19 : un goût âcre dans la bouche
Drago
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Classes, Bibliothèque, dîner, dodo. La routine de Drago était aussi épuisante qu'ennuyante. Théo ne parlait plus que des examens, parce qu'il espérait avoir une chance d'arriver premier maintenant que Granger n'était plus dans la compétition. Drago, lui, visait le top 10 des meilleurs résultats de l'école sans grande ambition. Il ne se sentait plus autant stimulé qu'en début d'année, peut-être parce que la première n'était plus là et qu'il n'y avait plus du tout de concurrence.
Poussé par l'envie de rendre fier son père, il s'accrocha tout de même et participa à toutes les séances de révisions de Théo à la Bibliothèque. Étant donné que Blaise y assistait aussi, Pansy avait fini par les rejoindre, plus par envie d'être avec eux que pour réellement travailler.
Drago était très fort en Potions. Il l'avait déjà compris en première année, mais ses résultats de cette année le prouvaient encore plus. Même Théo lui demandait de l'aide, alors qu'il était un expert dans toutes les matières. Et même si Drago était assez fier d'avoir plus de connaissances que lui, il ne pouvait pas s'empêcher de se demander s'il avait réellement un certain talent dans les Potions, ou si son professeur n'était pas juste ami avec ses parents. Peut-être même que Rogue le sur-estimait pour ne pas qu'un Gryffondor monte plus haut que lui dans le classement.
Vers la fin du mois de Mai, alors que les examens approchaient à grands pas, Drago était assis à la table habituelle de la Bibliothèque, où tous les parchemins et les livres de Théo étaient étalés.
À côté de lui, il y avait Blaise, qui lisait un paragraphe du manuel de Défense contre les Forces du Mal, en face, il pouvait voir Théo qui était penché sur un parchemin et Pansy était à sa gauche, en train de se limer les ongles. Drago trouvait ça très moldu de faire ça, mais il n'osa pas lui faire remarquer de peur qu'elle le prenne mal. Elle avait retiré son collant de son uniforme et avait passé ses deux jambes nues par-dessus l'accoudoir de sa chaise pour poser ses pieds sur celle de Drago.
Drago était en train de réviser un chapitre particulièrement compliqué en Astronomie, la matière qu'il aimait le moins, quand la voix perçante de la bibliothécaire résonna à côté de lui :
"Mademoiselle ! Un peu de tenue, enlevez vos jambes et redressez-vous !"
Pansy leva grossièrement les yeux au ciel et enleva lentement ses jambes de l'accoudoir, une par une, en regardant obstinément Madame Pince. Cette dernière, outrée, continua sur le même ton :
"Vous êtes supposée être en uniforme !"
"Je suis en uniforme !" répliqua Pansy en montrant sa cravate verte de la main.
"Pas complètement. Je vais devoir faire un rapport et l'envoyer à votre directeur de Maison."
Pansy eut un petit rictus et haussa les épaules :
"Allez-y."
La bibliothécaire repartit vers son bureau toujours aussi scandalisée, et Pansy remit ses jambes sur l'accoudoir dès qu'elle eut le dos tourné.
"Arrête Pans', tu vas te faire virer de la Bibliothèque." murmura Blaise sans lever les yeux.
Pansy soupira bruyamment :
"Vous avez tous décidé de me faire chier ?"
Elle enleva tout de même ses jambes, ce qui fit sourire Drago. C'était drôle de voir qu'elle obéissait à Blaise plutôt qu'à une figure d'autorité. Juste pour la forme. Ils replongèrent dans le silence, avant que Pansy ne le brise de nouveau quelques minutes plus tard :
"T'as oublié Saturne, c'est dans l'axe de Jupiter, pas Vénus."
"Hein ?" demanda Drago en relevant la tête.
Pansy avait penché la tête sur le côté et observait ses devoirs par-dessus son épaule sans qu'il le remarque. Elle avait les sourcils froncés et se limait toujours les ongles.
"Là !" répondit-elle en montrant son parchemin de son doigt parfaitement manucuré. "Ici, t'as oublié Saturne. Tu as confondu l'axe de la planète."
Drago fit une tête d'incompréhension et Pansy roula de nouveau des yeux :
"Passe, je vais te montrer."
Il fit glisser le papier sur la table et Pansy s'empressa de raturer les fautes qu'il avait fait et, à défaut d'avoir un mètre, utilisa sa lime pour lui montrer l'échelle des planètes en lui expliquant à voix basse :
"Là, c'est Jupiter, ton angle n'est pas le bon, si tu ajoutes ça…" Elle écrivit une sorte de calcul que Drago n'avait jamais vu de sa vie. "Tu obtiens ça, ça veut dire que ton axe suit celui de Vénus, tu vois ?"
"Non, j'ai rien compris." avoua Drago.
Pansy ne se découragea pas et lui expliqua chaque axe de planète une par une. Son explication était beaucoup plus claire que celle du professeure Sinistra, dont la voix calme avait toujours le don de l'assoupir.
Quand elle termina, Drago avait beaucoup plus compris son chapitre, et il remarqua que même Théo avait levé la tête pour écouter l'exposé de Pansy.
"Merci. Je savais pas que tu étais si douée en Astronomie." fit remarquer Drago en reprenant son parchemin.
"On a passé notre vie à observer les étoiles dans ton jardin ! C'est comme ça que j'ai appris."
"Je ne savais pas que c'était si calculé. Pour moi, c'était juste des jolies lumières dans le ciel noir." souffla Drago.
Pansy était mi-agacée, mi-souriante, maintenant. Ses émotions étaient tellement difficiles à capturer, en une seconde, elle pouvait basculer de l'une à l'autre sans qu'elle change d'expression faciale.
Après que Madame Pince soit passée derrière eux plusieurs fois avec son air désapprobateur, Pansy demanda à ce qu'ils aillent dîner, et ils acceptèrent. Drago n'en pouvait plus de réviser, il avait vraiment l'impression de ne faire que ça en ce moment. Il y avait intérêt à ce que ça vaille le coup et qu'il brille pendant les examens.
Ils remballèrent toutes leurs affaires et se dirigèrent vers la Grande Salle. Blaise était en train de raconter une anecdote marrante qui lui était arrivée la veille, quand Drago se figea.
Son père était en train de marcher droit sur eux, furieux.
Pendant une seconde, il crut que c'était une hallucination. Mais non, c'était bien Lucius Malefoy qui s'approchait d'eux, les yeux révulsés, sa cape volant derrière lui et sa main crispée sur sa canne. En le voyant, Blaise et Théo eurent tous les deux un mouvement de recul, et Pansy s'éloigna vite de Drago et rabattit sa jupe dans un geste automatique pour tenter de cacher ses jambes. Heureusement, Lucius ne lui prêta aucune attention, trop occupé à se jeter sur Drago. Il lui attrapa le bras et l'emmena sur le côté.
Le garçon se demanda ce qu'il avait bien pu faire pour que son père soit aussi furieux. Il passa en revue son comportement des dernières semaines : ses notes ? le Quidditch ? avait-il bien répondu aux lettres de sa mère dernièrement ? Ses yeux s'écarquillèrent quand il pensa : "et s'il savait ce que je pensais de Granger ?"
Lucius finit par lui lâcher le bras et se posta face à lui.
"Potter m'a volé Dobby." siffla-t-il.
Drago retourna la phrase plusieurs fois dans sa tête pour en comprendre le sens.
"Hein ?" demanda-t-il au bout de plusieurs secondes.
"Potter m'a volé Dobby !" répéta Lucius. Ses yeux se baladaient partout autour de lui, comme s'il ne remarquait plus vraiment Drago devant lui. "Mon plan a échoué, et Dumbledore est de retour… Le fameux Potter a réussi à percer le mystère, et comme si ça ne lui suffisait pas d'avoir gâché mes plans, il a l'audace de voler Dobby sous mes yeux !"
Drago ne comprenait absolument rien, mais il décida de ne pas poser de question et attendit que Lucius termine de vociférer son récit. Il imita sa mère, qui avait pris l'habitude de laisser Lucius parler en hochant simplement la tête sans l'interrompre. Drago fit de même, observant son père qui écumait de rage tandis qu'il murmurait des phrases incompréhensibles sur Potter, Dobby et Dumbledore. Le garçon était juste heureux de savoir que la colère que ressentait son père n'était pas dirigée vers lui. Il ne l'avait jamais vu aussi énervé de sa vie.
Finalement, son père finit par cracher une dernière phrase pleine de haine, puis, sembla se souvenir de la présence de son fils. Sa mâchoire se contracta et il le fixa de ses yeux gris perçant :
"Potter a libéré Dobby. Il n'est plus notre elfe de maison."
Drago eut comme un petit coup de poing au ventre. Même s'il ne l'aurait jamais admis à personne, il aimait bien Dobby. C'était lui qui lui avait lu des histoires avant de dormir, lui qui lui préparait ses tartines au beurre le matin, lui à qui il s'était confié parfois. Savoir qu'il n'était plus là le rendit un peu triste, nostalgique.
"Potter ?" répéta Drago sans comprendre.
"Oui. Cet idiot a voulu m'humilier une dernière fois en lui donnant une chaussette, et maintenant, nous avons perdu notre serviteur, et l'héritier de Serpentard a été arrêté."
"Potter l'a trouvé ?" demanda Drago, choqué.
"Il faut croire." rumina son père en serrant encore plus fort sa canne qui allait probablement se briser entre ses doigts. "Maudits Weasley… Je vais probablement perdre ma place au conseil d'administration maintenant !"
Drago n'avait aucune idée du lien entre les Weasley, Potter et Dobby dans cette histoire sans queue ni tête mais il hocha tout de même la tête pour paraître consolant. Lucius jeta un bref regard au groupe d'amis de Drago qui attendait au bout du couloir et qui se tenaient tous les trois serrés et hésitants. Il les désigna du menton et siffla à l'adresse de Drago :
"Rejoins-les. Je te retrouverai à la gare de King's Cross dans quelques jours."
Puis il partit en empruntant un autre couloir, marmonnant toujours sa rancœur dans sa barbe. Drago resta quelques secondes sur place, ne réalisant toujours pas ce qu'il s'était passé, puis alla rejoindre Blaise, Théo et Pansy.
"Qu'est-ce qu'il voulait ?" demanda avidement Théo.
"Je n'ai rien compris." avoua Drago. "Apparemment, Potter a réussi à démasquer l'héritier de Serpentard et Dumbledore est de retour. Et il a réussi à me voler Dobby en même temps."
"Dobby ?" demanda Blaise, les sourcils froncés.
"Oui, mon elfe de maison. Apparemment, il l'a libéré avec une chaussette." répéta Drago.
Théo, Pansy et Blaise se regardèrent quelques secondes, avant de se tourner de nouveau vers Drago :
"Hein ?" demandèrent-ils d'une même voix.
"Je suis comme vous. Rien compris. En tout cas, mon père était furieux, et il va probablement se faire virer du conseil d'administration de Poudlard."
Blaise haussa les sourcils :
"Bah… Si ça nous permet de ne plus le croiser dans les couloirs de l'école, tant mieux, non ?"
Drago approuva d'un signe de tête.
Hermione
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Son rêve se dissipa dans son esprit, elle n'arrivait plus qu'à saisir des formes vagues et des couleurs. Elle avait un goût âcre dans la bouche. Désagréable. Ses paupières se soulevèrent très lentement, et l'éclat de blanc autour d'elle l'aveugla un peu. Hermione cligna des yeux pour s'habituer à ce qu'elle voyait. Sa gorge était sèche, ses muscles étaient raides, et ses oreilles bourdonnaient. Elle entendait un bruit de tintement juste à côté d'elle qui résonnait dans son crâne.
Elle tourna la tête et aperçut des cheveux blonds et bouclés étalés dans un lit blanc. Elle réalisa en voyant l'arche de pierre blanche du bout de la pièce qu'elle se trouvait à l'infirmerie de Poudlard. Instinctivement, elle voulut lever le bras pour sentir la fourrure de chat sur sa peau, mais son bras ne voulait pas se soulever, ça lui demandait une force qu'elle n'avait pas du tout.
Madame Pomfresh se releva, et Hermione comprit que le bruit de tintement désagréable à côté d'elle était le bruit de flacons en verre que l'infirmière posait sur sa table de chevet. Elle croisa son regard et elle eut un petit sursaut :
"Miss Granger ! Vous êtes la première à vous réveiller, je ne pensais pas que vous seriez guérie avant encore plusieures heures !"
Hermione fronça les sourcils. Elle n'avait aucune idée de ce qu'elle faisait là. Elle ouvrit la bouche pour lui demander, mais l'infirmière posa une main sur son épaule pour l'arrêter :
"N'essayez pas de parler, Miss Granger. Vous êtes encore en état de choc."
Sa gorge était en effet douloureuse, comme si elle était enflée. Elle jeta un regard à Madame Pomfresh qu'elle espérait interrogateur pour qu'elle réponde à ses questions, ce qu'elle fit :
"Vous avez été pétrifiée."
Alors, elle se souvint, subitement, les souvenirs tombèrent dans sa tête comme un gros bloc de pierre.
"Je me… souviens !" parvint-elle à dire d'une voix rauque. "C'est un… un serpent… yeux jaunes… Basilic, je l'ai lu à la Bibliothèque… Harry… Il faut le dire à Ron…"
Elle essaya vainement de se soulever de son lit pour se relever, mais ses bras refusaient toujours de répondre. Pourquoi son corps était-il si engourdi ?
"Miss Granger !" scanda l'infirmière. "Arrêtez, allongez-vous, tout va bien ! C'est fini."
"Fini ?"
Le mot sortit de sa gorge comme une lame de poignard et elle toussa doucement pour essayer de retrouver sa voix.
"Oui, c'est fini, vous êtes guérie, la potion a fait effet."
"Harry, comment va Harry ?" parvint-elle à demander faiblement.
"Potter va bien." répondit l'infirmière en fronçant les sourcils. "Il a trouvé l'héritier, le monstre a été vaincu. Je ne sais pas comment vous le saviez…"
Les yeux d'Hermione papillonnèrent et elle n'entendit pas la suite de la phrase de l'infirmière. Cette dernière posa de nouveau une main chaude sur la joue glacée d'Hermione et cette dernière sourit un peu en fermant les yeux.
"Calmez-vous, reposez-vous…" furent les derniers mots qu'elle entendit avant de sombrer de nouveau dans les abysses du sommeil.
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Hermione se réveilla de nouveau, mais elle n'avait aucune idée du temps qu'elle avait passé en étant inconsciente. Elle arrivait à bouger, maintenant, même si elle avait encore l'impression que son corps était encore courbaturé de partout.
Elle tourna la tête et vit Pénélope à côté d'elle, la préfète qui s'était faite pétrifiée en même temps qu'elle. Elle était pâle et ses yeux étaient un peu vitreux, mais dès qu'elle vit qu'Hermione était réveillée, elle se jeta presque sur elle :
"Merci ! Merci de m'avoir sauvé la vie. Sans toi, j'aurais regardé le monstre dans les yeux !"
Hermione lui sourit simplement, sa gorge lui brûlait toujours. Au loin, elle vit Colin Crivey qui était assis dans son lit, il était complètement retourné et fixait son drap, perdu dans ses pensées. Justin n'était plus dans son lit. Ginny Weasley était assise sur une chaise à l'écart et tenait dans sa main une tasse de chocolat chaud, mais elle ne le buvait pas. Elle était dans le même état que Colin Crivey. Hermione remarqua que ses parents étaient à côté d'elle et semblaient aussi ébranlés qu'elle.
"Ah, Miss Granger ! Bienvenue de nouveau !" lança l'infirmière en s'approchant d'elle. "Vous vous souvenez de ce qu'il s'est passé ?"
Hermione hocha plusieurs fois la tête et se débarrassa de la couette sur son lit.
"Tenez, buvez ça, ça vous fera du bien."
Madame Pomfresh lui tendit trois verres. Le premier était rouge, le second transparent et le troisième noir goudron. L'avantage d'être la première de la classe, c'était qu'elle arrivait facilement à identifier les potions, à force de lire des livres dessus. Elle savait donc que le premier était un tonique, le second une Potion d'Étirage, et le troisième un breuvage pour apaiser sa gorge. Elle but les trois une par une, et à la fin, elle se sentait déjà beaucoup mieux.
"Combien de temps avons-nous été pétrifiées ?" demanda-t-elle.
"Trois semaines." répondit Pénélope. "Nous sommes le 30 mai."
Hermione entendit la date comme une onde de choc : 30 mai ? Elle n'avait qu'une hâte désormais, c'était de retrouver ses deux meilleurs amis pour qu'ils lui racontent ce qu'il s'était passé. Elle n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, mais il devait être tard, parce que les fenêtres de l'infirmerie ne reflétaient que le ciel noir et n'était que faiblement éclairée par les rayons de la lune.
Madame Pomfresh finit par autoriser aux élèves de sortir pour un dîner tardif, s'ils le voulaient. Hermione sortit de l'infirmerie sans changer son pyjama.
Elle entendait des centaines de voix qui provenaient toutes de la Grande Salle, alors, elle entra, et fut sidérée par le spectacle devant ses yeux.
Toutes les tables de la Grande Salle débordaient d'assiettes en tous genres, et tous les élèves se baladaient de table en table en criant. Hermione aperçut les cheveux flamboyants de Ron à la table des Gryffondors, et au même moment, Harry leva la tête et sourit en la voyant. Hermione, trop heureuse de les voir, courut pour les prendre dans ses bras :
"Tu l'as vaincu ! Tu l'as vaincu !"
Hermione n'avait jamais connu une soirée pareille. L'ambiance de fête se prolongea jusqu'à la fin de la nuit. Hermione n'avait aucune idée de l'heure qu'il était, elle était trop occupée à saluer Neville, Fred, George, Seamus, Dean, Lavande et Parvati qui applaudissaient. Elle passa la soirée à manger, parce que son ventre était en fait douloureusement vide, tout en écoutant les récits d'Harry et de Ron, entrecoupés par les voix de certains intervenants qui ajoutaient des détails importants à l'histoire.
"Où est le professeur Lockhart ?" "Comment as-tu compris que c'était un Basilic ?" "Qu'est devenu le journal ?" "À quoi il ressemblait ?" "Où est Hagrid ?"
Hermione les harcelait de questions en écoutant attentivement ce qu'elle avait manqué. La tranquillité avec laquelle Harry racontait ce qu'il s'était passé dans la Chambre des Secrets était remarquable : elle aurait été incapable de faire ça. Elle fut déçue d'apprendre que Lockhart était une arnaque, et qu'il n'avait jamais vraiment fait ce qu'il racontait dans ses livres, même si Ron était très enthousiaste en lui racontant ça. Hermione jeta un rapide coup d'œil vers Lavande et Parvati qui étaient tout aussi déçues qu'elle.
Quand Harry et Ron eurent fini de raconter, ce fut Ginny qui prit le relais après être arrivée au festin. Elle lui expliqua son année à voix basse, et Hermione se sentait profondément mal de voir que Ginny avait traversé ça sans qu'elle s'en aperçoive.
"Oh, Ginny, je suis tellement désolée…" dit-elle quand elle termina dans un petit sanglot.
La rouquine s'essuya le nez et arrondit les yeux :
"Non, c'est moi qui suis désolée, Hermione ! À cause de moi, tu t'es fait pétrifiée…"
"Ce n'était pas de ta faute !" coupa Hermione en voyant les yeux de Ginny se remplir de larmes. "Tu te faisais posséder, tu n'aurais jamais pu le savoir…"
"Alors, tu me pardonnes ?" demanda Ginny.
"Bien sûr !"
Elle se pencha vers elle pour lui faire un câlin et elle sentit Ginny respirer un grand coup dans ses bras. Elle sentait exactement comme Ron, l'odeur des Weasley qu'elle adorait et qui était encore plus revigorante que n'importe quel tonic qu'elle aurait pu boire à l'infirmerie.
À ce moment-là, les portes s'ouvrirent et Hagrid entra. Il dépassait le cadre de la porte et dû se plier en deux pour pouvoir entrer. Il sembla surpris par tous les regards braqués sur lui, et lança maladroitement :
"Me voilà."
Un tonnerre d'applaudissements retentit alors dans toute la Grande Salle, et le garde-chasse recula presque de surprise. Dumbledore se leva et applaudit en même temps, puis tous les professeurs, et Hermione vit Hagrid chasser une larme sur sa joue.
Une fois les acclamations terminées, il s'approcha de la table des Gryffondors et donna une grande claque dans le dos à Harry et Ron qui furent projetés en avant sous l'impact :
"Merci, sans vous, je serais toujours à Azkaban à l'heure qu'il est."
Harry l'enlaça et murmura :
"Il n'y a pas de Poudlard sans vous, Hagrid."
Le garde-chasse serra Harry dans ses bras. Puis, Hagrid se pencha vers Hermione :
"Ravi de te revoir en forme, Hermione."
Il lui fit un clin d'œil et repartit vers la table des professeurs avec un grand sourire. Dumbledore prit la parole derrière son pupitre :
"Une année étrange et mouvementée se termine. Merci pour votre accueil chaleureux envers notre garde-chasse Hagrid, et dont l'absence prouve que Poudlard ne tient plus debout sans lui."
Le concerné balaya son compliment de la main et faillit renverser le verre du professeur Flitwick au passage. Dumbledore reprit :
"Je tiens à remercier tout particulièrement le professeur Chourave pour avoir concocté le philtre restaurateur qui a permis de ranimer nos pétrifiés, ainsi qu'à Madame Pomfresh, qui a pris soin d'eux tout au long de cette année avec des soins et une patience infaillible."
Les deux femmes saluèrent les élèves qui les applaudirent.
"Et enfin, je voudrais qu'on applaudisse les élèves qui ont subi ces attaques."
Hermione rougit dès que la salle continua d'applaudir et sentit les centaines de regards tournés vers elle.
"J'offre 100 points à chacun d'entre eux." continua Dumbledore de sa voix tranquille, qui perçait malgré les exclamations des élèves émerveillés. "Et j'offre également 100 points à Ginny Weasley, qui a combattu des démons tout au long de cette année et les a bravés avec un courage sans nom." (Ginny devint aussi rouge que la racine de ses cheveux.), "Et 100 autres points chacun à Ronald Weasley et Harry Potter pour avoir, encore une fois, sauvé cette école d'une terrible menace."
Les banderoles de la Grande Salle se changèrent alors en Rouge et Or et toute la table des Gryffondors hurla de joie. Même la professeure McGonagall avait lâché un petit cri de joie.
Elle se leva à son tour et déclara :
"Et comme cadeau de fin d'année, tous les examens sont annulés !"
La Grande Salle sembla exploser tant les cris redoublèrent. Harry et Ron hurlèrent littéralement de joie, mais Hermione n'applaudit pas. Sans savoir pourquoi, en entendant ça, elle jeta un regard à la table des Serpentards pour repérer Théodore Nott.
Il la regardait déjà, les sourcils froncés. C'étaient les deux seules personnes de la Grande Salle à ne pas applaudir, il avait l'air aussi déçu qu'elle, mais quand elle croisa son regard, elle crut voir du défi. Il aurait presque pu articuler "on remet ça ?". Hermione sentit l'adrénaline de la compétition chauffer ses veines et elle sourit avant de perdre le contact visuel avec Nott à cause des élèves qui couraient en face d'eux dans tous les sens.
Hermione
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Chère Hermione,
Nous avons reçu un courrier alarmant de la part du professeure McGonagall, qui nous a raconté que tu avais été pétrifiée. Il est inutile de te dire à quel point nous sommes inquiets, et que nous attendons de tes nouvelles avec impatience. Ta professeure nous a dit que le sérum qui est censé pouvoir te guérir est en cours de préparation et devrait t'être administré dans les prochains jours, donc nous espérons recevoir une lettre rapidement.
Danny est paniqué aussi, il dit qu'il n'a pas reçu de lettre de ta part depuis longtemps et nous demande régulièrement si on a quelque chose pour lui. On ne sait pas quoi lui dire.
On attend ton hibou.
Maman.
Hermione s'assit sur le canapé de la Salle Commune avec du parchemin et une plume et écrivit un rapide mot à ses parents pour les rassurer, et une lettre à Mary et Danny.
Cher Danny,
Désolée, j'ai l'impression que mes lettres se sont perdues récemment. Mes parents m'ont dit que tu n'avais rien reçu de ma part, le facteur a dû oublier ma lettre quelque part.
J'espère que tu vas bien et que tu as bien profité du mois de Mai. J'ai hâte que tu me racontes tout ça quand je reviens à Londres, dans une semaine. D'ici là, je profite du beau temps et j'ai même arrêté de travailler (si, si, je te jure !)
Ces dernières semaines n'ont pas été très réjouissantes, parce que j'ai attrapé une grosse grippe et j'ai passé beaucoup de temps à l'infirmerie du collège pour me soigner. Heureusement, je vais beaucoup mieux, et je compte bien profiter de la Bibliothèque et du soleil avant de rentrer à la maison.
As-tu des voyages prévus cet été ?
J'espère que ma lettre arrivera bien à destination, et sinon, on se verra dans une semaine.
Amitiés,
Hermione.
Elle roula les deux parchemins et s'apprêta à se lever pour aller à la volière quand Neville s'approcha d'elle. Il avait le regard un peu fuyant, comme à son habitude, et se triturait les mains.
"Hey Hermione." lança-t-il.
"Hey Neville !"
"J'ai un service à te demander." dit le brun en s'asseyant à côté d'elle.
"Je t'écoute ?"
"J'ai parlé avec Ginny…"
Il la désigna d'un mouvement de tête et Hermione se tourna discrètement vers elle. Elle avait l'air plus en forme que ces derniers mois, mais elle avait toujours des gros cernes et sursautait dès que quelqu'un passait un peu trop près d'elle. Neville continua à voix basse :
"Et j'ai l'impression qu'elle ne va toujours pas très bien. Elle culpabilise et pense que c'est de sa faute qu'il s'est passé tout ça à l'école, et que les gens ont été pétrifiés."
"Mais je lui ai dit que…" coupa Hermione, mais Neville l'arrêta en levant un doigt et poursuivit :
"Alors, j'ai eu une idée pour lui remonter le moral." dit-il avec un sourire. "Et c'est là que j'ai besoin de ton aide. J'ai remarqué que Ginny n'empruntait plus le couloir du premier étage, celui à côté des toilettes pour filles, et j'ai compris que c'est parce qu'elle avait peur de passer devant les messages qu'elle a écrit quand elle était possédée. Est-ce que tu as une idée de ce qu'on pourrait utiliser pour les effacer ?"
L'esprit d'Hermione tourna à cent à l'heure à l'instant où elle entendit cette proposition.
"Neville, c'est une trop bonne idée !"
Le concerné agita sa main à la manière d'Hagrid quand Dumbledore lui avait fait un compliment.
"C'était juste une idée comme ça…"
Hermione se leva et proposa à Neville d'aller à la Bibliothèque pour trouver la solution. Ils passèrent par la volière pour envoyer les lettres à ses parents, Danny et Mary, puis s'installèrent à la grande table de la Bibliothèque qu'Hermione occupait souvent. Elle éplucha plusieurs livres de potions avec Neville, et au bout de plusieurs heures, il fit glisser l'un d'eux devant elle en lui montrant un paragraphe :
"La potion scrubia : permet d'effacer n'importe quoi si on saupoudre le contenu sur l'endroit désiré."
Hermione lut la recette et faillit rire en voyant à quel point elle était simple.
"C'est ça, Neville ! Bravo, tu as trouvé !"
Les joues gonflées de Neville rosirent légèrement.
"Tu veux dire que j'ai réussi quelque chose en Potions ?"
Hermione prépara la potion dans son propre chaudron en utilisant les ingrédients de son kit qu'elle avait acheté sur le Chemin de Traverse pendant l'été. Pendant qu'elle mijotait, elle se demanda pourquoi Rogue n'avait pas pensé à une potion aussi simple pour retirer les messages sur le mur.
Quand elle fut terminée, elle avait une texture tellement étrange qu'Hermione mit du temps à trouver un récipient adéquat pour la contenir. La potion était poussiéreuse et grise, comme des résidus de gomme moldue. Elle finit par opter pour un bol, et la passa à Neville :
"Et voilà !"
Il était déjà 19h, et Ginny était en train de se préparer pour aller dîner dans la Grande Salle. Hermione et Neville s'approchèrent d'elle :
"Salut Ginny, tu veux bien venir avec nous ?"
"On a un truc à te montrer." ajouta Hermione en voyant l'air interloqué de Ginny.
Ils ne lui laissèrent pas vraiment le choix et sortirent par le portrait de la Grosse Dame, avant de prendre la direction opposée à la Grande Salle où on pouvait entendre les conversations atténuées des élèves.
"Euh… Où va-t-on ?" demanda Ginny.
"Pas très loin." expliqua Neville qui cachait le bol dans un pan de sa robe. "On a vu que tu n'étais pas trop dans ton assiette."
Ginny renifla avec un sourire ironique.
"C'est le moins qu'on puisse dire." grommela-t-elle.
"Alors, on s'est dit que pour que tu ailles mieux…"
Ils se dirigèrent vers le couloir en question et Neville termina sa phrase en le désignant de la main :
"Il fallait effacer les preuves de ton année !"
Ginny ouvrit grand les yeux et secoua vivement la tête :
"Non, je ne veux pas y aller, c'est ici que j'ai…"
"Justement, c'est pour ça qu'on est là !" expliqua Hermione en lui prenant la main pour la conduire devant le mur.
Les deux messages étaient toujours là, brillant légèrement sous les reflets de la torche à côté. Ginny laissa échapper un gémissement craintif en les voyant.
"Tiens, prends ça." dit Neville en lui tendant le pot. "Prend un peu de poudre et frotte le message."
"C'est impossible, Rusard n'a pas réussi à les effacer." répondit Ginny d'une petite voix.
"Rusard n'a pas le même cerveau qu'Hermione, tu peux me croire !" s'exclama Neville avec un sourire. "On a trouvé une potion capable de les effacer, essaie et tu verras !"
Ginny leva une main hésitante, la plongea dans le bol, saisit une poignée de poudre et s'approcha prudemment du mur. Quand elle commença à frotter, ses yeux s'écarquillèrent à mesure que les mots s'effaçaient :
"Oh !" lança-t-elle.
Puis, elle éclata de rire. Neville et Hermione la suivirent, et tout en riant, ils s'amusèrent à frotter le plus fort possible pour faire disparaître les deux messages sinistres du mur. Ça dura assez longtemps, parce qu'ils finirent à moitié en se jetant la poudre au visage, puis entreprirent une bataille pour essayer d'effacer les sourcils des autres le plus vite possible.
À la fin, il n'y avait plus rien sur le mur, mais Ginny était pliée en deux tellement elle riait, et Neville n'avait plus qu'un demi-sourcil, mais un grand sourire sur le visage.
Drago
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Drago et Pansy s'étaient tous les deux endormis dans le compartiment du Poudlard Express.
Il avait posé sa tête sur ses genoux, et le visage de Pansy était enfoui dans le pull de Drago roulé en boule contre la fenêtre. Blaise et Théo avaient été assez gentils pour ne pas faire de bruit, et lisaient tranquillement sur la banquette d'en face, jusqu'à ce que la porte du compartiment s'ouvre en grand et que Crabbe et Goyle s'engouffrent à l'intérieur :
"Bah alors ?" s'exclama Crabbe. "Il y a une ambiance de mort ici ! Pourquoi vous faites tous la gueule ? Vous devriez être en train de célébrer !"
"Parce qu'on dormait, espèce d'imbécile." grogna Pansy.
"Oh." répondit simplement Crabbe.
Drago se releva et massa son cou endolori avant de jeter un regard perçant aux deux garçons qui avaient interrompu son sommeil :
"Qu'est ce qu'on doit célébrer ? La victoire de Potter ?" ironisa-t-il.
"Non, l'annulation des examens !"
"C'est tout ce que vous avez retenu de ce dernier mois ?" pesta Nott.
"Oui ?"
Théo roula des yeux et continua de lire en posant son menton sur sa main.
"Moi, je suis dégoûté. J'aurais enfin pu battre Granger et arriver premier." gronda-t-il. "J'étais sûr de la dépasser, elle n'a pas eu le temps de réviser…"
"Oui, elle avait une bonne excuse." se moqua Blaise. "Tu ne veux pas la battre comme ça, Nott, tu veux jouer à la loyale, non ?"
Théo hocha la tête, comme pour se convaincre lui-même. Il avait l'air déterminé à passer premier, ce qui voulait dire encore plus de séances de travail à la Bibliothèque, et Drago était déjà fatigué d'avance. Théo releva soudain la tête et ses yeux se plissèrent en regardant Goyle :
"Qu'est-ce que tu as dans les poches, Goyle ?"
"Euh…" répondit le garçon.
Drago pouvait voir des sachets de Chocogrenouille et des baguettes en chocolat dépasser.
"Tu m'as dit que tu n'avais pas d'argent sur toi !" s'écria Théo, scandalisé. "Tu as dit que tu ne pouvais pas me payer, et tu achètes des confiseries dans le train ?! Avec quel argent as-tu payé ça ?"
Crabbe et Goyle tentèrent de répondre en inventant probablement une excuse, mais ils furent vite à court d'idées et préférèrent prendre leurs jambes à leur cou. Théo sauta, faisant valdinguer son livre au passage, et les poursuivit dans le couloir du Poudlard Express.
"Vous me devez 40 Gallions ! Revenez !"
Pansy, Blaise et Drago éclatèrent de rire.
C'était un très bon voyage, du moins jusqu'à ce que les paysages de montagne et de champs furent remplacés par les immeubles londoniens. Pansy lissa sa robe noire et enfila son serre-tête noir intemporel qui ne quittait jamais ses cheveux lorsqu'elle voyait son père.
Drago prit sa valise et celle de Pansy quand le train s'arrêta, puis descendit sur le quai. Il repéra tout de suite sa mère, qui attendait sur le côté. Son père n'était pas là. Drago se dirigea d'abord vers le père de Pansy qu'il salua rapidement, mais il ne lui jeta à peine un regard et râla immédiatement :
"Tu es dans un état lamentable, Pansy. Remets correctement tes collants."
Pansy obtempéra tout de suite et ne regarda pas Drago qui s'éloigna pour rejoindre sa mère. Elle lui fit un rapide câlin avant de s'éloigner de lui avec un petit sourire :
"Année difficile ?" demanda-t-elle d'une voix douce.
Il hocha la tête. Il n'avait pas envie de raconter, il était fatigué et il avait très faim. Sa mère comprit et ajouta :
"Ton père s'est fait viré du conseil d'administration et du conseil des gouverneurs de Poudlard."
Drago comprit par cette remarque que son père était probablement encore plus furieux que la fois où il l'avait croisé à Poudlard, et la fatigue évidente sur le visage de sa pauvre mère le prouvait. Elle lui tendit le bras pour l'entraîner de l'autre côté de la barrière, où s'était formée une file d'attente pour passer.
"Tu as faim ?" demanda Narcissa.
Drago chercha du regard Dobby par terre, avant de se rappeler qu'il n'était plus là. Sa gorge devint sèche et il répondit rapidement "oui" avant de tourner la tête pour concentrer son attention sur autre chose.
Drago vit Granger qui était dans la file d'attente. Il prit du temps pour l'observer, surtout parce qu'il voulait supprimer l'image d'elle pétrifiée qu'il avait gardé en tête et qui continuait de surgir dans ses rêves. La Granger qui était là n'avait rien à voir, elle n'avait plus de visage glacé, ses joues étaient devenues rouges et elle souriait en parlant.
Quand elle parlait, ses mains partaient toujours dans tous les sens, manquant à plusieurs reprises de frapper quelqu'un sans qu'elle s'en rende compte. Elle était en train de discuter avec un énième rouquin, l'un des jumeaux, qui l'écoutait avec un petit sourire. Drago se demanda de quoi ils pouvaient bien parler, mais il n'entendait rien à cause de tous les bruits autour de lui.
Elle continuait de marcher vers la barrière et s'y engouffra sans réfléchir, toujours plongée dans sa conversation.
Je ne la reverrai pas avant deux mois, pensa Drago.
Il n'avait aucune idée de pourquoi cette pensée l'attristait autant.
