Chapitre 60 - Flashback 35

Juin 2003

Hermione acheva la bombe en deux semaines. Le produit final était argenté, ovoïde, avec de légers reflets luminescents, légèrement plus petit qu'une boule de cristal, et glacé au toucher.

Le timing de la construction avait été précis. Quand elle fut terminée, elle envoya immédiatement un mot à Severus. Il devait se rendre à Poudlard cet après-midi là, pour sélectionner de nouveaux prisonniers à utiliser au Sussex.

"Elle n'est visible que pour ceux qui savent la chercher," dit-elle, la lui tendant avec précaution. "Elle est réglée pour s'activer à exactement midi le premier juillet. Il y a des charmes d'amortissement là où j'ai pu risquer d'en mettre, mais… ne la faites pas tomber."

Severus l'avait examinée attentivement jusqu'à son avertissement.

Il leva les yeux et lui jeta un regard méprisant. "Merci, Miss Granger, sans votre avertissement, il ne me serait jamais venu à l'esprit d'être précautionneux avec une bombe."

Hermione ne cilla pas. "Auriez-vous préféré que je ne mentionne pas que c'était délicat ?" Elle arqua les sourcils. "Elle est conçue pour cibler la magie qui nous garde hors de Poudlard, alors au plus vous la mettrez haut, au mieux ce sera. La tour d'Astronomie serait idéale. Elle a un pouvoir de combustion, mais elle est conçue avant tout pour briser les protections, au plus elle est basse au moment de la détonation, au moins elle aura d'impact. Du moins… hé bien, c'est entièrement basé sur l'arithmancie… je n'ai pas pu réellement la tester."

"Je suis tout à fait confiant," dit Severus, regardant de nouveau la bombe.

Hermione était si nerveuse qu'elle avait l'impression que sa poitrine était fracturée. Ces derniers temps, c'était une douleur constante et écrasante qui la laissait à peine respirer.

"Je n'avais pas conscience que vous aviez ajouté la fabrication de bombe à votre répertoire," dit Severus après une minute.

Hermione retira un tablier et des gants en épais cuir de dragon et baissa les yeux vers ses mains, grimaçant. Sa peau était parsemée de brûlures, et plusieurs de ses bouts de doigts étaient verts et flétris ; elle allait devoir enlever les tissus restants et les faire repousser. Les vêtements et les sorts de protection avaient des effets limités quand on travaillait avec des matériaux spécifiquement choisis pour leur capacité à détruire les protections.

Elle frotta ses doigts les uns contre les autres et regarda la peau craquer et tomber, laissant les os visibles.

Elle grimaça et enroula précautionneusement des bandages imbibés d'essence de Dictame autour de ses mains. "J'ai commencé après avoir entendu parler de l'hôpital albanien… juste la théorie. Je n'ai pas compris les rapports, et je me suis sentie coupable parce que c'était probablement partiellement de ma faute si l'hôpital avait été visé. J'ai pensé que je devais au moins savoir ce qui était arrivé à tout le monde là-bas. Puis… après le pillage du laboratoire de la division des sorts… j'avais tout, mais il ne valait même pas la peine d'essayer de proposer l'idée que l'Ordre utilise une bombe."

Elle haussa les épaules et commença à emballer les matériaux dans toutes leurs boîtes et leurs contenants soigneusement scellés et protégés pendant que Severus la regardait.

Ils étaient dans une ferme abandonnée dans la campagne que l'Ordre avait selectionnée pour qu'Hermione travaille. Initialement, il n'y avait eu que des objections sans enthousiasme quand l'idée d'utiliser une bombe avait été proposée, mais finalement l'Ordre avait accepté. Personne n'avait de meilleure idée, et après la moitié d'une année et des douzaines de victimes dans des tentatives infructueuses, il y avait un vif sentiment de désespoir en chacun d'entre eux.

Hermione plaça avec précaution une flasque toujours à moitié remplie de liquide argenté et brillant dans une boîte protégée et la scella avec d'autres sorts de protection. "Quand Bill a amené ses analyses des protections de Poudlard le mois dernier, je me suis rendue compte qu'il y avait une chance que je puisse combiner des charmes et de l'arithmancie avec les usages traditionnels des potions et de l'alchimie pour faire un explosif. J'étais en train de relire la collaboration de Dumbledore avec Flamel sur les usages du sang de dragon et j'ai estimé qu'il réagirait avec le nitrate d'argent contenu dans le sang de licorne assez puissamment pour dissoudre les protections. La principal défi était de trouver une façon de le suspendre dans quelque chose qui pourrait pénétrer et adhérer à la magie, alors j'ai utilisé du venin de manticore pour l'émulsifier. La détonation sert avant tout à créer un rayon de souffle assez grand pour déstabiliser les protections pour qu'elles s'effondrent quand le solvant les frappera. J'ai vérifié les chiffres des douzaines de fois avant de faire la proposition à Maugrey ; je suis presque certaine d'avoir tout calculé correctement."

Elle se surprit à divaguer et s'arrêta, levant les yeux vers Severus.

Alors qu'il l'étudiait, ses yeux brillaient. Puis sa bouche se pinça, et il regarda de nouveau la bombe entre eux. "Est-ce que les potions et la guérison sont des carrières de guerre si ennuyeuses que vous vous soyez sentie obligée d'inventer un domaine de la magie entièrement nouveau pour vous occuper ?"

Hermione sentit ses joues rougir. Elle baissa les yeux pendant que le coin de sa bouche se tordait. "Je pensais que c'était une façon logique de combiner ces branches de la magie."

"Évidemment," dit Severus avec un reniflement étouffé. "Si ceci explose prématurément, j'espère que vous vous rappellerez de toutes les occasions où j'ai répondu à vos incessantes questions en vous rappelant que ce n'est pas parce que vous pouvez imaginer une chose que cela signifie qu'il faut essayer de la faire."

Il soupira. "Vous avez toujours été une élève à qui il était insupportable d'enseigner." Il y eut un silence alors qu'il regardait de nouveau la bombe. "Ceci en est précisément la raison."

Hermione détourna la tête pour cacher un sourire.

Ce soir-là, elle transplana à Whitecroft et attendit presque une demi-heure avant que Drago n'apparaisse.

Elle avait à peine vu Drago depuis qu'il était rentré de voyage. Il apportait occasionnellement des informations et renouvelait ses avertissements sur le fait que Voldemort préparait probablement quelque chose pour sa propre attaque finale. D'autres Mangemorts que simplement Lucius avaient été rappelés en Angleterre.

Elle avait décidé, depuis le début, de ne pas mentionner sa plus récente occupation pour l'Ordre.

Quand il apparut dans la masure, il était habillé de robes formelles, et il était sur ses gardes. C'était comme s'il s'était attendu à la trouver en train de se vider de son sang sur le sol.

Le soulagement s'étala sur son visage alors qu'il la regardait. "Je ne peux pas rester à moins que ça ne soit une urgence. Je suis à un dîner. Qu'est-ce qu'il y a ?"

Elle avait envie de tendre la main et de le toucher, mais elle se retint. Ses doigts n'étaient pas encore complètement guéri ; elle les avait soigneusement camouflés avec un glamour pour cacher les cicatrices.

"J'ai été envoyée pour te dire que la Résistance attaquera Poudlard dans deux jours. Ça commencera précisément à midi."

La mâchoire de Drago tressaillit. "Je présume que tu n'y seras pas."

Hermione hocha la tête. "Je serai à l'hôpital."

Les yeux de Drago se plissèrent alors qu'il continuait à l'étudier. "L'Ordre a trouvé un moyen de passer les protections ?"

Hermione ne réagit pas. "Oui. Les protections ont été prises en compte."

"Qu'est-ce que tu as besoin que je fasse ?"

Elle se lécha les lèvres et serra son poing gauche. "Harry sera là. Nous voulons une confrontation finale, mais avant ça, il faut qu'on tue Nagini. Harry dit qu'il est sûr que c'est un Horcruxe. Trouve un moyen qu'elle soit amenée, ou tue-la si elle est laissée derrière."

Ses yeux luisèrent. "Si le Seigneur des Ténèbres apparaît, elle sera là."

"Bien." Hermione fit un petit hochement de tête. "C'est tout ce dont nous avons besoin."

Elle se tourna pour repartir, mais Drago fit un pas en avant et attrapa son bras. Ses yeux étaient sombres alors qu'il approchait d'elle. "Reviens. Cette nuit."

Elle secoua fermement la tête. "Tu as dit que nous ne pouvions pas, Drago. Ce n'est pas le moment de prendre des risques."

Elle essaya de reculer, mais l'autre main de Drago attrapa sa hanche, et il la plaqua contre la porte. Il semblait avoir oublié que c'était lui qui ne pouvait pas s'attarder.

"Je veux te voir." Il glissa sa main du bras d'Hermione jusqu'à sa mâchoire, levant son visage vers lui.

Le souffle d'Hermione se coupa et elle frissonna.

Elle avait froid. Elle avait si froid, et il était chaud.

Ça pouvait être la dernière fois.

Elle hésita. "Très bien. Je viendrai. Tu dois y aller maintenant."

Il la lâcha. "Je t'appellerai."

Elle hocha la tête et il disparut sans un bruit.

Elle retourna au Square Grimmaurd et finit de guérir ses mains avec précaution jusqu'à ce que les cicatrices soient presque indétectables. Les empreintes des doigts de sa main droite avaient disparu, mais à moins qu'elle ne les regarde sous un certain angle, ça se voyait à peine.

Elle fit courir ses doigts sur son sternum. Avec un traitement, les cicatrices de son torse s'étaient estompées et la blessure paraissait moins saisissante. L'intérieur de ses seins avant été éclaboussé de brûlures d'acide jusqu'à son tissu mammaire, qu'elle avait réussi à restaurer. Les cicatrices, cependant, étaient permanentes. Le mieux qu'elle pouvait faire était de les traîter pour que le tissu cicatriciel soit élastique et ajouter une accumulation de glamour pour que la blessure s'estompe et soit moins décolorée et difficile à regarder.

Il était trois heures du matin quand son anneau brûla.

Drago apparut à l'instant où elle entrait dans la masure et les fit transplaner. Elle se retrouva écrasée contre le mur alors que les lèvres de Drago trouvaient les siennes, et qu'il l'embrassait voracement.

Elle s'agrippa étroitement à lui, faisant courir ses mains le long de ses épaules, désespérée de le sentir. Le bout de ses doigts était trop sensible à cause de la nouvelle peau qui avait repoussé.

Elle eut un petit gémissement contre les lèvres de Drago quand ses mains se glissèrent vers sa gorge pour se poser sur sa joue, et il se recula pour l'étudier, son regard acéré embrassant tous les détails de son visage.

Un jour, je vais l'aimer dans un moment qui ne sera pas volé, se promit-elle.

"Tu vas bien ? Tu vas bien ?" demanda-il, l'étudiant.

"Oui, je vais bien. Est-ce que tu vas bien ? As tu été blessé ?" Elle agrippa ses mains dans les siennes.

Drago laissa tomber son front sur celui d'Hermione. Ils restèrent ainsi pendant une minute avant qu'il ne libère ses mains et lève le visage d'Hermione pour étudier de nouveau ses yeux. Elle savait qu'elle avait l'air fatigué, et plus maigre, et que son teint était gris d'être tant restée à l'intérieur sans lumière du soleil. Elle lui fit un pâle sourire en croisant son regard.

"J'aurais dû t'appeler plus tôt." Ses doigts couraient le long de ses pommettes comme s'il s'attendait à ce qu'elle se brise entre ses mains.

Elle secoua la tête.

"Le risque n'en valait pas le coup. Nous ne devrions pas être en train de se voir maintenant. Je n'aurais pas dû venir," dit-elle en resserrant sa prise sur les robes de Drago. Elle attira de nouveau sa bouche contre la sienne. Alors qu'il l'embrassait, il l'éloigna du mur et la fit reculer vers le lit.

Le tic-tac régulier de l'horloge ressemblait à un compte à rebours.

Elle déboutonnait habituellement les vêtements de Drago, ou tirait dessus jusqu'à ce que les boutons cèdent, mais à la place elle sortit sa baguette et marmonna un sort qu'elle avait utilisé mille fois dans la salle d'hôpital. Ses vêtements vacillèrent et s'enlevèrent de lui. Elle répéta le sort sur ses propres vêtements.

"Efficace," dit-il dans un souffle alors que sa main remontait la colonne vertébrale nue d'Hermione.

Elle eut une exclamation essoufflée alors que la peau de Drago se pressait contre la sienne. "Je ne veux pas gâcher de temps."

Elle fit courir ses doigts le long de son cou et sur ses omoplates. Elle était si désespérée qu'elle pouvait sentir son cœur tambouriner dans sa poitrine alors que Drago lui faisait arquer le corps contre son torse et l'embrassait entre ses seins en descendant jusqu'à son ventre alors qu'il la poussait contre le lit.

Elle tendit les bras vers lui, tirant sur ses épaules. "S'il te plait, Drago… nous n'avons pas le temps d'y aller lentement. Je ne peux pas revenir demain."

Il relava la bouche des hanches d'Hermione, alors qu'elle faisait courir ses doigts le long de sa mâchoire, sentant le léger chaume sous le bout de ses doigts. Elle l'attira sur son corps et passa légèrement les doigts sur sa nuque en l'embrassant, écartant les jambes et les enroulant autour des hanches de Drago.

Elle ne ferma pas les yeux. Elle les garda ouverts et l'étudia, mémorisant chaque détail de son visage. Elle regarda la façon dont ses yeux vacillèrent et changèrent de couleur quand ses pupilles se dilatèrent, argent, gris, mercure, diamant et glace. Elle voulait enregistrer la façon dont il ressentait ses mains contre lui ; les tendons de sa nuque et la courbure de ses os ; le goût de sa peau et l'odeur de la mousse de chêne, du papyrus et du cèdre de sa peau quand elle enfouissait son visage contre son épaule.

Il entrelaça leurs doigts en se poussant en elle. Son expression était celle d'une adoration possessive et brûlante et d'une faim qu'elle pouvait sentir dans son âme.

Elle l'embrassa. Elle ferma les yeux en l'embrassant.

Faites que ça ne soit pas la dernière fois. Ne laissez pas cette fois être la dernière. Elle se le répéta encore et encore en enroulant les bras autour de son cou.

Après, Drago la serra contre son torse, sa tête reposant au sommet de celle d'Hermione, ses doigts dessinant des runes et des motifs contre sa peau.

Je vais prendre soin de toi. Je vais toujours prendre soin de toi. Je vais prendre soin de toi. Je vais prendre soin de toi.

Les mots étaient silencieux, mais elle pouvait les entendre dans le mouvement de l'air, et sentir le léger mouvement de la mâchoire de Malefoy alors qu'il les articulait. Encore et encore, jusqu'à ce qu'elle ait une boule dans la gorge.

Elle ferma les yeux pendant plusieurs minutes avant de s'asseoir et de regarder intensément Drago.

Alors qu'il levait le regard vers elle, ses yeux de mercure étaient prudents. Elle l'étudia, le mémorisant ; cette facette de lui qui n'était qu'à elle.

Elle entrelaça ses doigts avec ceux de Drago et passa le bout de ses doigts trop sensibles le long des arrêtes de ses phalanges. La bouche d'Hermione tressaillit et elle hésita.

"Drago," dit-elle finalement, "il y a une chance… nous espérons que la guerre va se finir à Poudlard. Nous ne… nous ne savons pas combien de temps nous allons encore durer si ce n'est pas le cas."

Les doigts de Drago tressaillirent.

"Si ce n'est pas le cas…" elle eut un petit rire à moitié sanglotant, "hé bien, on continuera juste d'essayer, je suppose. Mais si c'est la fin. Si c'est le début de la fin de la guerre, tu…" elle se mordit la lèvre et hésita, "ton serment d'aider l'Ordre sera rempli, et si tu restes et essaie de maintenir ta couverture en place pour nous aider, tu risques de violer le second serment que tu as fait. Alors… tout ça pour dire, si Harry réussit à vaincre Tu-Sais-Qui mardi, il faut que tu partes," elle leva les yeux de sa main et croisa son regard, "tu dois t'enfuir."

L'expression de Drago ne se rida même pas.

Hermione baissa les yeux et joua avec l'anneau au doigt de Drago. "Je… il y aura des choses pour lesquelles on aura besoin de moi, alors je ne… je ne pourrais pas venir avec toi… si on gagne. Mais tu devrais partir quand-même.

Drago s'esclaffa. "Je ne vais pas partir sans toi, Granger. Je vais…"

La gorge d'Hermione se serra. Elle pressa ses doigts contre les lèvres de Drago et croisa son regard. "Tu dois t'enfuir. Si tu es attrapé… je ne pourrais peut-être pas te protéger. Si tu as un procès, même si Maugrey et moi témoignons en ta faveur, tu pourrais toujours subir le baiser du Détraqueur ou être exécuté. S'il meurt… dès qu'il meurt… part. Tu seras enfin libre. Ça sera ta vie, Drago."

Il s'assit, l'expression dédaigneuse. "Je ne te laisserai jamais derrière moi."

Le ventre d'Hermione se noua, et elle secoua la tête, baissant les yeux. "J'y réfléchis depuis un moment. Drago, il faut que je reste. Mon travail commence après les batailles. À la fin, les choses pourraient être en désordre. Les Mangemorts seront désespérés. Te capturer serait une priorité et je ne sais pas si je pourrais te protéger… il… il y aura beaucoup de choses qui seront révélées."

Il se pencha en avant et agrippa la main d'Hermione. "Tu es à moi. Maintenant et après la guerre. Ton serment, tu as juré."

"Je suis à toi." Elle leva les yeux et croisa son regard. "Je te l'ai promis pour toujours, et je le pensais. Toujours, toujours, tant que je serais en vie. Mais…" sa poitrine se serra et sa mâchoire trembla, "… je ne serais pas prête à partir quand tu le devras. Je ne veux pas que tu risques d'être capturé parce que tu m'attends."

Les yeux de Drago se plissèrent en deux fentes. "Combien de temps t'attends-tu à ce que je doive attendre ?"

Les yeux d'Hermione se baissèrent. "Je ne sais pas. C'est pour ça que je veux que tu partes sans moi."

"Tu en as une idée, j'en suis sûr."

Elle secoua la tête. "Je ne sais pas à quelle vitesse les choses vont évoluer. Il est possible que je puisse avoir une chance de partir une fois que ça sera calme à l'hôpital. Mais… si on a des prisonniers et des victimes du Sussex, je serai celle en charge de m'occuper d'eux… la dernière fois… l'année dernière, ça a pris quelques mois. Les procès pourraient commencer d'ici là, et alors… je pourrais ne plus pouvoir… partir. Je ne veux pas avoir à m'inquiéter que tu essaies de venir pour moi et te fasse attraper."

"Tu parles de ton procès ; pour tes supposés crimes de guerre." Son ton était accusateur.

Hermione détourna les yeux. "Je suis sûre que ça ne sera pas pour longtemps. Une fois que je serais libre… j'irai quelque part où tu pourras me trouver. C'est… ça sera bien pour toi d'avoir du temps pour toi… d'avoir du temps de te retrouver seul avec toi-même."

"C'est pour ça que tu es venue ce soir ? Parce que tu voulais me dire ça ?" Il y avait une dérision traînante dans son ton.

Il agrippa la main d'Hermion, la tira vers lui jusqu'à ce que leurs visages se touchent presque et glissa une main sur sa gorge.

"Tu es à moi. À moi. Tu l'as juré. Ton putain d'Ordre t'a vendu à moi pour se gagner du temps. Si quelqu'un essaie de te mettre dans une cellule pour se prendre pour un héros, je le tuerai."

Il n'attendit pas qu'elle réponde ; il l'embrassa comme s'il essayait de la marquer avec ses lèvres. Elle enroula les bras autour de son cou et lui rendit son baiser.

Quand les aiguilles de l'horloge pointèrent cinq heures précises, elle recula. "Je dois y aller. J'ai du travail."

Elle se rhabilla rapidement et sortit sa baguette pour transplaner. Puis elle hésita et fit un pas vers Drago.

"Soit prudent, Drago. Et… garde en tête ce que je t'ai dit, si tu as l'occasion…"

Son expression était si dure qu'il pourrait avoir été gravé dans le marbre. "Je te verrai après la bataille."

Les doigts d'Hermione tressaillirent. "S'il te plait, soit prudent, Drago."

Ne meurs pas. Les mots non dits étaient suspendus dans l'air.

Elle déglutit et transplana.

Le Square Grimmaurd vibrait presque d'une agitation nerveuse. Il y avait des douzaines de meneurs de la Résistance dont Hermione ne connaissait même pas le nom dans la salle de guerre, se réunissant avec Maugrey et l'Ordre. L'attaque était planifiée pour être à la fois une mission de secours et une confrontation finale.

Hermione était dans la salle d'hôpital à travailler sur les préparations avec Poppy, Padma et les autres guérisseurs de terrain et les infirmières de la Résistance.

Au milieu de l'après-midi, le Patronus en forme de setter irlandais de Bill bondit dans le Square Grimmaurd à la recherche de Maugrey. Alastor partit, laissant Remus et Tonks mener la réunion pendant une heure.

Hermione alla rendre visite à Ginny. Ce n'était pas planifié, mais elle ne savait pas combien de temps elle aurait dans les jours suivants.

Elle tendit à Ginny une potion pour contrer l'effet du glamour d'éclabouille et agita sa baguette pour enlever les glamours additionnels sur le ventre de Ginny.

"Comment vas-tu ?" demanda-elle, s'asseyant alors que la peau de Ginny se lissait et que son ventre enflait pour s'arrondir au-dessus de son pelvis.

"Je m'ennuie à mourir, surtout quand je peux entendre tout le monde s'agiter autour de moi pour se préparer pour demain," dit Ginny. Son visage était pensif et plein de regrets, mais ses yeux étaient brillants. "Penses-tu que ça pourrait réellement être la bataille finale ?"

Hermione haussa une épaule et détourna les yeux. "Si ce n'est pas le cas, je ne sais pas ce qu'on va faire."

"Là, il est réveillé. Tu peux le sentir donner des coups de pied." Ginny attrapa la main d'Hermione et la pressa contre son ventre, juste au-dessus de l'os de sa hanche. Il y eut un silence, puis Hermione sentit quelque chose remuer légèrement sous sa paume.

"Tu le sens ?" dit Ginny.

"Oui, je le sens." Il y eut un autre mouvement puis il resta immobile pendant quelques minutes.

"Il s'est probablement rendormi," dit Ginny, faisant la grimace. "Tu devrais le sentir la nuit, je pense qu'il fait des sauts périlleux."

"Je me demande de qui il tient ses gènes d'insomniaque," dit Hermione d'une voix sèche en caressant le ventre de Ginny.

"Peux-tu l'imaginer à Poudlard un jour, quand la guerre sera finie ?" Les yeux de Ginny brillaient.

Hermione croisa le regard de Ginny et réussit à lui faire un pâle sourire en enlevant sa main. "Je plains les professeurs."

Hermione agita sa baguette et lança tous les diagnostics.

Ginny posa sa main sur le poignet d'Hermione. "Pas besoin. Je me suis entraînée et je peux faire tous les examens. Juste… parle-moi. Comment va Harry ? Est-ce que Ron va bien ? As-tu vu Maman récemment ? J'ai toutes ces lettres d'eux, mais ils ne me disent toujours que la moitié des choses."

"Harry est…" Hermione hésita et rangea sa baguette. "Hé bien, il va mieux en ce moment. Padma et moi l'avons gardé dans la salle d'hôpital ces dernières semaines, pour qu'il reprenne du poids et qu'on surveille son sommeil. Alors, il… il semble aller un peu mieux, je pense. Il fait toujours beaucoup de cauchemars, j'ai essayé de le faire pratiquer l'occlumancie, mais il ne m'écoute pas là-dessus. Avec l'attaque qui arrive, il a finalement arrêté de fuir et s'est mis dans les combats. Mais il compense en fumant plus." Hermione poussa un petit soupir. "Il a été très silencieux ces derniers temps, même avec Ron."

Hermione joua avec ses ongles. "Ron… Ron s'accroche. Il sait que Harry compte sur lui, mais il a toujours le cœur brisé pour Lavande, et il pense toujours que la mort de Kingsley est de sa faute. Mais… il s'accroche."

"Est-ce que tu penses que ça va marcher demain ?"

Hermione eut l'impression d'avoir avalé de l'acide. "Hé bien, mes calculs d'arithmancie sont bons. Flitwick et Minerva ont tous les deux regardé ma théorie et jusque-là nous n'avons pas entendu parler de quoi que ce soit indiquant qu'elle ait explosé prématurément." Son cœur battait violemment dans sa poitrine, et elle continua de parler de plus en plus vite. "Si elle ne fonctionne pas, la plupart de la Résistance va être là à attendre et…"

"Je ne faisais pas référence à ta partie. Je veux dire, penses-tu que l'Ordre peut gagner demain ?"

Hermione déglutit, la bouche sèche. "Nous allons essayer." Elle regarda vers la porte. "Ginny, je ne peux vraiment pas rester. Je suis censée prendre une potion de Sommeil sans rêve et me reposer quelques heures avant demain. J'ai encore mille choses à faire."

"Oh oui. Bien sûr." Ginny se dégonfla. "Je ne te retiens pas."

Hermione sortit des fioles de potion pour remettre en place le glamour d'éclabouille et regarda attentivement pour s'assurer que ça faisait correctement effet.

"Je te ferai savoir comment ça se passe, dès que nous le saurons," dit Hermione, regardant vers la porte.

"Dis à Harry que je l'aime. Dis-lui que je crois en lui." La voix de Ginny tremblait.

Hermione se retourna et lui fit un petit sourire. "Je le ferai."

Au petites heures du matin, des groupes de Résistants commencèrent à partir vers l'Ecosse. Hermione alla vérifier une troisième fois son inventaire de potions. Padma avait déjà coché l'inventaire mais il y avait des potions que Padma ne connaissait pas dont Hermione voulait compter les stocks. Elle en était à la moitié quand elle sentit ses protections se briser.

Elle ferma vivement le compartiment et se mit à compter les fioles de Poussos quand Harry apparut à la porte.

Elle s'arrêta et leva les yeux vers lui.

Harry venait rarement la voir avant de partir. Il partait en mission sans un mot, comme si laisser les choses en cours signifiait qu'ils pourraient sûrement continuer une fois qu'il serait revenu. Ou il s'arrêtait pour lancer un rapide "Je m'en vais. On se voit dans deux semaines."

Il n'y avait jamais de mention des risques. C'était comme les vacances d'été à l'école. Juste une brève séparation. La réunion était toujours vue comme inévitable.

Il avait l'air différent. Son séjour dans la salle d'hôpital avait permis à ses traits de se remplir légèrement, et ses yeux semblaient moins vides et enfoncés. Il était pâle mais pas gris.

Il y avait un désespoir pensif qui émanait de lui. Le garçon maigre avec ses vêtements trop grands et ses lunettes cassées, qui avait acheté un chariot plein de gourmandises pour son ami. Il avait l'air contusionné. Pas physiquement, mais émotionnellement ; comme s'il avait été battu jusqu'à tomber au sol.

Hermione l'étudia en silence pendant quelques secondes.

"Qu'est ce qu'il y a, Harry ?"

Sa voix était douce, prudente. Une voix qu'elle avait appris à utiliser dans la salle d'hôpital.

Le coin de la bouche de Harry tressaillit, et il pencha la tête sur le côté. "Je pense que ça va être la fin."

Hermione lui fit un petit sourire. "Je l'espère. J'espère que tu as raison là-dessus."

"Je…" Harry commença à parler puis s'arrêta. Il joua avec la poignée de la porte. "Je… je vais essayer de le tuer. Je ne l'ai encore dit à personne. Mais je n'arrête pas de penser à la prophétie. Si elle est vraie, je dois le tuer. Je ne pense pas que je puisse continuer à me battre encore dans cette guerre."

Hermione avança vers lui et lui prit la main, entrelaçant ses doigts avec les siens et le regardant dans les yeux.

"Je crois en toi, Harry. Je t'ai dit quand tu avais onze ans que tu étais un grand sorcier. Je n'ai jamais cessé de le croire."

Harry lui fit un pâle sourire, mais il disparut aussi vite qu'il était apparu. Il la fixa, ressemblant presque à un fantôme. Comme si les doigts d'Hermione pourraient subitement passer à travers les mains de Harry.

"Hermione, je pense que je vais mourir aujourd'hui."

Hermione le fixa. Elle ne l'avait jamais entendu dire quelque chose comme ça avant. Peu importait la bataille, peu importait la blessure, peu importait leur chances de l'emporter ; Harry avait toujours cru qu'il vivrait pour voir le lendemain.

"Non !" Sa voix claqua comme un fouet. "Non. Tout l'Ordre et la plupart de la Résistance seront là…"

"Hermione…" Harry l'interrompit d'une voix ferme. Il laissa s'échapper un soupir et baissa les yeux sur leurs mains. "Je peux le sentir. Je pensais… pendant un moment j'ai pensé qu'il y aurait plus…" Son épaule tressaillit, et il pinça les lèvres. "… que gagner ne serait que le commencement. Mais… je… je pense que tu as raison. Tu as toujours eu raison. La guerre… est tout ce qu'il y aura pour moi."

Hermione eut l'impression d'avoir été frappée. Elle serra sa main plus fort. "Ce n'est pas dans ce sens que je le disais, Harry. Ce n'est jamais ce que j'ai voulu dire. Tu ne peux pas aller à Poudlard aujourd'hui dans cet état d'esprit. Ça va marcher. Je te le jure… les équations sont parfaites… je les ai vérifiées des centaines de fois. On peut gagner. Tu peux le faire. Ginny t'attends…"

"Hermione, stop." Harry l'interrompit. "Il faut que je te le dise avant de partir."

Il prit une vive inspiration. "Je suis désolé qu'il m'ait fallu si longtemps pour te croire. Je voulais que tu aies tort à propos de tout ça. Je ne me suis pas rendu compte à quel point j'étais en colère contre toi juste parce que j'avais envie que tu aies tort. Je n'ai juste… je n'ai pas le temps d'arranger les choses avec toi."

Il parlait de plus en plus vite comme s'il allait manquer de temps. Comme s'il pouvait voir les minutes qu'il lui restait à vivre, et qu'il y en avait peu.

"Je sais que je ne devrais rien te demander, mais… mais… je veux te demander de prendre soin de Ginny pour moi. Au cas où je meurs." Sa prise sur la main d'Hermione se resserra. "Je ne sais pas ce qu'il va se passer aujourd'hui. Je veux que quelqu'un prenne soin d'elle. Elle ne peut pas se protéger si elle est malade, mais je sais que tu… tu… tu feras tout ce qu'il faut pour la garder en sécurité. Je veux savoir qu'elle ira bien, peu importe ce qu'il se passe. Je sais que si elle est avec toi, elle ira bien."

"Harry… tu vas revenir."

L'irritation passa dans les yeux de Harry, mais avant qu'il ne puisse parler, il y eut un bruit de l'autre côté de la porte.

Hermione leva les yeux pour voir que Ron passait la tête par la porte. "Harry, il faut qu'on y aille. Tout le monde attend en bas."

"D'accord. J'arrive." Harry la lâcha et recula. Il lança un dernier regard à Hermione et lui fit un petit salut avant de descendre les escaliers. Hermione le regarda jusqu'à ce que sa tête disparaisse de sa vue.

Ron s'attarda jusqu'à ce qu'Hermione le regarde. "Il va bien ?"

Hermione détourna les yeux. "Il voulait me faire promettre de prendre soin de Ginny, au cas où il mourrait aujourd'hui. Ron, surveille-le."

L'expression de Ron se tendit, mais il ne sembla pas surpris. "Je ne ferai. Où qu'Harry aille, je ne serai jamais plus loin que quelques pas derrière lui."

La bouche d'Hermione s'ouvrit avant qu'elle ne sache quoi dire. "Ron. Sois prudent, Ron." Elle tendit la main vers lui. "Ramène-le."

Il lui fit un sourire tordu qui n'atteignit pas ses yeux.

Il avait tant été vieilli par la guerre. Son visage fin était décharné. Ses pommettes saillaient, et ses traits étaient tirés. Les stries grises dans ses cheveux s'étaient élargies. Il avait l'air beaucoup plus vieux que ses vingt-deux ans. La mort de Lavande avait éteint une partie de la lumière en lui.

Hermione ne l'avait même pas su. N'avait pas remarqué la relation avant qu'elle ne s'achève.

Ses yeux bleu pâle étaient toujours d'acier. "Je le ramène à chaque mission. C'est mon boulot." Il jeta un regard vers les escaliers, et Hermione put voir que son esprit était accaparé par la journée à venir. "Prend soin de toi, Mione. Celle-là pourrait toucher durement la salle d'hôpital."

Elle hocha une tête tremblante.

"Bien. Allez, ils m'attendent maintenant." Ron posa sa main sur l'épaule d'Hermione pendant un moment et se retourna pour partir.

Hermione resta seule dans son cabinet de potions, essayant de se souvenir depuis quand ils ne se serraient plus dans les bras pour se dire au revoir.