Drago


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C'est toi, Drago.

C'est toi, Drago.

C'est toi, Drago.

La phrase que venait de prononcer Pansy mit du temps à atteindre son esprit. Non, ça ne pouvait pas être ça. Elle devait s'être trompée. Ou se moquer de lui.

Il la regarda. Son visage n'avait aucune expression qui pouvait faire croire que c'était une blague. Elle attendait sa réaction, son front barré par un pli que formaient ses deux sourcils rapprochés. Elle attendait, comme si elle ne venait pas de prononcer la phrase la plus choquante qu'il ait pu entendre de sa vie.

Drago se passa une main dans les cheveux, geste très rare qu'il réservait aux situations d'extrême choc. La révélation que venait de lui faire Pansy commençait seulement à colliser avec ses pensées, et il réalisa tout ce que cela impliquait.

"Depuis quand ?" demanda-t-il doucement.

Elle haussa les épaules, le regard toujours rivé sur lui :

"Est ce que ça a de l'importance ?"

Il voulut dire "oui", mais il ne le fit pas. Il était trop bouleversé pour réfléchir correctement, et il ne savait pas quoi dire. Il avait peur de la briser avec le moindre mot de travers.

"Je…" commença-t-il, hésitant.

Elle était là, bouillonnante, suppliante de lui répondre, alors qu'il avait l'impression que sa gorge était soudain tellement serrée qu'il ne pouvait plus respirer. Le choc n'était toujours pas passé. Il ne comprenait pas comment Pansy pouvait être amoureuse de lui, alors qu'ils se connaissaient depuis toujours, qu'il la voyait comme sa meilleure amie depuis la nuit des temps. Jamais il n'aurait pu penser qu'elle puisse ressentir ça pour lui.

Il déglutit lentement et dit dans un murmure à peine audible :

"Pans', je suis désolé… Je ne ressens pas la même chose que toi…"

Le dire était presque aussi difficile que de voir Pansy accuser le coup. Elle ferma les yeux une seconde, et quand elle les rouvrit, ils étaient brillants de larmes. Sa phrase fut secouée par un sanglot étranglé :

"Non. Je sais. Je savais que tu me dirais ça."

"Je suis désolé…"

"Non." répéta-t-elle en s'essuyant les joues. "Je sais. Je m'en doutais, c'est juste… Plus dur que ce que j'imaginais."

"Je ne veux pas que ça change, entre nous." s'empressa-t-il de dire. "Je tiens trop à notre amitié pour que tout bascule. Je veux rester ce qu'on est."

"Il va me falloir un peu de temps." murmura-t-elle doucement, essayant toujours de chasser ses larmes.

Il poussa un soupir malgré lui, et Pansy le regarda presque méchamment :

"Tu crois que c'est facile ? De t'aimer, après toutes ces années ? Comment crois-tu que je le vis ?"

"Non, non. Pardon. Viens là."

Il ouvrit ses bras et elle se réfugia tout de suite dedans. Ils ne se faisaient des câlins que très rarement, mais au vu des circonstances, celui-ci était plus que nécessaire. Elle paraissait étrangement petite et frêle quand il la tenait comme ça. Ils restèrent dans cette position pendant de longues minutes, Drago à moitié assis dans le lit, et Pansy blottie dans ses bras. Elle ne pleurait plus, mais il pouvait entendre sa respiration irrégulière contre son cou.

"Je suis désolé." répéta-t-il. "J'aurais aimé t'aimer aussi."

Elle hocha la tête contre lui. Il pouvait sentir l'odeur réconfortante du tabac froid qui émanait d'elle.

"J'ai besoin d'un peu de temps, pour faire le deuil." dit-elle.

"Je comprends." dit Drago, même si cette pensée lui était insupportable. "Mais… Tu te souviens, de la promesse qu'on s'est faite, à côté de la fontaine, chez moi, avant la première année ?"

"Oui, je m'en souviens."

"De rester amis, pour toujours. Malgré les disputes et les obstacles."

Pansy ne répondit pas tout de suite, et Drago pensa même qu'elle s'était endormie, jusqu'à ce qu'elle réponde d'une voix enrouée :

"Je n'ai pas oublié. J'ai juste besoin de temps."

Il lui fit alors un baiser sur le haut de son crâne, sur ses cheveux noirs encre, et se détacha d'elle lentement :

"S'il te plaît, ne brise pas notre promesse, Pans'."

Il voulut lui dire qu'il ne pouvait pas vivre sans elle, mais il n'arrivait pas à trouver les mots. Il n'avait jamais été très doué pour parler de ses sentiments, alors, il fit ce qu'il faisait de mieux : fuir.

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Drago


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C'est toi, Drago.

Drago n'avait pas dormi de la nuit. L'aveu de Pansy était constamment dans sa tête, et peu importe le nombre de fois où il s'était tourné dans son lit cette nuit-là, il ne trouva pas le sommeil. Maintenant qu'il avait digéré la nouvelle, il était encore plus confus qu'avant.

Comment Pansy avait-elle pu tomber amoureuse de lui ?

Il était persuadé qu'elle avait toujours ressenti la même chose, vis-à-vis de leur amitié. Il ne voyait pas quand les choses avaient changé entre eux, quand Pansy avait pu penser qu'il pourrait y avoir quelque chose. Il repensa à ce qu'avait dit sa mère et la mère de Blaise, et tous ces gens qui avaient suggéré plus d'une fois qu'ils allaient se marier.

Il pensait que c'était clair qu'il ne se marierait jamais avec Pansy. C'était sa meilleure amie, la personne dont il était le plus proche. Il l'aimait, c'était même la personne qu'il aimait le plus, mais il n'était pas amoureux d'elle. Ou alors, peut-être qu'il l'était, mais il ne l'avait toujours pas compris ?

Quand le lit de Théo grinça dans la matinée, Drago ne se leva pas. Il n'avait pas eu une minute de repos, et il était incapable de se lever maintenant. Pour la première fois de sa vie, il avait peur de croiser Pansy. De voir son regard implorant de l'autre côté de la table. De la voir comme autre chose qu'une amie, une confidente. Il ne pourrait pas supporter de perdre son lien avec elle.

Son ventre gargouilla et il fut obligé de se lever. De toute façon, il n'allait pas rester là pour toujours. Blaise et Théo étaient déjà partis déjeuner, alors Drago s'habilla et prit le chemin vers la Grande Salle. Il croisa Crabbe et Goyle en route, mais il ne parla à aucun d'entre eux, l'esprit trop occupé.

Il fut soulagé de voir que Théo et Blaise étaient toujours assis à table, et que Pansy n'était pas là. Quand il s'assit à côté de Théo, ce dernier haussa les sourcils :

"Mauvaise nuit ?" demanda-t-il.

Drago eut un rire jaune en guise de réponse. Malgré toute la nourriture en face de lui, il ne prit rien d'autre qu'un verre d'eau. Blaise était en train de lire la Gazette des Sorciers, et Théo mangeait silencieusement en observant les tables en face de lui d'un air absent.

Drago regarda autour de lui pour vérifier que personne ne pouvait les entendre, et annonça dans un souffle :

"Pansy m'a dit qu'elle était amoureuse de moi, hier soir."

Contre toute attente, aucun de ses deux amis ne parurent surpris de la nouvelle.

"Ah ouais ?" demanda distraitement Blaise, sans lever la tête de son journal.

"C'est tout ?! Ça ne vous choque pas ?" s'indigna Drago avec des yeux ronds.

Théo se tourna vers lui :

"Et toi, ça ne te choque pas ?"

"J'en avais aucune idée, moi !"

Drago était un peu agacé par leurs réactions. Il avait l'impression d'être aveugle, ou exclu d'un secret partagé depuis super longtemps.

"Vous êtes au courant, c'est ça ?" finit-il par demander.

Théo lui fit une mine d'excuse :

"Ouais… Désolé. Elle me l'a dit."

"Quand ?"

"En début d'année."

Drago posa sa tête entre ses mains :

"Le début de l'année ?! Et aucun de vous deux n'a pensé à me tenir au courant ?" demanda-t-il, irrité.

"On pensait que tu le savais, et que tu avais choisi de l'ignorer." lui dit Blaise.

"C'était plutôt évident." ajouta Théo.

"Quoi ? Mais dans quel monde était-ce évident ?!"

"Je sais pas, elle ne l'a jamais vraiment caché."

"Va falloir m'expliquer, là, parce que j'ai l'impression qu'on ne parle pas de la même Pansy Parkinson." s'énerva Drago.

Théo réfléchit un peu et dit :

"Bah, tu te souviens de Nathan Conley ?"

"Qui ?!"

"Un mec de Serdaigle, elle avait dit qu'elle le trouvait beau une fois, dans le Poudlard Express."

Drago avait un vague souvenir de ce dont il voulait parler, mais il n'avait aucune idée en quoi c'était lié.

"Euh, ouais, vite fait ?"

"Regarde-le !" s'écria Blaise en pointant du doigt la table des Serdaigles.

Drago regarda dans la direction indiquée. Nathan Conley était un garçon aux cheveux blonds foncés et la mâchoire carrée, et il était en train de manger dans son coin.

"Et bah ?" demanda Drago.

Théo et Blaise attendirent qu'il comprenne, mais Drago ne comprenait toujours rien, et il était franchement énervé, maintenant :

"Mais de quoi vous parlez, putain !"

"Drago, c'est ton sosie." lâcha Théo en se retenant de sourire.

Le concerné regarda de nouveau le Serdaigle. Mis à part la coupe de cheveux, il n'avait rien à voir avec ce type. Il arqua un sourcil :

"Sérieusement ? J'étais censé comprendre que ma meilleure amie depuis 13 ans était amoureuse de moi parce qu'elle a évoqué une fois qu'elle trouvait beau un mec qui ne me ressemble même pas ?"

"Il n'y a pas que ça !" continua Théo.

"Vous dormiez ensemble pratiquement tous les soirs." dit Blaise.

"C'est rien ça, c'était juste une habitude…"

"Ah bon ? Pas pour elle, visiblement."

Drago faillit contester, mais il réalisa que Blaise avait raison. Ils avaient dormi ensemble tous les soirs de la deuxième année, et il avait toujours pensé que c'était innocent, mais Pansy devait avoir développé des sentiments pour lui à ce moment-là.

Tous les petits moments ambiguës qu'ils pouvaient avoir ensemble se superposèrent dans son esprit. Devenait-il parano, ou était-ce évident depuis le début ? Pourquoi était-il le seul à ne pas avoir remarqué que Pansy était tombée amoureuse de lui ?

"S'il vous plaît, dîtes moi que ça ne date pas depuis toujours." implora Drago.

"Non ! Ça date de l'été dernier, un truc comme ça. Tu n'en avais vraiment aucune idée ?" insista Théo en prenant un verre de jus de citrouille.

"Non." marmonna Drago. Puis, il avoua : "Je croyais qu'elle était sur toi."

Théo recracha son jus en toussant et regarda Drago comme s'il venait de lui annoncer qu'il avait soudain envie de s'inscrire aux cours de chorale du professeur Flitwick. Blaise éclata de rire.

"Moi ? T'es malade ?!" s'exclama Théo.

"Je sais pas ! Vous vous êtes beaucoup rapprochés, et je me suis dit que peut-être… Elle était attirée par toi…" expliqua Drago platement.

"Non ! Pansy et moi, on est juste amis, c'est tout." s'empressa de dire Théo, comme s'il était outré que Drago ait pu penser ça. "Je ne ressens rien pour elle, et elle rien pour moi."

"Je croyais que c'était mon cas aussi." dit amèrement le blond. "Et vous vous êtes rapprochés, depuis l'été dernier…"

"Oh, tu veux dire, depuis qu'elle m'a sauvé la vie après que j'ai failli me faire tuer par mon père ?" dit Théo à voix basse d'un ton clairement ironique.

"J'en sais rien. Visiblement, je n'ai absolument rien vu."

"D'habitude, tu es extrêmement observateur." commenta Blaise, qui lisait toujours tranquillement son journal. "Est-ce que tes pensées étaient dirigées vers quelqu'un d'autre, récemment, pour que tu ne vois pas l'évident ?"

Drago tourna machinalement la tête vers la table des Gryffondors. Granger n'était pas là, étonnamment. Pourtant, le vendredi, elle prenait toujours son petit-déjeuner vers cette heure-là. Il secoua la tête et revint vers Blaise et Théo, qui avaient tous les deux un sourire espiègle sur le visage. Drago se demanda s'ils ne se doutaient pas déjà de quelque chose. Il avait l'impression d'être lu comme un livre ouvert, et ça le mettait mal à l'aise.

Avait-il été tellement accaparé par Granger qu'il n'avait pas vu l'évident ?

Il secoua la tête et se leva du banc. Théo et Blaise ne dirent rien en le voyant partir de la sorte, et quand il se retourna, il vit qu'ils étaient tous les deux retournés à leurs occupations. Pourtant, le monde de Drago venait de changer, tout partait dans tous les sens. Il sortit de la Grande Salle, et au moment où il tourna sans savoir où aller, il tomba sur Pansy.

Elle avait l'air aussi mal que lui. Ses yeux étaient vides, et elle était beaucoup plus pâle que d'habitude. Quand elle le vit, elle hoqueta de surprise.

"Salut." dit-il maladroitement.

"Hey."

"Tu veux venir avec moi, dans le parc de Poudlard ? Il fait beau dehors."

Pansy secoua la tête :

"Non, merci. Je vais aller manger."

Et elle le contourna pour aller dans la Grande Salle. Il savait qu'elle voulait plus de temps pour repousser ses sentiments, mais c'était tellement difficile de se faire rejeter de la sorte.

Il vagabonda dans les couloirs sans raison. Son cerveau était embrouillé et il avait trop envie de dormir. Il arriva soudain devant l'infirmerie. Il jeta un regard par curiosité, et s'arrêta brusquement. À travers la fenêtre, il pouvait voir Granger. Elle ne le voyait pas, mais elle était pile en face de lui, et il fut choqué de voir qu'elle avait un bandage autour de la tête, et que sa lèvre était coupée de travers.

Drago vit aussi Potter, et Weasley. Potter parlait à Granger depuis son lit de l'autre côté de la pièce, mais il ne pouvait rien entendre de ce qu'ils disaient à cause de l'épaisseur de la vitre. Granger était assise sur une chaise à côté du lit de Weasley, qui dormait profondément. Toute sa jambe droite était plâtrée. Drago remarqua alors que la main de Granger caressait doucement le dos de la main de Weasley, et cette vision lui retourna l'estomac.

Il décida d'aller dans la Salle Commune et d'essayer de se changer les idées là-bas.

Seulement, assis dans le canapé en face de la cheminée, Drago se rendit compte qu'il n'arrivait toujours pas à faire taire ses pensées. Il décida de prendre un magazine de Quidditch et s'y plongea dedans, même si en réalité, les modèles de balai ne l'intéressaient pas vraiment.

Finalement, Théo et Blaise revinrent à la Salle Commune, suivis par Pansy qui avait toujours l'air aussi triste. Les deux garçons s'asseyèrent dans le canapé, tandis que Pansy s'asseyait sur un fauteuil beaucoup plus loin, avec Tracey Davies. Crabbe et Goyle jouaient à une partie de Cartes Explosives, au pied du canapé de Drago et Blaise.

Soudain, la porte s'ouvrit et le professeur Rogue entra, l'air plus furieux que jamais. Drago se redressa tout de suite sur le dossier de son canapé, imité par Théo. Tous les Serpentards présents parurent surpris par l'apparition de Rogue, qui ne venait que très rarement dans la Salle Commune.

"Les résultats des examens ?" chuchota Théo tandis que Rogue prenait place en face de tout le monde.

"Impossible, ça ne fait même pas une journée." murmura Blaise.

Rogue commença à parler, et la Salle tomba dans un silence pesant. Drago, lui, observait Pansy depuis le canapé, qui ne prêtait pas attention à ce qu'allait dire Rogue.

"Votre professeur de Défenses contre les Forces du Mal a démissionné, ce matin."

Le professeur Rogue contracta la mâchoire, hésita visiblement sur ce qu'il voulait dire, puis lâcha de sa voix grave :

"Il ne peut plus enseigner dans cette école, parce que c'est un loup-garou."

Toute la Salle Commune explosa en murmures saccadés. Drago détacha son regard du visage choqué de Pansy pour dévisager Théo. Ce dernier le regardait déjà, l'air de dire "je-te-l'avais-bien-dit."

"Cela va sans dire que depuis que cette information a été révélée, il n'est plus possible de l'accueillir en tant que professeur dans cette école. Les cours de Défenses contre les Forces du Mal sont donc suspendus pour le moment."

Et Rogue s'en alla aussi rapidement que quand il était entré. Drago échangea des regards stupéfaits avec Théo et Blaise. Est ce que c'était lié à ce qu'il avait vu à l'infirmerie ? Pourquoi Potter, Granger et Weasley étaient toujours impliqués dans ce genre d'histoires ?

Crabbe et Goyle parurent choqués aussi :

"Est-ce ça veut dire qu'on peut le devenir aussi ? Qu'on l'a attrapé ?" demanda Crabbe.

Personne ne voulut lui répondre.

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Hermione


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Les révélations de cette fin d'année avaient été tellement choquantes qu'Hermione avait l'impression que le temps s'était allongé. Mais non, ça faisait seulement deux semaines qu'Harry, Ron et Hermione avaient appris que Sirius Black était en fait innocent. L'homme qui avait trahi les parents d'Harry était en fait Peter Pettigrow, et il avait réussi à s'enfuir. Depuis, ils n'avaient pas eu de de nouvelles de Sirius, probablement parce qu'il était en cavale.

Ron avait toujours la jambe plâtrée, alors ils passaient beaucoup de temps dans les jardins du Château. Hermione, elle, révisait toujours autant, malgré les moqueries de Ron. Même si les examens étaient terminés, les cours continuaient. Elle devait donc utiliser le Retourneur de Temps encore quelques semaines.

"Mais Hermione, tu as déjà passé les examens !" s'exclama Ron, une semaine avant la fin du trimestre. "Pourquoi est-ce que tu continues à aller en classe ?"

"Le fait d'avoir passé les examens ne veut pas dire que je n'ai plus rien à faire, Ron." dit-elle en continuant de lire son chapitre sur l'Étude de Moldus.

Ils étaient tous les trois allongés sous leur arbre préféré, devant le Lac Noir. Ron avait posé sa jambe plâtrée dans les fleurs, et profitait des rayons de soleil sur sa peau. Harry mangeait un muffin qu'il avait piqué au déjeuner et contemplait la surface du lac rêveusement.

"Tu es épuisée, Hermione." dit Ron. "Je ne comprends même pas comment tu as fait pour ne pas tomber dans les pommes depuis le temps. Tu ne veux pas faire une sieste ?"

Il lui montra l'étendue d'herbe sur laquelle il était posé pour lui prouver à quel point c'était confortable. Hermione soupira :

"Je vais à la Bibliothèque, je n'arrive pas à me concentrer."

Elle se leva et épousseta son pantalon couvert de brindilles et d'herbe, et rangea ses affaires dans son sac. Au moment où elle le mit sur ses épaules et se dirigea vers le Château, elle entendit Ron s'écrier dans son dos :

"Je viendrai te chercher quand tu te seras endormie là-bas !"

Elle sourit malgré elle. En réalité, elle était vraiment épuisée, et elle allait probablement s'endormir sur l'un de ses bouquins à la table de la Bibliothèque, mais elle préférait le faire en ayant la sensation d'avoir travaillé plutôt que de flâner au soleil.

Hermione passa par l'une des portes du Château pour aller à la Bibliothèque. Ron avait raison, il n'y avait presque personne dans les couloirs, tout le monde se reposait après la période des examens. Mais même un dimanche, Hermione devait travailler, sinon, elle serait en retard dans son programme de travail.

Son sac était tellement lourd qu'elle chancelait un peu sous son poids. Elle tenta de remettre la anse correctement sur son épaule, et elle sentit alors la couture se déchirer dans un grand "CRAC". Son sac s'ouvrit et tout le contenu se renversa par terre, et au même moment, elle rentra dans quelqu'un. Elle se massa la tête sous l'impact du coup, et quand elle vit qui elle venait de percuter, elle grinça des dents :

"Malefoy."

Ce dernier ne sembla pas du tout affecté par le fait qu'elle lui soit rentrée dedans à pleine vitesse. Il se recula simplement de surprise et observa le contenu du sac avec un sourcil levé :

"Il était temps que ce sac craque, ça fait des semaines que tu le trimballes avec trois tonnes de livres dedans."

Hermione ne fit pas de commentaire et se baissa pour ramasser ses affaires. Evidemment, Malefoy ne l'aida pas du tout, et préféra rester debout devant elle à la regarder réunir tous ses livres.

"Etudes de Moldus ?" lut Malefoy sur l'une des couvertures. "C'est pas vrai, Granger, ne me dis pas que tu continues avec ce Retourneur de Temps !"

"Laisse-moi tranquille, Malefoy."

Son encrier s'était brisé dans sa chute et toute l'encre se répandait par terre. Hermione vérifia qu'aucun des livres de la Bibliothèque était imbibé d'encre noire, et heureusement, ce n'était pas le cas. Pendant que Malefoy restait résolument fixé devant elle à ne rien faire, elle tira sa baguette de sa poche et lança :

"Purgato."

L'encre disparut du sol de pierre, puis Hermione lança un "Reparo" à son sac, qui se rafistola tant bien que mal. Elle se releva, et se retrouva de nouveau face à face avec Malefoy. Elle remarqua qu'il n'avait pas la même tête que d'habitude. Il était épuisé, lui aussi, avec des gros cernes sur le visage. Hermione se demanda quelle sorte de problème Drago Malefoy pouvait avoir pour souffrir d'insomnies.

"Tu devrais dormir un peu, Malefoy." commenta-t-elle en récupérant son sac et son livre. "Tu as une tête horrible."

"De même, Granger."

Elle se dirigea vers la Bibliothèque, et à sa grande surprise, Malefoy la suivit.

"Tu as fini tes examens, Granger. Tu es la seule personne de ce Château entier à travailler encore."

"Je ne vois pas en quoi ça te concerne, Malefoy. Si j'ai envie de travailler, je le fais."

Ils arrivèrent devant les deux portes de la Bibliothèque, et Hermione alla tout de suite retrouver sa table préférée. Elle s'assit, mais poussa un gros soupir quand Malefoy s'arrêta juste à côté d'elle, toujours debout.

"Quoi ? Qu'est ce que tu veux ?" s'exclama-t-elle.

"Hé, calme toi. Tu vois, t'as des accès de rage, comme ça. C'est à cause de la fatigue, Granger. C'est moi qui devrais être furieux, tu es celle qui m'a frappé au visage, tu te souviens ?"

Elle eut un petit sourire en se rappelant de ça.

"Pourquoi, tu en veux un deuxième ?" proposa-t-elle.

"Visiblement, tu n'as pas besoin de moi pour t'en mettre une." constata Malefoy.

Il lui montra sa lèvre d'un geste de la main. Elle avait presque oublié que sa lèvre était ouverte, et pas encore cicatrisée, malgré la lotion de Madame Pomfresh qu'elle appliquait tous les jours. Elle passa sa main machinalement dessus et grimaça de douleur en sentant sa blessure. Elle espérait que ça ne se verrait plus d'ici une semaine, sinon, ses parents pourraient s'inquiéter.

"Je suis tombée." dit-elle platement.

Malefoy leva les yeux au ciel.

"Bien sûr. Et tu crois vraiment que je vais croire ça ? Que tu es tombée ? À moins que tu te sois évanouie à force de remonter dans le temps, ça, j'y croirais."

"Je ne sais pas de quoi tu parles."

"Granger, je peux voir la chaîne dorée autour de ton cou."

Effectivement, la chaîne du Retourneur s'était emmêlée avec ses cheveux, mais elle préféra l'ignorer plutôt que de lui donner raison. Ce n'était pas parce qu'Harry et Ron étaient au courant qu'elle devait l'avouer à son ennemi juré pour autant. Elle sortit ses livres qu'elle posa en pile par ordre de priorité de travail, comme à son habitude, et commença ses révisions d'Astronomie.

"Sérieux, tu ne veux pas abandonner une ou deux matières ?" insista Malefoy. "Jette au moins l'Etude de Moldus, c'est une matière de merde et en plus, tu sais déjà tout dessus."

"Pour la millième fois Malefoy, en quoi ça te regarde ? Occupe toi de tes affaires ! Visiblement, tu en as beaucoup, en plus."

Elle avait sorti ça un peu au hasard, mais vu comment ses yeux s'assombrirent, elle vit qu'elle avait raison. Elle avait remarqué que Pansy Parkinson et lui ne se parlaient plus récemment, et même si elle n'avait aucune idée de pourquoi, elle comprit que c'était ça qui devait le perturber. Il ne réagit pas, cependant, et continua comme si elle ne l'avait pas interrompu :

"Tu sais quoi ? On va faire un marché." asséna-t-il très sérieusement.

"Pourquoi est-ce que je ferais un marché avec toi ?"

"Parce que je te le propose, et que tu ne peux pas résister à un peu de compétition." dit-il du tac au tac.

Elle devait admettre qu'elle était intriguée. Elle posa son livre sur la table et soupira bruyamment pour lui faire comprendre qu'elle n'avait pas tant d'intérêt que ça.

"Qu'est-ce que c'est ?" demanda-t-elle d'un ton le plus blasé possible.

"Si j'ai réussi à te battre à l'examen de Potions, tu abandonnes Études de Moldus."

Elle faillit éclater de rire.

"Pardon ? C'est impossible que tu puisses m'avoir battu en Potions. Ou dans n'importe quelle matière, d'ailleurs."

"Alors, tu ne devrais avoir aucun problème à accepter ce défi." dit-il avec son sourire en coin insupportable.

"En quoi je gagne quelque chose, moi ?" demanda-t-elle après avoir réfléchi à sa proposition. "Tu m'auras battu, et en plus je dois abandonner une matière que j'aime bien ?"

"Non. Vois-le plutôt comme ça, tu te feras battre, donc tu es obligée de sacrifier quelque chose. En plus, je suis sûre que tu me remercieras plus tard, quand tu ne tomberas plus dans les pommes sur Blaise dans les couloirs, par exemple."

Elle ouvrit grand les yeux pendant que Malefoy émit un rire moqueur.

"Il te l'a dit ?!"

"Evidemment qu'il me l'a dit, c'est mon meilleur ami."

Elle soupesa le pour et le contre encore une fois, puis proposa :

"Ok, j'accepte ta proposition. Mais par contre, si j'ai réussi à te battre, tu ne pourras plus jamais insulter Ron ou Harry."

"Jamais ?! Impossible." s'indigna Drago.

Il réfléchit quelques secondes, puis opta pour une autre alternative :

"Pendant un an. Je ne pourrais plus jamais les insulter pendant un an. Deal ?"

Hermione sourit avant qu'il n'ajoute sur un ton beaucoup plus grave :

"Attention, Granger. Les promesses, chez les Malefoy, c'est sacré. Je veux ta parole."

Elle lui tendit donc une main. Il ne cacha pas sa surprise de voir sa main tendue en face de lui, prête à être serrée pour marquer leur accord. Pendant une seconde, il l'observa, et Hermione se demanda s'il allait faire un commentaire sur le fait qu'elle était "sale" ou "contaminée". Mais non. Malefoy tendit son bras et serra la main d'Hermione. Sa paume était froide contre la sienne.

Il ne dit pas un mot de plus et s'en alla. Hermione pensa qu'il allait sortir de la Bibliothèque, mais en fait, il alla dans le rayon "Potions". Il en ressortit quelques minutes plus tard avec un épais volume noir, "Les plus grands alchimistes du monde des sorciers", et alla s'installer à une table pour le lire.

De temps en temps, Hermione ne pouvait s'empêcher de jeter un regard dans sa direction, et elle aurait pu jurer qu'il faisait pareil quand elle ne regardait pas.

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Hermione


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"Allez, dépêche toi Ron, les résultats sont affichés !"

Ron fit un grognement mécontent et n'accéléra pas du tout. Il fallait dire qu'il peinait à marcher avec son plâtre à la jambe, mais Hermione était trop pressée de voir les résultats des examens pour ne pas montrer son impatience. Elle s'approcha donc de Ron et l'aida à s'appuyer sur elle pour marcher, ce qu'il fit avec difficulté. Quand ils arrivèrent dans le couloir où les notes étaient affichées, il était bondé d'élèves.

"Merlin, on ne va jamais réussir à passer." s'exclama-t-elle en voyant les dizaines d'élèves agglutinés devant les feuilles.

"LAISSEZ PASSER ! LAISSEZ PASSER !"

Hermione vit Fred qui séparait les élèves en deux rangs distincts pour laisser passer Ron, soutenu par Harry et Hermione. Elle lui fit un petit sourire, et ils arrivèrent enfin devant les notes. Ron s'appuya sur le mur à côté d'eux et Hermione se jeta sur la liste.

Elle trouva son nom, et regarda les Potions en premier. "Efforts exceptionnels : 88%." Elle fit défiler ses yeux le long de la liste pour trouver Malefoy. G, H, I, J, K, L, M…

"Malefoy : Potions : Optimal : 100%."

Elle entendit à peine les exclamations d'Harry et Ron à côté d'elle qui comparaient leurs résultats. Elle resta figée sur place, les yeux fixés sur la ligne. "Malefoy : Optimal : 100%."

Il avait gagné.

Elle chercha Malefoy dans la foule, et le trouva adossé contre le mur en face d'eux. Il était avec Zabini, mais son regard était déjà posé sur elle. Il avait déjà vu les résultats, c'était évident. La seule trace qui le prouvait était le petit sourire qui creusait ses joues. Il avait gagné, et elle devait tenir parole.

Elle regarda ses autres résultats, qui étaient tous des "Optimal", même en Défenses contre les Forces du Mal, alors qu'elle n'avait pas réussi à vaincre l'Épouvantard de McGonagall qui lui annonçait qu'elle était recalée et qu'elle devait rentrer chez elle. Le souvenir de ce moment lui donnait des frissons d'angoisse.

Elle avait eu 320% à son examen d'Études de Moldus, mais elle ne fut pas particulièrement surprise de ce résultat étant donné que le sujet avait été "Donnez trois habitudes que les Moldus ont au quotidien." Elle s'était même inspirée de Danny pour y répondre en utilisant le plus d'exemples possibles.

Ron et Harry avaient passé toutes leurs épreuves aussi, à leur grande surprise.

"Tu penses que j'ai eu des meilleures notes que Nott ?" demanda-t-elle à Ron en cherchant son nom dans la liste.

"Qui ?"

Hermione leva les yeux au ciel. Ron ne connaissait même pas Nott, alors que c'était le deuxième du classement général, juste derrière elle. Ron et Harry préfèrent aller déjeuner, laissant Hermione seule avec ses notes pour les inspecter de nouveau.

Nott avait sensiblement les mêmes notes qu'elle, excepté en Défenses contre les Forces du Mal où il avait eu un Acceptable (70%). Malefoy n'avait pas d'autre Optimal mis à part celui de Potions, ce qui était encore plus agaçant. Comme s'il savait qu'il allait la battre uniquement dans celle-là.

Neville s'approcha alors d'elle et l'arracha de sa contemplation de ses résultats. Il avait un grand sourire :

"Merci, Hermione !"

"Pour ?" demanda-t-elle, un peu surprise.

"Pour ton aide ! Grâce à nos séances de révisions, j'ai eu un "Acceptable" en Métamorphose ! Merci, ma grand-mère va être ravie !"

Et sans qu'elle s'y attende réellement, il la prit dans ses bras pour la remercier. Hermione lui tapota doucement le dos :

"Ne me remercie pas Neville, tu as fait ça tout seul."

"Non, sans toi, je n'aurais jamais réussi à transformer cette théière en tortue. Tu m'as vraiment aidé cette année."

Elle lui rendit son câlin, et par-dessus l'épaule de Neville, elle sentait le regard brûlant de Malefoy la regarder. Quand elle leva les yeux vers lui, il la fixait, toute trace de sourire disparue, plein de défi. Elle lui fit le signe de tête le plus discret possible, auquel il répondit, avant de s'éloigner avec Zabini.

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Drago


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C'est toi, Drago.

Il y avait une fête tous les soirs depuis la fin des examens, mais Drago n'avait pas le cœur à célébrer. Pansy et lui ne s'étaient pas adressés un mot depuis qu'elle lui avait avoué ses sentiments, et passait son temps le plus éloigné de lui. Drago était tiraillé entre l'idée de lui laisser de l'espace, et de venir la voir en permanence. Il n'avait jamais connu un quotidien sans Pansy, il était complètement perdu. Et la seule personne avec qui il pouvait se confier était la personne qui l'ignorait actuellement, ce qui n'aidait pas non plus.

La veille des vacances d'été, il y eut une immense soirée dans la Salle Commune. En entrant, Drago vit Pansy qui était en train de fumer. Elle ne dansait pas, et discutait à voix basse avec Daphné. Quand il entra dans la pièce, elles jetèrent tous les deux un regard furtif vers lui, avant de reprendre leur conversation à voix basse. Drago n'avait jamais autant eu envie de les rejoindre, juste pour entendre la voix de Pansy qui lui manquait terriblement. Blaise était là-bas aussi, mais Drago n'arrivait pas à se résoudre à rejoindre la fête, alors il prit la direction des dortoirs. Dormir pour oublier.

Il ouvrit la porte et trouva Théo, qui était en train de lire dans son fauteuil. Drago se jeta dans son lit la tête la première et enfonça son visage dans l'oreiller avec un grognement.

"Qu'est-ce qu'il se passe ?" demanda gentiment Théo.

Drago ne bougea pas, et répliqua d'une voix étouffée à cause de l'oreiller :

"Pansy m'ignore toujours."

Drago entendit Théo soupirer et son livre se fermer. Puis, il demanda, plus doucement que d'habitude :

"Tu ne crois pas que tu devrais lui laisser du temps, pour digérer tout ça ?"

Drago produisit un son incompréhensible en guise de réponse.

"Hein ?" demanda Théo.

"Je ne sais pas !" s'exclama Drago en décollant soudain sa tête de l'oreiller. "Je ne sais pas quoi faire, je suis perdu ! Donc, comme je n'ai aucune idée comment gérer mes émotions, je préfère enterrer ma tête dans mon oreiller en espérant sentir son odeur. Ça te va, comme réponse ?"

"Ok, là, c'est bizarre." dit Théo en se levant. "Enlève ta tête de cet oreiller tout de suite."

Drago lui obéit et poussa un soupir de désespoir pendant que Théo s'asseyait à côté de lui dans son lit.

"Explique moi ce que tu ressens." dit Théo.

Drago haussa les sourcils :

"Hein ?"

"Explique-moi, je pourrais t'aider avec des solutions."

Drago le regarda d'un air bizarre, et Théo leva les yeux au ciel, essayant de ne pas perdre sa patience trop vite :

"Merlin, tu es vraiment un cas désespéré. Tu ne parles jamais de tes émotions ?"

Le blond secoua la tête.

"Tu vois, c'est ça ton problème." expliqua Théo d'un air très sérieux. "Tu contiens tout ce que tu ressens sans jamais en parler et à force de tout garder en toi, ça finit par exploser."

Il n'avait jamais rien entendu d'aussi exact. C'était exactement ce qu'il ressentait, ces espèces de débordement de colère qui le paralysaient.

"J'ai raison, c'est ça ?" tenta Théo.

"T'es en train de me faire une technique moldue pour que je m'ouvre à toi ou quoi ?"

"Non, espèce d'idiot. Je veux juste t'aider, et c'est assez facile de deviner ce que tu ressens."

Drago prit une grande inspiration en basculant sur son dos. En contemplant le plafond et sans regarder Théo, c'était un peu plus facile de se confier. Il réfléchit longuement, puis lâcha :

"J'ai l'impression d'avoir perdu la seule personne qui me comprenait vraiment."

Théo ne dit rien, alors il continua :

"Je n'aurais jamais pensé qu'elle puisse éprouver des sentiments pour moi, parce que l'amitié qu'on a… c'est la meilleure chose de ma vie, depuis longtemps. C'est là que je me réfugie quand j'en ai besoin."

"Et tu as peur que tout change après avoir appris ça ?"

"C'est déjà le cas ! Elle est déjà partie, et j'ai peur que… Si elle n'est plus là, alors je ne suis plus rien."

"Ce n'est pas vrai. Tu es Drago, avec ou sans Pansy."

"Non, je ne pense pas. C'est elle qui fait qui je suis. Sans elle, je n'ai plus aucun pilier, je m'écroule."

Il sentit les larmes monter mais il était absolument hors de question qu'il se mette à pleurer devant Théo, alors il renifla et essaya de ne pas succomber. Puis, il ajouta dans un murmure :

"Peut-être que je suis amoureux d'elle, en fait."

"Comment pourrais-tu être amoureux sans le savoir ?"

"Je sais pas. Comment sait-on qu'on est amoureux ? Peut-être que le confort que je ressens avec Pansy, c'est pas de l'amitié, c'est de l'amour. Peut-être que je peux me forcer à…"

"Non." interrompit Théo. "Si tu as besoin de te forcer, c'est que tu ne l'es pas. L'amour, ça tombe dessus sans prévenir. Et je pense que quand on est amoureux, on le sait, au fond de soi. Ta réaction après ce que Pansy t'a dit prouve que tu n'en avais aucune idée jusqu'à présent."

"Je sais pas, Théo. Je suis perdu. Je n'ai jamais ressenti ça, c'est comme si j'étais en deuil pour quelqu'un qui est toujours vivant."

Drago sentit la boule qui habitait dans son ventre ces derniers jours remonter le long de sa gorge, alors il déglutit et attendit le pronostic de son meilleur ami qui réfléchissait silencieusement.

"Est-ce que tu considères Pansy comme ta sœur ?"

Drago grimaça :

"Non ! Beurk."

"Alors, je sais pas. Votre lien est trop bizarre. Vous dormez ensemble et vous êtes plus proches que si vous étiez en couple, tu ne la considères pas comme ta soeur, alors que vous vous connaissez depuis que vous êtes bébés et que vous avez pratiquement grandi ensemble."

"Alors, je suis amoureux d'elle." dit Drago dans un soupir.

Il essuya ses yeux, et Théo eut l'amabilité de faire comme s'il n'avait rien remarqué. Puis, le dortoir plongea dans le silence, Drago perdu dans ses pensées embrouillées, et Théo en train de réfléchir intensément. Soudain, il sauta presque du lit, ce qui fit sursauter Drago :

"J'ai une idée !" s'exclama Théo. "Viens avec moi !"

"Hein ? Non." dit aussitôt Drago, effrayé par ce changement de comportement si soudain.

"Si, viens." dit Théo en enfilant rapidement ses chaussures. "On va savoir si tu ressens quelque chose pour Pansy ou pas."

Théo tira pratiquement le bras de Drago pour qu'il se lève, alors il céda. Théo ouvrit la porte du dortoir, traversa la Salle Commune bondée d'élèves qui dansaient et buvaient, et ouvrit la porte d'entrée. Drago le suivit à contrecoeur :

"Où est ce qu'on va ?!" demanda-t-il à Théo qui marchait rapidement devant lui.

"Tu vas voir."

"Théo, le couvre-feu est passé, si on se fait choper, on risque…"

"T'inquiètes, on ne va pas loin." le rassura Théo.

Il paraissait tellement fier de son idée que rien n'aurait pu lui faire changer d'avis. Drago se contenta donc de le suivre en vérifiant qu'aucun préfet ne gardait le couloir. Heureusement, Théo s'arrêta devant une porte assez proche de la Salle Commune.

Malheureusement, c'était la salle de classe de Potions.

"Théo, putain ! Qu'est ce que tu fous ?" s'exclama Drago en ménageant sa voix pour que personne ne les surprenne.

Il ne répondit pas et sortit sa baguette qu'il pointa sur la serrure de la salle de classe :

"Alohomora."

La poignée cliqua et Théo entrouvrit la porte pour vérifier que personne n'était dedans.

"Si Rogue est là…" commença Drago dans un murmure.

"Relax ! Il est dans son bureau. Viens."

Théo entra dans la salle plongée dans le noir. Drago referma précautionneusement la porte derrière lui et agita sa propre baguette : "Lumos.", en même temps que Théo qui s'approchait déjà des étagères.

"Qu'est-ce qu'on fout ici…" se lamenta Drago en voyant les bocaux alignés.

"Chut ! Ça ne prendra pas longtemps. Regarde où tu mets tes pieds. Voilà. Maintenant, je dois trouver…"

Théo fouillait dans les placards à la recherche de quelque chose, mais Drago était trop occupé à surveiller la porte pour voir ce qu'il faisait. Au bout d'un long moment de bruits de bocaux entrechoqués, Drago perdit patience :

"Bon, Théo, je retourne à la Salle Co…"

"Je l'ai !"

Théo se planta devant Drago, à côté d'une table de la salle de classe. Il tenait une petite fiole minuscule et transparente, qui contenait une potion nacrée aux reflets roses.

"C'est une potion d'amour." expliqua Théo.

"Quoi ? Mais t'es malade ! Ça coûte une fortune ce truc, et si tu penses une seconde que je vais boire ce truc pour tomber amoureux de Pansy…"

"Je n'ai jamais dit ça ! Laisse moi t'expliquer, par Merlin !" s'impatienta Théo.

Il remua le contenu de la petite fiole et l'observa avec attention.

"C'est de l'Amortentia. Une potion qui peut être extrêmement dangereuse lorsqu'on l'avale, parce qu'elle peut créer une obsession. Mais là, je ne veux pas que tu la boives, je veux que tu la sentes."

Drago fronça les sourcils. Il avait déjà entendu parler de cette potion quelques fois, surtout dans des livres de Potions plus avancés. Théo continua son explication :

"Quand tu sens cette potion, tu es censé sentir les odeurs de la personne que tu aimes, ou que tu trouves particulièrement attirantes. Si tu sens cette potion et que tu reconnais l'odeur de Pansy, ça voudra dire que tu es amoureux d'elle. Sinon, c'est quelqu'un d'autre."

"Ou personne." ajouta Drago.

Théo hocha la tête plusieurs fois et dévissa lentement le bouchon de la fiole. À peine fut-elle ouverte que Drago sentit une forte odeur se dégager de la petite bouteille, qu'il n'arriva d'abord pas à identifier. Il plissa le nez en essayant d'identifier ce qu'il sentait, ferma les yeux…

De la fraise, les vieux livres de la Bibliothèque… Et du thé. Du thé à la cannelle.