayer de me prendre pour quelqu'un de naïf. Je le sais aussi bien que toi. pourquoi penses-tu que j'essaye aussi fort ?" Sa voix se brisa légèrement.

L'expression de Drago restait froide.

Hermione se détourna. Elle se sentait si vidée qu'elle avait envie de sombrer dans un coin pour ne plus devoir rester debout. Elle s'était tellement inquiétée en attendant qu'il revienne en Angleterre. Elle avait atteint sa limite. Elle pouvait sentir ses murs d'occlumancie vaciller ; comme un barrage, son épuisement menaçait de les briser.

Tu es en train de perdre. Tu es en train de perdre. Tu n'as sauvé personne. Drago. Harry. Ron. Ginny. L'Ordre. La Résistance.

Tu en veux trop.

Ses épaules tremblèrent. Elle avait envie de retourner à son cabinet de potions et de trouver quelque chose qui arrêterait de lui faire ressentir la guerre comme une mort par milliers de coupures.

Elle pinça les lèvres et sa mâchoire trembla. "Je pense qu'il faut que je parte. Je suis trop fatiguée pour avoir cette dispute ce soir."

Elle avait juste envie de disparaître. Elle était si lasse de le supplier de ne pas mourir. Elle déglutit. Même sa salive avait un goût amer. "Je transmettrai à Maugrey l'information sur ton père. Est-ce que tu as besoin que je te soigne ?"

La main de Drago fusa et il agrippa son poignet. "Non. Ne t'en va pas. Je ne sais pas quand je pourrai de nouveau t'appeler."

Elle vacilla. "Drago… je suis si fatiguée… je ne veux pas me battre…"

Il l'attira plus près. "Reste juste avec moi. Reste."

Elle hocha légèrement la tête et la laissa tomber contre son torse. Il glissa un bras autour de sa taille et transplana. Ils réapparurent dans sa suite au Savoy.

Il l'allongea dans le lit et lui enleva ses chaussures. Il s'assit sur le bord, faisant courir ses doigts le long de son bras jusqu'à ce qu'elle soit à moitié endormie.

Il se leva. "Il faut que je prenne une douche et que je mange. Je reviens."

Hermione tendit la main pour attraper celle de Drago. "J'avais peur que tu meures à l'étranger, et tout ce que j'avais c'était ton mot." Sa voix était ensommeillée. "Tu es toujours en danger, et je ne peux jamais te demander d'arrêter."

Il fit courir son pouce sur le dos de la main d'Hermione. "Je le ferais si je le pouvais. Tu le sais. Je m'enfuirais avec toi sans un regard en arrière."

"Je sais…" Sa voix se brisa. Elle était trop fatiguée pour cacher ses émotions. Elle eut un petit sanglot. "Ne meurs pas Drago. Tu ne peux pas m'abandonner."

Il se rallongea sur le lit à côté d'elle et ne bougea pas avant qu'elle ait arrêté de pleurer et se soit endormie.

Quand le lit bougea, elle se réveilla pour le voir de l'autre côté du lit, les cheveux légèrement humides. Cela faisait des heures depuis qu'ils étaient arrivés, plus de sommeil qu'elle n'en avait eu depuis qu'il était parti.

Elle traversa le lit jusque dans ses bras, posant son front contre son torse nu, glissant ses doigts le long de son torse jusqu'à ce qu'il attrape sa main et la fasse rouler sous lui. Il étudia ses yeux mais ne bougea plus jusqu'à ce qu'elle lève la tête et l'embrasse.

La main de Drago était sur sa gorge, son pouce glissant vers le haut pour se nicher sous sa mâchoire alors que sa langue jouait avec elle d'Hermione. Graduel. L'enregistrant dans sa mémoire. Elle n'aurait jamais pensé connaître quelqu'un avec une telle intimité. Elle entrelaça ses doigts dans ses cheveux et ferma les yeux, se concentrant sur la sensation de Drago.

Elle savait comment il presserait ses lèvres contre le point où on sentait son pouls sur sa gorge, la façon dont il pousserait le corps d'Hermione sous lui. La sensation de ses mains sur ses cuisses et ses dents mordillant sa peau.

Quand il bougea en elle, ses mains étaient verrouillées autour des poignets d'Hermione. Elle s'arqua pour aller à la rencontre de ses hanches. Elle sentit son souffle contre sa peau.

"À moi. Tu es à moi," dit-il alors qu'il l'embrassait le long de sa mâchoire.

"Toujours."