Chapitre 63 - Flashback 38

Juillet 2003

Le laboratoire du Sussex était un énorme bâtiment noir qui semblait être tombé du ciel au milieu de la forêt d'Ashdown. Les protections anti-transplanage étaient étendues sur plusieurs centaines de mètres. Hermione approcha sous forte désillusion, contournant largement les autres plus petits bâtiments qui l'entouraient. Le laboratoire éclipsait tout le reste. L'air était si vicié et corrompu par la magie noire qu'il était difficile de respirer. Des Détraqueurs patrouillaient loin au-dessus.

De l'angle avec lequel elle l'approchait, le bâtiment rappelait à Hermione les photos d'Azkaban. Elle avait vu les plans du Sussex et l'avait vu de loin, mais c'était la première fois qu'elle l'approchait.

C'était un un bâtiment imposant en forme de V, sans point d'entrée visible. Il n'y avait qu'une poignée de fenêtres sur les étages les plus élevés. Elle savait des plans que la seule entrée possible était par un point de transplanage sécurisé à l'intérieur du bâtiment, et la seule sortie un autre point de transplanage à un autre étage.

Si elle avait été plus calme et moins frappée par le chagrin, elle aurait réalisé qu'il était impossible que Drago puisse extraire Ginny si rapidement sans se compromettre.

Ils avaient tous les deux fait des erreurs à cause du désespoir.

Elle regarda autour d'elle. C'était une soirée couverte pour la saison. Il commençait à faire noir ; les créatures sombres émergeraient bientôt en force.

Hermione approcha jusqu'à ce qu'elle atteigne la couche finale de protection. C'était le même genre de protections impénétrables qui s'étaient trouvées autour de Poudlard. L'herbe et les plantes s'étaient changées en cendre le long de son périmètre.

Hermione pointa sa baguette, et la magie craqua, devenant visible autour d'elle.

Elle sortit un couteau de sa cape et, s'agenouillant, perça les protections près du sol. Le venin de Manticore dans l'argent glissa à travers comme si la magie n'existait pas. Hermione sortit l'une des douzaines de bombes qu'elle avait apportées, la tapa légèrement du bout de sa baguette et la poussa à travers l'ouverture, faisant attention à ne pas laisser la protection ou le couteau entrer en contact avec la minuscule orbe. Si elle faisait accidentellement sauter une bombe, les Mangemorts la ramasseraient en morceaux sur un périmètre de quinze mètres.

Elle essaya de ne pas y penser.

Elle poussa cinq bombes à travers l'ouverture dans la protection et, d'un mouvement de baguette, fit léviter les bombes jusqu'au bâtiment, en laissant trois intercalées le long de la base et en envoyant deux flotter à à peu près six mètres de hauteur contre le mur. Elle retira le couteau et l'ouverture dans la protection se referma instantanément.

Elle avança rapidement de trois mètres et répéta les étapes, jusqu'à ce qu'elle ait remonté tout le long du mur est du bâtiment et que ses poches soient vides. D'après les rapports que Severus et Drago avaient ramenés sur le Sussex, le côté est du bâtiment était là où se trouvait la division de développement des sorts et la plupart des recherches qui utilisaient les tests sur les humains. Le côté ouest du bâtiment était plus technologique, là où les entraves et la recherche sur le Fidelitas étaient basées.

Elle recula aussi loin qu'elle le put, regardant le bord de la protection anti-transplanage et essayant de jauger sur quelle distance elle devrait courir. D'un rapide mouvement de baguette, elle se lança un sort de Têtenbulle.

Elle ferma les yeux et prit une lente inspiration avant de les rouvrir et de tendre sa main de baguette.

Je vais prendre soin de toi. Je prendrai toujours soin de toi.

Elle agita d'un coup sec sa baguette vers le haut puis l'abattit.

Il y eut une fraction de seconde de silence. Puis il y eut un grondement, comme si les particules d'air vibraient.

Le son la frappa comme un mur et ses os vibrèrent. Les protections autour du Sussex apparurent à la vue alors qu'une rapide série d'explosions filait le long du bâtiment. L'air se déchira dans une explosion assourdissante. Le souffle frappa les protections et ricocha vers la base du laboratoire du Sussex. Un nuage de poussière et de poison mortel emplit l'air, et le côté est entier du bâtiment vacilla puis tomba, se renversant en arrière et s'effondrant sur la partie ouest du bâtiment.

Le sol trembla si fort qu'Hermione fut jetée au sol. Sa tête heurta le sol et la douleur fit vaciller ses murs d'occlumancie. La sensation d'étourdissement de la potion fuita dans sa conscience alors qu'elle se remettait sur pieds. Il y avait un tintement aigu et douloureux dans ses oreilles qui éteignait tous les autres bruits. Elle jeta un dernier coup d'œil vers le bâtiment avant de foncer vers la limite de l'anti-transplanage.

Elle avait fait quinze mètres quand un désespoir glaçant lui tomba dessus.

Elle trébucha et hésita.

Harry était mort.

Tout le chagrin la frappa brusquement comme un raz de marée.

Harry. Padma. Dobby. Tout le monde.

Tout le monde.

Tout ce qu'elle avait fait. Rien n'avait compté.

Tout avait été inutile.

Les yeux vides de Harry alors qu'il était frappé encore et encore par le sort de Mort.

Ron hurlant. Se jetant désespérément vers son meilleur ami.

"Est-ce que Parv… ?"

Colin hurlant alors qu'il se faisait écorcher sur le lit d'hôpital.

Ça n'avait servi à rien.

"On a passé du bon temps, Granger, mais ça n'a jamais été fait pour durer."

Elle se leva dans la bruyère et trembla.

Un raz de marée de morts la submergea.

Ils allaient tous mourir.

Elle sombra au sol. Elle avait si froid, et tout lui faisait mal.

Elle pressa sa main contre sa poitrine et essaya de respirer.

"Tu dois le savoir, tu as atteint le point où les dommages vont commencer à être irréversibles."

Tous les souvenirs dont elle essayait de se cacher. Tous les hurlements et les morts. L'odeur putride et dégoûtante de la gangrène et de la putréfaction. La chair brûlée. Les boyaux, les insectes et le sang empoisonné. Des mains crochues se refermant à l'aveugle vers elle… "À l'aide." "Tuez-moi." "S'il vous plaît." "Faites que ça s'arrête."

Son corps entier était douloureux de froid, comme si du givre se répandait depuis ses doigts.

Elle avait envie de mourir.

Drago.

"Tu es à moi. Je viendrai toujours pour toi."

Elle se figea. Elle lui avait dit qu'elle l'attendrait.

Si elle ne rentrait pas, il reviendrait pour trouver les restes d'explosifs assemblés à la hâte et ses mots griffonnés sur la table. Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime.

Elle força sa tête à se lever et se rendit compte qu'il y avait des Détraqueurs, remplissant le ciel et s'approchant d'elle.

Elle agrippa sa baguette et essaya de se lever. Elle ne pouvait pas faire apparaître de Patronus. Elle devait s'enfuir.

Elle trébucha sur ses pieds et retomba, frissonnant violemment.

Les Détraqueurs qui descendaient étaient rassemblés si proches les uns des autres autour d'elle qu'ils lui cachaient toute la lumière.

Elle se redressa encore, creusant dans son esprit pour trouver quelque chose à utiliser. Quelque chose qui n'était pas empoisonné par la guerre.

"Je vais prendre soin de toi. Je ne vais laisser personne te faire du mal. Tu n'as pas à être seule. Parce que tu es à moi."

Ce n'était pas joyeux. Elle ne savait pas ce que c'était. Mais c'était à elle, une promesse que Drago lui avait faite. Elle devait retourner vers lui. Il était à elle. Elle l'avait mérité. Elle avait promis qu'elle l'attendait.

Elle ne pouvait pas mourir. Elle ne pouvait pas l'abandonner. Il avait traversé l'enfer pour elle.

Sa peau brûlait du froid agonisant. Elle se redressa et pointa sa baguette sur les Détraqueurs les plus proches d'elle.

"Spero Patronum !" Elle déversa chaque goutte d'émotion qu'elle avait dans le sort.

La lumière blanche explosa de sa baguette, devenant de plus en plus grande, jusqu'à ce que son Patronus s'incarne.

Pas sa loutre.

Pas un flou de lumière.

Hermione leva les yeux alors qu'un Opaloeil des Antipodes de taille réelle émergeait de sa baguette. Il emplissait le ciel. Il rejeta sa tête en arrière, rugissant, et déployant ses énormes ailes. Il ouvrit la bouche, et des flammes blanches en sortirent.

Les Détraqueurs se replièrent dans le ciel, mais le dragon s'envola à leur poursuite, les poussant de plus en plus haut jusqu'à ce qu'ils fassent demi-tour et volent vers le sol.

Hermione se leva et les regarda approcher alors qu'elle levait sa baguette.

Les Détraqueurs ne pouvaient peut-être pas mourir, mais ils pouvaient tout à fait brûler.

Le sort de Feudeymon, un enfer de lave fondue, se déversa de sa baguette, se tordant et frémissant en se formant et s'incarnant en une douzaines de chimères alors que les Détraqueurs descendaient, fuyant son Patronus. Alors que les Détraqueurs approchaient du sol, Hermione dirigea sa baguette vers le ciel et le Feudeymon rugit, se transformant en mur de flammes.

Le ciel entier était rempli de cris, de Détraqueurs prenant feu et dévorés alors que le Feudeymon se transformait en un énorme dragon rougeoyant.

Hermione ne regarda que pendant un moment avant de mettre fin au sort et de se retourner pour s'enfuir alors que les Détraqueurs en feu tombaient du ciel embrasé en hurlant.

Elle réussit à avancer de dix mètres quand quelque chose la plaqua au sol. Elle se libéra avec des coups de pieds et gronda un sort avant que le vampire qui l'attaquait puisse la mordre. Il s'effondra au sol et elle trébucha en se relevant.

Elle était à moitié sur pieds quand une harpie lui sauta soudain au visage. Hermione se jeta sur le côté, lançant un maléfice d'éviscération en même temps. Le terrain grouillait de créatures sombres. Une armée de créatures était descendue sur elle pendant qu'elle essayait d'échapper aux Détraqueurs.

Elle s'arrêta jusqu'à ce qu'ils soient proche puis pointa brusquement sa baguette sur le sol, liquéfiant la terre autour d'elle et regardant les harpies, les vampires et les loup-garous se faire avaler. Avant qu'ils ne puissent nager à la surface, elle annula le sort et se mit de nouveau à filer vers la limite de la protection.

Quelque chose la frappa dans le dos. Elle vola, se tordit, se retourna et se rattrapa sur ses pieds, utilisant le reste de l'élan pour s'aider à retrouver son équilibre. Elle lança un Bombarda Maxima sans regarder qui elle attaquait.

Un jeune loup-garou baissa les yeux et se rendit compte que son ventre était ouvert. Il tomba au sol. Avec sa lycanthropie, il réussirait probablement à survivre. Elle envoya plusieurs sorts de découpe rapide à la gorge des harpies et des loup-garous qui s'étaient trop rapprochés.

Elle se retournait de nouveau pour s'enfuir…

"Expelliarmus !"

Sa baguette lui fut arrachée alors que la force du sort la faisait voler en arrière. Elle atterrit durement, et sa tête heurtant une pierre. Sa vision vacilla, et des points noirs apparurent devant ses yeux alors qu'elle se relevait, étourdie, et regardait dans la direction où était partie sa baguette.

Graham Montague se tenait à cinq mètres d'elle, la regardant. La baguette d'Hermione dans la main.

"Aujourd'hui est mon jour, je dirais. J'ai l'impression que c'était hier que je t'ai vue," dit-il, souriant. Son expression était pleine de jubilation et extrêmement énervante. "Je ne m'attendais pas à te trouver si vite."

Il fit un geste vers les ruines fumantes du laboratoire et les Détraqueurs en flammes qui tombaient toujours du ciel. "Tu as réussi à faire tout ça toute seule ?"

Hermione ne bougea pas ; ses yeux étaient rivés sur sa baguette.

"Putain. Je parie que je gagnerai ma Marque pour t'avoir coffrée." Il regarda de nouveau vers elle puis sourit en agrippant sa baguette des deux mains et en la cassant en deux.

Elle le fixa, horrifiée.

Sans baguette, elle ne pouvait pas transplaner.

"Allez," Montague pointa sa propre baguette sur elle et lui fit signe de venir vers lui. Les créatures sombres se rassemblaient autour de lui. "Ne te complique pas les choses. Viens ici, Sang-de-Bourbe."

Les yeux d'Hermione balayèrent le terrain alors qu'elle essayait de réfléchir à quoi faire.

Elle courba la tête, rentrant les épaules de manière soumise alors qu'elle glissait un couteau hors de la poche intérieure de sa cape.

Elle marcha d'un pas hésitant vers Montague et toutes les créatures sombres qui le flanquaient. Un loup-garou fit un pas en avant et commença à lui saisir le bras.

Hermione frappa.

Son couteau brilla. Elle coupa la main du loup-garou et l'éviscéra.

Elle avait soigné assez de blessures faites par les harpies pour savoir exactement quelles blessures au couteau n'étaient pas soignables.

Elle se baissa alors qu'un sort filait vers elle, se précipitant vers Montague. Il était la personne la plus proche avec une baguette dans la main.

Une harpie sauta vers sa gorge, et Hermione pivota et plongea son couteau dans la gorge de la harpie, avant de se précipiter de nouveau vers Montague.

Les yeux de Montague étaient écarquillés de peur, et il essaya de lui jeter un maléfice. Il était un duelliste bien plus lent que Drago. Négligent et imprécis. Elle esquiva le premier sort. Et le second. Un sort violet coupa sa cape et la frappa au ventre. Elle continua d'avancer vers lui jusqu'à ce qu'il tombe en arrière, trébuchant en essayant de lui échapper.

Tournant le couteau dans sa main, elle le lança vers lui, visant le centre de son torse.

Il lança un bouclier, mais la lame magique le découpa et plongea jusqu'à la garde dans son épaule gauche. Elle avait manqué son coeur de peu.

Hermione sortit son second couteau.

L'expression de Montague devient terrifiée.

"Avada Kedavra !" Il essaya de lancer le sort, mais seules des étincelles apparurent.

"Avada Kedavra !"

Rien.

"Endoloris !"

Le sort rouge la manqua. Il le lança encore.

Alors qu'elle plongeait le couteau entre ses côtes, il enfonça sa baguette dans la gorge d'Hermione.

"Endoloris !"

Sa prise sur le couteau se relâcha, et elle tomba sur le sol, hurlant. Ses mains furent agitées de spasmes, et elle se tordit. L'agonie lui déchirait les nerfs. Sa gorge était déchirée. Ses nerfs mutilés et écorchés. La goût du sang emplit sa bouche. Douleur. Rien qu'une douleur absolue.

Finalement ça s'arrêta.

Hermione força ses yeux à s'ouvrir et regarda Montague tomber à genoux, saignant abondamment de son côté et de son épaule. Il paraissait être sur le point de s'évanouir. Sa baguette pendait, à peine tenue entre ses doigts.

Hermione sanglota, et inspira à travers ses dents alors qu'elle essayait de se retourner en tremblant.

Prends sa baguette. Prends sa baguette.

Ses muscles tressaillirent et se contractèrent alors qu'elle se levait.

"Putain de garce… Stupéfix !"

ooo

Elle se réveilla au son de hurlements.

Elle était au sol, et ses muscles étaient agités de spasmes et paraissaient méchamment déchirés alors qu'elle se forçait à s'asseoir. Elle était dans une grande cage remplie de plus d'une douzaine d'autres personnes, dont quelques-unes qu'elle reconnaissait vaguement.

La nuit était en train de tomber, et la seule source de lumière était celle des torches, d'un orange vacillant. Elle pouvait sentir le sang et la magie noire. Les hurlements continuaient, encore et encore. Il y avait des rires aussi. Des éclats de rire cruels, moqueurs, hystériques.

Elle regarda autour d'elle et se rendit compte qu'elle était à Poudlard. Il y avait des douzaines de grandes cages remplies de gens sur la pelouse de Poudlard autour de la base de la tour d'Astronomie. Les hurlements venaient de la tour.

Elle leva les yeux.

Suspendue cinq mètres au-dessus du sol, Molly Weasley hurlait, sanglotait et se tordait là où elle était suspendue par les poignets. Arthur hurlait d'agonie à côté d'elle. Un sort le découpait, morceau par morceau.

"S'il vous plaît ! Pas lui ! Faites-moi du mal plutôt ! Il ne comprend pas ! S'il vous plaît, ne lui faites pas ça !" La voix de Molly était brisée alors qu'elle suppliait.

Il y avait des morceaux de viande pendant au bout de chaînes autour de Molly. Hermione plissa les yeux dans la faible lumière.

Des bras coupés.

Un torse.

La tête de George.

Sa gorge se contracta, et elle se plia en deux et vomit si violemment qu'une douleur lui déchira le dos alors que son corps se convulsait.

Elle leva de nouveau les yeux en s'essuyant la bouche.

Bill, Charlie, Fred et George étaient tous morts, en morceaux qui pendaient au bout de chaînes. Ron était toujours en vie. À peine en vie. Tonks était morte, ses organes pendants hors de son corps. Remus était suspendu à côté d'elle, si mutilé qu'il était sûrement mort aussi.

Au-dessus des Weasley, Remus et Tonks, il y avait une autre silhouette. Un cadavre squelettique.

Les doigts d'Hermione eurent un spasme alors qu'elle agrippait les barreaux.

"Est-ce… est-ce que c'est Harry ?" s'étrangla-elle.

"Oui," dit platement une fille à côté d'elle. Hermione pensait que son nom était peut-être Mafalda. "Quand Tu-Sais-Qui a arrêté d'utiliser les sorts de mort, il a jeté un sort et Harry a commencé à se putréfier. Il l'a mis là… pour qu'on voit tous ce qui est arrivé. Et tous ses plus proches amis aussi. Ils les torturent depuis des heures maintenant."

Les cris d'Arthur d'affaiblissaient.

"S'il vous plaît ! Ne lui faites pas de mal. Arthur. Arthur." Molly continuait de sangloter et de supplier en essayant de l'atteindre.

Les doigts d'Hermione tressaillirent, et elle baissa le menton et détourna les yeux de la tour.

Sa cape avait disparu, son collier, son bracelet. Elle avait été déshabillée et revêtue d'une robe grise ; même ses épingles à cheveux et élastiques avaient été enlevés. L'anneau de Drago scintillait toujours sur sa main.

"Malefoy !"

Le sang dans ses veines se glaça, elle se raidit et se retourna. Il y avait une foule et des tentes dispersées parmi les cages. Mangemorts, gardes, et hauts placés du Ministère se mêlaient et buvaient. Un Mangemort s'avança et lança un sort vers les corps qui pendaient de la tour d'astronomie. Il y eut des rires bruyants et enivrés.

Quelques hommes lorgnaient dans les cages.

"Tu es charmante. Peut-être que le Seigneur des Ténèbres te donnera à moi en guise de faveur," chantonnait un Mangemort en essayant d'attraper l'une des prisonnière à travers les barreaux.

"Malefoy !"

Hermione chercha Drago. Elle vit Lucius approcher à la place.

"On pensait que les autres et toi alliez manquer toutes les célébrations," dit une voix cassée.

Hermione se recroquevilla sur le sol et détourna les yeux alors que Lucius approchait. Ses oreilles bourdonnaient toujours de l'explosion. Elle retint son souffle et tendit l'oreille.

"Le Seigneur des Ténèbres a requit ma présence," dit Lucius, la voix traînante, caressante et énervante. "Il y a eu… une situation inattendue."

Hermione sentit sa gorge se serrer. Drago.

L'autre voix se fit moins forte. "Sussex ?"

"En effet," dit Lucius à voix basse. "Le Seigneur des Ténèbres veut absolument garder ça secret. Seulement ceux à qui il fait le plus confiance."

Hermione s'effondra de soulagement. Pas Drago.

"C'est vrai alors ? Tout le monde ?" La voix cassée était insistante.

"Ne viens-je pas de dire que c'est gardé secret ? Tu veux savoir ce que le Seigneur des Ténèbres veut garder secret ?" Il y avait une mélodie dans la douceur de la voix de Lucius. "Alors qu'il s'inquiète de la présence d'espions dans notre milieu ? Je n'aimerais pas qu'il apprenne qu'on t'a entendu fureter. Je frissonne toujours en repensant à ce qui est arrivé à ce pauvre Rookwood la semaine dernière."

"Je ne… je voulais seulement… c'était juste une question polie. Regarde ! J'ai quelque chose pour toi. Il y en avait plein qui voulaient l'achever, mais j'ai dit que l'honneur te revenait. Regarde, il est toujours en vie."

Hermione leva les yeux et vit Lucius et l'autre Mangemort regarder vers la tour d'astronomie.

Arthur était devenu inerte, et les cris de Molly s'étaient changés en sanglots silencieux.

"Toujours quelques uns en vie." Le Mangemort à la voix cassée lança un sort vers Remus, et le corps de Remus tressaillit avant de redevenir inerte. "Celui-là ne veut pas mourir. Peu importe ce que je lui lance. Il a déjà régénéré deux fois ses organes." Il ricana. "Ensuite il y a la maman. Elle a crié plus fort pour sa progéniture que quand je lui ai lancé le Doloris. Mais j'ai gardé le meilleur pour toi. Le meilleur ami de Potter, celui qui était toujours avec lui. Je me suis assuré que personne ne le tue."

"Comme tu es prévenant, Mulciber." Lucius chantonna les mots en étudiant les Weasley au-dessus de lui.

Son visage se tendit et se fit pensif. Ses traits étaient presque squelettiques, la peau tirée sur son crâne, et les creux de ses joues et de ses orbites étaient profonds, presque des trous noirs dans l'obscurité et les torches vacillantes. "J'aurais espéré avoir plus de temps pour savourer l'expérience… mais le Seigneur des Ténèbres les veut mort avant la fin du jour." La voix de Lucius était pleine de regrets. "J'ai consacré une certaine réflexion à la manière dont j'allais m'y prendre."

Un sort d'un jaune malsain jaillit de la baguette de Lucius et frappa Ron sur le côté de la tête. Le corps de Ron commença à sursauter, et ses yeux s'écarquillèrent et s'exorbitèrent comme s'il suffoquait.

"Ne…" Le mot avait à moitié passé les lèvres d'Hermione avant qu'elle ne le ravale.

Les yeux gris de Lucius brillaient alors qu'il fixait les corps pendus au-dessus de sa tête.

"J'ai fait le serment sur la tombe de Narcissa que je tuerai tous les foutus traîtres de ce pays. Je savais que Potter appartenait au Seigneur des Ténèbres, mais j'espérais être celui qui enverrait le reste de la 'famille' bien-aimée de Potter après lui."

Lucius tendit la main, mais le mouvement était spasmodique, comme si c'était un tic qu'il avait. Son expression de tendit alors qu'il fixait Ron et, d'un mouvement de baguette, mit fin au sort qui l'étouffait. Ron haleta irrégulièrement. Son torse se soulevant. Ses yeux s'éteignirent.

Lucius fit tourner paresseusement sa baguette en spirale et parla lentement. "Mourir brûlé est une façon particulièrement douloureuse de mourir. Les Moldus avaient l'habitude de brûler les sorcières. Les brûler jusqu'à ce qu'il ne reste rien. Tout ce que j'ai de ma femme c'est une tombe vide. Il ne restait rien d'elle. Bien que j'aie cherché… beaucoup de fois." Sa main se tendit de nouveau.

"C'est approprié, je pense, que tu connaisses la douleur qu'elle a connu." Il leva sa baguette. "Ça, c'est pour ma femme."

Un sort vert foncé fila et frappa le pied de Ron. De la fumée s'éleva, et Ron jeta la tête en arrière et hurla alors qu'il se propageait à sa jambe.

Le corps d'Hermione trembla ; sa gorge se contracta et elle essaya de ne pas vomir. Elle connaissait ce sort. Il changeait le sang en plomb fondu à l'intérieur du corps. C'était un sort lent. Elle se pressa contre le bord opposé de la cage et essaya de ne pas sangloter.

Lucius jeta la tête en arrière et rit.

Molly sursauta et se réveilla. "S'il vous plaît. Non ! Pas mon fils. S'il vous plaît ne faites pas de mal à mon fils !"

Hermione ferma les yeux et se couvrit les oreilles, mais elle ne pouvait pas bloquer les cris de Ron et de Molly. Ou le rire de Lucius.

Les hurlements devenaient progressivement moins forts quand une odeur chaude et sucrée à en être écoeurante parvint au nez d'Hermione. Ses yeux s'ouvrirent brusquement et elle vit le visage de Dolores Ombrage à quelques centimètres du sien, étudiant Hermione avec une joie vicieuse à travers les barreaux de la cage.

Ombrage était flanquée de plusieurs gardes.

"Je crois que je reconnais ce petit visage fourbe." Ombrage fit signe à un garde. "Toi, ouvre et attrape la."

Il y eut le grincement de la porte de la cage, et une main dure attrapa le bras d'Hermione et la tira hors de la cage. Des doigts s'emmêlèrent dans ses cheveux et sa tête fut cruellement tirée en arrière.

Ombrage eut un autre petit rire, et Hermione en sentit le souffle sur son visage, chaud et sucré comme si elle avait mangé des friandises un instant auparavant.

"C'est toi. Je reconnaîtrais ton vilain petit visage n'importe où. Je ne t'ai pas oubliée." Les yeux d'Ombrage scintillaient. Elle fit un geste par-dessus son épaule. "Prenez note. Je la veux transférée au Sussex la prochaine fois qu'ils demandent un lot, première sur la liste, personnellement pour Dolohov." Elle se pencha plus près d'Hermione, et sa voix devint presque un murmure. "Il attend toujours de nouveaux jouets à briser."

L'un des gardes toussa légèrement. Ombrage le regarda vivement.

"Gardienne, le Sussex est… ils disent qu'il est définitivement hors d'usage… à cause de… de l'accident là-bas. Et Dolohov est… mort."

Hermione ressentit une bouffée de triomphe à travers sa terreur alors que le visage d'Ombrage se défaisait.

Elle avait espéré que Dolohov mourrait. La seule personne qu'elle détestait plus que Antonin Dolohov était Voldemort.

"C'est confirmé alors ?" La voix d'Ombrage était coupante.

Le garde fit un hochement de tête réticent.

Ombrage soupira et parut déçue. "Dommage."

Elle pointa sa baguette sur le sternum d'Hermione. "Endoloris."

Hermione hurla et ses jambres lâchèrent. La main dans ses cheveux resta en place. Son corps fut baigné dans l'agonie jusqu'à ce que ses muscles commencent à être agités de spasmes si violemment qu'elle craignit que ses tendons lâchent. Elle hurla jusqu'à ce que sa gorge soit à vif et que sa voix se change en sanglots ; elle resta suspendue en place alors que son corps sursautait et spasmait violemment.

Le sort ne s'arrêtait pas.

Hermione pouvait sentir son cerveau gratter pour s'échapper ; pour se libérer de l'agonie. Brise toi juste. Brise toi.

Non. Elle ne pouvait pas.

"Je ne suis pas fragile. Je ne vais pas me briser. S'il te plait, crois-moi là-dessus."

Elle resta suspendue tremblant d'agonie.

Le sort s'arrêta finalement. Hermione fut lâchée et s'effondra lourdement sur le sol, ses muscles tressaillant toujours. Elle avait l'impression d'avoir été déchirée en morceaux. Des sanglots gémissants s'échappaient de sa poitrine.

Elle força ses yeux à s'ouvrir et leva le regard. Elle pouvait voir la tour d'astronomie au-dessus de l'épaule d'Ombrage ; Molly était en train de mourir.

Ombrage étudia Hermione sur le sol et fit de nouveau un geste par-dessus son épaule. "Je veux celle-là, une fois que sa magie sera supprimée. J'imagine qu'elle va requérir un interrogatoire musclé. Remettez-la dans la cage."

Ombrage gloussa et commença à se retourner pour partir.

Thorfinn Rowle s'arrêta alors qu'il passait à côté d'elle. "Tu ne peux pas avoir celle-là." Sa voix était empâtée, et il fit un geste saccadé vers l'endroit où Hermione gisait sur le sol. "J'ai aidé à la ramener du Sussex après qu'ils l'aient attrapée. Le Seigneur des Ténèbres a dit qu'il voulait la garder intacte au cas où il déciderait de l'interroger lui-même. C'est sur les papiers de transfert."

À travers l'agonie et le choc que traversaient son corps suite à la torture, Hermione sentit son sang se glacer.

L'expression d'Ombrage se fit défaite. "Mais ils meurent si rapidement quand il le fait."

Rowle se redressa et plissa les yeux. "Tu doutes de moi, Gardienne ? Je peux appeler le Seigneur des Ténèbres ici, si tu doute des papiers."

Ombrage déglutit, et son menton trembla alors qu'elle secouait rapidement la tête. "Non. Non. Je ne désobéirai jamais au Seigneur des Ténèbres. S'il la veut intacte, elle restera intacte, bien sûr. Ceci…" elle fit un geste vers Hermione, "… n'était que quelques minutes pour sa… défiance. Je ne remettrais jamais en question les ordres de quelqu'un d'aussi important que vous. Ma déception a eu raison de moi." Sa voix se fit plus minaudante. "Après tout, vous… êtes l'un de ceux en qui le Seigneur des Ténèbres a le plus confiance."

Rowle carra les épaules, et son torse imposant se gonfla. Il regarda Hermione et la poussa du bout de sa botte. "Je doute qu'elle soit importante. Il a des douzaines de… terroristes plus importants qu'il prévoit d'interroger… si elle finit oubliée…" Il haussa les épaules. "Personne ne se souciera de ce que tu lui feras alors."

Il eut un rire qui ressemblait à un aboiement et continua son chemin.

Ombrage regarda de nouveau Hermione en silence pendant quelques instants. "Quand sa magie sera supprimée, je m'occuperai personnellement d'elle. Nous voulons nous assurer de suivre les ordres à la lettre et qu'elle reste intacte."

Hermione fut arrachée du sol et lourdement jetée dans la cage.

Elle se roula en boule sur le sol alors que son corps continuait de spasmer et sursauter, mais elle le remarquait à peine. Elle était glacée de terreur.

Voldemort l'avait désignée pour son interrogation en personne. Cette simple pensée la faisait paniquer plus que tout ce qu'Hermione pourrait lui faire.

Son esprit était rempli de souvenirs de Drago.

C'était un nombre de souvenirs presque impossible à essayer d'occluder ou duquel détourner l'attention.

Si jamais tu es en cours d'interrogatoire avec un légilimens réellement accompli, tu ne le garderas jamais hors de ta tête avec la simple force de tes murs mentaux. Si tu étais un membre mineur de la Résistance, ils te tueraient probablement plutôt que de faire l'effort d'entrer. Mais tu es un membre de l'Ordre. La fille dorée de Potter.

si je ne t'avais pas eue, je n'aurais jamais eu l'opportunité de rencontrer un cerveau organisé comme un classeur.

Elle pressa ses doigts tressaillant contre sa bouche et se tassa dans un coin de la cage alors qu'elle luttait pour ne pas paniquer.

"Est-ce que ça va ? Elle a maintenu le sort sur toi pendant… je ne sais même pas combien de temps." Un garçon dans la cage s'approcha et posa une main sur l'épaule d'Hermione.

"Je vais bien. Ne me dérangez pas," dit Hermione d'une voix étranglée et tremblante alors qu'elle se dérobait au toucher. "Il faut que je réfléchisse."

Elle prit plusieurs inspirations, utilisant son occlumancie pour forcer son attention à se détourner de la douleur spasmodique de son corps.

Voldemort en rendrait compte qu'elle était une occlumens. Il s'en rendrait compte et mettrait son esprit en pièces.

Il trouverait Drago.

Même si sa mort sous l'interrogatoire était rapide, la punition de Drago pour sa trahison ne le serait pas.

Ce serait une mort pire que celle dont elle avait essayé de l'épargner en bombardant le Sussex.

Si Voldemort découvrait leur relation, il utiliserait probablement Hermione comme moyen de punir Drago. C'était ce qu'il avait fait avec Narcissa. Il utiliserait ce à quoi tenait Drago pour le torturer.

Drago avait toujours été plus motivé par la peur de ce qu'il pourrait arriver à Hermione qu'à celle de ce que Voldemort pourrait lui faire.

Elle devait le cacher. Enfouir les souvenirs si profondément qu'ils ne les trouveraient jamais.

Un cerveau organisé comme un classeur…

Elle rassembla précautionneusement ses souvenirs de Drago, de Ginny et des Horcruxes, les examina méticuleusement et les tria, puis elle les repoussa le plus loin qu'elle le put dans son esprit ; elle les plaça dans les recoins les plus éloignés de sa mémoire ; derrière ses parents, derrière les souvenirs les plus anciens qu'elle possédait. Elle les poussa tous aussi loin de sa conscience que possible.

Puis… elle hésita et déglutit nerveusement, sa langue fourchant entre ses lèvres humides. Elle ferma fermement les yeux et prit une inspiration frissonnante alors qu'elle parcourait de nouveau son esprit, arrachant tous les murs qu'elle avait construits au cours de la guerre.

Sa vie soigneusement compartimentée. Toutes ses émotions et ses souvenirs refoulés. Son chagrin et sa dévastation face à ses relations perdues avec Harry et Ron. Son ressentiment amer et empoisonné envers l'Ordre. Toutes les choses qu'elle avait refoulées et ignorées pour rester concentrée, continuer sa mission. Les choses qu'elle avait cachées et auxquelles elle avait refusé de penser dans un effort pour rester saine d'esprit pendant qu'elle continuait à travailler.

La mort de Colin. Colin. La première mort. La façon dont il avait hurlé alors que sa peau était découpée de son corps, de son visage, ses yeux. Jusqu'à ce qu'il arrête de crier, et qu'Hermione reste là, trop dévastée et frappée par la culpabilité pour détourner les yeux, alors qu'il était écorché jusqu'à n'être plus qu'un squelette. Couche après couche.

Toutes les victimes de la première division des sorts qu'elle avait passé des mois à essayer de soigner. Ils étaient morts. Tout le monde mourait. Encore et encore. Ils mouraient toujours. Elle essayait de les sauver, mais à la fin, ils mouraient toujours.

Harry était mort. Ron. Les Weasley.

Sa vie était un cimetière.

Elle poussa tout ça à l'avant de son esprit.

Quand Voldemort viendrait, tout ce qu'il trouverait serait le glas funèbre et infini de la guerre, année après année. Une voix négligée dans une salle d'hôpital. Juste une guérisseuse. Toutes les réunions de l'Ordre où elle avait plaidé pour des sorts létaux et s'était fait envoyer paître et réprimander. Elle n'était pas une combattante. Juste une guérisseuse. Que savait-elle ?

Le Sussex paraîtrait être une vengeance.

Elle était perdue dans ses souvenirs quand la porte de la cage grinça, et qu'elle fut de nouveau durement tirée de la cage. Du métal froid se referma autour de chacun de ses poignets, et elle fut tirée vers le château. Tous ceux qui étaient suspendus à la tour d'astronomie étaient morts sauf Remus.

Il y eut un flash de lumière verte empoisonnée. Alors qu'Hermione regardait derrière elle, elle vit le sort de mort traverser l'air. Remus devient finalement inerte. Le dernier des Maraudeurs.

Elle fut tirée dans les couloirs, seulement à moitié lucide à travers le fouillis de traumatismes dans son esprit et la douleur physique persistant après le Doloris. Les couloirs avaient été dénudés. Il y eut une série de grandes portes de fer devant lesquelles le garde dût s'arrêter pour les déverrouiller en continuant de la tirer de plus en plus profondément dans les entrailles du château. Descendre dans les cachots, passer les salles de classe, passer le mur qui avait dissimulé la salle commune des Serpentard, à travers une lourde porte dans un couloir inconnu.

Ombrage se tenait près d'une porte. Elle eut un sourire sucré alors qu'elle parcourait Hermione du regard.

"C'est ici qu'on gardait nos prisonniers problématiques en attendant de les transférer au Sussex. Sans les protections sur le château, nous ne pouvons jamais être trop prudents avec une prisonnière réservée pour l'interrogation exclusive du Seigneur des Ténèbres. Je suis sûre que tu seras très bien ici en attendant qu'il pense à t'appeler."

Hermione fut poussée dans une petite pièce, à peine illuminée par la lumière des torches hors de la cellule. Des murs de pierre. De la paille dans un coin. Un pot de chambre dans un autre.

Elle se retourna alors que la porte pivotait pour se fermer, puis elle s'arrêta soudain et Ombrage entra, comme si elle re-considérait quelque chose.

Ses yeux parcoururent Hermione de haut en bas.

"Nous devons obéir aux ordres du Seigneur des Ténèbres, n'est-ce pas ?" dit-elle d'une voix amusée en faisant un geste de sa baguette vers Hermione. "Intacte. C'est très important. Nous ne voulons pas que tu restes ici à bavarder comme une pie, à papoter comme une sale petite sauvage. Faisons en sorte que tu restes… très silencieuse." Le bout de sa baguette s'enfonça dans le creux à côté de la mâchoire d'Hermione, la forçant à lever la tête. "Silencio."

Ombrage fit un petit gloussement , et son souffle sucré et écoeurant caressa le visage d'Hermione.

"Tu comprendras bien assez tôt."

Puis Ombrage se tourna et sortit de la cellule. La porte se referma avec un bruit sourd, et en quelques secondes, même la lumière des torches à l'extérieur de la cellule avait disparu.

Hermione était laissée dans l'obscurité et le silence.

Elle tâtonna précautionneusement jusqu'au coin avec de la paille et se roula en une boule serrée. Ses muscles la brûlaient et spasmaient douloureusement. Il faisait très froid dans les cachots, et ses vêtements étaient fins.

Elle ne cessait de cligner des yeux et de fixer les ténèbres, espérant que si elle attendait assez longtemps, elle pourrait finalement être capable de distinguer de légers contours.

Il n'y avait rien, rien d'autre que l'obscurité.

Finalement, elle baissa la tête et retourna à son occlumancie.

Sauf que… ça ne…

Elle essaya encore, mais ses souvenirs…

Se déplacer dans ses souvenirs était laborieux. Comme si elle était mentalement alourdie et qu'elle pouvait à peine ramper sans son esprit avec son occlumancie.

Elle se figea avec une horreur naissante. Ses doigts tressaillants allèrent jusqu'à ses poignets, sentant le métal verrouillé autour d'eux en essayant de respirer calmement.

Ça ne lui était jamais venu à l'esprit… avec sa magie supprimée, elle perdait sa capacité à utiliser l'occlumancie. Son esprit était verrouillé dans l'état exact où il avait été au moment où les entraves avaient été refermées autour de ses poignets. Une mer de traumatismes à la surface de son esprit, et Drago caché si loin qu'elle pouvait à peine tirer un souvenir clair de lui.

Elle pressa ses mains contre sa bouche et se força à respirer.

Elle inspira lentement. En comptant jusqu'à quatre.

Expira, par la bouche. En comptant jusqu'à six.

Inspiration et expiration.

Encore et encore.

Elle se força à réfléchir attentivement. C'était pour le mieux. Voldemort l'amènerait se faire interroger et trouverait un fouillis chaotique de souvenirs. Si elle faisait attention à ne pas penser à Drago, Voldemort pourrait ne pas être capable de le trouver.

Elle enroula ses mains autour de ses épaules, frissonnant à cause du froid. Elle ne pouvait juste… pas penser à Drago. Pas du tout. Elle ne pouvait pas se le permettre.

Tenir bon. C'était ce sur quoi elle devait se concentrer. Tenir bon.

Son anneau devint soudain douloureusement brûlant.

Hermione eut une exclamation silencieuse et agrippa sa main. Son anneau brûla encore et encore et encore. Puis les brûlures s'arrêtèrent.

Hermione fit tourner l'anneau autour de son doigt. Draco pourrait venir pour elle, avant que Voldemort ne l'appelle pour se faire interroger. Elle devait être prête.

Il venait toujours pour elle.

Elle ne pouvait pas se laisser dépérir.

"Tiens bon. Tiens bon, Hermione." Elle forma les mots silencieusement avec sa bouche, encore et encore.

Elle ne savait pas si c'était simplement des heures qui s'étaient écoulées ou un jour quand l'anneau brûla de nouveau. Elle avait tellement mal qu'elle le sentit à peine. Son corps hurlait à cause des dommages musculaires du Doloris, du froid et de la faim. Elle pouvait à peine bouger.

Qu'elle ait les yeux ouverts ou fermés, tout ce qu'elle pouvait voir était la mort. Harry mourant devant ses yeux. Encore et encore. Les hurlements de Ron pendant qu'il mourait. Colin. Molly et Arthur. La salle d'hôpital. Ils étaient à la surface de son esprit, et il n'y avait rien d'autre auquel penser.

Il n'y avait pas de nourriture. Il n'y avait pas d'eau non plus.

Elle pensait que ça faisait un jour, mais elle n'avait aucun moyen d'en être sûre. Il n'y avait pas de bruit à l'extérieur, même pas un goutte à goutte monotone. Il n'y avait qu'un silence infini et l'obscurité.

Peut-être qu'Ombrage avait l'intention de la faire mourir de faim.

Son anneau brûla encore des heures plus tard, elle pressa la main contre sa poitrine. Plusieurs heures plus tard, elle sentit soudain de la nourriture et se traîna à moitié sur le sol. Elle trouva une assiette avec du pain, une sorte de viande et un grand seau d'eau.

Ses muscles spasmaient toujours si sévèrement qu'elle fit presque tomber le seau en buvant de l'eau.

Après ça, des repas apparurent. Irrégulièrement. Il ne semblait jamais y avoir d'intervalle de temps défini entre chaque. Parfois elle avait l'impression que c'était des jours. D'autres fois, il lui semblait que seules quelques heures étaient passées.

Après ce qu'elle pensait être une semaine, son corps cessa de brûler et d'être agité de spasmes. Elle se força à se lever et à explorer chaque centimètre carré de sa cellule du bout des doigts. La porte était magiquement scellée ; il n'y avait pas de serrure à forcer même si elle n'avait rien d'autre que de la paille et un pot de chambre. Elle renifla l'air à travers les barreaux de la porte dans l'espoir que ça lui indique quelque chose. L'air était vicié, humide, froid. Sans vie.

Elle avait espéré que si elle cherchait assez attentivement, elle trouverait une pierre descellée dans le mur ; un compartiment secret cachant un clou, ou une cuillère, ou même un morceau de corde. Apparemment la cellule n'avait jamais hébergé de prisonnier audacieux. Pas de marques pour mesurer le temps. Pas de pierre descellée. Rien.

Rien que les ténèbres.

Son anneau continuait de brûler. À chaque fois elle poussait une petite exclamation de soulagement et se mettait à pleurer de savoir que Drago était toujours en vie quelque part.

Puis elle se reprenait vivement. Elle ne pouvait pas y penser. Elle ne pouvait pas se permettre de penser à Drago. Si Voldemort venait la chercher avant lui, elle ne pouvait pas l'avoir dans son esprit alors qu'elle ne pouvait pas l'occluder. Elle utilisa la plus petite étincelle de magie et poussa ses souvenirs de lui encore plus hors de portée. Comme si elle était une huître, enterrant précautionneusement chaque souvenir sous la plus minuscule couche d'occlumancie qu'elle pouvait manier sans activer la suppression magique.

Son anneau continuait de brûler, chaque jour, avec une intensité presque à lui donner des cloques. La quinzième fois qu'il brûla, elle serra la mâchoire et l'enleva, le cachant soigneusement dans le coin. Avant que trois repas n'apparaissent, elle retourna le chercher à tâtons à travers la cellule et le remit, terrifiée que si elle ne le portait pas, il puisse disparaître.

Il ne brûla plus après ça. Elle ne savait pas si ça signifiait que Drago avait sû d'une façon ou d'une autre qu'elle l'avait enlevé.

Ou s'il était mort.

Elle se blottit dans un coin de la cellule, sentant la texture rugueuse des pierres dans l'obscurité, et essayant de ne pas penser.

Elle récita des recettes de potions dans sa tête. Des techniques de métamorphose. Passa les runes en revue. Des comptines. Ses doigts bougeaient alors qu'elle mimait des mouvements de baguette, prononçant silencieusement les formules magiques. Elle comptait à rebours depuis mille en soustrayant les nombres premiers.

Elle massa ses muscles endommagés jusqu'à ce qu'ils coopèrent et commença à faire la routine d'exercices qu'elle avait mémorisée. Des pompes, des abdominaux, des burpees. Elle découvrit qu'elle pouvait coincer ses pieds à travers les barreaux de la porte de la cellule et faire des abdominaux ainsi suspendue la tête en bas. Elle apprit à faire le poirier.

Cela aidait à faire taire son esprit. Compter. Repousser ses limites physiques. Quand ses bras et ses jambes étaient en compote, elle s'écroulait dans un coin et dormait d'un sommeil sans rêves.

C'était la seule façon de faire cesser les images de la fin de la guerre qui défilaient devant ses yeux.

Tiens bon, Hermione, ne cessait-elle de se rappeler quand elle avait si froid et qu'elle avait le cœur si brisé qu'elle ne voulait plus continuer. Tout ce qu'il y avait dans sa tête était la mort. Tout le monde qui hurlait.

Parfois, elle pressait ses deux mains contre les pierres, penchait la tête en arrière et se préparait à fracasser son front contre le mur dans l'espoir de tout faire cesser.

Mais elle se retenait toujours et reculait.

"Tiens bon. Tu as promis que tu ne te briserais pas."

Elle ne pouvait pas toujours se rappeler pourquoi.

Quand elle se souvenait, elle repoussait la pensée et se forçait à penser à quelque chose d'autre. Calculer les mètres cubes de sa cellule. Plus de pompes. Pouvait-elle compter à l'envers depuis mille jusqu'à zéro avant que son prochain repas n'apparaisse si elle doublait le nombre soustrait à chaque fois ? Deux mille ? Elle continuait jusqu'à ce qu'elle soit trop fatiguée pour penser encore puis se blottissait dans un coin et passait ses doigts le long des murs.

Les murs étaient la seule chose qu'elle savait qu'elle trouverait toujours dans le noir.

Personne ne vint.

Tout le monde était mort. Elle les avait vus mourir. Personne ne viendrait pour elle.

Les murs de sa cellule étaient tout ce qu'elle avait.

Tout le reste n'était que ténèbres.