j'ai nommé ce chapitre " bodleian" parce que je l'ai écrit depuis la bibliothèque d'Oxford où a été tourné les films, la bibliothèque Bodleian! J'ai adoré cette visite, c'était magnifique, si un jour vous avez l'occasion d'aller à Oxford n'hésitez pas à faire un tour touristique, c'est aussi là que les scènes de l'infirmerie ont été tournées!

j'avais décidé de lire le premier titre d'une tranche de livre et d'appeler mon chapitre comme le titre, donc " " et "bodleian" pour le nom de la bibliothèque :)

autre note : il y a une petite divergence au canon dans ce chapitre, tous les Weasley restent pour Noël, et pas seulement Ron.

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Drago


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Drago écarquilla grand les yeux :

"Pansy ? Qu'est-ce que tu fous ?"

Elle le regarda avec étonnement, comme si c'était un geste qu'elle faisait tous les jours depuis une dizaine d'années.

"Je fume."

"Depuis quand ?"

"Presque deux mois. Tu n'as même pas remarqué ?"

Elle leva les yeux au ciel exagérément, puis prit de nouveau une grande inspiration sur sa tige blanche, qui rétrécit légèrement, et cracha de nouveau sa fumée grise qui fit tousser Drago.

"Putain, mais c'est quoi ce truc ?" s'exclama-t-il en observant la tige qu'elle tenait entre ses doigts.

"Des cigarettes moldues."

"Moldues ? Depuis quand tu t'intéresses aux cigarettes moldues ? T'es devenue folle ?"

Pansy haussa de nouveau les épaules.

"J'sais pas, quelqu'un m'en a parlé et j'ai essayé, et depuis je le fais. Qu'est ce que ça peut te faire ?"

"Pourquoi tu n'utilises pas des cigarettes sorcières, à la rigueur ?"

Drago avait déjà vu son père fumer des cigares magiques qui restaient indéfiniment allumés, ou sa mère prendre très occasionnellement des longues tiges, bien plus grandes que celles de Pansy, et qui tenaient grâce à un porte cigarette. La différence avec les moldues était surtout l'odeur, parce que celles que Pansy était en train de fumer était écoeurantes. La fumée lui retournait l'estomac.

"Trop chères, et trop détectables. Ici, les élèves fument celles-là, parce que les profs les remarquent moins." dit-elle en tirant de nouveau dessus.

"Pourtant, on remarque bien l'odeur." fit remarquer Blaise qui avait plissé le nez.

"Ça détend. Essayez, vous verrez."

Elle proposa son paquet ouvert aux deux garçons qui refusèrent d'un hochement de tête. Drago était estomaqué, il n'avait jamais vu Pansy fumer, c'était une vision assez étrange. D'une part parce que c'était moldu, et qu'elle avait toujours mis un point d'honneur à ne rien faire de moldu, et d'autre part parce que ça ne lui ressemblait pas vraiment. Il continuait de fixer la tige blanche qui rétrécissait à mesure que Pansy tirait dessus, quand elle leva soudain le bras pour lui montrer quelque chose face à eux :

"Tiens, voilà ton plan cul."

Drago vit Astra, qui était assise sur l'un des fauteuils de la salle, avec une amie à elle. Depuis le fameux soir, ils ne s'étaient jamais reparlés, mais Drago en était plus que ravi. Elle lui avait rendu service, maintenant, ils n'avaient pas besoin de faire semblant d'être amis.

"C'est pas mon plan cul, ma conquête d'un soir à la rigueur. N'en fais pas tout un…"

Mais Drago s'arrêta là, parce que la place qu'occupait Pansy quelques secondes plus tôt était vide.


Hermione


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Le matin de Noël, Hermione se leva de bonne humeur, à côté de Pattenrond qui s'était enroulé autour de son bras pendant la nuit. Elle repensa à Pré-Au-Lard, et à l'affreuse découverte qu'Harry avait entendu. Sirius Black était son parrain. Elle eut un frisson rien qu'en le pensant, et même si Harry avait digéré la nouvelle depuis le début des vacances, elle voyait bien qu'il était toujours perturbé. Elle espérait que Noël lui changerait les idées.

Pattenrond s'étira, puis s'assit pour regarder Hermione déballer ses cadeaux qui étaient tous au bout de son lit. Puis, elle descendit dans la Salle Commune pour voir si Harry et Ron étaient déjà là, et trouva à la place Ginny qui poussa un cri strident :

"Pattenrond !"

Ce dernier eut l'air effaré d'être interpellé de la sorte, mais ne put rien faire d'autre que de se laisser faire quand la rouquine l'attrapa pour le prendre dans ses bras et lui caresser la tête en babillant des mots incompréhensibles.

"Et Hermione." ajouta Fred avec un rire. "Joyeux Noël, même si ton chat a l'air plus intéressant que toi."

"Je n'en doute pas. Joyeux Noël à vous aussi. Je vois que vous avez reçu vos pulls de Noël ?"

Fred et George abordaient fièrement leurs pulls, vert et orange, et qu'ils avaient évidemment interchangés.

"Oui ! Toi aussi ?"

Hermione leur montra le colis de leur maman, qui était arrivée pendant la nuit. Pour la première fois, elle avait reçu elle aussi le pull avec une grande lettre H dessus, tricoté en violet à la main, avec des petits biscuits à la noisette.

"Maman a dû être au courant que tu restais à Poudlard pour les fêtes aussi." dit Fred avec un sourire.

"Ou alors, elle avait une bobine de fils en trop." dit George.

"Dans tous les cas, ça me fait trop plaisir. J'adore les vêtements tricotés, ma maman m'en fait aussi souvent."

Elle leur montra le gilet blanc qu'elle avait reçu de la part de sa mère.

"Ginny, lâche ce pauvre chat !" s'exclama George après une dizaine de minutes.

"Désolée, il est vraiment trop mignon." dit-elle en remettant Pattenrond dans les bras d'Hermione.

"Mignon ? On dirait qu'il s'est fait écrasé par le Magicobus." commenta Fred.

Il reçut deux regards noirs de la part d'Hermione et de sa sœur et éclata de rire.

"Harry et Ron ne sont toujours pas réveillés ?" demanda Hermione.

"Non, mais tu peux y aller, je crois avoir entendu Ron rigoler tout à l'heure." l'informa Ginny, qui portait elle aussi son pull rose avec un G brodé dessus.

Elles s'amusèrent encore avec Pattenrond en lui accrochant des boules de Noël à ses oreilles et des guirlandes autour du cou. Puis, Hermione monta dans les dortoirs des garçons et entendit les éclats de voix assez forts d'Harry et Ron.

"Qu'est-ce que vous mijotez, tous les deux ? Je vous ai entendus rire comme des fous." dit-elle en entrant dans la chambre.

Ron et Harry étaient tous les deux penchés au pied du lit d'Harry. En voyant Pattenrond, Ron alla chercher Croûtard sous ses draps pour le mettre dans sa poche en s'écriant :

"Ne l'amène pas ici !"

Hermione posa Pattenrond sur le lit de Seamus et vit seulement maintenant ce qui avait causé les cris de joie des deux garçons. Au pied du lit d'Harry, il y avait un balai étincelant et doré, qu'ils tenaient comme s'il s'agissait de lingots d'or.

"Harry ! Qui t'as envoyé ça ?" demanda-t-elle en s'approchant.

"Aucune idée, il n'y avait pas de carte."

Hermione se mordit la lèvre en s'arrêtant sur ses pas. Une liste de sortilèges de magie noire passa dans sa tête, et le visage déjanté de Sirius Black en couverture de la Gazette du Sorcier tous les jours depuis l'été.

"Qu'est ce qui t'arrive ?" demanda Ron.

"Je ne sais pas…" dit lentement Hermione. "Mais c'est un peu bizarre, non ? Il s'agit d'un très bon balai, n'est-ce pas ?"

"C'est le meilleur balai qui existe au monde, Hermione." dit Ron avec un soupir agacé.

"Donc, il a dû coûter très cher ?"

"Il vaut probablement plus cher que tous les balais de l'équipe Serpentard réunis." dit Ron.

"Alors, qui enverrait à Harry quelque chose d'aussi précieux sans même le prévenir ?" demanda Hermione.

"On s'en fiche !" répliqua Ron d'un ton impatient. "Est-ce que je peux l'essayer, Harry ? Tu veux bien ?"

"Il ne faut surtout pas monter ce balai !" protesta Hermione dans un cri effrayé. "Pas maintenant !"

"Qu'est-ce qu'on doit en faire, d'après toi ? S'en servir pour balayer le plancher ?"

Hermione était à la fois apeurée et énervée qu'ils soient aussi imprudents. Il suffisait de les amadouer avec un Éclair de Feu pour qu'ils oublient le danger dans lequel se trouvait Harry. Ce balai était forcément ensorcelé, et peut-être même qu'Harry était déjà contaminé.

Elle voulut leur expliquer, mais Pattenrond sauta sur Ron pour attraper Croûtard.

"SORS-LE D'ICI !" hurla Ron.

Ron attrapa Pattenrond par la queue pour lui donner un coup de pied, ce qui énerva Hermione au plus haut point, qui tenta à tout prix de reprendre son pauvre chat. Il finit par le lâcher, et Hermione récupéra Pattenrond qui crachait. Il se recroquevilla dans les bras d'Hermione.

"Tu ferais mieux d'emmener ce chat ailleurs, Hermione !" hurla Ron.

Hermione sortit du dortoir, furieuse. Elle ne supportait pas que Ron parle de la sorte de Pattenrond, et encore moins qu'il l'attrape comme ça pour lui faire du mal ! Toute sa bonne humeur de son réveil s'était évaporée, et elle décida donc de laisser Pattenrond dans le dortoir et de redescendre dans la Salle Commune.

Ginny, Fred et George n'étaient plus là, probablement en bas en train de manger le petit-déjeuner. Harry et Ron arrivèrent à leur tour, mais Hermione n'avait toujours pas décoléré du coup de pied de Ron, alors ils évitèrent de se parler. En plus, Harry était toujours fasciné par ce maudit balai qui était très certainement un piège. Pourquoi les garçons ne faisaient-ils jamais attention ?

A l'heure du déjeuner, alors que l'unique table de Noël était couverte de plats succulents et de cadeaux en tous genres, Hermione ne pensait qu'à l'Eclair de Feu dans le dortoir des garçons. Elle savait qu'Harry ou Ron ne voudraient jamais en parler à un professeur, et qu'ils seraient probablement vexés qu'elle le dénonce, mais elle était sûre que ce balai était étrange et elle voulait être sûre qu'Harry ne courait aucun danger. Elle espérait sincèrement qu'ils comprennent que c'était juste par sécurité, en se dirigeant vers la professeure McGonagall, après le déjeuner.

"Professeure ?"

Le chignon de McGonagall était plus désordonné que d'habitude, probablement à cause des pétards qu'avaient fait éclater les quelques élèves qui avaient mangé à côté d'elle.

"Oui, Miss Granger ?" demanda-t-elle en rangeant ses cadeaux.

"Ce matin, Harry a reçu un cadeau de Noël assez étrange, et je pensais que je devais vous prévenir…"

"Que voulez-vous dire ?"

Elle leva la tête et observa Hermione de ses yeux perçants, par-dessus ses lunettes. Hermione prit une grande inspiration. De toute façon, elle ne pouvait plus reculer, les yeux de McGonagall la scrutait maintenant avec attention.

"Un balai. Un Éclair de Feu, tout neuf." (la professeure écarquilla grand les yeux.) "Il n'y avait pas de carte ni de nom de l'expéditeur, et je ne peux pas m'empêcher de penser… Et si c'était Sirius Black ? Que le balai était ensorcelé ?"

Hermione avait chuchoté le nom comme s'il portait malheur, mais la professeure ne tiqua pas et hocha frénétiquement la tête, très sérieuse :

"Vous avez tout à fait raison, Miss Granger. Il vaut mieux prévenir que guérir. Venez, nous allons voir ce balai."

Hermione se rendit donc de nouveau à la Salle Commune, son cœur battant anormalement contre sa poitrine. Elle n'avait rien fait de mal, elle avait raison de s'inquiéter pour son ami qui était menacé par un dangereux tueur en série. Pourtant, elle avait bien plus peur de leurs réactions à cet instant que la potentielle tentative de meurtre de Sirius Black.

En arrivant dans la Salle Commune des Gryffondors, McGonagall prit tout de suite le balai pour l'examiner, puis après plusieurs secondes, elle l'emporta avec elle pour vérifier qu'il n'avait aucun sort imprégné dessus.

Au regard que Ron lui lança, elle comprit qu'ils n'allaient pas comprendre ses intentions.

"Pourquoi est-ce que tu as été tout raconter à McGonagall ?" demanda-t-il d'un ton dur.

"Parce que j'ai pensé, et le professeur McGonagall était d'accord avec moi, que ce balai a sans doute été envoyé à Harry par Sirius Black !"

Harry et Ron n'avaient pas l'air convaincus. Encore une fois, elle fut profondément agacée de voir à quel point le Quidditch était important pour eux, au détriment de leur vie.

Si elle avait su, elle aurait passé Noël avec ses parents, à Edimbourg.


Drago


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Les vacances de Noël avaient été plus reposantes qu'il ne l'aurait cru. Il avait, encore une fois, reçu plus de cadeaux qu'il ne pouvait les compter, et n'en avait ouvert qu'une dizaine avant de laisser tomber. Il avait passé le réveillon et le déjeuner de Noël avec Pansy, Blaise et Théo, qui lui était resté au Manoir des Zabini pendant les vacances.

À son retour à Poudlard, Drago avait presque oublié son obsession pour Granger. Après avoir reçu une dose de son père qui n'avait pas arrêté de parler des "sangs impurs", il avait retrouvé la haine et le dégoût qu'il ressentait pour elle depuis la première année. Il était maintenant déterminé à la dénoncer, juste pour l'énerver, ou la perturber. Il n'avait pas oublié que voir Granger perdre ses moyens était l'une de ses activités préférées.

Il se dirigea donc, le lendemain de la rentrée, vers la Bibliothèque d'un pas décidé. Il avait pour but de lui exposer tout ce qu'il savait sur le Retourneur de Temps pour la voir perdre ses couleurs et l'entendre le supplier de ne rien dire. Il était certain qu'elle serait là, en train de réviser à sa table préférée, comme tous les soirs depuis septembre.

Drago avait aussi remarqué que Granger ne parlait plus à Weasley et Potter depuis qu'il était rentré à Poudlard, elle ne s'asseyait plus avec eux à la Grande Salle, et avait passé leur cours en commun dans son coin, en leur jetant des regards sombres. Il se demandait ce qu'il s'était passé pendant les vacances de Noël, et espérait avoir des réponses.

Il arriva donc à la Bibliothèque, sûr de lui, prêt à se rendre à la table de Granger, quand il la vit. Il s'arrêta sur ses pas, choqué, et s'assit à la table la plus proche, parce qu'elle avait fait quelque chose qu'il n'avait pas du tout anticipé.

Elle avait des nattes.

Ses cheveux étaient séparés en deux nattes, posées sur ses épaules. Drago n'avait jamais remarqué à quel point ses cheveux étaient longs, mais maintenant qu'ils étaient coiffés comme ça, il se rendit compte de la longueur. C'était la première fois qu'il la voyait avec une autre coupe que celle qu'elle avait d'habitude, c'est-à-dire détachés et hirsutes, partant dans tous les sens et parfois même emmêlés. Ça changeait complètement son visage, c'était troublant.

Il dut prendre quelques secondes pour s'habituer à ce changement. C'était un peu excessif comme réaction, mais pourtant, ça le scotcha sur place. Il n'avait pas du tout prévu de voir ça, et surtout, d'en être aussi surpris. Pansy attachait ses cheveux en permanence, parfois avec des accessoires comme des bandeaux ou des foulards, parfois dans des chignons sophistiqués, parfois avec des barrettes. Drago était tellement habitué à voir ses différentes coupes (lors des fêtes, au réveil, avant de dormir, en classe…) qu'il ne le remarquait même plus. Mais Granger, c'était vraiment surprenant.

Il se ressaisit et se leva, essayant de chasser le choc de son visage en s'approchant d'elle.


Hermione


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Elle lâcha le plus gros soupir d'exaspération possible en voyant Malefoy s'approcher de sa table. Déjà qu'elle avait du mal à se concentrer dernièrement, mais si en plus il voulait l'embêter…

"Quoi, Malefoy ?" demanda-t-elle agressivement.

Il avait ce sourire en coin malicieux qu'elle ne supportait pas. Il pouvait être tellement insupportable, même sans parler. À sa grande surprise, il s'assit en face d'elle. Elle fit semblant de ne pas être intriguée et fronça les sourcils.

"C'est quoi cette coupe, Granger ?" demanda-t-il en regardant ses nattes d'un air mauvais.

"Hein ? Qu'est ce que ça peut te faire ?"

Elle passa une main sur ses deux nattes que Ginny lui avait faites le matin-même. Elle n'était pas vraiment habituée à en avoir non plus, mais c'était beaucoup plus pratique pour se pencher pour lire et comme ça, ses cheveux ne se coinçaient pas dans son écharpe quand elle sortait.

"Rien, je voulais juste souligner à quel point c'était laid." dit Malefoy avec un sourire.

"Tes remarques sur mes cheveux ne m'intéressent plus depuis octobre 1991, Malefoy. Si tu es venue pour m'insulter, ça ne sert à rien. Va plutôt travailler pour essayer de retourner dans le classement général."

"Ma place dans le classement te fascine tant que ça, Granger ?"

Elle leva les yeux au ciel, mais évita son regard en se penchant sur son livre d'Études de Runes :

"Non. Si tu t'appelais Nott, ça serait déjà plus palpitant."

Il sembla vexé par cette réplique, mais elle évitait toujours de lever la tête pour vérifier.

"Tu es en train de travailler sur quelle matière, Granger ?" demanda-t-il de sa voix traînante quelques secondes plus tard.

Elle poussa de nouveau un soupir agacé :

"Ecoute, Malefoy. Je ne suis pas d'humeur à entrer dans ton petit jeu. Va embêter quelqu'un d'autre, je suis occupée, j'ai plein de choses à faire et j'ai déjà assez de problèmes comme ça !"

"Occupée, hein ? Tu as quoi… Cinq options ?"

Elle sentit son coeur battre un peu plus vite et fit tout son possible pour paraître détendue. Hermione ne répondit pas, alors il continua :

"Dont trois le lundi, c'est ça ? Divination à 9h, Arithmancie, et Études de ton espèce de dégénérés ?"

"Tu m'as observée ?" demanda-t-elle impulsivement.

Son sourire en coin s'agrandit davantage. Comme ça, il lui faisait penser au Drago de première année qui avait découvert qu'Hagrid abritait illégalement un dragon, en version beaucoup plus grand, et un peu plus effrayant.

"Oui, et j'ai découvert quelque chose, Granger. Je connais ton secret."

Elle retourna à la lecture de son livre pour l'ignorer, mais il dû voir qu'il avait touché un point sensible parce qu'il continua dans un murmure, en se penchant vers elle :

"J'ai pas raison ?"

"Je n'ai aucune idée de quoi tu parles, Malefoy."

"Je crois que si. Je crois que tu sais parfaitement de quoi je veux parler. De ton collier doré autour du cou."

Le souffle d'Hermione se coupa.

"Quel collier ?"

"Arrête, je peux le voir d'ici. La chaîne que tu as autour du cou. Tu n'aurais pas dû te faire des nattes, tes cheveux de folle dingue arrivaient presque à le cacher."

"C'est juste un collier que mon père m'a offert pour Noël." lâcha-t-elle un peu trop brutalement.

"Bien sûr. Alors, montre moi le pendentif ? Si c'est ton taré de moldu de père qui te l'a acheté, il doit être complètement banal, non ?"

"N'insulte pas mon père." grinça-t-elle entre ses dents.

"Tu le fais bien pour le mien." répliqua-t-il instantanément.

Il approcha sa main pour prendre le collier, mais Hermione se recula instinctivement, et il arrêta son geste, comme s'il venait de se rendre compte de la proximité qu'il venait d'avoir avec elle. Il posa sa main sur la table à la place, et Hermione remarqua qu'il avait plusieurs bagues sur les doigts.

"En tout cas, ça explique pourquoi tu as l'air au bout du rouleau." continua-t-il. "Tu as une tête horrible. Enfin, pas plus que d'habitude, mais là, tu as l'air épuisée."

"Je travaille beaucoup, c'est tout. Et je ne vois pas pourquoi ma charge de travail te passionne autant, Malefoy."

"Parce que tu utilises un Retourneur de Temps." dit-il, soudain brutal, comme s'il perdait sa patience. "C'est illégal."

"Tu deviens complètement fou."

Malefoy semblait déchiré entre la colère et le doute. Elle était sûre qu'il était en train de peser sa théorie dans tous les sens.

"Non, je le sais."

"Et même si je le faisais, qu'est ce que ça peut te faire ?!"

"Parce que c'est interdit ! Pourquoi toi, Potter et Weasley avez toujours le droit de tout faire, sans vous faire punir ?"

"Parce qu'utiliser un Retourneur de Temps serait une bêtise, pour toi ?" lâcha-t-elle en posant brutalement son livre sur la table. "Allons, soyons sérieux deux minutes. Tu es simplement jaloux que je puisse avoir des si bonnes notes en assistant à autant de matières, alors tu as inventé cette hypothèse bizarre que je possède un Retourneur de Temps, ce qui est illégal, juste pour justifier mon travail. Au lieu d'essayer de te convaincre que je triche, pourquoi tu ne dépenses pas cette énergie à travailler, plutôt ? Peut-être que tu arriveras à dépasser le top 50."

Elle lui lança un dernier regard insolent, plein de colère, avant de reposer son regard sur les centaines de runes étalées sur la page de son manuel. Malefoy prit du temps pour répondre, et quand il le fit, elle pouvait entendre sa colère qui teintait sa voix d'habitude lente et pleine de dédain :

"Tu peux donner toutes les excuses du monde à Weasley et Potter, Granger, mais tu ne me la feras pas à moi. Tu auras beau nier, je sais ton secret, et je vais faire en sorte qu'il devienne public le plus vite possible pour que tu comprennes ce que ça fait d'être la fille la plus insupportable d'Angleterre !"

Il se releva en faisant grincer sa chaise sur le parquet de la Bibliothèque et s'en alla rapidement. Hermione fit semblant de continuer tranquillement sa lecture, mais en réalité, elle avait très peur. McGonagall lui avait précisément averti de ne jamais se faire prendre avec le Retourneur de Temps. Avait-elle été imprudente ? Il était vrai que quelquefois, elle avait failli prendre les mêmes chemins, mais elle avait réussi à s'éviter elle-même à chaque fois. Comment réagiraient les élèves s'ils l'apprenaient ? Et Harry ? Et Ron ?

Sans pouvoir l'empêcher, une larme roula sur sa joue et alla s'écraser sur la page de son manuel. Comment Malefoy avait pu comprendre son secret alors que même ses deux meilleurs amis avec qui elle passait ses journées n'avaient pas remarqué ? Et il était tellement imbuvable avec son petit air supérieur et son sourire cruel ! Il savait qu'elle avait peur, et l'utilisait pour le tourner à son avantage, même quand il n'était pas concerné.

Elle essaya de continuer ses révisions, en vain. En plus, Harry et Ron ne lui parlaient toujours pas à cause de ce stupide Eclair de Feu, donc elle se sentait douloureusement seule. Elle rangea donc tristement ses affaires et décida d'aller se coucher après cette longue journée.


Drago


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Pourquoi est ce qu'à chaque fois qu'il parlait avec cette fille, il ressentait cette montée de colère incontrôlable qui lui serrait la gorge et lui donnait de la fièvre ?

Il n'y avait qu'elle qui lui faisait ça, et Drago tombait à chaque fois dedans sans s'y attendre, d'un coup, le faisant trembler. Il marchait rapidement pour tenter de la dissiper, sans succès. Il avait déjà eu des centaines de disputes avec Pansy, parfois jusqu'à hurler tant elle pouvait le rendre fou, mais jamais à ce point-là. Jamais il n'avait ressenti autant de colère, de rage et l'envie de se défouler aussi vite.

Il arriva dans la Salle Commune toujours aussi enragé et regarda autour de lui. Pansy était en train de danser avec une cigarette à la bouche, qu'elle ne quittait plus ces temps-ci. Même si on était mardi, il y avait encore une fête. Il n'avait pas envie de lui parler à côté de Daphné, alors il chercha Théo du regard, qui était assis dans un fauteuil en train de lire, comme d'habitude. Drago s'assit lourdement dans le fauteuil à côté sans parler, mais Théo s'exclama tout de suite :

"Oula, qu'est ce qui t'arrive ?"

Il ferma même son livre, preuve ultime d'amitié qu'il ne faisait pas à tout le monde, pour pouvoir l'écouter pleinement. Mais Drago était tellement sur les nerfs qu'il n'y fit pas spécialement attention et cracha juste :

"Granger."

"Qu'est-ce qu'elle a encore fait ?"

"Je l'ai confrontée, pour le Retourneur de Temps. Elle nie ! Elle ose nier, alors que je sais pertinemment ce qu'elle cache. Elle est tellement insupportable, avec son petit air de fille sage, cette Miss-Je-Sais-Tout arrogante et impure qui se permet de me dire que…"

"Quoi ?! Tu lui as dit ?"

Théo avait posé sa main devant sa bouche de surprise, sans que Drago s'en aperçoive.

"Bah ouais, je lui ai dit ! Tu croyais que j'allais la laisser se pavaner comme ça dans Poudlard alors qu'elle triche ?"

"Mais, Drago ! Pourquoi t'as fait ça ?" s'exclama Théo.

"Pourquoi je l'ai dénoncée ?! T'es sérieux ?"

Cette conversation n'arrivait pas du tout à le calmer, au contraire, il était presque aussi énervé qu'au début. Il serra plusieurs fois des poings pour essayer de la faire passer.

"Tu n'as donc rien compris des livres que je t'ai montrés ?" dit Théo. "Les Retourneurs de Temps sont extrêmement rares, et gardés en sécurité dans une salle secrète du Ministère de la Magie. Pour en avoir un, il faut des dizaines de documents signés, c'est toute une procédure. C'est forcément un professeur qui a réussi à l'obtenir pour Granger, elle n'a pas fait ça toute seule. Ce n'est pas de la triche !"

"Mais toutes ces recherches… Je croyais que tu étais aussi indigné que moi, que tu trouvais ça injuste !"

Théo réfléchit quelques secondes en poussant ses boucles qui s'amassaient devant ses yeux, puis reposa son regard sur Drago dans un air compatissant.

"Je ne trouve pas ça injuste… Je suis juste… Impressionné."

"Impressionné ?!"

"Ouais. Tu te rends compte de tout ce qu'elle réussit à faire ? Assister à trois cours en même temps ? On dirait qu'elle veut tester ses propres limites en travaillant, je trouve ça assez admirable. Je serais incapable de le faire à sa place."

"Mais toutes ces conneries sur ton envie de la dépasser ?" pressa Drago.

"J'y arriverais probablement jamais !" s'écria-t-il avec un sourire. "Mais c'est comme un jeu, une compétition, et je pense que le fait qu'elle soit devant moi me donne la motivation pour essayer de la rattraper. Quand je suis à la Bibliothèque et que je travaille depuis des heures, que j'ai mal aux mains à force de tenir ma plume ou que j'ai envie d'aller dormir, je la regarde, et la voir aussi studieuse me force à continuer."

Drago n'en revenait pas. Il avait pensé que Théo partageait sa haine envers Granger, mais il s'avérait être presque de son côté. Il laissa passer quelques minutes et joua avec la couture de son pull en silence. La musique de la fête des Serpentards faisait trembler les murs, mais il y était complètement insensible. Au bout d'un moment, il demanda à Théo d'une petite voix :

"Comment tu fais pour ne pas qu'elle… t'atteigne comme ça ?"

"M'atteigne ?"

"Ouais. Elle a le don pour m'énerver, mais genre, vraiment. Quand je la vois, je ressens tellement de haine."

"Je sais, mate. Je sais qu'elle te rend fou." répondit-il en lui tapotant affectueusement l'épaule.

Théo ne comprenait pas. Il ne voyait que la surface des choses, il ne savait pas le tourbillon de rage que Drago sentait naître en lui dès qu'il posait les yeux sur Granger, ou pire, qu'ils se parlaient. Il ne répondit rien, parce qu'il n'avait pas envie de lui expliquer.

"Par contre, tu veux savoir ma nouvelle théorie ?" demanda Théo.

Drago se tourna vers son ami, qui semblait soudain surexcité. Il lui montra son livre, "Journée avec un loup-garou."

"Je crois que Lupin est un loup-garou." annonça-t-il d'une voix fière.

Drago faillit éclater de rire. Il était devenu fou, il n'y avait pas d'autres explications.

"Je crois que tu deviens taré, Nott. Il faut que tu poses un peu tes livres." dit-il, moqueur.

Théo haussa les épaules, toujours souriant, et se replongea dans son livre. Drago, lui, préféra laisser passer la vague de colère doucement, en se concentrant sur autre chose. En l'occurrence, Pansy qui dansait au milieu d'une dizaine de filles de Serpentards.

Elle dansait bien, elle faisait bouger ses hanches au rythme de la musique, les yeux fermés, en sirotant son verre de temps à autre. Elle portait toujours ses bas résille, une jupe noire et sa chemise d'école blanche sans cravate. Elle était belle, et Drago remarquait d'ici les vingtaines de regards des garçons qui suivaient ses mouvements en même temps que lui. Ça l'énerva. Pas comme quand il parlait avec Granger, plutôt comme une sorte d'instinct de protection.

"Pansy est déchaînée, ce soir." fit-il remarquer d'une voix acide.

"Ouais, elle danse depuis deux heures. Je ne sais pas comment elle fait pour ne pas s'écrouler de fatigue." expliqua Théo en levant lui aussi ses yeux vers la brune.

"Elle est complètement insouciante."

Le visage de pitié que Théo avait pris pour discuter avec Drago se changea aussitôt en traits durs. Il fronça les sourcils, et ses yeux bleus lancèrent soudain des éclairs :

"Hé. Laisse la tranquille, elle s'amuse. Si elle veut danser et boire, elle a le droit de le faire, c'est normal."

Drago soupira et se releva pour aller dans son dortoir. Ça n'avait rien de normal. Pansy n'était pas le genre de fille à se trémousser de la sorte devant tout le monde, ou à boire, ou à fumer des cigarettes moldues. Elle avait changé, et il le savait plus que personne, parce que c'était celui qui la connaissait le mieux. Théo avait tendance à la protéger aussi ces derniers temps, alors qu'il n'en savait rien. Drago ne pouvait parler à personne de ce qu'il ressentait. Quand il arriva dans son dortoir, il était vide. Il enleva sa chemise qu'il jeta par terre et se mit sous la douche.

Personne ne le comprenait vraiment.

Pansy le connaissait par cœur, sur le bout des doigts, mais jamais elle ne comprendrait ce qui lui passait par la tête en ce moment. Blaise ne le jugeait jamais, il était toujours à l'écoute et de très bon conseil, mais dès qu'il parlait de Potter ou de Granger, il s'empressait de lui dire de ne pas s'approcher d'eux. Drago pensait partager sa haine envers Granger avec Théo, mais en fait, pas du tout. C'était un de ses meilleurs amis, mais Théo n'arrivait pas à anticiper ce qu'il voulait dire, ou comprendre les sous-entendus, comme Blaise et Pansy. Crabbe et Goyle avaient la même mentalité concernant les Sangs-de-Bourbe, mais ils étaient bien trop idiots pour voir plus loin que ça.

Il ne pouvait pas en parler à sa mère, et encore moins à son père, parce qu'il se ferait punir, rien que pour avoir adressé la parole à une fille de moldus. Il ne pouvait expliquer à personne ce qu'il ressentait réellement. La colère bien plus profonde que ses amis imaginaient, ces centaines d'émotions qui le traversaient. Le fait qu'il soit aussi ébahi pour deux stupides nattes, qu'il observe Granger tous les jours, qu'il analyse ses gestes, ses tenues, son emploi du temps.

Tout le monde avait changé autour de lui. Blaise couchait avec des Poufsouffles, Théo lisait des livres moldus, et Pansy fumait des cigarettes. Est ce qu'il avait changé, lui aussi ? Est ce que l'aversion qu'il ressentait pour les moldus avant d'entrer à Poudlard s'était transformée en curiosité malsaine pour une fille impure ? Il avait l'impression d'être contaminé, de ne pas pouvoir s'empêcher d'aller la voir, de lui parler, de regarder ses expressions faciales changer.

L'eau chaude de la douche fut remplacée par un jet glacial et Drago coupa. Il ressentait toujours ce mélange étrange de sensations qui lui faisait brûler la peau, renforçant cet effet de maladie, comme s'il avait été marqué par Granger.

En sortant de la douche, il espérait secrètement, une infirme partie de lui, que Pansy l'attendrait dans son lit. Il pourrait se confier, du moins un minimum, et écouter sa voix qui lui rappelait le réconfort de leurs entrevues à côté de la fontaine de son jardin sous les étoiles.

Mais en ouvrant la porte de la salle de bains, il vit que son lit était vide.


Hermione


.

.

"Asseyez-vous, Miss Granger."

Hermione s'assit sur la chaise en face de McGonagall, à son bureau, et posa ses deux mains sur ses jambes pour ne pas montrer sa nervosité. McGonagall posa sa plume dans l'encrier sur le coin de son bureau et joignit ses doigts dans un poing sévère.

"Bien. Alors, dites-moi, comment vous sentez-vous ?"

"Comment je me sens ?" répéta Hermione.

"Oui ! Comment vous adaptez-vous à ce rythme difficile de travail ?" pressa la professeure.

"Oh." répondit-elle en posant une main automatique sur la chaîne du Retourneur de Temps autour de son cou. "Ça va, je suis un peu fatiguée, mais je gère bien mes cours et mes révisions."

"Vous n'avez pas eu d'accident, personne ne vous a vu ?"

Hermione hésita à lui dire que Malefoy avait deviné, mais elle ne le fit pas. Elle ne savait pas pourquoi, mais il n'avait toujours pas rendu public sa découverte, et elle ne voulait pas inquiéter McGonagall et prendre le risque de devoir rendre son Retourneur de Temps.

"Non." répondit-elle.

"Ah !" s'exclama McGonagall avec un sourire en tapant ses mains. "Je vous l'avais dit que Mr. Weasley et Mr. Potter n'allaient rien remarquer. Bravo, je ne peux que saluer votre sérieux et votre implication. Et mis à part vos cours, arrivez-vous à profiter de la vie étudiante ? Écrivez-vous souvent à vos parents ?"

"Oui, ça va. Je leur écris toutes les semaines." dit-elle d'une petite voix.

Ce n'était pas totalement vrai. Elle ne parlait plus à Harry et Ron à cause de l'histoire de l'Eclair de Feu, et elle n'avait pas répondu aux lettres de ses parents et de Danny depuis le Nouvel An. Les seules activités sociales qu'elle avait, c'était les thés dans la cabane d'Hagrid, les séances de révisions du samedi avec Neville et les dîners avec Ginny.

"Très bien, très bien." dit la directrice de maison en se levant de son bureau pour aller lui ouvrir la porte, marquant la fin du rendez-vous. "Je voulais simplement voir où vous en étiez, et vous avertir que nous commençons à entrer dans une phase de travail plus intense avec l'arrivée des examens. Les professeurs vont demander plus de devoirs. Vous sentez-vous prête ?"

"Oui, tout à fait."

"Parfait ! Alors, je vous souhaite une excellente soirée et nous nous verrons demain au cours de Métamorphose."

McGonagall referma la porte et Hermione prit une dizaine de secondes à essayer de se rappeler quel jour on était. Toutes ces remontées dans le temps ne l'aidaient pas du tout. Elle comprit enfin que c'était un mardi, parce que McGonagall faisait référence à leur cours du mercredi.

Elle décida d'aller voir Hagrid. Depuis Noël, elle y allait plus souvent qu'avant, aussi bien pour elle que pour lui. Elle avait passé la semaine précédente à faire des recherches dans l'affaire de Buck. Depuis qu'Hagrid leur avait annoncé que l'hippogriffe était condamné à mort, elle avait utilisé plusieurs fois son Retourneur de Temps pour se consacrer à la lecture de plusieurs procès afin d'essayer de l'innocenter. Au début, Harry et Ron l'avaient aidé, mais depuis qu'ils s'ignoraient, ils n'en avaient pas reparlé.

Elle avait préparé un gros dossier pour Hagrid avec des dates et des explications, afin qu'il puisse défendre Buck dans la Commission d'Examen des Créatures dangereuses. Elle enroula son écharpe autour du cou pour aller dehors et traversa le parc de Poudlard en grelottant. Le sol était recouvert de neige, alors ses pieds s'enfonçaient dans la poudreuse à chaque pas. Quand elle arriva devant la cabane, elle était frigorifiée, mais heureusement, Hagrid avait allumé un feu.

"Hermione ! Viens, entre." dit-il de sa grosse voix.

Elle s'assit à la table et Hagrid s'affaira à préparer le thé. Il portait un tablier rose qui devait faire la taille d'une nappe. Quand il posa la tasse devant elle, elle fut ravie de voir qu'il s'agissait d'un thé à la cannelle, son préféré. Il posa aussi une assiette de biscuits et il s'assit en face d'elle.

"Ça va, Hermione ?" demanda-t-il en fronçant ses sourcils broussailleux.

"Oui, parfaitement bien. Et vous ?"

"Ça va. Buck est en train de jouer dehors, dans la neige." dit-il en regardant par la fenêtre d'un air mélancolique. Puis, il tourna de nouveau sa tête vers Hermione : "Tu as l'air épuisée. Tu dors bien ?"

"Oui." mentit-elle.

Elle ne se souvenait pas de la dernière fois qu'elle avait passé une nuit complète de sommeil réparateur. Elle hocha la tête vigoureusement et Hagrid haussa les épaules sans rétorquer. Puis, elle sortit l'énorme dossier de son sac et le posa sur la table :

"J'ai fait quelques recherches, et j'ai trouvé des cas intéressants qui se rapprochent de la condamnation de Buck. Je pense qu'avec ça, nous avons une chance de gagner. Je vous ai écrit plusieurs dates et affaires qui pourraient vous aider à montrer que Buck n'est pas un animal dangereux, et que Malefoy l'a cherché."

Elle ouvrit le dossier et expliqua longuement ce qu'elle avait écrit à Hagrid, qui hochait la tête de temps en temps pour montrer qu'il comprenait ce qu'elle voulait dire. Au moment où elle était en train d'expliquer le cas d'un hippogriffe condamné en Irlande pour avoir arraché des cheveux à une fille qui s'était approchée trop près, il l'interrompit de sa voix bourrue :

"Hermione… Tu n'avais pas besoin de travailler autant…"

"Bien sûr que si !" répondit-elle en posant une main affectueuse sur le dos de celle d'Hagrid. "Je veux vous aider, il faut que Buck soit innocenté !"

"Harry et Ron… Ils t'ont aidé à faire tout ça ?" demanda-t-il en montrant du doigt l'épais dossier entre eux.

Hermione se mordit la lèvre.

"Hm… Non. Ils sont très occupés. Ils veulent vous aider…"

"Tu as fait ça toute seule ? Pourquoi ?" coupa Hagrid.

Il était à la fois surpris et inquiet. Elle sentit les larmes monter.

"Et bien… On ne se parle plus trop."

"Quoi ?" rugit-il, ébahi. "Comment ça se fait ?"

Hermione lui expliqua toute l'histoire de l'Eclair de Feu, sous les expressions de choc d'Hagrid, puis but une grande gorgée de thé brûlant pour s'empêcher de faire couler les larmes qui menaçaient.

"Hermione… Les garçons peuvent être vraiment stupides, surtout pour un sport comme le Quidditch." dit doucement Hagrid. "Tu as bien fait d'en parler au professeur McGonagall, et je suis sûr qu'Harry et Ron s'en rendront compte bien assez tôt."

Ce fut la goutte de trop. Hermione éclata en sanglots, qu'elle devait retenir depuis pas mal de temps. C'était un mélange d'épuisement, de solitude, de culpabilité et de surmenage qui la firent craquer, et le fait qu'elle se sente toujours aussi bien dans cette cabane réconfortante embaumée de cannelle l'avait poussée à bout.

Hagrid la consola dans des murmures rassurants en lui tapotant l'épaule plusieurs fois, l'enfonçant dans son tabouret à cause de l'impact de son geste.

"Je suis désolée." dit-elle en reniflant contre la manche de son pull. "Je ne sais pas pourquoi je pleure, c'est idiot. Moi aussi je suis furieuse contre eux, surtout Ron. Il ne voit jamais plus loin que le bout de son nez."

"Tu veux que je leur parle ?" demanda Hagrid en se rasseyant à sa place.

"Non !" s'écria Hermione. "Surtout pas. Ça va, c'était juste… Ça va."

Hagrid n'insista pas, mais il était toujours aussi inquiet, même quand elle reprit le cours de son exposé sur le droit des hippogriffes. Quand le soleil fut couché, elle souhaita une bonne nuit à Hagrid et ressortit dans la neige. Après avoir avalé une dizaine de biscuits, elle n'avait plus du tout faim, alors elle n'alla pas dîner et partit plutôt en direction de la Salle Commune pour aller se coucher plus tôt. Elle monta les escaliers, les pieds gelés à cause de la neige dehors, et tomba sur Neville qui attendait devant aussi, frigorifié.

"Hey Neville." dit-elle en arrivant à côté de lui. "Qu'est-ce que tu fais là ? Tu n'es pas au dîner ?"

"Je voulais passer dans le dortoir avant, mais je ne me souviens plus du mot de passe…"

Hermione réprima un soupir et se tourna vers le tableau. C'était le chevalier du Catogan qui occupait la porte vers la Salle Commune des Gryffondors désormais, depuis Halloween et la tentative d'intrusion de Sirius Black. Et le chevalier avait tendance à modifier les mots de passe tous les deux jours, ce qui était assez agaçant. Elle passait son temps à demander le nouveau à Percy.

"C'est "Pomme de pin", je crois bien." dit-elle à l'adresse du tableau.

Le chevalier du Catogan commença un long discours sur une des nombreuses batailles dont il aimait parler, mais Hermione n'en écouta pas un mot et entra plutôt dans la Salle Commune et alla tout de suite se réchauffer les pieds près du feu. Elle commença à lire, mais cette fois-ci, ce n'était pas pour les devoirs. C'était sur les loup-garous.

Hermione était désormais certaine que Lupin était un loup-garou, mais elle n'en avait parlé à personne. Avant qu'ils n'arrêtent de se parler, elle avait hésité à le dire à Harry et Ron, mais Harry avait l'air de s'être vraiment attaché au nouveau professeur de Défenses contre les Forces du Mal et elle ne voulait pas altérer son jugement.

Dans les livres qu'elle lisait, les loup-garous étaient tous considérés comme dangereux, associables, voire sauvages. Lupin n'avait rien de tout cela. Mis à part sa mine fatiguée et ses absences répétées, il ne laissait pas trop entrevoir sa véritable condition. Hermione se faisait peut-être des films. Mais l'Epouvantard s'était tout de même changé en pleine lune quand il s'était mis devant, lors du premier cours…

Pendant sa lecture, plusieurs élèves de Gryffondors remontèrent après le dîner et allèrent se coucher, ou s'asseyèrent eux-aussi sur des canapés, fauteuils ou tables de révisions. Ron et Harry passèrent devant elle sans lui adresser un mot, Harry lui fit simplement un léger hochement de tête avant de monter dans leur dortoir. Elle sentit sa gorge se serrer. Même si elle était furieuse contre eux, elle détestait quand ils s'ignoraient de la sorte, surtout pour une raison aussi bête.

Elle finit par remonter dans son dortoir pour aller se coucher. Lavande et Parvati étaient déjà là, assises dans le lit de Lavande et penchées au-dessus de livres. C'était la première fois qu'Hermione les voyait travailler.

"Salut les filles." dit Hermione.

"Salut Hermione !"

"Vous faites vos devoirs ?"

"Oui, on avance déjà sur l'essai de Divination." expliqua Parvati.

"Quoi ?" s'exclama Hermione avec étonnement. "Mais il n'est pas à rendre avant un mois ?"

Lavande leva la tête et Hermione vit qu'elle avait l'air surexcitée :

"Mais c'est tellement passionnant ! On arrive à lire les lignes de la main, maintenant !"

"Tu veux qu'on te fasse les tiennes ?" demanda Parvati, tout aussi enthousiaste.

Hermione se retint de lever les yeux au ciel et se réfugia plutôt dans la salle de bains pour se brosser les dents, en laissant la porte ouverte :

"Non, ça va, merci !"

"Allez, Hermione, ça prendra 5 minutes ! On commence à se lasser des mains de l'autre, on les connaît par cœur." insista Parvati.

"Vraiment, ça va." dit Hermione.

Elle mit son pyjama, et entendit à travers la porte les deux filles chuchoter entre elles. Hermione était sûre qu'elle parlait d'elle, et de son désintérêt pour la matière qu'elles adoraient. Quand elle sortit de la salle de bains pour se mettre dans son lit, les deux visages euphoriques de ses colocataires s'étaient transformés en une grimace :

"Qu'est-ce que t'as ?" demanda gravement Lavande.

"Rien !" s'impatienta Hermione. "C'est juste que… Je ne crois pas à tous ces trucs. C'est de la pacotille, de la fausse magie. Ce n'est même pas une science, c'est basé sur… Rien. Vous n'avez pas entendu les prédictions de Trelawney ?"

"Si, justement." dit Lavande sur un ton de défi. "Et nous, on y croit."

"D'accord… Faites ce que vous voulez, alors." dit Hermione.

Elle avait conscience que sa voix perçait le mépris. Elle était trop fatiguée pour ménager son ton, ou ce qu'elle disait. Elle trouvait la Divination stupide, et elle était un peu agacée que les deux filles vouaient un culte de cette manière à une professeure aussi peu fiable. Lavande et Parvati semblèrent outrées, et fermèrent rapidement les rideaux du lit sans dire un mot de plus.

Hermione s'allongea dans le sien. Il était froid, malgré la bouillotte, et Pattenrond n'était même pas là. Elle ne parlait plus à ses deux meilleurs amis, et elle venait de se mettre à dos les seules filles à qui elle aurait pu parler ce soir. Hermione prit doucement sa baguette, jeta un sort de silence sur les rideaux de son lit pour atténuer les bruits qu'elle faisait, et pleura de longues heures, en serrant un oreiller contre elle, avant de s'endormir de fatigue.